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La qualité de l'eau et assainissement en France (annexes)

 

Rapport de l'OPECST n° 2152 (2002-2003) de M. Gérard MIQUEL, fait au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scient. tech., déposé le 18 mars 2003

Disponible au format Acrobat (2,2 Moctets)

 

OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION

DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES

 

RAPPORT

sur «la qualité de l'eau et de l'assainissement en France»

par M. Gérard MIQUEL,

Sénateur

TOME II - ANNEXES

           
   

Déposé sur le Bureau de l'Assemblée nationale

par M. Claude BIRRAUX

Président de l'Office

Déposé sur le Bureau du Sénat

par M. Henri REVOL

Premier-Vice Président de l'Office

Annexe 1 - LES POLLUANTS

Un polluant est un élément introduit dans un écosystème et contribuant à dégrader sa qualité, à perturber son fonctionnement ou à contraindre ses usages.

1. Les macropolluants

Les macropolluants sont des molécules de grande taille (par rapport aux micropolluants), qui sont soit naturellement présents dans l'eau, soit apportés par l'activité humaine mais qui ne présentent pas d'inconvénient pour la vie aquatique, l'écosystème aquatique ou l'aptitude d'une eau à la fabrication d'eau potable, tant qu'elles restent à des niveaux ou des concentrations limitées. Ils doivent être contenus dans certaines limites de concentration, évaluées en milligrammes par litre (mg/l), par opposition aux micropolluants, chiffrés en microgrammes par litre (g/l) - 1 mg = 1 000 g).

a) Les matières en suspension (MES) sont des matières insolubles, fines, minérales ou organiques, biodégradables ou non. Leur principal effet est de troubler l'eau : c'est la turbidité. La turbidité est un élément important de la qualité de l'eau, tant pour la vie aquatique (car elle réduit la transparence, empêche la pénétration de la lumière, ce qui a pour effet de freiner la photosynthèse, élément important de la croissance des plantes) que pour la production d'eau potable (car elle réduit l'efficacité des traitements de potabilisation de l'eau). Les MES conduisent aussi à des fermentations contribuant aux carences en oxygène, et ont des effets mécaniques sur les poissons par colmatage des branchies.

Dans le milieu naturel, elles proviennent des effets de l'érosion et des détritus d'origine organique. Les eaux résiduaires urbaines et industrielles contribuent également à l'élévation des matières en suspension, notamment les rejets en provenance des industries agroalimentaires et de la chimie.

b) Les matières organiques : Un composé organique est caractéristique de toute matière vivante ou issue d'une matière qui a été vivante, et/ou contient du carbone Un végétal, un excrément, mais aussi des hydrocarbures et des substances issues de la chimie (pesticides, solvants) sont des matières organiques. La plupart des matières organiques ne deviennent polluantes que lorsqu'elles sont en excès dans le milieu notamment dans le milieu aquatique On distingue, d'une part, les matières organiques biodégradables qui se décomposent dans le milieu naturel. C'est le cas des polluants d'origine humaine les plus classiques (excréments humains ou animaux, résidus des activités agricoles...) qui peuvent générer divers problèmes (odeurs, consommation d'oxygène) et surtout être associées à des micropolluants bactériens D'autre part les matières organiques non biodégradables (hydrocarbures..).

L'importance de l'oxygène dans l'eau est une variable déterminante pour la vie aquatique. On la mesure avec trois paramètres :

La teneur en oxygène dissous,

La demande chimique en oxygène (DCO) représente la quantité d'oxygène qui serait nécessaire pour oxyder les substances organiques dissoutes ou en suspension. Lorsque des matières organiques sont présentes dans l'eau, leur oxydation entraîne une chute de la quantité d'oxygène dissous, ce qui peut nuire, en cas d'excès, à la survie de la faune et la flore.

La Demande Biologique en Oxygène (DBO5) : la DBO mesure le caractère biodégradable des matières organiques. Elle représente la quantité d'oxygène consommée par les microorganismes après 5 jours pour oxyder les matières organiques biodégradables.

La pollution par les matières organiques peut provenir des rejets urbains, des rejets agricoles et industriels (industrie chimique...).

c) Les nutriments

Les nutriments sont des matières nutritives. Il s'agit principalement de l'azote et du phosphore. L'azote et le phosphore sont ce qu'on appelle en agronomie deux facteurs limitants : la capacité de développement des plantes (terrestres et aquatiques) dépend de la quantité d'azote et de phosphore qu'elles vont absorber. S'il y a beaucoup d'azote et peu de phosphore, le phosphore sera limitant, empêchera le développement des plantes. A l'inverse, s'il y a beaucoup de phosphore et peu d'azote, l'azote sera limitant. Quand il y a les deux, les plantes se développent. L'azote et le phosphore sont à la base des engrais agricoles.

Ils ne doivent cependant pas être excessifs dans l'eau. Dans l'eau de surface, ils peuvent provoquer une prolifération végétale (eutrophisation), qui va à son tour entraîner une demande d'oxygène, et donc un appauvrissement en oxygène dans l'eau et, à terme, une diminution, voire la disparition, de la faune piscicole.

L'azote (symbole chimique N) a la faculté de changer très facilement de forme chimique, en s'associant à des molécules d'oxygène ou d'hydrogène. L'azote et l'hydrogène forment l'ammoniac (NH4+ : un atome d'azote, 4 atomes d'hydrogène, le terme « + » signifiant que la molécule ainsi constituée est chargée positivement). L'azote, en consommant de l'oxygène, forme des nitrites (NO2-) ou des nitrates (NO3-).

Ces éléments contribuent à des situations d'anoxie des milieux aquatiques et peuvent favoriser une eutrophisation des écosystèmes.

L'agriculture et la chimie industrielle apportent les plus grosses contributions à ce type de pollution.

L'excès de phosphore, (symbole chimique P) comme l'azote, entraîne une prolifération d'algues grandes consommatrices d'oxygène, ce qui peut conduire à asphyxier les milieux aquatiques (eutrophisation).

Le phosphore a pour principale origine l'agriculture et les rejets domestiques. Mais l'industrie en rejette également du fait de la présence de phosphore dans certains réactifs de laboratoire et dans les eaux de rinçage après utilisation d'une lessive.

2. Les micropolluants

Le terme micropolluants désigne un composé minéral ou organique dont les effets sont toxiques à très faible concentration (les teneurs sont évaluées en g/litre).

Ces micropolluants contaminent les cours d'eau soit par apport direct, par ruissellement, par érosion, soit indirectement par la pluie. On distingue aussi des apports ponctuels avec des sources clairement identifiées (rejets industriels, pollution accidentelle, rejets des eaux usées domestiques) et des sources diffuses, liées aux activités agricoles ou aux pluies (les pesticides, épandus sur de très larges surfaces, sont être transportés dans l'atmosphère et retombent avec les pluies).

On distingue quatre types de micropolluants:

a) Les métaux : Les métaux sont naturellement présents dans les roches et les sols. La présence de gisements métallifères (Massif central, Alsace) contribue à la contamination métallique des eaux. Néanmoins, l'essentiel provient des apports d'origine industrielle, qu'il s'agisse des exploitations minières, des activités industrielles anciennes, ou des activités actuelles.

Les éléments métalliques surveillés sont le fer, le chrome, le zinc, le nickel, qui sont utiles au monde vivant en très faible quantité, et les métaux lourds, dont on ne connaît aucune utilité pour l'homme, et qui ont la propriété de s'accumuler dans la chaîne alimentaire : mercure, cadmium, plomb, arsenic, etc. (1(*))

Les métaux lourds ont un fort caractère bioaccumulatif et ont la particularité de ne pouvoir être éliminés. Ils changent simplement de forme. Au-delà d'un certain seuil, ils deviennent des toxiques importants pour l'homme.

Les contaminations des cours d'eau sont étroitement liées aux implantations industrielles, notamment aux activités les plus polluantes : les activités minières et sidérurgiques, les activités de traitement de surfaces, la tannerie...

b) Les pesticides destinés à lutter contre les parasites des plantes. L'agriculture est le principal utilisateur de pesticides

c) Les « autres micropolluants organiques ». Ce sont surtout des substances chimiques. On distingue principalement les hydrocarbures et les solvants.

Les hydrocarbures, peu biodégradables, s'accumulent et enrobent les plantes, les berges, stoppant leurs échanges vitaux et interdisant le développement de la faune et la flore. Lorsqu'ils forment un film de surface, ils s'opposent à l'oxygénation naturelle de l'eau. Les principaux hydrocarbures sont les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques).

Les solvants chlorés, utilisés dans le traitement des métaux, notamment les PCB, polychlorobiphéniles, dérivés du benzène et du chlore, utilisés jusqu'en 1976 comme isolants dans les transformateurs électriques.

d) les micro polluants issus de la micro biologie : bactéries, virus et parasites

Cette dernière catégorie, d'origine naturelle ou humaine, les autres micropolluants sont surtout utilisés dans l'industrie. Ils se retrouvent dans les cours d'eau en aval de toutes les grandes agglomérations (entraînés par les eaux de ruissellement)

Annexe 2 - PLUIE ET POLLUTION ATMOSPHÉRIQUE

Il existe un lien naturel entre la pluie et la pollution atmosphérique. L'air contient des particules et des gaz d'origine naturelle (sable, émissions volcaniques, gaz carbonique) et d'origine humaine (chauffage, transport) qui vont se redéposer au sol, avec ou sans transformation, par temps sec et par temps humide. Les particules se redéposent au sol pratiquement à l'identique, mais les gaz se transforment en acides par réaction chimique au contact de l'eau dans les gouttelettes nuageuses. La pluie est donc naturellement chargée.

Cette charge est non seulement naturelle, mais est même utile : « en l'absence de germes créés par les poussières, les gouttelettes d'eau ne parviendraient pas à atteindre une taille et un poids suffisant pour vaincre l'agitation moléculaire de l'air et arriver jusqu'au sol. Il est donc normal que l'eau de pluie soit impure (...). Dans une certaine mesure, la pollution atmosphérique est nécessaire à la formation de la pluie » (Encyclopédie de l'hydrologie urbaine, sous la coordination de B. Chocat - ed Tec et doc - 1997).

La pollution atmosphérique influence même la quantité des précipitations. Ainsi, dans les grandes métropoles urbaines, il pleut en moyenne un tiers de moins le samedi et le dimanche que le jeudi et le vendredi, jours où le réchauffement et la pollution sont au maximum.

En France, les émissions gazeuses ont beaucoup diminué au cours des deux dernières années mais la pollution de l'air, et par conséquent la pollution de la pluie, est l'une de celles qui s'exporte le mieux. Le soufre et l'azote, par exemple, à l'origine des pluies acides - voir annexe spécifique - viennent pour l'essentiel des pays limitrophes.

Les retombées de la pollution atmosphérique (gaz et particules) peuvent avoir lieu par temps sec (« les dépôts secs ») et par temps humide (« les dépôts humides »). Les retombées incorporées aux pluies ne forment qu'une fraction minime des retombées totales, qui viennent par conséquent pour l'essentiel par temps sec.

La répartition retombées sèches/retombées humides s'établit comme suit :

Dépôts atmosphériques (en kg/ha/an)

 

Dépôts humides (mini-maxi)

Dépôts totaux (mini-maxi)

Part des dépôts humides dans les dépôts totaux

Hydrogène (H+)

0,01-0,5

0,01-0,7

90 %

Soufre/sulfate (S-SO4)

3,3-19,6

5,3-47,5

51 %

Nitrates (N-NO3)

0,7-9,1

1,9-25,8

37 %

Ammonium (N-NH4)

0,3-12,2

0,3-43,6

64 %

Potassium (K)

0,2-5,8

0,7-39,1

20 %

Calcium (Ca)

1,2-15,7

2,2-47

45 %

Magnésium (Mg)

0,3-3,8

0,3-30,2

56 %

Chlorures (Cl)

2,9-58,9

5,5-436

33 %

Sodium (Na)

0,4-45,6

3,2-137

23 %

Source : École des mines de Douai - Audition du 20 février 2002

Annexe 3 - LES PLUIES ACIDES

L'acidité est l'un des paramètres qui permet de caractériser un liquide (eau, sang, urine, etc.). L'acidité correspond à la concentration en ions d'hydrogène. L'indice utilisé est le pH - potentiel d'hydrogène - qui mesure cette concentration. Si le pH est inférieur à 7, la solution aqueuse est dite acide. Si le pH est inférieur à 5, l'eau est dite très acide ou « agressive ». Si le pH est supérieur à 7, la solution est peu acide ou « alcaline ». L'échelle du pH est logarithmique. Un écart de 1 de pH correspond à un écart très important : une eau avec un pH de 4 est dix fois plus acide qu'une eau avec un pH de 5.

L'eau de pluie (météorite) est naturellement acide, avec un pH autour de 5 - 5,6, car elle absorbe le dioxyde de carbone, gaz naturellement présent dans l'air (le carbone est naturellement produit dans l'atmosphère par le bombardement des rayons cosmiques et se combine à l'oxygène pour former du dioxyde de carbone - CO2. le chiffre 2 signifie qu'il y a deux atomes d'oxygène pour un atome de carbone). La forêt et les océans absorbent et rejettent également du CO2.

C'est cette acidité qui dissout les minéraux à la surface du globe et participe ainsi à la formation, au cours du temps géologique (les millions d'années), de la Terre que l'on connaît aujourd'hui.

L'acidité a été renforcée au XXe siècle, sous l'effet de l'augmentation des rejets polluants, notamment le dioxyde de soufre (SO2), l'oxyde d'azote (NOx), principalement liés à la combustion des matières fossiles, ainsi que le chlore. Après réaction chimique dans la vapeur d'eau, ces gaz forment de l'acide sulfurique, de l'acide nitrique et de l'acide chlorhydrique qui contribuent à acidifier le sol et les eaux, au point d'avoir été accusés de faire dépérir les forêts situées notamment à proximité des grands centres industriels européens.

Il ne peut être nié que les pluies acides sont bien à l'origine de différents problèmes, car une eau très acide dissout énormément. Elle remet en solution, c'est-à-dire en mélange avec l'eau, des éléments qui étaient sous forme solide, tels que l'aluminium, les métaux lourds, avec des effets toxiques potentiels sur la faune aquatique.

Les effets doivent être distingués selon les milieux. En milieu urbain, les pluies acides accélèrent la détérioration des éléments de construction (immeubles, statues, toitures en zinc), et favorisent la remobilisation de métaux lourds (plomb, cuivre, cadmium, mercure, ...). En milieu rural, les pluies acides participent au déboisement, à la diminution de la faune aquatique. Mais son impact sur les forêts doit être nuancé : d'une part l'acidification des eaux et des sols s'observe essentiellement sur des terrains granitiques, tandis que l'acidité de l'eau est quasiment neutralisée sur les terrains calcaires (type Beauce), d'autre part le dépérissement des forêts serait aussi lié aux choix des essences elles-mêmes (pins, sapins) qui épuisent le sol.

L'« alerte aux pluies acides » a été à son maximum dans les années 80. Depuis, la médiatisation est retombée et les rejets polluants ont diminué, notamment l'oxyde de soufre et l'oxyde d'azote, principaux responsables des « pluies acides ». Ces retombées sont fortement influencées par les vents dominants : 30 % des dépôts d'azote, 60 % des dépôts de soufre en France sont d'origine extra métropolitaine.

Émissions et dépôts acides en France en 1990-1999 (en tonnes)

 

Oxyde de soufre

Oxyde d'azote

 

1990

1999

1990

1999

Émissions France

1 200 000

800 000

1 900 000

1 600 000

Dépôts en France

580 000

320 000

720 000

850 000

Dont origine France

180 000

130 000

440 000

600 000

Source : IFEN

Annexe 4 - L'ANALYSE DES PLUIES EN FRANCE

Source : Audition de M. Patrice Codeville, enseignant-chercheur à l'école des Mines de Douai - 20 février 2002

§ Le dispositif

L'analyse des caractéristiques des pluies a longtemps été anecdotique et très « parisienne » Les premières mesures remontent à 1850. Selon les mesures de l'époque, la pluie de Paris était très chargée d'arsenic (issu de la combustion du charbon de bois), et surtout d'ammoniaque, dégagé par l'urine des habitants (avant l'installation du « tout à l'égout ») et des chevaux. Le dépôt d'ammoniaque était alors évalué à 16 kilos par hectare et par an. D'autres mesures avant la seconde guerre mondiale montrent des dépôts de soufre équivalant à 96 kilos par hectare et par an.

C'est à partir des années quatre-vingt que le réseau d'analyse s'est structuré. L'émergence d'un droit international de l'environnement imposant des mesures (Convention de Genève de 1979 sur la pollution atmosphérique) et la médiatisation des « pluies acides » -voir annexe- symbole de la crise environnementale annoncée, ont entraîné la mise en place d'un réseau d'observation et d'analyse.

Ce réseau est articulé autour de trois institutions : le réseau national de suivi de long terme (30 ans) des forêts, RENECOFOR, mis en place par l'Office national des forêts en 1982, Météo France, ainsi qu'une structure dite MERA, résultat d'un partenariat entre le ministère de l'environnement, l'ADEME et l'Ecole des mines de Douai.

Le réseau compte 200 sites de collecte, répartis sur cinq régions (Nord Pas-de-Calais, Midi-Pyrénées, Lorraine, Basse-Normandie, Champagne -Ardenne). Les paramètres mesurés sont : le pH, les nitrates, les sulfates, les chlorures, l'ammonium, le calcium, le magnésium, le sodium, le potassium. Les métaux lourds et les pesticides sont mesurés depuis 2002.

Le suivi des pluies et de la pollution atmosphérique est souvent commun puisque les premières traduisent l'évolution de la seconde. Les « dépôts secs » sont mesurés sur une plaquette enduite d'un corps gras qui récupère les poussières. Les « dépôts humides » sont mesurés par un collecteur avec étranglement, pour éviter l'évaporation, et muni d'un couvercle mobile qui s'ouvre automatiquement quand il pleut.

§ Résultats
(
Source : Ecole des Mines de Douai - Audition Sénat - 20 janvier 2002)

Caractéristiques de l'eau de pluie en France
(en moyennes annuelles)


Paramètres

Concentration moyenne par litre
(mg/l) sauf pH

Limites de qualité d'eau potable( mg/l)

Valeur mini-maxi
(mg/m2/an)
sauf pH

Valeur mini-maxi
(kg/ha/an)

Acidité (pH)

5

6,5 - 8,5

4,8 - 5,6

 

H+

   

1 - 30

0,01 - 0,3

Soufre/Sulfates (SO 4)

0,5

150-250

100 - 1.000

1 - 10

Nitrates (NO 3)

0,3

25-50

10 - 400

0,1 - 4

Ammonium (NH 4)

0,3 - 0,6

0,1

100 - 1.400

1 - 14

Potassium (K)

0,05 - 0,25

Non listé

30 - 250

0,3 - 2,5

Calcium (Ca))

0,2 - 0,8

Non listé

100 - 800

1 - 8

Magnésium (Mg)

0,05 - 0,9

Non listé

30 - 700

0,3 - 7

Chlorure (Cl)

0,2 - 10

250

200 - 10.000

2 - 100

Sodium (Na)

0,2 - 6

200

100 - 6.000

1 - 60


Variations interrégionales des caractéristiques de l'eau de pluie
(en moyenne annuelle -sauf pH- et en mg/m2/an

 

mini

maxi

pH (moy. annuelle)

4,7

Bas-Rhin (1991)

5,5

Alpes-Maritimes (1993)

pH (moy. mensuelle)

3,8

Ardèche (1996)

7,8

Alpes-Maritimes (2000)

Sulfate

70

Haute-Vienne (1991)

1050

Pyrénées-Atlantiques (1993)

Nitrates

33

Haute-Vienne (1991)

640

Bas-Rhin (1995)

Ammonium

94

Haute-Vienne (1991)

1362

Nièvre (1994)

Annexe 5 - LES PESTICIDES DANS LES EAUX DE PLUIE

Source : Audition du Dr René SEUX, Professeur à l'école nationale de santé publique

Les pesticides sont identifiés dans les eaux de surface et les eaux souterraines. Cependant, depuis quelques années, des traces de ces produits ont été retrouvées dans les eaux de pluie. Les premières études, américaines, au début des années 90, avaient montré que dans deux cas sur trois, les teneurs en pesticides dans les pluies étaient supérieures à celles constatées dans les rivières du Minnesota. Par la suite, des études ont été conduites en France et en Europe. Toutes ont confirmé l'imprégnation parfois importante des eaux de pluie en pesticides.

1. Les mécanismes

Avant d'être dans la pluie, les pesticides sont présents dans l'atmosphère. « Les départs » ont lieu lors de l'application (dérive) puis dans les jours qui suivent l'épandage (transfert sol/air). Les pesticides se trouvent alors sous forme gazeuse ou particulaire, susceptibles d'être entraînés dans l'eau de pluie. Leur importance va dépendre de plusieurs facteurs :

- La nature du pesticide : les organochlorés, type DDT ou lindane, se déplacent sur longue distance et les pesticides sous forme particulaire sont plus facilement entraînés dans la pluie que les pesticides gazeux.

- Les caractéristiques des précipitations : plus les gouttelettes sont fines et plus elles rencontrent les pesticides. Les brumes, les brouillards et la rosée sont 30 à 60 fois plus chargés en pesticides que la pluie.

- Les conditions météorologiques : les pertes lors de l'application du produit restent à peu près constantes puisque les épandages ont lieu par temps sec ; en revanche, les départs post-application dépendent beaucoup de l'état du sol : plus le sol est humide ou saturé d'eau et plus les pesticides restent dans le sol, ce qui diminue d'autant les quantités qui migrent vers l'atmosphère.

2. Les résultats

Les analyses menées en France et en Europe confirment la présence fréquente des pesticides dans les eaux de pluie, parfois à des niveaux élevés et leur grande facilité de déplacement.

- L'importance des contaminations. Il n'existe pas de norme de qualité des eaux de pluie mais il est d'usage de se référer aux normes utilisées pour l'eau potable (soit 0,1ug/l). Des traces de pesticides dans les pluies sont constatées sur l'ensemble du territoire français, à la ville comme à la campagne. Les résultats sont évidemment très variables selon les régions et les années. Le tableau suivant donne les résultats de deux campagnes de mesures sur les eaux de pluie en Bretagne en 1996 et 2000. La forte baisse constatée en 2000, année de pluviométrie importante, révèle l'importance des conditions climatiques. Les concentrations pour l'atrazine et l'alachlore, qui sont les deux principaux pesticides du maïs, peuvent atteindre 10, 20, voire plus de 200 fois les normes tolérées pour l'eau potable !

Pesticides dans les eaux de pluie en Bretagne

 

Atrazine

Alachlore

 

1996

2000

1996

2000

concentration moyenne *

1,5 ug/l

0,1 ug/l

3,8 ug/l

0,25 ug/l

concentration maximale

4,6 ug /l

0,6 ug/l

24 ug/l

2,4 ug/l

* sur douze relevés entre avril et juin

- L'importance des déplacements. Une étude conduite en 1996 par l'INRA de Rennes au centre de Bretagne, dans une région où les agriculteurs n'utilisent pas de pesticides, avait détecté des pesticides dans une eau de pluie dont on aurait pu attendre la pureté maximale. Toutes les analyses de simazine effectuées dépassaient le seuil de 0,1ug/l. Les résultats dans le Nord Pas-de-Calais confirment cette tendance. Les précipitations analysées en 2000 à Berck présentaient des traces d'atrazine probablement en provenance de Normandie, de Bretagne ou d'Angleterre. Les pluies en ville, à Lille, Rennes, Strasbourg ou Paris contiennent aussi des pesticides. A Paris, les concentrations sont égales à celles constatées à 100 km de la capitale.

- La permanence des contaminations. Les traces de pesticides dans les pluies sont durables. Dans la ville d'Hanovre en Allemagne, des concentrations de terbuthylazine et de son métabolite ont atteint 0,4 et 0,5 ug/l soit cinq fois la norme pour l'eau potable alors que le produit était interdit depuis cinq ans.

Annexe 6 - LE RUISSELLEMENT DES EAUX DE PLUIE

Arrivée au sol, l'eau s'évapore, s'infiltre dans le sous-sol ou ruisselle. La part prise par chaque processus dépend de la température, de la nature du sol, notamment de sa perméabilité.

Le coefficient d'imperméabilisation est le rapport entre la surface imperméabilisée et la surface totale considérée. Ce coefficient dépend surtout du rapport entre la surface bâtie et les espaces libres.

Le coefficient de ruissellement est le rapport entre la « pluie nette », c'est-à-dire le débit ruisselant en sortie de la surface considérée et la « pluie brute ». Ce coefficient dépend de l'imperméabilisation des surfaces, de la pente... Plus le sol est imperméable, et plus le ruissellement va être important. Le coefficient de ruissellement varie selon les surfaces : entre 2% (terre), 10% (sable tassé), 40 % à 90% (bitume), et 95% (verre).

Au cours de son parcours vers son point de sortie (ruissellement - canalisations - rivières), la pluie va se charger de différents dépôts polluants, notamment sous forme particulaire. Ces particules vont générer des matières en suspension qui augmentent la turbidité de l'eau. La décomposition des matières organiques est elle aussi source de pollution.

On distingue trois grandes familles de dépôts :

- les résidus physiques, qu'il s'agisse de déchets volontaires d'origine humaine (plastiques, papiers, restes de marchés) qui représentent des volumes importants, des déchets végétaux, source de matière organique biodégradable mais aussi chargés d'azote et de pesticides et des déjections animales, sources de contamination bactérienne (déjections canines, fientes d'oiseaux...).

- les particules issues de l'érosion des sols et des matériaux. L'érosion est liée d'une part, à la nature et à l'état de la surface (chantiers...) ou des matériaux (toiture en zinc...), et d'autre part, aux caractéristiques de l'eau de pluie elle-même : l'acidité accroît l'agressivité vis-à-vis des matériaux, de même que la granulométrie (la taille des gouttes) et l'intensité de la pluie (une pluie violente arrache les particules des sols).

- les « dépôts secs », c'est-à-dire les dépôts issus des rejets dans l'atmosphère de l'industrie (métaux, solvants et autres polluants organiques), de l'incinération des ordures ménagères, et de la circulation automobile. La plupart des surfaces aménagées imperméables (toitures, chaussées, autoroutes, pistes d'aéroports...) accumulent des dépôts secs qui seront mobilisés par temps de pluie et entraînés avec l'écoulement des eaux (2(*)).

Les effets sont faciles à identifier mais difficiles à mesurer. On distingue deux types d'effets. Il y a, d'une part, les perturbations générales, appréciées à travers deux indicateurs de pollution principaux : les matières en suspension et la demande en oxygène. Les résidus et particules génèrent des matières en suspension (MES) qui augmentent la turbidité de l'eau (l'eau est trouble) et qui peuvent se redéposer dans les sédiments et colmater les équipements. La décomposition de la matière organique va générer une demande en oxygène, dite « demande biologique en oxygène » -DBO- généralement mesurée sur 5 jours (DBO5) et demande chimique en oxygène -DCO- deux indicateurs de la présence de matières organiques et par conséquent de la qualité de l'eau. Il y a, d'autre part, les pollutions plus spécifiques au milieu urbain, liées à la présence d'acides, d'hydrocarbures et de métaux « indésirables » ou « toxiques », remobilisables par temps de pluie.

La mesure est plus délicate car les résultats sont contradictoires selon que l'on considère les masses de polluants, qui sont importantes, et les concentrations qui sont beaucoup plus faibles, puisque les polluants sont dilués. La dilution, importante pour les matières en suspension, et la demande en oxygène, a cependant moins d'effet sur la présence des métaux, notamment des métaux lourds, qui ont pour particularité de se fixer aux particules et de s'y concentrer.

La pollution rejetée dans les eaux de ruissellement se présente essentiellement sous forme de particules, auxquelles adhèrent les polluants. La pollution est donc essentiellement -à plus de 90 %- sous forme solide, et non sous forme dissoute. Cette caractéristique est très importante. Elle conditionne les modes de traitement éventuels car la pollution solide peut être éliminée par aspiration, par filtration et par décantation.

De manière synthétique, on peut retenir les ordres de grandeur suivants :

- 75 % à 85 % de la pollution contenue dans l'eau pluviale sont imputables au ruissellement (15 % à 25 % sont déjà contenus dans la pluie météorite),

- La charge en matières en suspension des eaux de ruissellement est cinq à dix fois supérieure à celle des eaux rejetées par les stations d'épuration, et cinq à cent cinquante fois supérieure aux matières en suspension recueillies par temps sec.

Annexe 7 - LES EAUX PLUVIALES À PARIS

Source: Audition de M. Daniel Thévenot, professeur à l'université Paris XII, Centre d'enseignement et de recherches sur l'eau- CEREVE-

Il y a une interaction entre la ville et la pluie. La pluie en ville, polluée quand elle tombe, devient très toxique quand elle s'écoule. La ville a même un effet sur la quantité de pluie. « La ville, par sa structure et ses émissions polluantes, est susceptible de jouer un rôle sur le déclenchement des précipitations. La ville a un rôle pluviogène : en particulier à Paris, il pleut en moyenne 30 % de moins les samedis et dimanches, que les jeudis et vendredis, jours où l'accumulation des émissions polluantes est au maximum » (B. Chocat, encyclopédie de l'hydrologie urbaine et de l'assainissement, 1997).

La qualité de l'eau de pluie à Paris est liée à l'importance des retombées atmosphériques. Les retombées de plomb ont été divisées par 10 en 5 ans depuis l'élimination du plomb dans l'essence : le flux de métaux des retombées atmosphériques sèches et par temps de pluie pour le bassin de la Seine a été estimé à plusieurs dizaines de tonnes. Ces flux sont de 2 (plomb) à 10 (cadmium) fois plus importants que les flux annuels de la Seine à son estuaire.

Retombées atmosphériques dans le bassin de la Seine*
(en tonnes par an)

 

1995

2000

Cadmium

24

18

Cuivre

540

230

Chrome

 

35

Plomb

2 000

180

Zinc

5 000

1 200

* 2 500 km² urbanisés + 62 500 km² ruraux

Source ; Daniel THÉVENOT, Michel MEYBECK et Laurence LESTEL, Métaux lourds, Bilan de synthèse PIREN SEINE, février 2002

Estimation de la répartition des surfaces à Paris *

Toitures

54 %

Imperméabilisation totale : 90 %

Coefficient de ruissellement : 0,78

Chaussées

23 %

Cours

23 %

* Calculs sur les 42 hectares des 3e et 4e arrondissements (le marais)

Il y a une interaction entre les retombées atmosphériques et les surfaces puisque l'eau, acidifiée par la présence des gaz polluants (voir annexe sur les pluies acides) agresse les matériaux sujets à la corrosion, notamment les toitures et gouttières en tôle zinguée (92 % du zinc dans les eaux de ruissellement est apporté par les toitures). Ainsi, l'eau de ruissellement se charge de matières en suspension et surtout de métaux toxiques au cours de son trajet. La concentration en substances métalliques augmente considérablement.

Concentration de métaux (mg/l) au cours du ruissellement de l'eau de pluie à Paris

 

Pluie

Chaussée

Toiture

Réseau

seuil de potabilisation

Zinc

0,1

8

20

15

3-5

Plomb

0,1

1,1

30

20

0,05


Par temps d'orage, 1,3 million de m3 d'eau sont évacués dans la Seine. Le débit double en quelques heures (de 100 m3/seconde à 200 m3/seconde). Cette eau, qui n'a subi aucun traitement et qui provient des eaux usées domestiques et du ruissellement est très chargée de matières en suspension sur lesquelles des métaux et hydrocarbures se sont accumulées. L'essentiel des éléments transportés est sous forme particulaire, et non sous forme dissoute (comme dans l'eau météorite). Cette forme particulaire est cependant plus facile à éliminer par décantation dans les rivières. Les métaux se retrouvent d'ailleurs massivement dans les sédiments fluviaux et les boues de dragage, notamment près des barrages.

Masses métalliques associées aux sédiments dragués en région parisienne (moyenne 1999-2000 en tonnes/an)

Cadmium

Cuivre

Plomb

Zinc

0,1

3,3

5,4

19,5

Annexe 8 - L'EAU DE PLUIE SUR LES AUTOROUTES ET LES AÉROPORTS

Source : Audition de MM. Georges RAIMBAULT et Michel LEGRET, Directeurs de recherche au Laboratoire central des Ponts & Chaussées (LCPC) de Nantes (février 2002)

La plupart des surfaces aménagées et imperméables accumulent des dépôts secs qui seront mobilisés par temps de pluie et entraînés avec l'écoulement des eaux. L'étude de la qualité des eaux de pluie en milieu périurbain a été effectuée sur une chaussée d'autoroute régionale (A11 - Nantes - 24 000 véhicules/jour), et une piste d'aéroport régional (Marseille). A notre connaissance, des mesures comparables n'existent pas pour les grandes infrastructures de la région parisienne (A1, A6, Orly, Roissy,...).

La circulation automobile est à l'origine de plusieurs dépôts polluants : hydrocarbures (huile et essence), oxydes d'azote (issus des gaz d'échappement), chlorures (sels de déverglaçage), métaux provenant des pneus (zinc, cadmium), des freins (cuivre), ou de la chaussée (érosion de revêtements en bitume, zinc des glissières de sécurité). La liste peut être établie sans difficulté. En revanche, les quantités sont plus difficiles à évaluer. Ces polluants vont se répartir entre plusieurs compartiments :

- une partie (27 %) va être rejetée dans l'atmosphère et se déposer en bordure de chaussée, dans un rayon de 25 m par rapport à la route ;

- une partie (64%) déposée sur le revêtement, va être mobilisée par la pluie et être retenue dans un enrobé drainant qui joue un rôle filtre. Un enrobé drainant peut diminuer la charge de polluants de 20 à 40 % (diminution observée avec un enrobé drainant : 25 % sur le cuivre, 65 % sur le zinc et le cadmium, 75 % sur le plomb, 90 % sur les hydrocarbures) ;

- une partie (9%) déposée sur le revêtement, va être mobilisée par la pluie et transportée dans l'eau de ruissellement. Les particules vont être mélangées à la pluie pour former des « matières en suspension » (MES). La première étape est le fossé, qui joue un rôle de tampon très efficace, comparable à un bassin de décantation.

Une autoroute de taille moyenne (25.000 véhicules/jour) produit une tonne de matières en suspension par km et par an (1 km d'autoroute = 2 hectares), dont 25 kg d'hydrocarbures, 4 kg de zinc, 1/2  kg de plomb. Le sablage, mélange de sable et de sels, représente un apport de matière de l'ordre de 5 à 10 tonnes par km.

L'analyse des eaux d'écoulement a été effectuée également sur quelques aéroports régionaux. La pollution entraînée dans les eaux est très inférieure à celle rencontrée sur les autoroutes, à l'exception du paramètre cadmium, lié à l'importance de l'usure des pneus au moment des atterrissages.

Des pollutions ponctuelles interviennent cependant à l'occasion des opérations de dégivrage des avions (un dégivrage requiert l'utilisation d'un m3 de glycol), et surtout, des exercices d'entraînement des pompiers (feux de kérosène générant d'importants rejets d'hydrocarbures dans les eaux). Ces pointes de pollution pourraient être évitées par une meilleure sensibilisation des personnels aux risques de pollution, et par l'aménagement systématique de zones d'exercice (terrains entourés de bassins de retenue ou de fossés d'écoulement dont le rôle dans l'épuration est très important).

Ces mesures paraissent particulièrement nécessaires lorsque les aéroports sont situés à proximité de prises d'eau utilisées par les installations de production d'eau potable (prise d'eau d'Orly de la SAGEP).

Les valeurs observées (en moyenne et en maxima) sont indiquées dans le tableau suivant. Les valeurs moyennes masquent de très grands écarts entre les minima et les maxima, de 1 à 2000 pour les chlorures (la valeur maximale étant liée au salage). Ces valeurs ont été comparées aux valeurs réglementées des rejets des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE, arrêté du 2 février 1998) et des limites de qualité pour la production d'eau destinée à la consommation humaine (décret du 20 décembre 2001). L'importance des matières en suspension, des hydrocarbures et des chlorures observée dans les eaux de ruissellement des eaux d'autoroutes excède très largement les valeurs réglementaires précitées.

Indicateurs de pollution dans les eaux de ruissellement sur autoroutes et pistes d'aéroports

 

MES (mg/l)

DCO (mg/l)

Cl (mg/l)

Hc (mg/l)

Pb (ug/l)

Cu (ug/l)

Cd (ug/l)

Zn
(ug/l)

Moyenne autoroute régionale

71

80

500

1,2

58

45

1

355

Moyenne aéroport régional

50

55

5

0,7

15

10

3

150

Maxi autoroute régionale

267

507

6424

4,2

188

145

4,2

1544

Réglementation ICPE

35

125

200

10

500

500

200

2000

Réglementation pour la production d'eau potable

25

30

200

0,05 -1

10-50

20-1000

1-5

500-5000

Annexe 9 - LE RÉGIME JURIDIQUE DES EAUX PLUVIALES

Source : Sénat, service des Collectivités territoriales

Le régime légal des eaux pluviales est déterminé par les articles 640 à 643 du code civil. L'article 640 pose en principe, une servitude dite « d'écoulement des eaux » qui s'applique dans les rapports entre propriétés riveraines et voies publiques. Les voies publiques doivent recevoir les eaux qui s'écoulent naturellement des propriétés riveraines et, éventuellement, de celles qui proviennent des toits par l'intermédiaire de gouttières (article 681 du code civil).

Le respect des servitudes d'écoulement combiné aux pouvoirs de police du maire pour garantir la commodité de circulation et la conservation des voies publiques (articles L. 2212-1 et L.2212-2 du CGCT) entraîne:

- l'interdiction ou la modification des gouttières d'écoulement des eaux pluviales qui provoquent la destruction ou la détérioration des voies publiques (Conseil d'Etat, 30 juillet 1909) ;

- l'application d'une contravention de 5e classe pour rejet sur la voie publique de substances pouvant incommoder le public, menacer la salubrité ou la sécurité publique (articles L. 2122-21 du CGCT et R. 116-2 alinéa 4 du code de la voirie routière) ;

- l'entretien obligatoire des fossés limitrophes des chemins ruraux avec capacité d'injonction du maire (article R. 161-21 du code rural) ; il faut noter que, dans ce cas, le maire ne peut faire exécuter d'office les travaux ;

- l'obligation d'assurer l'écoulement des eaux pluviales même en cas de travaux sur les voies publiques. Le maire doit donc surveiller ces travaux et le cas échéant, faire réaliser tout ouvrage, pour respecter ce droit d'écoulement (article L. 2122-21 du CGCT)

- la possibilité de construire des ouvrages permettant de canaliser des eaux pluviales (article 641 2e alinéa du code civil) sans que ces ouvrages ne créent ni n'aggravent la servitude d'écoulement des eaux prévue par le code civil ;

- l'obligation pour les communes de délimiter les « zones où des mesures doivent être prises pour limiter l'imperméabilisation des sols et pour assurer la maîtrise du débit et de l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement », ainsi que les « zones où il est nécessaire de prévoir des installations pour assurer la collecte, le stockage éventuel et, en tant que de besoin, le traitement des eaux pluviales et de ruissellement lorsque la pollution qu'elles apportent au milieu aquatique risque de nuire gravement à l'efficacité des dispositifs d'assainissement » (article L 2224-10 du CGCT).

Annexe 10 - FORMATION ET CARACTÉRISTIQUES DES NAPPES D'EAU SOUTERRAINES

Une nappe est une étendue d'eau en sous sol. Il y a formation d'une nappe lorsque l'eau, en s'infiltrant rencontre une couche de sol imperméable. La nappe est mobile. Lorsque la surface du terrain (au sol) affleure le « toit » de la nappe, celle-ci s'écoule sous forme de source. Contrairement à une opinion courante ce ne sont pas les rivières qui alimentent les nappes, c'est en général le contraire.

1. La formation des nappes

La formation des nappes est liée aux caractéristiques des roches constituant le sous-sol. Le globe terrestre est formé d'un empilement de roches issues du magma (dites roches plutoniques) transformées par la chaleur, le gel et la pression (dites roches métamorphiques), et de sédiments arrachés aux continents, accumulés au fond des mers comme celles qui recouvraient l'Europe il y a 150 millions d'années. Ces masses rocheuses sont plus ou moins larges, profondes, ou irrégulières, dispersées en couches ou non, accompagnées parfois de fissures et de galeries, qui s'élargissent au fur et à mesure de la dissolution des roches par la pluie.

L'eau suit des lignes d'écoulement, déterminées par la surface au sol. Les limites de ces surfaces drainantes forment ce qu'on appelle le bassin hydrologique dit aussi « bassin versant ». Cette eau, lorsqu'elle rencontre une surface imperméable de la nappe, forme alors en sous-sol des nappes, c'est-à-dire des réservoirs d'eau.

L'aquifère est le contenant, le corps de roches perméables qui présentent les caractéristiques qui lui permettent de recueillir l'eau (sable par exemple). Les formes des aquifères, qui peuvent présenter les mêmes pentes que les surfaces du sol, forment ce qu'on appelle le « bassin hydrogéologique ». La nappe est le contenu, le volume d'eau. Attention, très peu de nappes se présentent sous forme d'une masse liquide, comme un lac. La plupart des nappes sont en fait de l'eau mobile, imprégnant la roche, comme une éponge.

L'alimentation de la nappe se fait par percolation, c'est-à-dire par les mouvements de l'eau à travers un matériau poreux sous l'effet de la gravité. En l'absence de fissures dans la roche, qui accélèrent considérablement la vitesse de transfert de l'eau depuis la surface du sol vers les couches de plus en plus profondes, l'alimentation des nappes se fait au travers de la microporosité des roches.

Les principaux sols et roches présentes en France sont les suivants :

Les sols calcaires et karstiques (Provence, Jura, Vittel...) sont caractérisés par des failles dans la roche, faisant naître des voies de circulation privilégiée, et accélérant la dissolution de la roche calcaire. Les communications entre le sol et le sous-sol sont très rapides, jusqu'à 500 mètres/jour dans le drain et 1 mètre/jour dans les fissures. Le transport des polluants éventuels est alors inévitable. L'eau peut sortir après un transit souterrain de galeries et de drains divers, à des kilomètres de distance.

La craie est une roche sédimentaire calcaire non fissurée qui comporte aussi des couches de silex et d'argile. On retrouve cette roche dans le Bassin Parisien, l'Artois Picardie....

L'argile est une roche sédimentaire tendre, résultat de la décomposition des microorganismes. C'est une roche plutôt imperméable. L'argile joue un rôle de filtre car l'eau migre très lentement à travers cette roche. Les marnes ont des propriétés intermédiaires entre la craie et l'argile.

Le granite est une roche dite du socle (plutonique), très dure et imperméable (Massif central, Bretagne).

Le parcours de l'eau dans le sol va surtout dépendre des caractéristiques du sol. Les calcaires présentent de nombreuses fractures qui sont autant de voies de circulation préférentielles, tandis que l'argile, imperméable, laisse peu de place à l'infiltration. Dans un sol calcaire fissuré, la vitesse d'infiltration peut atteindre 1 m par an. Dans la craie, la vitesse est de l'ordre de 0,5 à 0,7 mètre par an. Les roches poreuses (sable, craie, calcaire) peuvent contenir jusqu'à 100 m3 d'eau par m3 de sol et peuvent délivrer de 50 à 200 m3 d'eau à l'heure.

2. Les différentes nappes

On distingue plusieurs types de nappes :

a) Les nappes souterraines, dites « nappes captives »

Ce sont des nappes profondes (plusieurs centaines de mètres), qui ne sont pas en contact avec l'air. Le terme « captif » signifie que l'aquifère est recouvert d'une couche géologique imperméable. L'alimentation de la nappe a lieu en bordure de l'aquifère à partir de quelques zones d'affleurement et par des voies de communication souterraines. La nappe de l'Albien, dans le Bassin Parisien, est une immense nappe captive subfossile (plusieurs milliers d'années) qui contient de 450 à 700 milliards de m3 d'eau. Dans le cas de nappes captives, les eaux sont sous pression car la nappe remplit complètement l'aquifère. La nappe étant captive, les eaux peuvent jaillir si un forage est installé.

b) Les nappes « libres »

Les nappes libres sont, au contraire, en contact avec l'air. Le « contact » avec l'air est apprécié sur des critères chimiques et géologiques. Il ne s'agit pas d'une nappe à l'air libre, mais située dans un sol qui contient de l'air, dit aussi « sol non saturé ». Le terme « libre » signifie aussi que la surface supérieure de la nappe fluctue sans contrainte. La nappe est alimentée par l'eau de pluie sur toute la surface de l'aquifère. Le niveau de la nappe s'élève ou s'abaisse sous f'effet de la gravité. Les eaux ne sont jamais sous pression, et l'eau doit être pompée.

La nappe de la craie de l'immense nappe de Beauce (9 000 km² sur six départements) est une nappe libre. Au sein des nappes libres, on distingue les « nappes phréatiques », qui sont des nappes d'eau libres à faible profondeur, et les « nappes alluviales ».

c) Les nappes alluviales

Il s'agit d'un type particulier de nappe libre. Les nappes alluviales sont des nappes d'accompagnement des rivières, elles assurent un débit minimum en période d'étiage.

Les eaux souterraines en quelques chiffres

On a répertorié en France 450 aquifères indépendants, dont 200 exploitables, soit 25 nappes captives et 175 nappes libres, réparties sur les deux tiers du territoire, sur des surfaces comprises entre 100 et 100 000 km² (1 km² = 100 hectares).

On estime que ces 200 nappes renferment 2 000 milliards de m3, dont 100 milliards s'écoulent vers les sources et les cours d'eau.

7 milliards de m3 sont puisés chaque année dans les nappes, dont 50 % pour l'eau potable, couvrant ainsi 63 % des besoins domestiques, 20 % des besoins agricoles, et 25 % des besoins industriels.

Annexe 11 - CONCENTRATIONS MAXIMALES CONNUES EN ÉLÉMENTS TOXIQUES ET INDÉSIRABLES D'ORIGINE NATURELLE DANS LES EAUX SOUTERRAINES EN FRANCE (g/l)

Élément

Concentration observée

Norme de potabilisation *

Contexte géologique

Aluminium

200

200

(non précisé)

Antimoine

27

5 (eau potable)

Sédimentaire (grès +calcaire)

Arsenic

6 223

10 - 100

Calcaire, Haut-Rhin

Cadmium

0,06

1 - 5

Karst, Hérault

Chrome

50

50

Molasse (grès + argile), Artois -Picardie

Mercure

0,06

0,5-1

Moi-pliocèce.- Landes

Nickel

100

20 (eau potable)

Craie, Picardie, Gard

Plomb

1

10-50

Schiste

Sélénium

60

10

Calcaire, Vienne et Est du bassin parisien

Baryum

1 600

-

Grès, Ardèche

Bore

350 000

1000

(Non précisé)

Cuivre

24

20-1000

Calcaire

Fer

12 840

100- 1000

Sable aptien (argile sur calcaire), Aube

Fluor

12 000

700-1 700

Calcaire compact

Manganèse

1 328

50-1000

Sable aptien., Aube

Phosphore

150

400-700

Craie, Artois-Picardie

Zinc

2 160

500-5 000

Alluvions, Alsace

* normes de potabilisation ou d'eau potable (décret 20/12/01)

Source : Audition BRGM

Annexe 12 - LES MÉCANISMES DE TRANSFERT DES POLLUANTS DANS LES EAUX SOUTERRAINES

La couche du sol non saturé (chargé d'air) est un filtre imparfait qui laisse passer les polluants. Les transferts de polluants dans les eaux souterraines se déroulent selon trois processus : physique, chimique et biologique.

1. Les transferts physiques

L'eau se déplace par gravité en s'infiltrant par la porosité du sol et/ou en suivant les pentes d'écoulement préférentiel. La convection correspond au transfert vers les profondeurs ; la dispersion correspond à la diffusion de l'eau dans des voies plus ou moins horizontales.

Le sol est divisé en plusieurs couches ou horizons successifs. La couche superficielle, végétale, de faible épaisseur (50 cm-1 m), est le lieu des échanges biologiques (voir ci-après). Les couches intermédiaires présentent des mélanges de matières (terre, argile, graviers...), de liquide et d'air. Dès lors qu'il y a une présence d'air, le sol est appelé « non saturé ». Un sol non saturé est un sol où il y a de l'air. L'épaisseur de cette couche de sol est très variable, de quelques mètres dans les plaines alluviales, jusqu'à plus de 100 m dans les zones karstiques.

Le temps de transfert va dépendre de deux facteurs principaux : les caractéristiques du sol et son humidité.

- Les caractéristiques du sol, c'est-à-dire sa composition (proportion de sable, argile, gravier), sa perméabilité (la perméabilité entre un sable et un argile imperméable varie de 1 à 100 000), mais aussi son homogénéité. Un sol homogène (sable par exemple) présente une même porosité (macro porosité et micro porosité) et par conséquent un temps de transfert unique. Un sol hétérogène avec des fissures (comme le karst qui est l'aquifère le plus hétérogène du point de vue hydrodynamique), entraîne des vitesses d'écoulement très variables : la vitesse d'écoulement dans le sable est de l'ordre de un an pour 200 mètres, tandis que des fissures dans un sol karstique, calcaire ou volcanique, peuvent accélérer les vitesses, de 15 mn à 20 jours pour 200 mètres. L'écoulement peut être aussi rapide que celui d'une rivière. Les vitesses d'écoulement sont toujours beaucoup plus lentes que les réponses des nappes à un changement de pression (ex. orage) qui se transmettent beaucoup plus vite.

Il existe une très grande variation spatiale entre les types de sols, et sur un même type de sols, quand le sol est hétérogène, entre parcelles. Mais il faut relativiser l'importance de ce premier facteur qui paraît, à l'observation, beaucoup moins important que le second : l'humidité des sols.

- L'humidité des sols. A sols comparables, plus le sol est humide et plus le temps de transfert est rapide. L'eau circule d'autant plus vite et facilement qu'il existe de l'eau au départ. Ce facteur, connu sous le nom de conductivité hydrique, est plus important que la variabilité des caractéristiques pédologiques (la composition du sol). L'étude a été effectuée sur les nitrates : les variations de drainage dépendent à 10% seulement des variations des sols, mais à 25 % des quantités d'azote (d'engrais) apportées en surface, et à 40 % de la variabilité climatique. Des pluies intenses sur un sol humide peuvent majorer les transferts de nitrates de 40 % par rapport à une situation sèche (Michel VAUCLIN - Modélisation des transferts d'eau - Résultats d'une recherche interdisciplinaire CNRS-INRA - septembre 2000).

Compte tenu de cette grande variabilité, il n'y a pas de temps-type de transfert, mais seulement des échelles de temps. A polluant égal (nitrates, pesticides, métaux lourds), le temps de transfert est donc variable entre les sols et l'épaisseur du sol non saturée : très rapide dans les sols karstiques, de l'ordre de 1 jour à 1 an, moins rapide dans les plaines alluviales, de l'ordre de 1 mois à 5 ans, encore plus long dans la craie et les sols granitiques du socle, de l'ordre de 1 an à 1 000 ans.

Il y a bien sûr une interaction entre caractéristiques du sol et humidité. Des polluants peuvent être « emprisonnés » dans des parties du sol imperméables puis libérées par de fortes charges hydrauliques.

2. Les transferts chimiques

Au cours de leur parcours dans le sol, les molécules peuvent subir diverses transformations chimiques, dont les deux principales sont d'une part la dissolution (le polluant se dissout dans l'eau - cas des hydrocarbures par exemple) ou son contraire, la précipitation (le polluant se minéralise, se fixe dans le sol) et d'autre part l'oxydoréduction. Sous certaines conditions (rareté de l'oxygène au fur et à mesure de la descente dans le sol), les polluants peuvent s'oxyder, c'est-à-dire s'unir avec l'oxygène. Le cas le plus connu est l'ammonium, présent dans les engrais qui, au contact avec l'oxygène et des bactéries, se transforme en nitrates (NO3). Le phénomène inverse peut se produire dans le processus de dénitrification : les atomes d'oxygène disparaissent, de telle sorte qu'il n'existe plus que l'azote gazeux (voir annexe sur la dénitrification naturelle).

Les nitrates, une fois formés, sont transportés par pure gravité, n'ont aucune interaction avec les solides et suivent le même parcours que l'eau d'infiltration. En d'autres termes, les nitrates coulent dans le sol comme l'eau.

La présence de fer et de soufre peut également transformer les molécules (et conduire par exemple à une dénitrification chimique).

3. La biotransformation

Contrairement au processus précédent, abiotique, la transformation biologique implique l'action de bactéries et de micro-organismes vivants. Deux phénomènes peuvent être distingués :

- La biodégradation

La plupart des molécules chimiques apportées au sol en agriculture soit sont absorbées par les systèmes racinaires des plantes (c'est même leur objectif), soit sont biodégradables et disparaissent sous l'action des bactéries. L'étude de cette dégradation est même une des conditions de mise sur le marché des produits phytosanitaires. Le premier filtre biologique est bien celui du sol et des plantes. Tout ce qui échappe au système racinaire et à la biodégradation se retrouve tôt ou tard dans les nappes souterraines. Cette phase a lieu dans la première couche superficielle du sol, qui regorge de bactéries : 1 cm3 de terre contient de 1 à 10 milliards de bactéries.

L'un des processus connu de biodégradation concerne la dénitrification biologique des nitrates (voir annexe ), qui peuvent se dégrader sous certaines conditions, notamment en cas de réfaction de l'oxygène : les bactéries consomment l'oxygène présent dans les molécules des nitrates qui les retransforment en azote gazeux inerte (N2).

Un excès d'apport ou des études incomplètes (l'industrie chimique produit plus de molécules que les biologistes ne sont capables d'analyser) peut cependant entraîner des pollutions et la persistance de molécules potentiellement polluantes pour la ressource en eau.

Le processus microbien est le premier mode de dégradation, mais il se raréfie au fur et à mesure que l'on descend dans le sol, car les bactéries, chiffrées par milliards dans la première couche superficielle, sont de moins en moins nombreuses. Un deuxième phénomène intervient alors : le transport colloïdal.

- Le transport colloïdal

Si certaines bactéries ont un rôle de destruction des molécules chimiques, d'autres ont un rôle de transporteur. Certaines molécules chimiques ou minérales (métaux lourds) ont la faculté de se fixer aux bactéries de très petite taille. Les molécules dont la taille est inférieure à celle des argiles (de l'ordre de 2 microns) peuvent être ainsi transportées et transférées au travers de couches de sol imperméable, et rejoindre la nappe captive. Les virus (de l'ordre de 1/100e, voire 1/1000e de micron) peuvent ainsi contaminer les eaux souterraines.

Les pesticides et les métaux lourds présentent cette caractéristique de se fixer sur des bactéries. Le temps de transfert dans les couches profondes est donc beaucoup plus long que celui des nitrates, qui coulent comme l'eau. Mais les pollutions qui s'ensuivent sont aussi beaucoup plus durables.

Il n'y a pas de temps-type de transfert, mais seulement des échelles de temps. A sol égal, le temps de transfert des nitrates sera plus court que celui des pesticides, qui sera lui-même plus court que celui des métaux lourds.

Annexe 13 - LE SEQ EAUX SOUTERRAINES

Sources : Réseau national des données sur l'eau - www.rnde.tm.fr
Revue de l'Agence de l'eau Adour Garonne hiver 2001 - Synthèse et commentaire OPECST

Alors que la qualité des eaux de surface était évaluée dès 1971, aucune grille d'évaluation comparable n'avait pu être élaborée pour les eaux souterraines. Le travail a été réalisé à partir de 1994, sous l'impulsion des agences de l'eau et du Ministère de l'environnement, par un groupe interdisciplinaire animé par l'Agence de l'eau RMC. Plusieurs versions ont été préparées. La dernière a été présentée en 2002 au Ministère de l'écologie et du développement durable. Le SEQ est déjà utilisé par les agences de l'eau, mais son approbation définitive est retardée en raison des difficultés d'articulation avec les nouvelles dispositions de la directive cadre européenne.

1. La méthode d'analyse suit trois étapes :

- une analyse des paramètres physico-chimiques, bactériologiques, hydrobiologiques. Les paramètres qui peuvent être analysés se chiffrent par centaines. Le nombre de mesures varie selon les paramètres (entre une et plusieurs centaines de mesures). Chaque paramètre est noté de 0 à 100.

- un regroupement des paramètres par type d'altération. Cette notion est à la base du SEQ. Une altération est un regroupement de paramètres de même nature ou ayant le même effet perturbateur. Plusieurs paramètres peuvent contribuer à une même altération (exemple : le pH, les chlorures, le sodium et les sulfates, concourent à la même altération « minéralisation et salinité»). La plus mauvaise note d'un paramètre donne la note de l'altération. On compte une douzaine d'altérations (voir tableau 1).

- les altérations déterminent, par calcul automatique, des classes de qualité (très bon, bon, passable...). Le problème principal à ce stade est la fixation du seuil de passage d'une classe à une autre. Les seuils ont d'ailleurs été modifiés au cours des différentes versions du SEQ.

2. Les classements possibles

Le SEQ prévoit deux options de classement. Le choix entre les deux options est laissé aux agences.

- Le classement détaillé par type d'usages et par rapport à l'état patrimonial.

Le principe du SEQ (eaux ou eaux souterraines) est de permettre d'évaluer la qualité de l'eau par rapport à des usages. Il n'existe pas de qualité intrinsèque mais des qualités d'eau qui permettent de satisfaire tel ou tel usage. Ainsi, une altération de la qualité de l'eau par les nitrates peut poser un problème pour l'alimentation en eau potable, mais ne gêne ni l'irrigation (au contraire), ni l'industrie. Concernant les eaux souterraines, cinq usages ont été définis : alimentation en eau potable et industrie agro alimentaire, irrigation, abreuvage, industrie et énergie. En plus de ces cinq usages, le SEQ introduit la notion d'état patrimonial, qui permet d'apprécier l'état de dégradation d'une eau qui résulte des activités humaines. Les paramètres qui sont pris en compte ne sont normalement pas présents à l'état naturel dans les eaux (pesticides...).

Le nombre d'altérations prises en compte est variable selon les usages (voir tableau 1). Les altérations permettent de répartir les eaux en différentes classes, selon l'usage suivant un barème allant de « très bon » à « inapte ». Ces classes sont repérées par un code couleur. Il y a donc un indice de qualité pour chacun des cinq usages.

L'aptitude de l'eau à satisfaire un usage pour une altération considérée est déterminée par le paramètre le plus déclassant (si les résultats sont très bons pour tous les paramètres sauf les nitrates mais que le paramètre nitrates classe l'eau en qualité mauvaise, l'eau est classée en qualité mauvaise).

- Un classement synthétique de la qualité de l'eau.

Les agences peuvent aussi établir un indice synthétique de la qualité de l'eau. Le classement est lui aussi évalué par altération. Les seuils de passage d'une classe à une autre sont établis à partir des seuils utilisés pour les classements précédents. Les seuils bleu-vert (très bonne - bonne qualité) et vert jaune (bonne qualité - qualité passable) sont définis par les seuils de l'état patrimonial. Les seuils jaune-orange (qualité passable - qualité médiocre) et orange-rouge (qualité médiocre - mauvaise qualité) sont définis par les seuils applicables à l'usage (production d'eau potable). L'indice est donc composite (voir tableau 2).

Tableau 1 - Critères d'altération dans le SEQ eaux souterraines

Altérations

Eau potable

Abreuvage

Irrigation

Industrie/
énergie

- goût et odeurs

X

     

- matières organiques oxydables

X

     

- particules en suspension

X

     

- coloration

X

     

- micro-organismes

X

X

X

 

- minéralisation et salinité

X

X

X

 

- nitrates

X

X

   

- composés azotés

X

X

   

- micropolluants minéraux

X

X

X

 

- produits phytosanitaires

X

X

X

 

- autres micropolluants organiques

X

     

- corrosion

     

X

- dépôts

     

X

- température

     

X

Tableau 2 - Classement des eaux selon les usages et l'état patrimonial


Code
couleur

Usage
Alimentation en eau potable (AEP)

Autres usages
Irrigation/Abreuvage
/Industrie énergie


Etat patrimonial


Indice
synthétique

Bleu

Eau potable optimale

Très bonne aptitude

Eau dont la composition est naturelle

Eau de très bonne qualité

Vert

 

Bonne aptitude

Eau proche de la composition naturelle

Eau de bonne qualité

Jaune

Eau de qualité acceptable pour être consommée

Aptitude passable

Contamination moyenne par rapport à l'état naturel

Eau de qualité passable

Orange

Eau de qualité non potable nécessitant un traitement

Aptitude mauvaise

Contamination importante par rapport à l'état naturel

Eau de qualité médiocre

Rouge

Eau inapte à la production d'eau potable

Inapte pour l'usage

Contamination très importante par rapport à l'état naturel

Eau de mauvaise qualité

3. Les difficultés

Le SEQ eaux souterraines a été long à élaborer et n'est toujours pas formellement adopté par le Ministère de l'écologie et du développement durable. Il ne saurait être nié que des difficultés demeurent.

- Ces difficultés sont d'abord intrinsèques du SEQ eaux souterraines. La lecture et la communication du SEQ restent difficiles. On retiendra par exemple que l'aptitude de l'eau à la production d'eau potable comprend quatre classes tandis que l'aptitude aux autres usages en comprend cinq, avec de surcroît, des formulations différentes selon les usages et même des couleurs différentes (la qualité moyenne est repérée par le bleu foncé pour l'eau potable et jaune pour les autres usages !...)

Le choix laissé aux agences entre un indice usage et un indice synthétique empêche d'avoir une vision générale de la qualité des eaux en France.

Les seuils de passage d'une classe à une autre restent discutés. Les seuils de passage d'une classe à une autre ont d'ailleurs été modifiés au cours des différentes versions du Seq.

- Les difficultés viennent ensuite de l'harmonisation avec les dispositions de la directive cadre européenne. SEQ eaux et directive sont dans une complémentarité difficile. Le SEQ eaux en l'état doit être modifié sur quelques points.

Le SEQ eaux s'applique à des nappes, les aquifères, alors que la directive s'applique à des « masses d'eau » dont la définition n'est pas seulement hydrodynamique. Les deux notions sont voisines mais distinctes. Il peut y avoir une masse d'eau pour plusieurs nappes (cas des nappes superposées) et un aquifère pour plusieurs masses d'eau (cas des très grandes nappes dont les caractéristiques changent selon les sites) et des nappes alluviales.

De même, tandis que le SEQ eaux français choisit un classement selon quatre ou cinq classes de qualité, la directive européenne ne retient que deux classes (bon ou médiocre).

Enfin, les paramètres et les seuils conduisant aux classements doivent être négociés et acceptés au niveau européen, c'est-à-dire aujourd'hui à 15, et dès 2004, à 25... La « directive fille » spécifique aux eaux souterraines, attendue entre 2003 et 2005, devrait modifier sensiblement le SEQ eaux souterraines.


Pour en savoir plus :

Pour une présentation générale : Réseau national des données sur l'eau site www rnde.tm.fr ; Revue de l'agence de l'eau Adour Garonne, hiver 2001.

Pour une présentation détaillée et une application pratique : agence de l'eau Seine Normandie, suivi de la qualité des eaux souterraines du bassin de Seine Normandie, données 2000, publication avril 2001.

Annexe 14 - LES ALTÉRATIONS DES EAUX SOUTERRAINES

L'originalité du SEQ eaux souterraines est d'évaluer la qualité des eaux par classe et par altération. Une altération est une dégradation de l'eau estimée à partir d'un regroupement de paramètres de même nature ou ayant le même effet. Les principales altérations sont les suivantes :

1. Altération « matières azotées »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour les usages « production d'eau potable » et « abreuvage ».

Les paramètres principaux sont l'ammonium et les nitrites. L'ammonium est lié soit à la réduction des nitrates (la réduction est une réaction chimique inverse de l'oxydation), soit aux activités humaines (rejets d'effluents des stations d'épuration, activités industrielles, élevage...). L'ammonium est un indice d'une possible contamination microbiologique. Il peut aussi modifier le goût de l'eau ou provoquer la prolifération de bactéries nitrifiantes. Les nitrites proviennent d'une transformation de l'ammonium par les bactéries. Leur présence est signe d'une pollution d'origine bactériologique et organique. Les nitrites sont aussi les plus toxiques. Les nitrites sont aussi les plus toxiques.

2. Altération « minéralisation et salinité »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour les usages « production d'eau potable », « abreuvage » et « irrigation ».

La minéralisation correspond à la quantité de sels minéraux contenus dans l'eau. Elle est évaluée à partir des paramètres suivants : chlorures, sulfates, dureté de l'eau, calcium, magnésium, potassium, sodium... La présence de minéraux dans les eaux souterraines est souvent d'origine naturelle, et peut même être recherchée (elle est à la base de l'exploitation des eaux embouteillées), mais en excès, ils peuvent provoquer des inconvénients (altération gustative, laxative) et des maladies (maladies rénales...). Un certain nombre « d'eaux minérales » ne pourraient pas être distribuées au robinet.

3. Altération « matières organiques et oxydables »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour l'usage « production d'eau potable ».

L'origine principale est la décomposition des êtres vivants qui entraîne une consommation d'oxygène et une prolifération bactérienne. L'un des paramètres est le carbone organique dissous -COD.

4 et 5. Altération « particules en suspension »/« fer et manganèse »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour l'usage « production d'eau potable »

L'altération est définie par la turbidité (l'aspect trouble de l'eau), elle-même liée soit à la présence de fer et manganèse, qui peut être une altération à elle seule, soit à la présence de matières en suspension (MES). Les matières en suspension, constituées de micro particules (argiles, plancton...) proviennent le plus souvent des eaux de ruissellement après des épisodes orageux : la pluie s'engouffre par des voies de cheminement préférentiel, rejoint les nappes. La turbidité étant souvent liée à la pluie, les mesures réalisées à dates fixes ne sont pas forcément représentatives de l'altération réelle...

6. Altération « micropolluants organiques »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour l'usage « production d'eau potable ».

Ces micropolluants ont pour caractéristique d'être d'origine anthropique, industrielle ou urbaine (circulation automobile) et d'avoir des propriétés toxiques avérées (molécules cancérigènes, tératogènes ou mutagènes). Ils sont très peu biodégradables et constituent donc un risque pour la contamination des eaux de surface. On distingue dans cette famille les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) qui sont des hydrocarbures liés à la circulation automobile, les PCB polychlorobiphényles utilisés dans les dans les plastiques et les peintures, les organes chlorés volatils, les OHV -organochlorés volatils.

7. Altération « micropolluants minéraux »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique et pour les usages « eau potable », « abreuvage » et « irrigation ».

A l'exception des métaux lourds (mercure, plomb, cadmium), les métaux sont utiles au développement des êtres vivants. Ils sont toutefois toxiques à de fortes concentrations. Leur origine peut être naturelle ou anthropique, d'origine agricole (engrais chargés en cadmium ou en zinc, déjection animale chargée en cuivre, manganèse ou zinc), mais surtout d'origine urbaine (boues de stations d'épuration, chargées en plomb et mercure, corrosion des canalisations en plomb) et d'origine industrielle (métallurgie, industrie chimique). Quinze micropolluants sont pris en compte : l'aluminium, l'antimoine, l'argent, l'arsenic, le bore, le cadmium, le chrome, le cyanure, le mercure, le nickel, le plomb, le sélénium, le zinc.

8. Altération « nitrates »

Cette altération est prise en compte pour le classement synthétique, ainsi que pour les usages « production d'eau potable », « abreuvage » et pour déterminer l'état patrimonial.

Les nitrates constituent un élément nutritif majeur indispensable pour les plantes et proviennent de la décomposition des déchets organiques (transformation de l'ammonium en nitrites ou en nitrates). L'augmentation régulière de teneur en nitrates des eaux souterraines est suivie avec préoccupation. Les seuils de classement sont souvent discutés (voir ci-après).

9. Altération « pesticides »

Cette altération est utilisée pour le classement synthétique ainsi que pour les usages « production d'eau potable », « abreuvage », « irrigation » et pour déterminer l'état patrimonial.

Les pesticides sont exclusivement d'origine anthropique. Ruissellement, drainage, érosion, entraînent ces produits vers les eaux superficielles et les eaux souterraines sont contaminées par infiltration (transfert par le sous-sol) ou directement. Les familles de pesticides suivies dans les analyses d'eaux souterraines sont les triazines (atrazine...), les urées substituées (diuron), les organochlorés (lindane). Là aussi, les seuils sont discutés.

Seuils de classes de qualité pour les nitrates et les pesticides

(appliqués en 2002 dans le Seq eaux souterraines)

Classe

Nitrates

Pesticides
(cas général)

Bleu : Eau de très bonne qualité dont la composition est naturelle ou subnaturelle

< 10 mg/litre

< seuil de détection usuel

Vert : Eau de bonne qualité, proche de l'état naturel mais avec détection d'une contamination d'origine anthropique


10 - 20 mg/litre


0,01 - 0,05 ug/litre

Jaune : Eau de qualité passable. Dégradation significative par rapport à l'état naturel


20 - 40 mg/litre


0,05 - 0,1 ug/litre

Orange : Eau de qualité médiocre. Dégradation importante par rapport à l'état naturel


40 - 50 mg/litre


0,1 - 0,5 ug/litre

Rouge : Eau de mauvaise qualité. Dégradation importante par rapport à l'état naturel


> 50 mg/litre


> 0,5 ug/litre

Nota : Il s'agit du classement pour l'état chimique des eaux. Les seuils retenus pour l'état patrimonial restent discutés, certains experts considérant qu'il faut diviser les seuils par 20.

Annexe 15 - LES RÉSEAUX DE SUIVI DES EAUX SOUTERRAINES

On distingue deux types de réseaux : le réseau patrimonial destiné à suivre l'évolution quantitative de la ressource ; les réseaux de contrôle qualitatif, juxtaposition de plusieurs réseaux distincts destinés à suivre la qualité de l'eau prélevée pour l'eau potable, la qualité des eaux souterraines dans leur globalité, ou seulement quelques paramètres.

1. Le réseau patrimonial quantitatif

Le réseau patrimonial, dit aussi réseau piézométrique, a pour but de suivre l'évolution quantitative de la ressource. Le paramètre mesuré est la profondeur de l'eau dans la nappe, appelé le niveau piézométrique de la nappe, c'est-à-dire le niveau naturellement atteint par l'eau dans un puits.

Un piézomètre est un instrument qui mesure le niveau de l'eau souterraine. Dans le cas des nappes libres, le niveau est apprécié par un calcul de la profondeur (quand la nappe se décharge, le niveau baisse et inversement). Dans le cas des nappes captives, le niveau est apprécié par la pression d'eau (dans le cas de la nappe de l'Albien. Sous Paris, à 600 mètres de profondeur, lors des premiers forages en 1850, la pression était telle que l'eau jaillissait en surface ; après un siècle et demi de captages, la pression est réduite et le jaillissement n'arrive qu'à une profondeur de 400 mètres).

Ce réseau s'est d'abord développé de façon aléatoire à partir d'initiatives locales, après des alertes consécutives à des périodes de sécheresse. La densité des stations et la fréquence des mesures sont par conséquent très inégales. Les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), élaborés dans chacun des grands bassins hydrographiques, visent à améliorer les connaissances de l'état patrimonial de la ressource en eau et les agences de l'eau financent désormais ces stations.

La nécessité de disposer d'un réseau national plus rigoureux a été formalisée en 1999 avec la création d'un réseau national des eaux souterraines- RNES-, résultant d'un protocole entre le ministère chargé de l'environnement et les agences de l'eau. Ce réseau est en cours de réalisation. Le protocole fixe une densité de points de mesure par type d'aquifère (un point par 500 km² pour les aquifères libres, et un point par 3 500 km² pour les aquifères du socle) et la fréquence des prélèvements (au minimum deux par an : un en hautes eaux de printemps, un en basses eaux au début de l'automne). Le choix des points est laissé à l'appréciation des bassins. Une difficulté consiste à déterminer des sites représentatifs de l'état des nappes (et éviter une dérive statisticienne qui consiste à multiplier les mesures sur un même site, sans utilité évidente...).

2. Les réseaux de contrôle qualitatif

a) Le réseau de contrôle sanitaire des DDASS

Ce réseau, créé dans les années 60, relève de la surveillance sanitaire du ministère de la santé. Il permet d'acquérir des informations sur les eaux prélevées dans les captages destinés à la consommation humaine. Il est réalisé par les producteurs d'eau et par les DDASS (direction départementale des affaires sanitaires et sociales) qui prélèvent à la source des échantillons d'eau et les font analyser par un laboratoire agréé. Les prélèvements des DDASS se font également en sortie des usines de traitement, notamment lorsqu'il y a mélange d'eaux provenant de captages différents.

La fréquence des analyses est fixée par décret (annexe II du décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine) et dépend du débit. Plus le débit est élevé et plus les contrôles sont fréquents  (entre une analyse tous les deux ans pour les débits inférieurs à 10 m3 par jour et une analyse par mois, pour les débits supérieurs à 100.000 m3)

Les paramètres analysés sont fixés par la même réglementation. Il s'agit de paramètres microbiologiques, physicochimiques, des substances indésirables et toxiques, des pesticides. Les données sont chargées dans un système d'information dit SISE-eaux, géré par les DDASS.

b) Le réseau patrimonial qualitatif du RNES

Contrairement au réseau précédent, orienté sur l'usage (l'alimentation en eau potable de la population), le réseau patrimonial vise à connaître la qualité physico-chimique des eaux souterraines dans leur globalité et leur évolution. Les analyses portent sur tous les captages, l'eau potable, l'irrigation, les captages industriels. Ces mesures sont réalisées par le Réseau national des eaux souterraines (RNES) déjà évoqué, dont elles constituent le second volet.

Les contrôles sont réalisés par les agences de l'eau. Le protocole fixe la densité des points de suivi. Les paramètres analysés sont plus nombreux que ceux analysés par les DDASS. Les résultats sont gérés par les agences de l'eau.

c) Les réseaux locaux

Ce réseau sanitaire ou patrimonial de l'État et des agences est souvent complété par un contrôle complémentaire mené par les départements mais cofinancé par les agences de l'eau, soit pour multiplier le nombre des contrôles, soit pour rechercher des paramètres peu suivis par le réseau des DDASS, notamment les micropolluants. Il existe aussi un réseau d'analyse des eaux à proximité des sols pollués.

d) Les réseaux dédiés

En complément de ces réseaux « généralistes », il existe aussi des programmes de mesures de certains paramètres, dont le plus connu est le « réseau nitrates », qui résulte de la directive nitrates et de l'obligation de déterminer des zones vulnérables. Les points de mesure sont répartis sur le territoire mais adaptés aux risques nitrates (il serait évidemment inutile de mesurer les nitrates dans les eaux souterraines des Alpes ou des Pyrénées...). Des cartes sont ainsi publiées régulièrement à l'occasion du renouvellement des délimitations des zones vulnérables.

Il existe également un programme de mesures des pesticides. Dans ce cas, il n'y a pas de réseau spécifique mais plutôt une sélection de points dans les réseaux existants dans lesquels on mesure certains pesticides. L'analyse est confiée à l'Institut Français de l'Environnement -IFEN- .

3. Appréciation critique

Le réseau ainsi mis en place présente de nombreux inconvénients :

On passera en premier lieu sur la complexité de l'organisation qui empêche d'avoir une vision claire du système mis en place, éclaté entre réseaux généralistes ou dédiés, nationaux ou locaux... Aucun n'est satisfaisant et le réseau sanitaire de la DDASS n'est pas le moins critiquable. La remontée d'informations au niveau national est très inégale et les mesures réalisées donnent une vision très biaisée de la qualité de la ressource car les captages fermés ou abandonnés pour cause de contamination ne sont plus suivis « donnant une vision optimiste de la qualité des nappes ».

L'information reste partielle. Le suivi piézométrique d'une nappe permet de constater que le niveau est stable ou baisse. Cette information n'est utile que si l'on connaît l'origine et l'importance des prélèvements, c'est-à-dire des forages, ce qui est loin d'être toujours le cas. La situation peut s'avérer gravement préoccupante dans certaines régions lorsque la baisse du niveau piézométrique s'accompagne de risques de dommages irréparables liés aux phénomènes d'intrusion marine (intrusion de la mer dans les nappes), comme c'est le cas dans le périmètre couvert par l'agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse qui commente ainsi ce phénomène : « la connaissance des points de captage progresse mais est encore loin d'être exhaustive, notamment en ce qui concerne les captages d'irrigation. Des inventaires complémentaires, ainsi que le développement de réseaux piézométriques, s'avèrent nécessaires pour atteindre les objectifs de connaissance de la ressource en eaux souterraines fixés par le SDAGE ».

Le contrôle des petits captages est peu fréquent (respectivement une analyse tous les deux ans et une analyse par an pour les débits inférieurs à 10 m3 jour et inférieurs à 100 m3 jour) et souvent délaissé au profit des contrôles des mélanges d'eau. Les ouvrages à faible débit sont peu ou pas suivis, les contrôles étant alors effectués après les mélanges d'eau de plusieurs captages.

Le maillage du territoire est encore très inégal. Plusieurs régions ont été aidées dans la mise en place du réseau RNES : celles fortement dépendantes des eaux souterraines pour l'alimentation en eau potable de la population (lorsque l'eau potable est plutôt prélevée dans les eaux de surface, le suivi des nappes est plus aléatoire) ; celles où la profondeur et les caractéristiques de la nappe ne posaient pas de difficultés, celles où il était aisé de transférer un réseau préexistant ; et celles, enfin dans lesquelles l'initiative locale a été déterminante (cas de l'Alsace, citée par l'instance d'évaluation du Commissariat général du Plan, qui bénéficie du réseau régional le plus ancien et le plus performant depuis 1950. D'autres régions sont moins avancées, notamment l'Adour Garonne qui avait peu investi jusqu'alors dans le suivi des nappes. La Bretagne, longtemps critiquée pour ses délais dans la mise en place du RNES, a rattrapé son retard.

La directive-cadre européenne a fixé à 2006 l'établissement, par les États, d'un « programme de surveillance de l'état chimique et quantitatif » des « masses d'eau » souterraines. Ce réseau est un outil majeur de ce « programme de surveillance » et doit donc être opérationnel avant cette date.

Cette surveillance doit normalement s'accompagner de mesures de gestion annoncées, prévues : « poursuivre toujours et encore la lutte contre la pollution des eaux souterraines » réaffirme solennellement l'un des SDAGE. Il y a de nombreux cas où la situation mérite de telles actions, sans attendre l'échéance de 2006.

Annexe 16 - L'EVALUATION DE LA QUALITE DES EAUX SOUTERRAINES EN SEINE-NORMANDIE

(Application du SEQ eaux souterraines)

Source : Suivi de la qualité des eaux souterraines du bassin Seine Normandie - 2000 - Agence de l'eau Seine Normandie - avril 2002

Présentation

Le bassin Seine-Normandie compte onze nappes, d'importance variable (depuis la nappe du calcaire de Brie au sud du département de Seine et Marne, jusqu'à la nappe de Craie, qui couvre neuf départements depuis le Calvados jusqu'à l'Yonne en passant par tous les départements au nord de Paris).

Les mesures de qualité des eaux souterraines, à partir de la méthode Seq eaux, existent depuis 1997. Elles se sont beaucoup développées depuis cette date (37.000 analyses en 1997, 57.000 en 1998, 60.000 en 1999, 80.000 en 2000). En 2000, jusqu'à 280 paramètres ont été recherchés sur 402 captages. Le nombre de mesures par paramètre varie de 1 à 1.029 (nitrates), soit au total 80.000 mesures.

Les analyses sont effectuées sur les eaux brutes, en sortie de captage, avant tout traitement. Deux prélèvements sont effectués au minimum par an : un en période de basses eaux (septembre-octobre), un pendant la période de hautes eaux (avril-mai). Les analyses sont réalisées par trois laboratoires et les laboratoires départementaux agréés par la DDASS.

Le classement par altération et par usage est évalué selon les critères du Seq. L'agence a choisi de classer les eaux selon le classement synthétique et non selon le classement par type d'usage.

Le coût de l'étude (traitement des résultats) a été de l'ordre de 30.000 euros auxquels s'ajoutent les coûts de reproduction papier (12.000 euros).

Les résultats sont donnés dans le tableau suivant :

Panorama de la qualité des eaux souterraines
dans le bassin Seine-Normandie

   

Répartition des classes de qualité
(en %)

Altérations

Nombre de captages

Bleu
Très bonne qualité

Vert
Bonne qualité

Jaune
Qualité passable

Orange
Qualité médiocre

Rouge
Mauvaise qualité

Matières azotées - hors nitrates

384

83

13

2

2

0

Minéralisation et salinité

389

0

85

8

5

3

Matières organiques et oxydables

402

74

21

2

2

1

Particules en suspension

402

38

26

8

28

0,5

Fer et manganèse

402

64

13

4

20

0,5

Hydrocarbures (HAP)

149

97

1

1

1

0

Micropolluants organiques

364

84

4

12

0,5

0,3

Micropolluants minéraux

402

47

31

8

11

3

Nitrates

402

20

13

37

16

14

Pesticides

349

30

11

9

38

11

Triazines

397

33

10

9

39

8

Pesticides hors triazines

400

85

4

3

5

2


Source : Agence de l'eau Seine-Normandie (chiffres arrondis)

Altération des captages aux nitrates (%) *

 

1998

1999

2000

Composition naturelle (< 10 mg/l)

22,8

21,1

21,5

Composition proche de l'état naturel (10-20 mg/l)

19,1

18,7

16,3

Dégradation significative (20-40 mg/l)

38,2

37

35

Dégradation importante (40-50 mg/l)

11

10,2

15

Dégradation très importante (> 50 mg/l)

8,9

13

12,2

Sous-total dégradation importante ou très importante

19,9

23,2

27,2

*  % des captages ayant une mesure correspondant au seuil considéré

Altération des captages aux pesticides (%)*

 

1997

1998

1999

2000

Composition naturelle (< 0,01g/l)

33,5

29,7

32,3

28,5

Composition proche de l'état naturel (0,01-0,05 g/l)

7

12

12,7

10,8

Dégradation significative (0,05-0,1 g/l)

15,2

10,8

8,3

7

Dégradation importante (0,1-0,5 g/l))

35,4

38

39,2

41,1

Dégradation très importante (> 0,5 g/l)

8,9

9,5

7,6

12,7

Sous-total dégradation importante ou très importante (>0,1 g/l)

44,3

47,5

46,8

53,8

*  % des captages ayant une mesure correspondant au seuil considéré

Annexe 17 - OBSERVATIONS DE METHODE SUR LES ANALYSES D'EAU

Les analyses d'eau souterraine et plus encore les comparaisons d'analyses, demandent une grande rigueur scientifique. L'observateur doit se poser quelques questions sur

la représentativité des points de mesure

la fréquence des analyses

les difficultés d'appréciation

les difficultés de représentation

1. La représentativité des points de mesures 

Les analyses sont effectuées sur des échantillons d'eau prélevés sur des points de captage (forages ou cours d'eau). Le choix des sites est évidemment déterminant. Il doit permettre de constituer des échantillons représentatifs des caractéristiques du milieu analysé et de ses altérations éventuelles. Cette question, fondamentale dans une démarche scientifique, ne paraît pourtant pas suffisamment prise en compte.

La représentativité suppose que les prélèvements aient lieu au bon endroit, sur des aquifères, des cours d'eau ou des masses d'eau identifiées, que les pressions anthropiques aient été analysées (pression agricole, urbaine, industrielle...) et que les paramètres aient été sélectionnés. Cette sélection suppose un travail d'analyse complexe. La difficulté est souvent contournée par une dérive « statisticienne » qui consiste à mesurer, un peu partout et n'importe comment, à produire des statistiques, à surinformer au lieu d'informer, à privilégier le nombre et l'anecdote au détriment de l'analyse.

L'une des questions pratiques concerne, par exemple, la densité des points de mesure. Faut-il un point par 10, par 100, par 1.000 km2 ? Poser la question en ces termes est déjà être sûr de se tromper, puisque tout va dépendre de la nature des nappes. Une nappe homogène, avec une seule pression anthropique homogène (forêt, ville) peut être raisonnablement suivie par une mesure. En revanche, dans le cas de nappes issues de milieux chahutés, avec des écoulements préférentiels, à proximité de sites polluants, les sites d'observation doivent être plus nombreux. Tout doit dépendre du milieu et des pressions en surface. Il n'y a donc pas de densité unique. Le nombre de mesures doit s'adapter au milieu et être d'autant plus important que la variabilité est grande.

Des observations similaires s'appliquent aux analyses.

2. La fréquence des analyses

Le SEQ eaux souterraines prévoit une fréquence minimale de prélèvements variable selon les paramètres, mais fixée au minimum à deux par an, une en hautes eaux (printemps), une en basses eaux (début de l'automne). Cette périodicité donne souvent prise à la critique. Cette constatation doit être discutée.

D'une part, l'importance de certaines pollutions est variable dans le temps et dans l'espace. C'est le cas des pollutions d'origine agricole liées aux cultures (nitrates et pesticides). L'impact sur les cours d'eau, quasi immédiat, doit être analysé après les périodes d'épandage. La variation dans les eaux souterraines est moins importante. Autant le reconnaître, certaines altérations ou certaines pollutions échappent largement aux analyses des réseaux traditionnels. C'est le cas lorsque les contaminations sont ponctuelles, associées à des événements imprévisibles. La turbidité, par exemple, est très dépendante des fortes pluies (par exemple en Normandie et Pays de Caux) ; les contaminations bactériologiques sont presque toujours ponctuelles (décomposition d'un animal mort, contamination fécale à la suite d'un accident du réseau d'évacuation des eaux usées...). La programmation des relevés dans le temps, de plus en plus automatique, ne peut évidemment prendre en compte tous les incidents possibles.

D'autre part, il arrive que la nature du polluant empêche toute analyse exhaustive. C'est le cas des pesticides. Il n'est guère possible d'analyser la centaine de molécules différentes utilisées. Une sélection doit être faite.

Ces caractéristiques sont telles que les réseaux d'observation présentent nécessairement des lacunes. Aucun n'est parfait, incontestable. Cette caractéristique doit être connue et acceptée. Lorsqu'une dégradation apparaît, la facilité et la pression médiatique poussent au contraire à multiplier les mesures, à produire des statistiques. La pratique et l'analyse montrent pourtant qu' « on ne gagne que très peu d'informations en multipliant le nombre de points et la fréquence des prélèvements ».

D'ailleurs, la fréquence des mesures a beaucoup moins d'importance que leur permanence. Les mesures doivent s'inscrire dans la durée, qui seule permet de déterminer des tendances et des comparaisons. Dix ans est un minimum compte tenu des variations climatiques interannuelles. On commence à être sur des tendances et à pouvoir les interpréter au bout de vingt ans.

3. L'appréciation des analyses

Sous réserve d'une sélection pertinente et d'une fréquence adaptée des prélèvements, les analyses de laboratoires permettent d'observer la présence de pollutions ou d'altérations. Leur évaluation est une autre étape, qui pose deux difficultés supplémentaires.

La première difficulté est celle de la synthèse d'éléments disparates. Les responsables politiques doivent, à ce propos, éviter deux écueils.

Ils doivent en premier lieu se garder des chapelles. Les études sur l'eau sont innombrables et d'autant plus nombreuses qu'elles émanent de spécialistes... de plus en plus spécialisés (hydrogéologie, biologie, santé...). Toutes les réglementations sur l'eau sont aussi marquées par le sceau d'une spécialité dominante (la directive cadre européenne est un parfait exemple de ce type de travers, avec une nette faveur accordée aux eaux de surface pour lesquelles les dispositions sont incontestablement plus précises que pour les eaux souterraines et une tendance à privilégier la biologie et l'étude des écosystèmes). Une synthèse suppose une pondération entre altérations qui n'ont ni la même incidence, ni la même gravité, ce qui suppose aussi un arbitrage entre compétences.

Les élus doivent en second lieu se garder des modes. L'opinion est sensible aujourd'hui à la dégradation nitrates et pesticides. Il existe pourtant bien d'autres risques sur lesquels il y a moins de données, moins de communication, mais qui sont tout autant préoccupantes : l'intrusion marine (pour les nappes côtières), l'eutrophisation (pour les cours d'eau), les contaminations bactériennes sont des risques certainement plus importants, les métaux dans les grandes régions industrielles et minières.

Une fois la synthèse effectuée, l'appréciation suppose in fine un jugement qualitatif. La qualité de l'eau doit être classée ; selon deux, quatre, cinq classes. Le passage de l'une à l'autre classe (bon à passable, médiocre à mauvais...), connu comme « la question des seuils » est évidemment un enjeu fondamental. Il importe, par exemple, que les seuils d'alerte des dégradations soient fixés suffisamment bas compte tenu des délais de réponse des eaux souterraines aux pollutions en surface, mais aussi, à des niveaux raisonnables pour ne pas supprimer toute activité en surface, notamment toute activité agricole. La plupart des seuils ont été discutés au cours des différentes versions du Seq eaux. Ils le sont toujours pour l'élaboration de la future « directive fille » relative aux eaux souterraines. Ils le seront encore davantage lorsque les seuils s'appliqueront aux dix nouveaux Etats membres.

4. La visualisation des données

Une fois ce travail réalisé, le stade suivant concerne la communication. Cette communication est aujourd'hui généralement assurée par deux méthodes : la cartographie et les codes couleurs. La représentation des milieux (un cours d'eau, une nappe, un captage...), par classes et par couleur est une pratique simple et usuelle. A cinq classes correspondent cinq couleurs, souvent du bleu (bon état ou très bonne qualité) au rouge (mauvais état ou très mauvaise qualité).

Si la lecture est incontestablement facilitée par ce mode de communication, on ne saurait assez mettre en garde chacun contre cet effet visuel écrasant et trompeur. Une carte de qualité est moins un état de qualité qu'un état des efforts de mesure, une photographie qui exige un mode de lecture et qui demande une grande rigueur et une interprétation. Il est parfaitement possible de multiplier les points bleus (où tout est bon) ou les points rouges (où tout est mauvais) en choisissant de multiplier les mesures dans certains lieux. De telles cartes ont un sens (c'est même leur but principal, puisqu'elles sont confectionnées pour démontrer, pour rassurer ou au contraire inquiéter), mais elles n'ont évidemment aucune valeur scientifique.

On ne saurait trop recommander une grande prudence. Le lecteur devrait se poser plusieurs questions élémentaires : les points de mesure sont-ils représentatifs ? Toutes les analyses ont-elles été reportées ? Les données de deux périodes différentes sont-elles comparables ? La confection et plus encore la lecture d'une carte de qualité sont exigeantes.

La meilleure, ou la moins mauvaise, des représentations graphiques devrait comporter quatre données :

- le respect des normes réglementaires, s'il y en a,

- le classement hiérarchique des eaux par classe de qualité,

- l'évolution des altérations.

- une comparaison avec les masses d'eau voisines et/ou celles de l'ensemble du bassin.

Respect des normes, hiérarchie et évolution permettent d'apprécier une qualité d'eau. On observera, pour le déplorer, que très peu d'institutions font cet effort de présentation.

Annexe 18 - LES OBJECTIFS DE LA DIRECTIVE CADRE CONCERNANT LES EAUX SOUTERRAINES

La directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau -dite directive cadre- fixe deux objectifs pour les eaux souterraines, à l'échéance 2015 : atteindre un bon état chimique et un bon état quantitatif. Contrairement aux eaux de surface, la directive ne fixe pas pour objectif un « bon état écologique » : celui-ci est supposé atteint lorsque les deux objectifs précédents sont respectés. Ces objectifs sont présentés ci-après :

Objectifs à l'échéance 2015

Bon état chimique

Bon état quantitatif

- Pas d'effet d'intrusion saline
(nappe côtière)

- Respect des normes environ-nementales antérieures

- Permet d'atteindre les objectifs écologiques et chimiques des eaux de surface

- La ressource n'est pas affectée à long terme par les prélèvements annuels

- Permet d'atteindre les objectifs écologiques et chimiques des eaux de surface

Contrairement aux eaux de surface, évaluées par une grille de couleurs progressives, les eaux souterraines sont évaluées simplement selon un barême de deux couleurs, correspondant à deux « classes » : « médiocre » (jaune à rouge) ou « bon » (vert et bleu). L'objectif à l'échéance 2015 est d'atteindre le niveau « bon » pour les deux critères indiqués.

L'échéance 2015 est ponctuée d'échéances intermédiaires, programmées à partir de la date de publication de la directive du Journal Officiel (22 décembre 2000).

- Décembre 2002 (décembre 2000 + 2 ans) : adoption d'une « directive fille » sur les eaux souterraines. L'article 17 de la directive cadre prévoit que « le Parlement européen et le Conseil adoptent des mesures spécifiques visant à prévenir et contrôler la pollution des eaux souterraines afin de réduire l'objectif d'un bon état chimique ».

Ces mesures sont arrêtées sur proposition de la Commission. Celle ci a d'ores et déjà fait savoir qu'une proposition de directive interviendrait seulement mi-2003, compte tenu de la rareté des informations sur la qualité des eaux souterraines, des difficultés d'étalonner leur « bon état chimique » et d'identifier les mesures permettant une amélioration.

- Décembre 2003 : transposition de la directive. La date limite de transposition de la Directive par les Etats membres est fixée par l'article 24 au 2 décembre 2003.

- Décembre 2004 (décembre 2000 + 4 ans) : étude d'impact. Article 5 : « les Etats membres procèdent pour chaque district hydrographique à une étude des incidences de l'activité humaine sur les eaux souterraines ».

- Décembre 2004 (décembre 2000 + 4 ans) : état des lieux et établissement d'un registre des zones protégées. Article 6 : « Les Etats membres veillent à ce que soit établi dans chaque district hydrographique, un registre des zones nécessitant une protection spéciale ». Concernant les eaux souterraines, ces zones sont les zones de captage d'eau destinée à la consommation humaine et les zones vulnérables définies par la Directive 91/676 CEE sur les nitrates.

- Décembre 2006 (décembre 2000 + 6 ans) : programmes de surveillance. Des programmes de surveillance doivent être établis dans les Etats membres. Ils impliquent des contrôles de surveillance standardisés sur une sélection de masses d'eau, et des contrôles opérationnels (pour le contrôle chimique et quantitatif) sur les masses d'eau risquant de ne pas répondre à l'objectif de bon état chimique.

L'outil d'évaluation en France est le SEQ - eaux souterraines.

L'objectif est de parvenir à un bon état chimique et quantitatif en 2015. Des reports de l'échéance sont toutefois possibles. Ils sont prévus à l'article 4, paragraphe b, et déterminés par les articles 5 à 8 de la directive cadre. Le report est possible lorsque la masse d'eau considérée ne se détériore pas davantage et que l'objectif ne peut être obtenu pour des raisons tenant à la faisabilité technique ou aux coûts disproportionnés.

Annexe 19 - CONTRIBUTION DES ACTIVITÉS INDUSTRIELLES À L'ÉTAT GÉOCHIMIQUE DES EAUX SOUTERRAINES

(Sélection)

Eléments

Culture

Extraction de métaux

Textiles

Cuir et chaussures

Imprimerie

Peintures et vernis

Verre

Métallurgie

Travail des métaux

Fabrication de machines

Industrie automobile

Distribution de carburants

Transport ferroviaire

Argent

           

X

X

X

 

X

 

X

Arsenic

X

X

X

X

X

X

X

X

       

X

Baryum

X

       

X

X

X

   

X

 

X

Bore

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

   

X

Brome

   

X

   

X

 

X

   

X

X

X

Cadmium

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X

 

X

X

X

X

X

X

X

X

 

X

Chrome

 

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

 

X

Cobalt

X

     

X

X

X

X

       

X

Cuivre

X

X

   

X

 

X

X

X

X

X

 

X

Etain

X

   

X

X

 

X

X

X

 

X

 

X

Manganèse

X

X

X

 

X

 

X

X

       

X

Mercure

X

   

X

X

 

X

X

 

X

   

X

Nickel

   

X

 

X

 

X

X

 

X

     

Plomb

X

X

 

X

X

 

X

X

X

 

X

X

X

Selenium

X

 

X

 

X

 

X

X

         

Zinc

X

X

X

X

X

 

X

X

X

 

X

 

X

Source : audition BRGM

Annexe 20 - LA POLLUTION DE LA NAPPE DE LOUVRES

Source : DRIRE - ILE-DE-FRANCE - juillet 2001

La pollution de la nappe de Louvres (Val d'Oise) est un cas de pollution industrielle décalée.

En 1996, une analyse faite par la DDASS au niveau d'un puits de captage en eau potable de Louvres révèle une quantité de cyanure très supérieure au seuil de potabilité (50 ug/litre). Les risques de migration des cyanures vers les captages voisins sont élevés et le captage est immédiatement arrêté.

Les cyanures (CN-) sont des combinaisons de cyanogène -gaz composé d'azote et de carbone- avec un corps simple, qui peut être la soude, le phosphate, les métaux. Il existe donc des cyanures de sodium, de potassium, des cyanures métalliques... Certains, les cyanures dits alcalins, sont très solubles dans l'eau. D'autres, les cyanures métalliques, sont insolubles dans l'eau, mais se dissolvent dans les premiers en faisant des « sels doubles ».

A l'analyse, il est apparu que l'origine des cyanures remontait à un demi-siècle auparavant. Le site avait abrité, jusqu'en 1956, une société de produits chimiques, qui avait fabriqué pendant un demi-siècle des cyanures alcalins. L'activité avait changé une première fois en 1956, pour une entreprise de traitement de surface, et une deuxième fois, en 1990, date à laquelle le site avait été utilisé pour la construction d'un supermarché. Lors de travaux de terrassement, des épandages de chaux avaient été effectués afin de consolider le sol, et cette opération avait engendré la libération de cyanures enfouis dans le sol depuis près de 50 ans.

Dès 1997, l'ADEME réalise une étude de sol. En 1998, le Préfet du Val d'Oise prévoit une dépollution de la nappe, par un pompage des eaux, rejetées dans un ru, et le déblaiement des terres polluées. En 2000, le Préfet impose une imperméabilisation totale des sols, pour éviter toute infiltration des eaux. Les travaux sont imposés au dernier propriétaire du terrain, jugé responsable de la pollution (car à l'origine des travaux ayant libéré le cyanure).

Cet exemple illustre un cas de pollution décalée et confirme la nécessité de disposer d'un historique, d'une mémoire des sols. Le propriétaire du sol aurait peut être hésité à choisir cet emplacement qui s'est avéré fort coûteux.

Les inventaires historiques régionaux des sols pollués sont menés par le BRGM. Un opérateur immobiliser peut ainsi disposer de l'information sur les terrains qui l'intéressent, savoir si une activité polluante a été exercée. L'estimation porte sur 300 000 à 400 000 sites. Ces inventaires devraient être achevés en 2005.

Annexe 21 - L'IMPACT DES TERRILS HOUILLERS SUR LA QUALITE DES EAUX DE LA NAPPE DE LA CRAIE (ARTOIS)

Source : Melle Sophie DENIMAL, M. Nicolas TRIBOUILLARD, Chercheurs au CNRS & Université Lille 1 - Synthèse OPECST

La fin de l'exploitation minière dans le Nord Pas-de-Calais a laissé d'énormes quantités de déchets, sous forme de terrils, monticules de déchets miniers mélanges de "schistes" et de grès (roches « feuilletées » ou plus dures), de charbon, de sulfures métalliques (mélanges de soufre et de métaux comme la pyrite qui est un sulfure de fer), souvent de taille considérable (de 30 à 100 mètres de haut, sur plusieurs hectares, représentant de 3 à 20 millions de m3 de déchets). Ces terrils sont exposés à la pluie, et ces eaux météoriques sont susceptibles de s'infiltrer et rejoindre les aquifères dans le sous-sol, affectant ainsi potentiellement la qualité des eaux souterraines.

Les risques ont été clairement mis en évidence, et certaines nappes (les plus superficielles) paraissent irrémédiablement condamnées (au moins en ce qui concerne leur aptitude à être exploitées pour la distribution d'eau potable). Les nombreuses études portant sur le drainage minier (le lessivage par les eaux météoriques des résidus d'exploitation du charbon) ont montré une grande diversité de situations empêchant de formuler des conclusions simples, mais quelques lignes directrices apparaissent.

L'impact des terrils sur les eaux souterraines serait déterminé par plusieurs facteurs :

- La composition du terril, en relation avec la nature de la roche contenant l'aquifère.

La composition du terril influe sur la nature des risques. La présence de sulfates issus de l'oxydation des sulfures par les eaux météoriques et le contact avec l'air est toujours avérée, mais l'importance des métaux, notamment de métaux lourds, est variable, mais rarement à des concentrations anormales au regard de la nature minéralogique et chimique des résidus miniers. L'altération par l'eau de pluie de résidus de minerais riches en sulfures métalliques peut aboutir à des eaux très acides et provoquer la formation de ce qu'on appelle le drainage acide minier.

Il y a toutefois une interaction possible entre les caractéristiques du terril et l'eau, en fonction de la nature des roches qui contiennent l'aquifère (ici, la craie, déposée au Crétacé). L'acidité naturelle de la pluie peut être renforcée par la présence de pyrite (qui, en s'oxydant, accroît l'acidité par libération d'acide sulfurique), ou au contraire diminuer lorsque l'aquifère est contenu dans des roches carbonatées. En effet, la présence des carbonates "tamponne" le milieu en neutralisant l'acidité des eaux.

Enfin, l'hétérogénéité et l'ancienneté du terril (dont le mode d'édification a varié selon l'évolution des techniques) influencent le mode d'infiltration des eaux.

- Le partage entre ruissellement et infiltrations

Il existe souvent dans les terrils des niveaux ou des zones imperméables (liées à la taille des particules, à leur degré de compacité...) : quand les eaux s'infiltrent, elles sont alors arrêtées, ressortent sur les côtés et ruissellent. Ces zones imperméables limitent l'infiltration des eaux en profondeur et par conséquent la quantité de sulfures potentiellement oxydables en sulfates et donc susceptibles d'être entraînées vers la nappe.

De même, une sorte de croûte plus ou moins imperméable s'est souvent formée sur les terrils anciens, qui constitue une protection naturelle, en favorisant le ruissellement et en limitant l'infiltration.

- L'articulation site / type de nappe

Le choix du site d'exploitation -et par conséquent du terril- a été commandé par la localisation des veines de charbon et non par la localisation par rapport à la présence ou non d'une nappe. Les conditions du transfert des pollutions sont pourtant sensiblement différentes selon que le terril est situé au-dessus ou au voisinage d'une nappe libre (contact possible avec l'oxygène de l'air) ou au-dessus ou au voisinage d'une nappe captive (moindre renouvellement de l'oxygène).

Lorsque la nappe est libre, les sulfates libérés par lessivage du terril se dissolvent dans l'eau, arrivent dans la nappe pratiquement sans transformation.

Lorsque la nappe est captive (avec très peu d'oxygène), le milieu est dit réducteur. L'absence d'oxygène, associée à l'apport de carbone (dans les terrils) et à l'action des bactéries conduit à une réaction chimique de réduction des sulfates : la molécule change, les sulfates se "retransforment" en sulfure, très peu solubles dans l'eau. Les sulfures et les métaux associés, au lieu de suivre le parcours de l'eau, vont « précipiter » c'est à dire se solidifier et rester piégés dans la roche qui contient l'aquifère. Les métaux qui ont pu gagner l'aquifère sont précipités naturellement et ne constituent pas de menace pour l'aquifère.

Annexe 22 - LE GUIDE DE L'ADEME SUR L'INCIDENCE DES DÉCHARGES SUR LA QUALITÉ DE L'EAU

Source : Mme Dominique DARMENDRAIL, BRGM Orléans, M. Denis N'GUYEN, BRGM Montpellier (Audition du 20 mars 2002) - Commentaire OPECST

A la suite de la loi du 13 juillet 1992 imposant la fermeture et la remise en état des décharges brutes à l'échéance 2002, un recensement des décharges a été réalisé. Un premier recensement, en 1994, dénombrait 5 667 décharges, dont près de 80 % étaient des décharges non autorisées. Des enquêtes plus poussées ont montré que la plupart des estimations initiales transmises par les services de l'État dans les départements étaient optimistes. Le nombre de décharges brutes est aujourd'hui estimé par le Ministère de l'Industrie entre 9.000 et 12.000. Ce chiffre ne tient pas compte des dépôts sauvages estimés à 25.000.

Beaucoup de ces décharges présentent des risques potentiels pour l'environnement et la santé : déchets de bricolage (peintures), déchets toxiques en quantité dispersée, pouvant libérer des éléments toxiques par accumulation, etc... Ces risques étant évidemment renforcés lorsque ces décharges et dépôts sauvages se situent sur des zones sensibles ou à risques (bords de rivières, zones inondables, etc.).

En 1996, l'ADEME publiait un guide méthodologique pour la remise en état des décharges d'ordures ménagères, permettant d'évaluer les impacts environnementaux des décharges et de les classer en fonction de la gravité des situations observées.

Cette méthodologie repose sur un diagnostic établi par une méthode simple, accessible à la plupart des services communaux (1). Le diagnostic (2) et cette analyse des risques permettent normalement de guider une stratégie d'intervention (3).

1. L'analyse multicritères

La méthodologie repose sur un diagnostic et une grille d'analyse multicritères. Plusieurs critères physiques et environnementaux ont été sélectionnés : le contexte géologique, la sensibilité des eaux souterraines aux pollutions, la sensibilité des eaux de surface, la proximité des habitations, la sensibilité du paysage, la taille et l'âge de la décharge, la composition du dépôt. Une note comprise entre 1 et 5 est affectée à chaque critère selon un barème préétabli par l'ADEME.

Les critères sont ensuite pondérés selon le risque que l'on cherche à évaluer. Quatre risques correspondant aux différentes pollutions et nuisances susceptibles d'être induites par une décharge sont ainsi appréhendés : le risque de pollution des eaux souterraines, le risque de pollution des eaux de surface, le risque de nuisances pour les riverains, le risque de dégradation des paysages. Le total (note par critère + pondération) donne un score qui permet d'établir un diagnostic simplifié de la situation et d'évaluer le risque

Deux des quatre risques évalués concernent l'eau. Le risque « eau » est mesuré à partir de cinq critères principaux :

Critères d'évaluation des risques sur l'eau liés aux décharges

(a)

le substratum géologique : nature du substrat, existence de fissures, perméabilité du sol (exemple : sable = 5, calcaire poreux = 4, argile = 1)

(b)

les eaux souterraines : proximité d'une nappe, profondeur de la nappe, distance du forage (exemple : ressource en eau pure = 5, nappe à 20 mètres de profondeur = 3...)

(c)

les eaux de surface : proximité d'un captage, distance par rapport au cours d'eau, présence d'une nappe alluviale (exemple : site situé dans le périmètre de protection = 4, site situé sur nappe alluviale = 4, ...)

(d)

taille de la décharge : superficie et épaisseur du dépôt (exemple : site > 1ha = 5, dépôt de 5 à 10 m = 3...)

(e)

âge de la décharge : temps passé depuis la fermeture, durée d'exploitation, etc.

(f)

composition du dépôt : déchets toxiques ou lixiviats constatés =5, lixiviats supposés =3...)

Les critères sont ensuite pondérés comme suit :

- risque eaux souterraines = 3 a + 3 b + 2 d + 2 e + 2 f

- risque eaux de surface = 3 a + 4 c + 2 d + 2 e + 2 f.

La note obtenue permet de classer les sites en trois catégories : site à risques faibles, site à risques moyens, site à risques forts (lorsque la note finale dépasse 42).

2. Le diagnostic

Ce diagnostic simplifié est établi pour les principaux risques (« eaux souterraines », « eaux de surface », « riverains » et « paysages »). L'ensemble des informations est rassemblé dans un document de synthèse, permettant d'identifier clairement les sites polluants : un même site pourrait être classé « à risque » pour plusieurs impacts analysés. Dans le cas où le diagnostic simplifié conduit à classer un site comme site « à risque fort », un diagnostic approfondi est alors engagé.

La moitié des départements ont entrepris ce travail d'inventaire, qui peut être réalisé par le Bureau de recherches géologiques et minières -BRGM- ou par des bureaux d'études privés. En 2001, 57 départements l'avaient réalisé ou étaient en cours de diagnostic. Un regroupement des informations au niveau national s'est cependant avéré difficile dans la mesure où chaque département étant libre de sa sélection (décharges brutes, décharges sauvages), les résultats ne sont pas forcément cohérents. Sur un échantillon de 1 000 décharges on estime cependant que tous risques confondus, 38 % ont un impact faible sur l'environnement, et 20 % un impact moyen à fort. Le risque fort spécifique à l'eau serait de l'ordre de 5 à 10 %.

Cette méthode est caractérisée par une très grande simplicité. Une fois la grille de notes connue (déterminée par le guide méthodologique de l'ADEME), et avec un minimum de connaissances et d'observation, la plupart des communes pourraient aisément établir ce prédiagnostic simplifié de risque. Pour pallier l'insuffisance de connaissances géologiques, le BRGM a proposé de mettre à la disposition des communes un outil dit « ELDORADO » (élimination des décharges d'ordures ménagères) dans lequel les communes pourraient piocher pour remplir leur grille. Cet outil, proposé par le BRGM est depuis plusieurs mois dans l'attente d'une validation par l'ADEME.

3. L'intervention

Cette première phase de diagnostic est en principe suivie d'un plan  de résorption des décharges. Cette résorption peut prendre deux formes distinctes :

§ Le réaménagement. C'est la forme la plus simple qui consiste à fermer un site en le réintégrant dans son environnement, par des opérations de couverture, apport de terre, revégétalisation... Le coût d'une opération du réaménagement est de l'ordre de 15.000 € à 76.000 € (100.000 F à 500.000 F).

§ La réhabilitation. C'est la forme la plus élaborée, qui consiste à réparer les dégâts sur le milieu et prévenir les effets futurs, par des opérations d'enlèvement et de confinement des déchets, captage des lixiviats ou de biogaz... Les coûts sont beaucoup plus élevés, de l'ordre de 150.000 à 600.000 € (1 à 4 millions de francs).

Les réhabilitations sont précédées d'un diagnostic approfondi, qui nécessite donc de nouvelles études.

Les travaux restent de la compétence de la commune, mais sont aidés par le syndicat compétent sur les ordures ménagères et le Conseil général. Jusqu'en juin 2002, elles étaient aussi aidées par l'ADEME. L'ensemble des taux de cofinancement pouvant atteindre de 60 % à 80 %). Les demandes de subventions à l'ADEME, au titre de la réhabilitation des décharges brutes, qui peuvent représenter 20 à 30 % du coût total devaient être déposées avant juin 2002. Les demandes ne sont plus recevables depuis cette date et les projets de réhabilitation sont compromis (voir annexe suivante : l'exemple des Pyrénées Orientales).

Annexe 23 - DIAGNOSTIC ET RÉSORPTION DES DÉCHARGES DANS LES PYRÉNÉES-ORIENTALES

Source : audition de M. Denis NGUYEN - BRGM de Montpellier - Commentaire et analyse OPECST.

1. Le diagnostic

A la demande du syndical départemental des transports, traitement et valorisation des ordures ménagères - SYDETOM- des Pyrénées Orientales, le BRGM a établi en 2001 un diagnostic des décharges et dépôts dans le département qui s'établit comme suit :

- sites estimés 200

- sites inventoriés 403 (plus du double de l'estimation initiale)

- sites examinés 403

- sites diagnostiqués 188

- risques - impacts potentiels - élevés diagnostiqués 77

(un même site peut toutefois cumuler plusieurs risques en même temps)

. impacts eaux souterraines 16

. impacts eaux de surface 2

. impacts riverains 31

. impacts paysages 25

Ainsi, l'impact potentiel des décharges sur les eaux est faible. Il ne représente que le quart des risques jugés élevés, et ne concerne que moins de 10 % des sites diagnostiqués et 4 % des sites inventoriés.

2. Le plan de résorption des décharges

A la suite du diagnostic, un plan de résorption des décharges a été adopté en 2001. On observera que ce volet n'était pas prévu dans le premier plan départemental d'élimination des ordures ménagères, conclu en 1995, plus axé sur la collecte sélective des ordures ménagères que sur la préservation et la réhabilitation de l'environnement, deux préoccupations apparues plus récemment.

Les 188 sites diagnostiqués devraient donc être résorbés, 164 par des opérations de réaménagement, 24 par des opérations, plus lourdes, de réhabilitation : une première enveloppe de 17,2 millions de francs (2,62 millions d'euros) a été prévue pour les réaménagements. Cette première phase concerne surtout les principaux sites classés à impacts potentiels élevés pour les riverains et les paysages. Aucun des cinq premiers sites classés à risques pour les eaux souterraines n'a été sélectionné dans ce premier volet, les sites étant sélectionnés pour des réhabilitations.

La programmation financière de ces opérations, beaucoup plus coûteuse par unité a été subordonnée à la réalisation d'études complémentaires. Ce délai a eu un « effet cliquet » en supprimant une partie des cofinancements. En effet, selon les règles de l'ADEME, cofinanceur majeur (30-40 %) des opérations, les demandes de subvention par les communes devaient être déposées avant juin 2002. Compte tenu des délais d'études complémentaires et des délais administratifs, cette date butoir n'a pu être respectée. Les opérations restent subventionnables par le SYDETOM et le Conseil Général, mais la subvention de l'ADEME est désormais exclue.

Ainsi, au 1er janvier 2003, les principaux sites classés à impacts potentiels élevés pour les riverains et les paysages devraient être réhabilités prochainement tandis que les principaux sites classés à risques pour la qualité de l'eau ne seront réhabilités ... qu'ultérieurement. On ne peut que déplorer une situation où les principaux sites classés à risques pour les eaux souterraines sont aussi les sites pour lesquels les travaux seront, au mieux, retardés...

Règles de procédure et de calendrier, implication variable et arbitrages des élus en faveur d'autres réaménagements ont joué en défaveur des sites à risques pour les eaux. La protection des eaux n'est pas apparue prioritaire.

Annexe 24 - LES « DÉCHARGES RÉGLEMENTÉES » ET L'EAU SOUTERRAINE

La mise en décharge a été longtemps la solution de facilité, la moins coûteuse et la plus répandue, de traiter les déchets. Les décharges sont, depuis 1992, au centre de polémiques liées au traitement des déchets, et la situation en dix ans s'est radicalement transformée. Deux textes fondamentaux sont l'expression de ce bouleversement.

D'une part, la loi du 13 juillet 1992 a interdit la mise en décharge des déchets bruts en réservant les décharges aux seuls déchets ultimes dont on aurait tiré toutes les possibilités de valorisation (l'échéance fixée par la loi du 1er juillet 2002 n'a cependant pas été respectée). D'autre part, les arrêtés du 18 décembre 1992 et du 9 septembre 1997 réglementent étroitement les conditions d'exploitation des « centres d'enfouissement technique » (CET), appellation moins négative que « décharge ».

Les centres d'enfouissement technique (CET) sont divisés en trois catégories ou classes :

- la classe I, réservée aux déchets dits « spéciaux ou toxiques ».
Il existe douze CET en fonctionnement et un treizième est en construction.

- la classe II, réservée aux déchets ménagers et assimilés.
Le nombre d'installations autorisées est de l'ordre de 2.500.

- la classe III, réservée aux déchets inertes.

Ces décharges doivent respecter des prescriptions techniques rigoureuses. La protection de la qualité des eaux, notamment des eaux souterraines est au fondement même de cette réglementation. Tout a même été édifié pour que l'impact des déchets sur les eaux soit quasi nul ou réduit au minimum.

Un CET est un ensemble composé de casiers, indépendants, sur le plan hydraulique, eux-mêmes composés d'alvéoles, dans lesquelles sont entreposés les déchets. Les casiers sont entourés de digues étanches. L'étanchéité est assurée par superposition d'une « géomembrane » en mélange de fibres textiles en PEHD et de matériaux drainant. Les lixiviats sont récupérés, traités par lagunage puis envoyés en stations d'épuration ; l'ensemble est entouré d'une digue périphérique. La hauteur et la pente des digues, la distance des casiers par rapport à la limite de l'exploitation, les contrôles, etc..., sont réglementés. La durée d'exploitation est en général de vingt ans.

La catégorie de décharges susceptibles d'avoir l'impact le plus important sur les eaux souterraines sont les décharges pour déchets dangereux, dites décharges de classe I. La réglementation est alors très stricte, et de nombreuses dispositions sont prévues pour réduire au maximum l'impact potentiel :

- les déchets sont contrôlés à l'entrée. Les déchets liquides ne peuvent être admis en décharge,

- le terrain doit comporter une couche géologique imperméable d'une épaisseur d'au moins 5 mètres,

- une géomembrane est disposée en bordure et au fond des casiers pour arrêter les lixiviats,

- un réseau de drains est disposé au fond des casiers pour collecter les lixiviats,

- un système de suivi des eaux souterraines est mis en place.

Les décharges pour déchets non dangereux qui recouvrent les déchets ménagers et les déchets industriels banals suivent des prescriptions comparables, mais allégées (moindre épaisseur de la couche géologique impérissable, absence de test à l'entrée). En revanche, la répartition des casiers et leur équipement en géomembrane et drains est identique.

Les décharges de classe III n'ont aucune incidence sur les eaux souterraines puisque la qualité des déchets inertes est précisément établie sur ce critère.

Contrairement à l'opinion dominante, l'impact sur les eaux d'une décharge exploitée conformément à la réglementation est extrêmement limité. Les nuisances existent mais sont d'un autre ordre ; odeurs, envols de déchets ...

Annexe 25 - STATISTIQUES SUR LES PRÉLÈVEMENTS D'EAU

Source : Compte rendu d'activité de la police de l'eau - Année 2001 - Ministère de l'Ecologie et du développement durable - Année 2002

Répartition géographique des forages autorisés ou déclarés
destinés à l'irrigation agricole en 2001

Total recensé* 59 141

- Landes 7 809
- Pyrénées Orientales 7 000
- Bas-Rhin 4 414
- Haut-Rhin 4 103
- Charente-Maritime 3 342
- Côtes d'Armor 2 650
- Loiret 2 650
- Côte d'Or 2 000
- Tarn et Garonne 1 813
- Lot et Garonne 1 783

* sur les ¾ des départements, 25 départements
n'ayant pas donné de réponse

Evolution du nombre de dossiers de déclaration et d'autorisation
de forages instruits par les services déconcentrés de l'Etat

1999 2000 2001

1 207 1 443 1 993

DONNÉES STATISTIQUES SUR LES PRÉLÈVEMENTS D'EAU

Source : ministère de l'Écologie et du Développement durable.
Compte tendu d'activité de la police de l'eau et des milieux aquatiques, 2001. Commentaire OPECST

1. Les points de prélèvements :

En 2001, il a été recensé 36 171 points de prélèvements d'eau destinée à la consommation humaine, et 90 764 points de prélèvements hors eau potable (prélèvements et pompages des eaux souterraines et des eaux de rivière). Malgré une évaluation récente, cette seconde évaluation paraît cependant sous-estimée et la situation des prélèvements d'eau reste mal connue.

L'évaluation reprend en effet les données transmises par les différents services de l'Etat chargés d'assurer la police de l'eau dans les départements, ce qui suppose que les données soient connues, fidèles et transmises, ce qui est loin d'être toujours le cas.

D'une part, la connaissance des prélèvements est très inégale selon les départements et régions. En Aquitaine et en Alsace, les données paraissent relativement bien suivies (avec respectivement 17 710 et 12 484 captages), tandis que la situation des prélèvements est pratiquement ignorée en Basse Normandie en Rhône-Alpes et en Bretagne (à l'exception des Côtes-d'Armor, classée pour l'essentiel en « zone de répartition »). On observera ainsi qu'en 2001, 25 départements n'avaient fourni aucune indication sur le nombre de prélèvements déclarés.

Même lorsque le nombre de déclarations et autorisations est communiqué, ce chiffre est loin de correspondre au nombre de prélèvements réels : d'une part, beaucoup de prélèvements échappent à toute obligation (voir l'annexe précédente, consacrée au régime juridique des forages) ; d'autre part, même quand cette obligation existe, elle est rarement respectée. La situation dans le département de l'Hérault illustre parfaitement ce « décalage » - euphémisme - entre la situation telle qu'elle est connue et recensée par l'administration centrale (0 prélèvement comptabilisé) et la réalité du terrain. Sur le seul bassin de l'Astien, qui ne couvre qu'une partie du département, près de 700 forages ont ainsi été recensés au cours d'une enquête hydrogéologique ; zéro prélèvement comptabilisé pour 700 forages effectifs...

Un tel décalage permet d'avoir de sérieux doutes sur la qualité des évaluations. L'incertitude est encore plus grande s'agissant des quantités prélevées.

2. Le suivi des quantités prélevées :

Sur la base de ces données, partielles, pratiquement la moitié (46 %) des prélèvements connus (déclarés ou autorisés) sont à usage agricole. Malgré une amélioration récente, les taux d'équipement en compteurs des points de captage agricole reste faible (52% en moyenne) et surtout très inégal selon les départements. Un tiers seulement des départements ont plus de 60% des captages équipés de compteurs. Dans deux départements (54 et 87), aucun point de prélèvement n'est équipé d'un compteur ! De même que 25 % des départements n'avaient pas fait remonter d'informations sur le nombre de prélèvements, il faut également noter que la situation est pire encore s'agissant des contrôles des compteurs puisque 33% des services départementaux de l'Etat n'ont fait remonter aucune information sur le degré d'équipements en compteurs...

Points de prélèvements en France

Prélèvements d'eau destinés à la consommation humaine

36 171

Prélèvements d'eau déclarés ou autorisés. non destinés à la consommation humaine


90 764

Total des prélèvements connus

126 935

Prélèvements à usage agricole en eaux souterraines

59 141

Prélèvements à usage agricoles en rivières

30 938

INSTRUCTION DES DOSSIERS DE DÉCLARATION ET D'AUTORISATION

 

1999

2000

2001

Prélèvements, cas général

4 851

4 984

4 673

Prélèvements en zone de répartition

8 323

10 866

8 585

Prélèvements dans les cours d'eau bénéficiant d'un soutien d'étiage > 50 %

43

22

2 900

Sous total prélèvements

13 217

29 089

16 158

Prélèvements dans les eaux souterraines

1 207

1 443

1 913

Annexe 26 - LE RÉGIME JURIDIQUE DES FORAGES DESTINÉS AUX PRÉLÈVEMENTS D'EAU

Le régime juridique des forages d'eau repose sur la distinction entre le droit de propriété et le droit d'usage du sous-sol. Selon le principe fixé par l'article 552 du Code civil, « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. (Le propriétaire) peut faire au-dessous toutes les constructions qu'il jugera à propos ». Ainsi, le propriétaire du sol est également propriétaire du sous sol. En revanche, le droit d'usage est principalement réglementé comme suit :

- le code minier fixe le cadre général des forages en distinguant les forages profonds ou peu profonds (moins de 10 mètres). L'article 131 dudit code dispose que « toute personne exécutant un ouvrage souterrain dont la profondeur dépasse 10 mètres au-dessous de la surface du sol doit le déclarer ». La déclaration doit être faite à la DRIRE (direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement);

- le code de l'environnement réglemente les prélèvements d'eau réalisés à des fins non domestiques. La réglementation s'applique aux forages d'eaux souterraines et aux prélèvements des eaux de surface. Selon les articles L.214-1 à 4 dudit code, reprenant l'article 10 de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992, les installations, ouvrages, travaux entraînant des prélèvements d'eau sont soumis à autorisation ou déclaration. Le passage d'un régime à l'autre, fixé par le décret n°93-743 du 29 mars 1993, est fonction du débit et de la vulnérabilité des zones dont certaines imposent « des mesures permanentes de répartition quantitative » ;

- les formalités et procédures à suivre pour obtenir l'autorisation ou déclarer un prélèvement d'eau sont déterminées par le décret n° 93-742 du 29 mars 1993. Les demandes et déclarations sont formulées en préfecture. L'autorisation est délivrée, après enquête publique, par les services de l'Etat, la Direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF), dans la plupart des cas, sauf exception dans certains départements, où la compétence relève de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS). L'inobservation de ces dispositions est punie d'une peine d'amende prévue pour les contraventions de 5ème classe à savoir une amende maximale de 1 500 € ;

- les distinctions selon le débit et la vulnérabilité des zones sont précisées par le décret n°93-743 du 29 mars 1993. Les installations permettant un prélèvement supérieur ou égal à 80 m3/heure sont soumises à autorisation. Les installations permettant un prélèvement compris entre 8 et 80 m3/heure sont soumises à déclaration. Ces seuils sont abaissés dans les « zones de sauvegarde de la ressource »  dites aussi « zones de répartition des eaux » : l'autorisation est alors requise dès que le prélèvement dépasse 8 m3/heure et tous les autres forages sont soumis à déclaration. Le décret n° 94-354 du 29 avril 1994 précise ces différentes « zones de répartition des eaux ». Trois bassins (Adour-Garonne, Loire-Atlantique, Rhône-Méditerranée-Corse) sont, en tout ou partie, concernés.

D'autres textes viennent en complément, notamment un décret n° 96-626 du 9 juillet 1996, relatif aux aménagements hydrauliques des cours d'eau et un décret-loi du 8 août 1935 applicable à certaines localités mais tombé en désuétude.

Les autres forages, destinés aux prélèvements à usage domestique, ne sont pas réglementés et sont donc libres. Conformément à l'article 3 du décret 93-743 précité, « Constituent un usage domestique de l'eau, les prélèvements destinés exclusivement à la satisfaction des besoins des personnes physiques propriétaires ou locataires des installations (...) dans la limite des besoins nécessaires à l'alimentation humaine, aux soins d'hygiène, au lavage et aux productions végétales ou animales réservées à la consommation familiale de ces personnes ». Les autres prélèvements, professionnels ou à usage non domestique inférieurs à 40 m3/jour (1,66 m3/heure) sont assimilés à des prélèvements domestiques.

L'ensemble de ces dispositions peut être résumé dans le tableau simplifié ci après :

Régime juridique des forages d'eau


Usages

Usages domestiques

   
   

Usages non domestiques

Débit

Profondeur

40 m3/j 8 m3/h 80 m3/h

Cas général

Libre

Libre

D

A

- 10 mètres

 

 

 

 

Zone de répartition

Libre

D

A

A

Cas général

D

D

D

A

+ 10 mètres

 

 

 

 

Zone de répartition

D

D

A

A


Légende : D : déclaration ; A : autorisation Source : code minier, code environnement, décret n° 93-743 ; synthèse OPECST

Annexe 27 - SCHÉMAS DE POLLUTION DES EAUX SOUTERRAINES PAR LES FORAGES

Source : Syndicat national des entrepreneurs de puits et forages d'eau - Charte de qualité de puits et forages d'eau.

Un forage n'est pas un simple trou qui permet de puiser l'eau souterraine. La moyenne des forages utilisés pour les prélèvements d'eau se situe entre 200 et 300 mètres de profondeur (quelques uns vont jusqu'à 600 mètres). La cavité est aménagée avec un tubage intérieur, associé par éléments raccordés de façon étanche. L'étanchéité par rapport à l'environnement extérieur est également assurée par la cimentation des parois, qui occupe donc l'espace situé entre le tubage et la cavité (dit « espace annulaire »). Au fond du puits, une crépine permet de filtrer l'eau et de capter le meilleur débit possible.

Un forage mal réalisé, mal entretenu et abandonné sans précaution constitue une source potentielle de pollution des nappes souterraines. Les schémas ci-dessous illustrent les différentes situations à risques les plus couramment rencontrées :

- forage mal cimenté laissant passer les polluants le long de l'espace annulaire (espace entre le diamètre du forage et le tube utilisé par le prélèvement) générant un drain vertical et un écoulement continu ;

- forage percé ou raccordement non étanche entre élément de tubage, laissant passer les polluants directement à l'intérieur du tube ;

- forage abandonné sans précaution, ouvrant ainsi une voie directe de pollution des nappes inférieures par les nappes supérieures.

Annexe 28 - DONNÉES STATISTIQUES SUR LES ABANDONS DE CAPTAGE

Il n'existe pas de données nationales sur les abandons de captage. Les données sont normalement collectées par les DDASS et peuvent être regroupées par les agences de l'eau, mais les mobilisations sont variables selon les régions (une tentative de recensement par l'agence de l'eau RMC, au milieu des années 90, a été interrompue, faute de mobilisation suffisante des services de l'État). D'après les données disponibles auprès des agences de l'eau, on peut estimer le nombre de fermetures annuelles à une centaine, 95 % concernant les eaux souterraines.

Les causes d'abandon de captage sont multiples, mais sont principalement liées à la dégradation de la qualité des eaux prélevées, devenues inaptes à la production d'eau potable, et aux difficultés rencontrées pour protéger les captages. Les données ci-après qui concernent un bassin particulier et une année déterminée présentent un éventail des causes d'abandon.

Causes de fermeture des captages
(bassin Loire-Bretagne - 1997 - 55 fermetures)

Qualité

( %)

Qualité bactériologique

34

Teneur excessive en nitrates

27

Teneur excessive en pesticides

11

Turbidité excessive

5

Captage difficile ou impossible à protéger

27

Débit insuffisant

16

Autres (proximité de rejets, agressivité de l'eau, etc.)

13

Source : SDAGE Loire Bretagne 2000

Les fermetures devraient se poursuivre et même, probablement, se multiplier dans un proche avenir, notamment lorsque la protection des captages s'avère impossible. Dans le bassin Artois-Picardie, 514 captages ont déjà été abandonnés. Sur les 1206 captages actifs, 181 sont « dans une perspective d'abandon ». Au total, 695 captages seraient ainsi abandonnés, soit 40 % du nombre total de captages !

Situation des captages en Artois-Picardie (2002)

Département

Captages abandonnés

Projets d'abandon

Captages actifs

Captages en projet

Aisne

23

5

58

2

Nord

133

34

354

27

Pas-de-Calais

230

90

371

28

Somme

128

52

242

10

Total

514

181

1025

67

Source : Agence de l'eau Artois-Picardie

Les fermetures, jusque là plus ou moins laissées à l'initiative des autorités locales, devraient même être imposées par l'État. Tel est le sens d'une initiative du préfet du Pas-de-Calais demandant, en avril 2002, à certains maires du département de « prendre une délibération pour statuer sur l'abandon définitif de (leur) ressource en eau dans un délai de trois ans et d'envisager la recherche d'une nouvelle ressource ». Cette décision est fondée sur le fait que « la ressource souterraine alimentant la population en eau potable ne peut bénéficier de la protection des captages prévue par l'article L.1321-2 du Code de la santé publique pour les raisons suivantes :

- la ressource ne bénéficie pas d'une protection naturelle suffisante et présente une vulnérabilité importante vis-à-vis des pollutions éventuelles ;

- la ressource est « non protégeable » du fait de son environnement immédiat (zone urbanisée ou à urbanisation future) ;

- la ressource montre une dégradation constante de la qualité microbiologique et/ou physico-chimique. Il ne peut donc être envisagé la pérennisation d'une ressource dont la qualité est déjà mauvaise » (avec des teneurs en nitrates parfois supérieures à 100 mg/l).

Cette disposition concerne 54 communes, soit 6 % des 894 communes que compte le département, parmi lesquelles les villes d'Arras, Lens et Liévin. Les fermetures annoncées portent sur 54 captages, soit 15 % des 354 captages du département...

Annexe 29 - LES GOLFS ET L'EAU

Source : Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse - Synthèse et commentaire OPECST.

Le golf impose une grande qualité de gazon et par conséquent, des conditions d'arrosage ou d'irrigation particulières. Le développement important des golfs dans les années 80, associé à des périodes de sécheresse (1990-1991) a pu générer des craintes et des conflits d'usages avec d'autres utilisations de la ressource en eau (irrigation agricole, voire alimentation en eau potable dans les régions très touristiques). Une étude a été conduite à ce sujet par l'Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse - RMC, en 1992. Les données sont un peu anciennes mais sont des repères utiles. La Fédération française de Golf est très discrète sur ce sujet.


1. Présentation générale

En 2002, on compte 531 golfs, toutes catégories confondues (9, 18, 27, 36, 45 et 54 trous, golfs « rustiques » et « haut de gamme »...), à l'exception des golfs dits « compacts » ne disposant que de quelques trous (35 terrains).

L'augmentation très rapide constatée dans les années 80 (avec un triplement du nombre de parcours en dix ans, entre 1982 et 1991) s'est ralentie dans les années 90. Les golfs sont de gros consommateurs d'eau, principalement en raison de l'arrosage et l'irrigation des parcours. La quantité d'eau utilisée est fonction de deux types de paramètres :

- les paramètres physiques et climatiques... Il s'agit du type de sol (un sol sableux draine l'eau et ne permet pas aux végétaux de pousser, un sol argileux est imperméable et noie les racines), de la pluviométrie naturelle, et de l'évapotranspiration (c'est-à-dire la transpiration du sol et des plantes) liée à l'ensoleillement et à l'humidité de l'air ;

- des options de gestion, qui permettent de distinguer notamment les golfs dits « haut de gamme » et les golfs dits « rustiques » qui ne visent ni les mêmes objectifs (les premiers sont destinés aux compétitions, les seconds au sport de proximité et à l'apprentissage), ni la même clientèle, et qui ne requièrent ni les mêmes exigences (terrassement, esthétique...) ni le même entretien... Ce positionnement (haut de gamme rustique) se traduit par des différences de consommation d'eau très importantes : un golf haut de gamme irrigue plus de surfaces et irrigue aussi davantage. Plus un gazon est coupé court, plus il a besoin d'eau. Les golfs haut de gamme sont également équipés d'un réseau de drainage sophistiqué, qui permet d'arroser massivement sans risque de stagnation des eaux (tout aussi dommageable qu'un manque d'eau). Ainsi, la recherche esthétique, les équipements favorisent la surconsommation d'eau.

2. Résultats

Pour les raisons expliquées ci-dessus, il existe de très grandes différences selon les golfs, rendant hasardeux l'établissement de moyennes. Par ailleurs, la plupart des statistiques suivantes ont été établies en 1992, sur les sites du périmètre de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse et les extrapolations sont par conséquent sujettes à caution. Quelques repères méritent pourtant d'être rappelés :

§ l'arrosage porte sur une surface variable (entre 1 et 100 %). Un golf haut de gamme irrigue en moyenne la moitié de sa surface (30 ha sur une surface moyenne de 65 ha pour un 18 trous), tandis qu'un golf rustique n'en irrigue que moins de 15 % (4 ha sur une superficie moyenne de 32 ha). Sur un échantillon de 59 golfs haut de gamme :

2 % n'arrosaient que les « greens » (surface à herbe rase où se trouve le trou)

15 % arrosaient les « greens » et les « tees » (air de départ du jeu)

36 % arrosaient également les « fairways » (pistes) et les « practices » (parcelle réservée à l'initiation)

27 % arrosaient en plus les « roughs » (reste du décor autour des pistes de jeu).

§ plus de la moitié des golfs haut de gamme (de la région Rhône Méditerranée Corse) surarrosaient leurs terrains.

La dose théorique nécessaire à l'entretien du parcours est calculée comme suit :

D = ETP = évaporation transpiration
P précipitation

Sur un échantillon de 27 golfs haut de gamme, plus de la moitié des golfs arrosait plus de deux fois la dose théorique (un golf arrosait même quinze fois plus que la dose théorique).

La répartition s'établissait comme suit :

= dose théorique 15 %

de 1 à 2 fois la dose 29 %

+ de 2 fois la dose 56 %

+ de 3 fois la dose 23 %

+ de 5 fois la dose 12 %

§ La quantité d'eau rapportée à l'hectare, varie dans une fourchette de 1 à 1 000 ;

Le volume d'eau utilisé pour l'irrigation des golfs haut de gamme varie entre 300 et 300.000 m3/ha, la moyenne est de 13.000 m3/ha. Un golf haut de gamme de 18 trous a une consommation moyenne de 5.000 m3/jour, ce qui correspond à la production nécessaire à la satisfaction des besoins d'une collectivité de 12.000 habitants.

Le volume d'eau utilisé par les golfs rustiques est en moyenne de 3.800 m3/ha.

Le prélèvement moyen, tous golfs confondus, est estimé à 6.800 m3/an (données actualisées en 1995) ou plutôt 6.800 m3/sur six mois (puisque l'irrigation n'a lieu en pratique que pendant six mois).

La consommation totale de 107 golfs identifiés en 1995 dans le périmètre de l'agence RMC est estimée à 7,5 millions de m3/an, soit la consommation annuelle d'une ville de 120.000 habitants.

En extrapolant les données 92-95, on peut estimer la consommation totale d'eau liée à l'irrigation des golfs en 2002 à 36 millions de m3, soit la consommation annuelle d'une ville de 500.000 habitants.

§ D'où vient l'eau utilisée pour l'irrigation ?

Pour assurer ces arrosages, plus de la moitié des golfs ont recours à des équipements autonomes (forages privés, accès à la rivière ou aménagements de retenues d'eau ...).

La répartition de l'origine de l'eau s'établit comme suit :

Répartition de l'origine de l'eau d'irrigation des golfs

- Installations propres au golf 53 %
dont forages eaux souterraines 20 %
retenues - lacs 19 %
rivières 14 %

- Installations réseaux collectifs 38 %
eau d'irrigation 18 %
alimentation en eau potable 17 %
réutilisation des eaux usées 3 %

- Origines diversifiées 9 %

Total 100 %

3. Les conflits d'usage

Au total, les consommations d'eau sont importantes. Bien qu'ils soient concentrés sur six mois de l'année, ces prélèvements ne génèrent pourtant que peu de conflits d'usage. Lors de l'étude de 1992, 8 golfs seulement sur 53 avaient fait état de conflits d'usage.

Des voies nouvelles méritent d'être recherchées afin de soulager la pression sur la ressource naturelle en eau. Il est tout d'abord impératif d'améliorer la connaissance. Le comptage des prélèvements d'eau doit être obligatoire et doit être vérifié.

Ensuite, des voies semblent encore insuffisamment explorées. C'est le cas de la réutilisation des eaux usées (REU) pratique parfaitement courante, voire systématique dans certains Etats des Etats-Unis (Californie, Arizona, Texas...), mais encore très peu développée en France (dans l'étude de l'agence RMC en 1992, 3 % seulement des golfs avaient recours à cette pratique).

Annexe 30 - INCIDENCE DE L'ENNEIGEMENT ARTIFICIEL SUR LA RESSOURCE EN EAU

Source : Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse

La pratique de l'enneigement artificiel ne cesse de progresser. Destinée au départ à compenser le manque de neige naturelle dans les stations de basse et moyenne altitudes, elle constitue aujourd'hui un important argument commercial permettant de garantir la neige dans le domaine skiable et le retour des skieurs « au pied des pistes ». Cette neige artificielle est fabriquée à partir de prélèvements d'eau, susceptibles de provoquer à terme des conflits d'usage. Cette problématique nouvelle a été étudiée par l'Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, dont le périmètre recouvre 162 stations alpines de sports d'hiver.


1. L'équipement

80 % des stations de sports d'hiver alpines sont aujourd'hui équipées de canons à neige. L'eau prélevée est issue de cours d'eau, des nappes, de lacs artificiels créés par des retenues collinaires et du réseau d'eau potable. L'enneigement artificiel représente un prélèvement d'eau de l'ordre de 10 millions de m3 d'eau par an, soit l'équivalent de la consommation d'eau d'une ville de 170.000 habitants (en prenant en compte un ratio de 60 m3/habitant/an). Ces données sont récapitulées ci-après :

Nombre de stations recensées 162
Nombre de stations renseignées 138
Nombre de stations équipées 119
Taux d'équipement 86 %

119 stations sont équipées. Le nombre d'équipements est de 141 dans la mesure où une station peut recourir à des sources d'eau différentes. Les surfaces enneigées représentent en moyenne 15 % de surfaces skiables, avec des variations de 5 à 60 % selon les stations. Les proportions devraient augmenter. L'enneigement artificiel correspond à un ratio de 4 000 m3 à l'hectare, soit une quantité très supérieure à l'irrigation de maïs (1 700 m3 à l'hectare en Isère) et voisine de l'irrigation en arboriculture provençale.

Répartition des équipements d'enneigement artificiel

type d'équipements

Nombre d'équipements

%

Volumes prélevés

Prélèvements directs (eaux de surface ou eaux souterraines)

37

26 %

3 millions de m3

Prélèvements à partir de retenues d'eau

70

50 %

5 millions de m3

Prélèvements à partir du réseau eau potable et autres

34

24 %

2 millions de m3

Total

141

100 %

10 millions de m3

2. La pression sur la ressource

Les prélèvements pour enneigements artificiels sont concentrés sur une courte période de l'année où la ressource en eau est à la fois sollicitée et fragilisée par l'afflux touristique (demande en eau potable et rejets d'eaux usées qui peuvent être multipliés par dix), et réduite (période d'étiage).

La pression sur la ressource a été calculée à partir du ratio P/R (P correspond au débit lié à l'enneigement et R correspond au débit à l'étiage). Les calculs ont été effectués sur 88 stations, en janvier. La pression sur la ressource en eau est inférieure à 10% dans 61% des cas, comprise entre 10% et 50 % dans 31% des cas, et supérieure à 50% dans 8% des cas.

Ainsi, dans la majorité des cas, la pression due à l'enneigement est faible ou modérée et n'entraîne donc pas de conflits d'usage. Cependant, quelques difficultés peuvent apparaître dans les communes situées en aval qui doivent à la fois subir les prélèvements d'eau et les rejets des eaux usées des communes en amont. En 2001, une commune de Haute Savoie a été confrontée à une dégradation sensible de la qualité de ses eaux de consommation, liée aux pratiques des communes « amont ». Les prélèvements d'eau pour enneigement ont dû être stoppés.

Un incident, encore unique, mais qui doit attirer l'attention. Si le nombre de stations équipées devrait se stabiliser, il faut prévoir un renforcement des taux d'équipement et un plus grand recours aux équipements actuels dans les stations déjà équipées. Cette pression nouvelle doit donc être surveillée. Cet impact éventuel sur la distribution d'eau des communes en aval n'est pas pris en compte par les gestionnaires de stations et cette incidence pour la santé doit être surveillée par les autorités locales et les autorités déconcentrées de l'Etat.

Annexe 31 - LES DISPOSITIONS DE L'ANCIEN PROJET DE LOI SUR L'EAU RELATIVES AUX PRÉLÈVEMENTS D'EAU

Le projet de loi sur l'eau (projet de loi n° 3205, onzième législature portant réforme de la politique de l'eau) présenté par le précédent gouvernement contenait quelques dispositions sur les forages et les prélèvements d'eau.

L'article 48 visait à protéger l'eau potable dans les « zones de sauvegarde de la ressource », prévues à l'article 211-3 du code de l'environnement. Il prévoyait que, dans ces zones, des mesures pour préserver la qualité des eaux pourraient être prescrites afin de réduire « la concentration de polluants résultant de l'activité humaine ».

La rédaction trop générale de cet article ne pouvait que créer des difficultés d'interprétation et d'application.

L'article 49 était destiné à modifier les conditions de calcul des prélèvements d'eau, afin de « tenir compte des effets cumulés d'opérations simultanées ou successives pour la soumission du régime d'autorisation ».

Le clivage déclaration/autorisation repose sur le débit du forage. Plusieurs forages modestes, inférieurs à 80 m3 /h, permettent donc de rester dans le régime déclaratif et d'éviter l'autorisation. Le précédent projet de loi sur l'eau comportait une disposition visant à cumuler les prélèvements opérés par un même propriétaire.

Ainsi, lorsqu'un exploitant souhaite procéder à plusieurs forages ou prélèvements d'eau, l'administration devait prendre en compte les effets cumulés pour savoir si le régime de l'autorisation (applicable à partir de 80 m3/jour de débit) devait s'appliquer, le but de cette précision étant d'éviter le contournement des procédures d'autorisation par un morcellement des opérations.

L'article modifiait donc une disposition déjà très mal appliquée en raison de sa complexité et de l'engorgement des services.

L'article 50 visait à apporter des compléments aux procédures d'autorisation et de déclaration et précisait qu'en cas de déclaration, l'administration aurait disposé d'un délai de trois mois pour s'opposer aux travaux.

L'article 51 prévoyait que les autorisations pourraient préciser les conditions de remise en état du site, une fois l'opération achevée.

On regrettera que le cas des abandons de forage et les conditions de fermeture des forages n'aient pas été davantage précisées et rendues systématiques.

Annexe 32 - LA DÉNITRIFICATION NATURELLE

Source : Joël Michelin, maître de conférences à l'Institut agronomique de Paris-Grignon - Synthèse OPECST

La dénitrification consiste à éliminer les nitrates présents dans un élément, en l'occurrence l'eau. L'élimination a lieu par la transformation des nitrates en gaz inerte. Le processus peut s'opérer de façon naturelle. Il a été mis en évidence à plusieurs reprises par l'observation et l'analyse des mesures en nitrates dans l'eau dans des sites voisins, appartenant au même bassin versant. L'eau, arrosant une surface occupée par de grandes cultures, était drainée pour moitié vers une rivière, et pour moitié vers une nappe captive située sous les tourbes (mélange de terre et de matières organiques) d'une zone humide. Les teneurs de l'eau en nitrates étaient de deux à cinq fois moins importantes dans les eaux des tourbes que dans la rivière, suggérant donc l'existence d'un phénomène naturel de dénitrification dans la zone humide.

L'analyse a permis de comprendre le processus au fond assez simple, mais fragile.

1. Le processus

a) Le processus chimique

Le principe est simple : les nitrates sont une synthèse d'azote, d'ammoniaque et d'oxygène (attention, il faut distinguer l'ammoniac qui est un gaz et l'ammoniaque qui est soluble). La forme chimique est un atome d'azote (N) et trois atomes d'oxygène (O3) : NO3. La dénitrification va consister à enlever progressivement les atomes d'oxygène afin de parvenir à une forme gazeuse, neutre, l'azote présent dans l'air N2 (sans oxygène).

Cette diminution se présente donc simplement comme suit :

NO3 (1 atome d'azote, 3 atomes d'oxygène) = nitrates (NO3-)

NO3 -1 atome d'oxygène = NO2 (1 atome d'azote, 2 atomes d'oxygène) = nitrites (NO2-)

NO2- 1 atome d'oxygène = NO ou N2O (1 ou 2 atomes d'azote, 1 atome d'oxygène) = Oxyde d'azote ou dioxyde d'azote

NO ou N2O - 1 atome d'oxygène = N ou N2 - azote ou diazote : gaz inerte présent dans l'air.

b) Les bactéries dénitrifiantes

Cette diminution d'oxygène va s'opérer par l'intermédiaire d'organismes vivants, des bactéries qui ont besoin d'oxygène pour leur propre respiration. Une bactérie vivant sur un substrat soufré a d'étonnantes facultés dénitrifiantes : la thiobacilus denitrificans. La bactérie utilise l'oxygène des nitrates et réduit ces derniers en azote gazeux.

Le processus de dénitrification a donc lieu lorsque la bactérie se trouve en présence de nitrates dans un milieu par ailleurs très pauvre en oxygène. Plus le milieu est pauvre en oxygène, et plus les bactéries vont trouver l'oxygène qui leur manque dans les nitrates. Cette situation se retrouve dans les zones humides où l'eau stagnante accumule les matières organiques en décomposition, grosses consommatrices d'oxygène, notamment les tourbes. Certaines plantes telles que la luzerne sont également propices à cette dénitrification naturelle.

2. Limites du phénomène

Le processus est relativement simple à analyser. La mesure et le temps du phénomène sont plus difficiles à déterminer, mais surtout le processus est fragile et pas exempt d'effets pervers.

a) La dénitrification naturelle suppose que certaines conditions soient réunies

Il faut que l'oxygène soit rare. C'est le fondement même du processus : les bactéries consomment l'oxygène des nitrates parce qu'elles ne le trouvent pas ailleurs. En milieu aérobique (avec de l'air), le processus de dénitrification s'arrête. C'est le cas lorsque la pression sur les nappes est trop forte : des prélèvements trop importants font baisser le niveau des nappes et peuvent changer la nature de la nappe, qui cesse d'être captive en retrouvant un contact avec l'atmosphère. Tout apport d'oxygène freine la dénitrification.

- Il faut aussi que l'alimentation en eau ne soit pas trop abondante. Quand il pleut beaucoup, l'aquifère ou la zone humide reçoivent une grande quantité d'eau, chargée en oxygène. Les bactéries trouvent alors dans l'eau l'oxygène qui leur manque. La dénitrification est donc sujette aux variations saisonnières : le processus est beaucoup moins efficace en hiver. Pour que le système fonctionne, la vitesse d'écoulement de l'eau ne doit pas être supérieure à la vitesse de dénitrification naturelle.

- Les bactéries dénitrifiantes sont également fragiles et peuvent être inhibées par un apport de toxiques issu des pesticides (lindane par exemple).

- Enfin, évidemment, l'apport en nitrates ne doit pas être trop abondant. Les bactéries sont inopérantes lorsque la charge en nitrates est excessive.

b) Le processus n'est pas non plus exempt d'effets pervers

En premier lieu, les bactéries dénitrifiantes vivent aussi sur un substrat soufré. La dénitrification s'accompagne d'une acidification de l'eau due au rejet de gaz carbonique et de sulfate par les bactéries.

En second lieu, le processus de dénitrification passe par différentes phases. La phase finale conduit à un gaz inerte (N2). Mais les phases intermédiaires conduisent à la formation d'oxydes d'azote (NO et N2O), qui, eux, sont des gaz à effet de serre importants. Le processus doit donc être poursuivi jusqu'à son terme, et ne doit pas s'arrêter en cours.

La dénitrification naturelle doit donc être accompagnée, gérée, entretenue. L'aménagement de zones humides est loin d'être un simple retour à la nature, et suppose une gestion attentive de la part de la collectivité.

Annexe 33 - LES RÉSEAUX DE MESURE DE QUALITÉ DES EAUX SUPERFICIELLES

Source : IFEN / Agence de l'eau Seine-Normandie/Agence de l'eau Loire-Bretagne

1. Organisation générale

- Le réseau national de bassins (RNB) : Il comprend 1 700 points d'observation censés être représentatifs. Il a une vocation de connaissance générale et à long terme, de la qualité des eaux superficielles. Les données seront intégrées dans un « réseau national des données sur l'eau » - RNDE.

- Les réseaux complémentaires de bassins (RCB) : Ils ont la même vocation que le RNB (connaissance générale), mais ils sont réalisés en partenariat avec les départements, sur des cours d'eau localement importants

- Les réseaux d'usage : Il s'agit de contrôles de qualité, sur les points de prélèvement d'eau destinée à la fabrication d'eau potable. On rappellera que les prélèvements d'eau en rivière destinés à l'eau potable ne représentent que 5 % du nombre total de points de captage destinés à l'eau potable, mais 40 % du volume de l'eau utilisée pour la consommation alimentaire

- Les réseaux locaux : Réalisés à l'initiative de certaines collectivités, lorsque les cours d'eau ou la situation géographique justifient une surveillance particulière (eau du littoral, eaux de baignade, etc.).

- Les réseaux dédiés : Ils sont spécifiques à certains paramètres, en fonction des circonstances locales. Il y a, dans ce domaine, une très grande diversité. Pour le bassin Seine-Normandie, par exemple, certaines stations sont spécialisées dans les micropolluants organiques (pesticides et HAP), dans les eaux de surface ou dans les sédiments/les seuls pesticides/les métaux sur sédiments/la chlorophylle/l'hydrométrie (suivi des débits)/l'hydrologie (suivi des populations piscicoles)/les eaux du littoral, etc. EDF a également un suivi réglementaire de la qualité du milieu en amont et en aval des centrales nucléaires.

Le bassin Loire-Bretagne présente une situation analogue avec d'autres spécificités, comme indiqué dans le tableau suivant.

2. La connaissance de la qualité des cours d'eau : l'exemple Loire-Bretagne

Fiche descriptive des réseaux

Nom

Objet

Nombre

Opérateur

Coût annuel
(millions d'euros)

Réseau national de bassin (RNB)

Connaissance générale des cours d'eau

232

État (DIREN/ Navigation) Laboratoires agréés
Bureaux d'étude

1 250 000

Réseaux complémentaires
de bassins (RCB)

Connaissance générale des réseaux locaux

458

État (DIREN/DDE/
DDAF/DDASS) Conseils généraux Laboratoires agréés
Bureaux d'étude

1 107 000

Réseau santé

Aptitude à la potabilité des eaux

np

État/DDASS

np

Réseaux complémentaires régionaux-pesticides

Contamination des eaux aux pesticides

121

Associations,État (services variables
selon les régions)

360 000

Réseaux d'impact Micropolluants

Impact des micropolluants

45

État (DIREN)
Bureaux d'étude

23 000

Plan et zone d'action renforcée (PAR-ZAR)

Suivi de la reconquête de qualité sur certains cours d'eau

np

État (DIREN)
Laboratoires spécialisés
Bureaux d'étude

51 000

Réseau hydrologique piscicole

Connaissance du peuplement piscicole sur fleuves et rivières

165

Conseil supérieur de la pêche

650 000

BEP
Bretagne eau pure

Impact des actions de maîtrise de pollution

1 000
(à terme)

Libre choix de la collectivité

270 000

TOTAL

     

3 711 000

Mesures réalisées par les différents réseaux

 

Macropolluants

Micropolluants

   
 

Nitrates/
Phosphates

Autres

Minéraux

Organiques non pesticides

Pesticides

Hydro-
biologie /
Bactériologie

Faune

RNB Stations macropolluants

x

x

         

RNB Stations micropolluants

   

x

x

x

   

RNB Stations hydrobiologie

         

x

 

Réseaux départementaux complémentaires

x

x

x

   

x

 

Réseaux complémentaires régionaux (pesticides)

       

x

   

Réseaux d'impact micropolluants

   

x

 

x

   

PAR-ZAR

x

x

     

x

 

Réseau hydrobiologie/ piscicole

           

x

BEP

x

     

x

   

Soit au total :

2 000 stations dans 10 réseaux différents
11 opérateurs différents sollicités :
- État : DIREN ou DDE ou DDAF ou DDAS ou SRPV ou CQEL...
- Conseils généraux : bureau qualité de l'eau/mission d'assistance
- Collectivités locales

- Structures associatives : FREDEC - CREDES - Groupe régional pour l'étude de la pollution de l'eau et des sols par les produits phytosanitaires
- privé : Bureaux d'étude - Laboratoires...

pour un coût annuel de 3,7 millions d'euros.

Annexe 34 - LES OBJECTIFS DE LA DIRECTIVE CADRE CONCERNANT LES EAUX DE SURFACE

Source : présentation de M. Louis-Charles OUDIN, Responsable du département « Milieux » - Agence de l'eau Loire Bretagne

La directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, dite directive cadre, fixe deux objectifs pour les eaux de surface, à l'échéance 2015 : atteindre un bon état écologique et un bon état chimique.

1. L'objectif écologique

a) Les critères

L'état écologique d'un cours d'eau est déterminé à partir de deux critères : les éléments physico-chimiques et la qualité biologique.

La qualité physico-chimique est évaluée avec trois éléments :

- les macro-polluants : il s'agit de la pollution classique. Ces macro-polluants ne deviennent gênants qu'à fortes doses : matières ou suspension (MES), nitrates, température, acidité, etc.

- les micro-polluants minéraux (métaux lourds : mercure, cadmium, plomb...). A la différence des macro-polluants, les éléments constituant les micro-polluants sont polluants à très faibles doses, y compris sous forme de traces. On appelle d'ailleurs les métaux lourds « éléments trace métallique » - ETM -. Ces polluants sont d'origine naturelle et/ou anthropique.

- les micro-polluants synthétiques : ces polluants sont d'origine anthropique : biocides, pesticides, etc.

Une liste non exhaustive des micro et macro-polluants figure à l'annexe VIII de la directive : matières en suspension, hydrocarbures, métaux, arsenic, cyanures, produits phyto-pharmaceutiques, produits contribuant à l'eutrophisation (nitrates, phosphore, etc.). Les micro-polluants doivent respecter des normes de qualité environnementale (nqe- voir ci après).

Parmi ces micro polluants, on distingue :

- les substances prioritaires. Elles sont incluses dans la liste précédente. L'annexe X de la directive, qui devait définir la liste des substances prioritaires a été laissée vierge. Une liste de 33 substances a finalement été fixée en novembre 2001 par une décision du Parlement européen et du Conseil (3(*)). Ces substances doivent être progressivement réduites. La liste et les seuils seront révisés tous les quatre ans.

- les substances dangereuses. Elles sont décrites à l'annexe IX. Elles comportent une « directive-mère » de 1996 « relative aux substances dangereuses » complétées par cinq « directive-filles » relatives à certaines d'entre elles (mercure, cadmium...) (4(*)). Ces substances dangereuses doivent être éliminées.

La qualité biologique est évaluée à partir de la présence et l'état de quatre éléments : les poissons, les invertébrés, la flore aquatique, le phytoplancton.

a) Le classement des masses d'eau

Les masses d'eau sont évaluées en fonction des paramètres présentés ci dessus (le plus mauvais résultat enregistré sur un élément donne l'évaluation finale), sur une échelle comportant cinq classes, ou une grille de cinq couleurs, échelonnées selon la qualité observée, entre le bleu et le rouge.

Le plus mauvais résultat observé sur la qualité physicochimique et sur la qualité biologique donne le classement final de la masse d'eau. Le cumul de ces deux critères conduit à déterminer l'état et le potentiel écologique, lui-même défini en cinq classes :

- bleu : très bon état, situation de référence, non influencée par les activités humaines,

- vert : bon état, respect des nqe par les micropolluants,

- jaune : moyen,

- orange : mauvais,

- rouge : très mauvais (usage interdit)

L'objectif est de parvenir d'ici 2015 à un très bon état ou à un bon état écologique (classement en catégorie bleue ou verte), sauf dérogations.

b) Les dérogations

Des dérogations sont toutefois possibles :

- soit en reportant l'échéance, au maximum de deux fois 6 ans, si l'état du cours d'eau ne se dégrade plus,

- soit en renonçant à l'échéance, si l'objectif est impossible à atteindre, ou à des coûts disproportionnés.

Les objectifs très ambitieux sur certains paramètres (10 mg/litre de nitrates par exemple) sont impossibles à atteindre pour les nappes d'ici 15 ans, compte tenu des délais de transfert des polluants vers les nappes : la norme est cependant accessible pour les eaux de surface (10 mg/l est la norme retenue dans le « seq eau » français).

Les dérogations sont possibles mais doivent être justifiées. Il faut justifier l'impossibilité de parvenir à l'objectif qualité (à partir de simulations, de modèles de transferts de polluants), et en fixant un chiffre à l'échéance (exemple : en 2027 (2015+6+6) on obtiendra 30 ou 40 mg de nitrates par litre).

Le premier arbitrage sur les dérogations aura lieu en 2009.

2. L'état chimique

Le bon état chimique de l'eau de surface défini à l'article 2 § 24 de la directive, est « l'état chimique atteint par une masse d'eau de surface dans laquelle les concentrations de polluants ne dépassent pas les normes de qualité environnementale ».

Ces normes sont établies pour une liste de substances auxquelles on fixe des limites de concentration. Les substances concernées sur l'état chimique sont les « substances dangereuses », les « substances prioritaires » et « les autres micropolluants ».

L'appréciation de l'état chimique des eaux de surface est plus simple que celle sur l'état écologique : d'une part, les eaux sont classées en deux catégories : « bon » ou « pas bon ». L'objectif est de parvenir à un bon état à l'échéance 2015. D'autre part, il n'y a pas de dérogation.

3. Les normes de qualité environnementale - nqe -

Le respect des nqe détermine le bon état chimique et écologique des masses d'eau. La nqe est respectée quand deux conditions sont réunies :

- il faut, d'une part, que la législation existante soit respectée. Cette condition concerne les substances dangereuses décrites à l'annexe IX.

- il faut, d'autre part, ne pas dépasser le « risque écotoxique ». Ce risque concerne les substances prioritaires définies en novembre 2001 (les seuils restent cependant à déterminer). et les autres micropolluants, définis dans les paragraphes 1 à 9 de l'annexe VIII de la directive-cadre.

Ainsi, ces nqe déterminent à la fois le « bon état chimique » et le « bon état écologique », mais sans se recouper totalement. Le bon état chimique est atteint lorsque les substances dangereuses respectent des concentrations maximales, tandis que le bon état écologique est atteint lorsqu'il n'y a pas de substances dangereuses. De même, le bon état écologique impose le respect de concentration de micro-polluants non prioritaires alors que ces micro-polluants ne sont pas pris en compte pour qualifier l'état chimique.

Les dispositions se présentent comme suit :


Les normes de qualité environnementale - nqe -

dans la directive-cadre applicable aux eaux de surface

 

Bon état chimique

Bon état écologique

Respect de la législation existante

- Directives sur les substances dangereuses prévus en annexe IX

- Autres textes législatifs pertinents


Respect des concentrations maximum

Respect des dispositions



Absence de substances dangereuses

Respect des dispositions

Risque écotoxique

- Concentration maximum de substances prioritaires (liste adoptée en novembre 2001)

- Concentration maximum
de micropolluants (liste en annexe VIII)

Respect des concentrations maximum


Critère non surveillé

Respect des concentrations maximum

Respect des concentrations maximum

Annexe 34 bis - LA CONTAMINATION DU LOT PAR LE CADMIUM

Pendant un siècle, l'exploitation de minerai de zinc à Viviez (département de l'Aveyron) a entraîné le rejet de cadmium dans la rivière Lot, via son affluent, le Riou mort. Le minerai était apporté sur le site et l'extraction du zinc était accompagnée d'éléments métalliques comme le cadmium, le cuivre et le plomb. Ces métaux se sont accumulés dans les boues déversées dans la rivière ou dans les « crassiers », c'est-à-dire les dépôts de résidus en surface. La production de 3,4 millions de tonnes de zinc a ainsi conduit à la production de dix mille tonnes de cadmium.

L'entraînement de cadmium par lessivage par les pluies s'est ajouté aux masses stockées dans le lit du Lot estimées à 200 tonnes, dont les trois quarts ont été piégés dans les sédiments. L'apport de cadmium est caractérisé par un flux de 4,8 tonnes sous forme dissoute et 1,5 tonne sous forme particulaire. Cependant, 97 % de la charge dissoute passe sous forme particulaire.

L'ensemble a donc généré une importante pollution de la rivière jusqu'à l'estuaire et entraîné plusieurs risques, liés à l'ingestion d'eau pendant les activités de loisirs, à la contamination des produits maraîchers arrosés avec l'eau du Lot, à la contamination des poissons et des coquillages dans les parcs ostréicoles de la Gironde (les concentrations de cadmium atteignant jusqu'à 100 milligrammes par matière sèche soit cinquante fois plus que celles mesurées dans les parcs en sortie de l'estuaire).

Les travaux de lutte contre la pollution, démarrés en 1970, se sont accélérés au milieu des années 80 après une importante pollution accidentelle entraînant la mort de plusieurs tonnes de poissons. Trois types de mesures ont été adoptés :

- Isolement des zones contaminées en surface par une couche d'argile.

- Pompage des eaux polluées de la nappe phréatique.

- Traitement des eaux pompées et stockage des boues chargées en métaux sur des sites appropriés.

Le flux de cadmium a ainsi été abaissé de 70 kilos par jour à 5 kilos par jour.

Annexe 35 - RÉGLEMENTATION ET MESURES DES POLLUTIONS INDUSTRIELLES DANS L'EAU DE SURFACE

1. Le cadre juridique

a) Le code de l'environnement

Le cadre juridique reprend la loi relative aux installations classées pour la protection de l'environnement -ICPE- (loi n° 76-663 du 19 juillet 1976) et la loi sur l'eau (loi n° 92-3 du 3 janvier 1992), dont les principales dispositions ont été abrogées par l'ordonnance 2000-914 du 18 septembre 2000 . Selon l'Article L 214-8 du dit code, « Les installations soumises à autorisation ou à déclaration (...) permettant d'effectuer à des fins domestiques des prélèvements en eau superficielle ou des déversements (...) doivent être pourvues de moyens de mesures ou d'évaluation appropriés (...). »

L'Arrêté modifié du 2 février 1998 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau spécifie les conditions de rejet dans le milieu naturel des effluents liquides des installations classées soumises à autorisation et fixe les valeurs limites de rejet à respecter pour chaque polluant. L'arrêté précise qu'une approche « milieu » est indispensable. Ainsi, dans le cas d'un rejet en milieu sensible, ces valeurs limites peuvent être revues à la baisse.

L'application de l'ancienne réglementation sur les ICPE permet de connaître les principaux rejets industriels (eau, air, sol). Les données sont collectées auprès des exploitants. Le Ministère chargé de l'environnement publie les principaux rejets depuis 1985 (principaux rejets industriels).

Concernant les pollutions aquatiques, la législation ICPE distingue, outre les paramètres de base (matières en suspension, DBO/DCP, azote, phosphore, etc...) pour lesquels il est prévu de réaliser un bilan annuel,

- les « substances très toxiques pour l'environnement aquatique » (27 substances),

- les « substances toxiques ou néfastes à long terme pour l'environnement  aquatique » (37 substances),

- les « substances nocives pour l'environnement » (40 substances),

- les « substances susceptibles d'avoir des effets néfastes pour l'environnement » (80 substances).

b) L'inventaire communautaire des pollutions

La Directive 96/61/CE du Conseil relative à la prévention et la réduction intégrées de la pollution prévoit l'inventaire des principales pollutions. Cet inventaire a été créé par la décision de la Commission du 17 juillet 2000 -JOCE 2000/479/CE sous forme d'un registre européen des émissions de polluants -EPER- European Pollutant emission Register, qui couvre 26 polluants pour l'eau. Un premier registre européen est attendu pour 2003.

La France s'apprête à réaliser ce registre sous forme d'un registre national des émissions polluantes significatives des installations classées en annonçant que les substances visées seraient plus nombreuses que celles prévues par les registres européens.

c) La directive-cadre européenne

Enfin, la Directive cadre européenne 2000/60/CE impose une identification des pressions anthropiques auxquelles sont soumises les masses d'eau de surface, et un suivi des principaux polluants en distinguant les substances prioritaires et les substances dangereuses...

Les substances dangereuses mentionnées à l'annexe IX de la directive-cadre (cadmium, mercure...) dite directive mère doivent respecter les seuils de concentration maximum fixés par les directives filles, pour atteindre un « bon état chimique ». Elles doivent être éliminées pour atteindre un « bon état écologique ». Ces seuils sont aujourd'hui fixés par les directives suivantes :

- Directive relative aux rejets de mercure (82/176/CEE - JO L 81 du 27.3.1982)

- Directive relative aux rejets de cadmium (83/513/CEE - JO L 291 du 24.10.1983)

- Directive relative au mercure (84/156/CEE - JO L 74 du 17.3.1984)

- Directive relative aux rejets d'hexachlorocyclohexane (84/491/CEE- JO L 274 du 17.10.1984)

- Directive relative aux rejets de substances dangereuses (86/280/CEE - JO L 181 du 4.7.1986).

Les substances prioritaires prévues à l'annexe X et listées par une décision du Parlement européen et du Conseil n° 2455/2001/CI du 20 novembre 2001 (JO L 331 du 15.12.2001) doivent être progressivement réduites. Les seuils ne sont pas encore fixés. La liste comprend 33 substances. Elle concerne principalement les micropolluants organiques utilisés en agriculture (principaux pesticides), mais aussi quelques micropolluants organiques issus principalement de l'activité industrielle : HAP, nickel.

2. Paramètres de mesures de la pollution de l'eau (législation ICPE)

L'exploitant d'une installation classée doit identifier les points d'entrée et de sortie des eaux qui transitent dans son installation et les quantités mises en jeu. Ce bilan permet de choisir les solutions adéquates de traitement qui lui permettront de faire des économies d'eau et de diminuer (voire supprimer) les rejets dans le milieu naturel.

La pollution de l'eau d'origine industrielle peut prendre plusieurs formes, dont les principales sont :

Les matières en suspension, minérales (rejets de minerais) ou organiques (rejets des industries agroalimentaires, des papeteries, etc.)

Les métaux

Les autres micropolluants organiques, résultant principalement de combustions (HAP) et de traitements de surface (PCB) -Voir annexe précédente-.

3. Quantification de l'impact d'un rejet

Mesurer la concentration (Cp) des paramètres ci-dessus permet d'évaluer le caractère nocif du rejet, mais ne suffit pas à rendre compte de la charge polluante effectivement rejetée dans le milieu. Pour cela, il faut calculer le flux (Fp), c'est-à-dire la masse de polluant transférée au milieu récepteur pendant une période donnée, selon la formule suivante :

Fp = Cp X q q : débit des eaux rejetées


Paramètres de comparaison

Ø Les Matières Oxydables (M.O.) sont calculées à partir de la DBO5 et de la DCO. La DBO est la quantité d'oxygène consommée pour oxyder les matières organiques biodégradables, la DCO représente la quantité d'oxygène nécessaire pour oxyder les matières organiques dissoutes ou en suspension. C'est le paramètre utilisé par les Agences de l'eau pour le calcul des redevances en matière de rejets aqueux industriels

M.O. = (2 X DBO5 + DCO)
3

Ø L'équivalent-habitant : pour « illustrer » les données de flux de pollution de matière organique issue de l'industrie, il est intéressant de les convertir en pollution domestique équivalente rejetée par une tranche de population. Pour cela, on estime qu'un habitant engendre un rejet moyen journalier de 57 g de Matières Oxydables (Les équivalents habitants sont des normes administratives qui peuvent varier d'un pays à l'autre. Elles permettent essentiellement de dimensionner les stations d'épuration.
Exemple : Une distillerie rejette des effluents pendant ses 195 jours de fonctionnement.
Si M.O. = 265 tonnes/an = 1 358 975 g / jour de fonctionnement 24 000 équivalent-habitants, la pollution annuelle de cette distillerie est équivalente à celle d'une ville de 24.000 habitants ».

L'article 32 de l'arrêté modifié du 2 février 1998 fixe ainsi les valeurs limites de concentration des eaux résiduaires rejetées au milieu naturel selon le flux journalier maximal autorisé

Extrait du Tableau récapitulatif « Pollution de l'eau »

cas général (*)

Substances

Flux maximal autorisé (F)

Valeurs limites de rejet*

Débit

L'arrêté préfectoral d'autorisation fixe le débit maximal journalier

Température

Doit être inférieure à 30°

pH

Doit être compris entre 5,5 et 9,5

Matières en suspension totales

Si F = 15 kg/j
Si F > 15 kg/j

100 mg/l
35 mg/l

DBO5 (sur effluent non décanté)

Si F = 30 kg/j
Si F > 30 kg/j

100 mg/l
35 mg/l

DCO (sur effluent non décanté)

Si F = 100 kg/j
Si F > 100 kg/j

300 mg/l
125 mg/l

Hydrocarbures totaux

Si F = 100 kg/j

10 mg/l

Plomb et composés (en Pb)

Si F = 5 g/j

0,5 mg/l

...

...

...

* De nombreux cas particuliers sont susceptibles de modifier ces valeurs de « cas général ».

ANNEXE 36 - PRINCIPAUX REJETS INDUSTRIELS DANS LES EAUX*en tonnes

 

Principaux fleuves
(et assimilés)

Principales mers

Eléments

Rhône

Rhin

Seine

Canal
Deule

Méditer-
ranée

Atlan-tique

Manche

Mer du Nord

Aluminium

90

 

290

 

17.000

     

Arsenic

71

7.097

1.365

730

109

     

Azote

1.087

             

Cadmium

130

69

 

2.460

       

Chlorure

164.000

1,3 x 106

           

Chrome

3

14

19

 

436

   

28

Cuivre

10

6

   

5

     

Cyanure

300

     

241

 

60.000

375

DCO

14.500

3.960

     

11.000

   

Fer

 

14

2.000

 

73.000

   

2.800

Fluor

80

 

1.700

       

22

Hydrocarbures

17

 

27

 

40

     

Mercure

30

   

24

21

14

   

MES

65.000

250.000

1.560

 

220.000

     

Nickel

 

10

   

4

     

Phosphore

410

100

245

       

62

Plomb

 

4

   

15

     

Sulfate

23.000

 

56.000

       

6.300

Zinc

 

16

16

21

20

   

15

Source : Ministère de l'Aménagement du territoire et de l'environnement - Principaux rejets industriels en France - Bilan : 1999 (avril 2001)

* Ne sont comptés dans ce tableau que les rejets isolés, des dix premières entreprises. Les rejets raccordés aux stations d'épuration sont donc exclus du décompte.

Annexe 37 - LA DÉCONTAMINATION DES POTASSES D'ALSACE

Source : BRGM, DRIRE Alsace

Avec l'exploitation des potasses, un élément de base servant à la fabrication des savons et détergents, les sels résiduaires ont été mis en terrils, à proximité des mines. 17 terrils ont ainsi été édifiés, représentant un total de l'ordre de 18,5 millions de tonnes de chlorures.

Au cours du temps, une partie des sels dissous avec la pluie, ont ruisselé vers les cours d'eau, et une partie s'est infiltrée dans les nappes souterraines, générant une « langue salée » (appellation inspirée de la forme de la contamination, au nord-ouest de Mulhouse), zone dans laquelle la teneur de l'eau en chlorure dépasse déjà 500 mg par litre (alors que la limite de potabilisation est de 200 mg/litre).

Depuis la fin des années 70, une décontamination des sols et des nappes a été mise en place, sous deux formes.

La décontamination des terrils les plus chargés en sels est assurée par la dissolution accélérée. Un arrosage permanent permet de dissoudre le sel. Les eaux sont évacuées vers le Rhin. Les terrils les moins importants ou à faible teneur en sel sont recouverts d'un tissu végétal.

La décontamination des nappes est assurée par des puits de fixation, c'est-à-dire des puits qui permettent de pomper l'eau salée aux endroits des plus fortes concentrations et aux endroits d'infiltration des eaux des terrils. Là encore, les eaux pompées sont dirigées vers le Rhin, dont le débit est tel qu'il permet d'absorber les sels rejetés par les actions de dépollution et les rejets sont, en principe, dosés pour que les teneurs dans le Rhin ne dépassent pas 200 mg/l après dilution.

La dépollution est lente mais continue.

En 2002, le stock de chlorures dans les terrils est estimé à 3,3 millions de tonnes. Le stock de chlorures contenu dans la nappe est de l'ordre de 800.000 tonnes, avec une marge d'incertitude de #177; 30 %. Il diminue de 100-110.000 tonnes par an. On rappellera que cette dépollution des eaux souterraines engendre une pollution des eaux de surface.

Le schéma ci-après illustre le bilan des flux de dépollution.

Bilan de la dépollution des sels de potasse d'Alsace
(tonnes de chlorures)

Terrils

Stock : 3.200.000 tonnes

   

Terrils à faible concentration de sels

Terrils à forte concentration de sels


 
 



Infiltration
+ 42.300 tonnes

Arrosage

285.000 tonnes

dissolution

Ruissellement

 

Nappes

Stock :
800.000 tonnes
#177; 30 %



Captage
par puits
de dépollution

156.700 tonnes

(dépollution nette 114.400 tonnes)

Rhin :
+ 441.000 tonnes
(pollution nette)


Evacuation


 

Annexe 38 - LE RÔLE DU PHOSPHORE DANS L'EUTROPHISATION DES EAUX STAGNANTES

Source : audition de M.Guy BARROUIN, Chercheur INRA Thonon

La France compte environ trois mille lacs. Les lacs ainsi que les eaux stagnantes sont des eaux très vulnérables aux pollutions.

Une eau de rivière est homogène (le brassage du courant assure l'homogénéité), elle bénéficie d'une réoxygénation permanente, elle accueille une biocénose (ensemble du monde vivant) relativement pauvre (plus le courant est rapide, plus il freine la formation des végétaux), et elle n'a pas de mémoire : les traces d'une pollution disparaissent assez vite (à l'exception des sédiments).

Une eau stagnante présente des caractéristiques opposées. Elle n'est pas homogène et se présente par couches thermiques superposées avec une surface chaude et un fond froid, le fond se comble en permanence par des dépôts divers à un rythme compris entre un millimètre et un centimètre par an, le végétal est abondant, et toute pollution reste. Les eaux stagnantes sont donc particulièrement vulnérables aux pollutions occasionnelles ou régulières.

Les lacs sont en particulier vulnérables aux apports de phosphores. Le phosphore. Il forme avec l'azote ce que les agronomes appellent un « facteur limitant », ce qui signifie que la croissance d'une plante va dépendre à la fois de la quantité d'azote et de la quantité de phosphore qu'elle va recevoir. Le phosphore utilisé dans les engrais agricoles se fixe dans la plante et dans les sols et n'est que peu transporté dans les eaux. Près de la moitié du phosphore dans les eaux a pour origine les rejets domestiques liés à l'utilisation des dérivés de phosphore utilisés dans les lessives pour réduire la dureté de l'eau, c'est-à-dire la teneur de l'eau en calcium, qui perturbe le nettoyage en réagissant avec les tensioactifs pour donner des produits insolubles. Tous ces apports sont évacués dans l'eau qui devient vecteur de pollution.

L'apport de phosphore est particulièrement dommageable dans les eaux stagnantes. Dans celles-ci comme dans l'agriculture, le phosphore et l'azote constituent les deux facteurs limitant de la croissance de la végétation. Cependant, l'azote et le phosphore ne se présentent pas dans l'eau dans les mêmes quantités et ont, dans l'eau, deux comportements différents. D'une part, l'azote se trouve en quantité illimitée dans l'air et peut être fixé directement par certains microorganismes lacustres, les cyanobactéries abondantes dans les milieux eutrophes, de telle sorte que, dans l'eau, le phosphore est le premier facteur limitant. Or, les eaux sont naturellement pauvres en phosphore, qui provient donc pour l'essentiel des apports extérieurs, notamment issus des rejets des eaux usées.

On distingue deux types de végétaux aquatiques : les plantes aquatiques, également appelées macrophytes, qui sont visibles à l'oeil nu, qui comprennent des racines, des feuilles, parfois des fleurs, se développent en herbiers ; et les algues, également appelées microphytes, invisibles à l'oeil nu, qui n'ont ni racine, ni feuille, qui sont fixées ou flottent librement dans l'eau. Dans ce dernier cas, elles portent le nom de phytoplancton, qui donne une couleur à l'eau et parmi lequel on distingue les cyanobactéries qui ont la particularité de fixer l'azote.

Ainsi, dans les eaux, le principal facteur limitant est le phosphore. Après un déversement de phosphore, les algues qui n'ont plus de facteur limitant peuvent donc se multiplier. Dans certains cas, le phytoplancton croît de façon explosive produisant des floraisons algales (le « bloom »).

Trois processus interviennent alors. D'une part, la croissance et la destruction des algues consomment de l'oxygène, ce qui entraîne une acidification de l'eau et par voie de conséquence le relargage des matériaux piégés dans les sédiments du lac tels que le fer, le manganèse et le phosphore. D'autre part, la prolifération du phytoplancton va augmenter la consommation d'oxygène et la turbidité de l'eau. Les poissons vont dépérir faute d'oxygène entraînant une décomposition accélérée. Enfin, dans le même temps, l'azote n'est pas un facteur limitant qui limite la croissance des algues car cet obstacle est contourné par le développement du phytoplancton capable de fixer l'azote gazeux de l'atmosphère.

Ainsi le phosphore entraîne l'eutrophisation, c'est à dire une évolution de l'eau marquée par la prolifération végétale et l'apparition des nuisances qui en découlent (disparition de la faune, turbidité, odeurs). L'eutrophisation engendre une diminution des usages des plans d'eau (pêche, loisirs, eau potable), et la diminution de l'efficacité des traitements d'eau potable liée à la multiplication des matières en suspension et à la transformation des caractéristiques de l'eau (odeurs, goût).

C'est pourquoi les fabricants de lessives s'étaient engagés, en 1990, à créer au moins une lessive sans phosphates par marque et à réduire la teneur des nouveaux produits à un maximum de 20 % de phosphates. Tous les consommateurs avertis peuvent voir que certaines marques ne respectent pas cet engagement. Certains pays (Allemagne, Suisse) ont été plus vigilants que la France à réduire les détergents phosphatés. Même moins nombreuses qu'avant, des quantités de phosphates continuent de se déverser dans les rivières. Très peu d'usines de traitement des eaux usées possèdent des installations de déphosphatation.

Annexe 39 - PRÉSENCE DE MICROPOLLUANTS ORGANIQUES DANS LES COURS D'EAU

(L'exemple américain)

Source : audition de M. Yves LEVI, professeur à la faculté de pharmacie de Paris-Sud

Un micropolluant se présente sous forme de trace en très faible quantité (microgramme, voire nanogramme par litre). On distingue les micropolluants minéraux (les métaux lourds) et les micropolluants organiques utilisés en chimie, à base de carbone. La présence de ces micro polluants a été suivie dans une étude américaine portant sur 139 sites, soit plus d'une centaine de cours d'eau.

Catégories de micropolluants

Fréquence de détection (en %)

Part dans la concentration totale mesurée (en %)

Steroïdes

90

22

Médic. OTC

80

9

Répulsifs insectes

75

< 1

Métabolites détergents

70

36

Désinfectants

68

2

Plastifiants

65

21

Retardateurs feux

63

2

Antibiotiques

50

3

Insecticides

48

< 1

HAP

46

1

Hormones reproductives

44

< 1

Médicaments autres

30

< 1

Antioxydants

28

1

Parfums

26

< 1

Solvants

25

< 1

Source : Etude USGS Kolpin et al. Environment, Science and Technology - 2002

Une telle étude systématique n'a pas encore été menée en France à notre connaissance. Dans la plupart des cas, les seuils de détection dans les analyses réglementaires (DDASS) ou patrimoniales (Réseau National de Bassin), sont beaucoup trop élevées pour apporter une appréciation quantifiée de la contamination et de son évolution (on est toujours en « non détecté » jusqu'au moment où c'est trop fort et il est trop tard pour réagir). Il conviendrait de constituer des réseaux d'alerte précoce, sur des stations clefs, afin de prévenir ces risques.

Annexe 40 - LES DISPOSITIFS DE LUTTE CONTRE LES POLLUTIONS AZOTÉES D'ORIGINE AGRICOLE

Source : Ministère de l'écologie et du développement durable - Direction de l'eau

La présente note présente succinctement les différents dispositifs de lutte contre les pollutions azotées d'origine agricole et leur articulation.

La politique de lutte contre les nitrates d'origine agricole repose sur la combinaison de trois dispositifs :

- un dispositif réglementaire (directive nitrates et installations classées),

- des dispositifs économiques d'aides financières (PMPOA, ICCS, aides au traitement) et de redevance,

- les actions volontaires de conseils aux agriculteurs.

L'action de l'Etat est encadrée par des textes communautaires qui occupent une place prépondérante dans la réglementation nationale et les incitations économiques :

- la directive 91/676 dite directive nitrates,

- la directive 75-440 relative aux eaux brutes superficielles destinées à l'eau potable,

- les lignes directrices européennes en matières d'aides publiques

1. Le dispositif réglementaire

a) La transposition de la directive nitrates a conduit :

- à classer depuis 1994 environ 50% de la Surface agricole utile de la France en zones vulnérables. Ce sont aussi bien des régions d'élevage intensif (le grand Ouest dont la Bretagne) que les zones de grandes cultures intensives du Bassin Parisien ou du Sud Ouest. Toutefois la Cour de Justice des Communautés Européennes a condamné la France le 27 juin 2002 pour insuffisante délimitation notamment dans le Nord Ouest,

- à élaborer un Code des Bonnes Pratiques Agricoles recensant les règles techniques permettant de réduire la pollution de l'eau par les nitrates. Ce Code est d'application volontaire hors des zones vulnérables.

- à mettre en oeuvre des programmes d'action (le premier 1996-2000, le second 2001-2003) applicables à tous les agriculteurs situées dans les zones vulnérables. Les mesures des programmes d'action sont fixées à partir des règles du Code des Bonnes Pratiques Agricoles.

Les prescriptions des programmes d'action portent essentiellement sur les pratiques agricoles à mettre en oeuvre pour atteindre l'équilibre de la fertilisation azotée (la bonne dose d'azote au bon endroit et au bon moment). Il en résulte des capacités et des durées de stockage (lien avec le PMPOA). Les quantités d'azote organiques épandues issues des effluents d'élevage ne doivent pas dépasser 170 kgN/ha/an au 20 décembre 2002 (obligation de la directive nitrates).

Ces prescriptions sont renforcées :

- dans les zones à forte concentration d'élevages (zones en excédent structurel lié l'élevage ou ZES) où il est nécessaire de résorber les excédents d'effluents organiques par le recours au traitement des effluents ou la réduction des effectifs animaux. Ces zones sont surtout localisées en Bretagne. Dans ces zones, l'augmentation des effectifs est interdite, sauf dérogations pour les jeunes et les petites exploitations. Des aides (agence de l'eau et collectivités locales) sont accordées pour mettre en oeuvre des dispositifs de traitement des effluents. A l'heure actuelle celles-ci ne sont pas notifiées à la commission. Il convient d'engager rapidement cette notification.

- dans les bassins versants en dépassement sur le paramètre « nitrate » au titre de la directive 75-440 (zones d'action complémentaires ou ZAC) avec couverture des sols et limitation des apports totaux d'azote (minéral + organique). Ces zones sont localisées dans dix départements du Grand Ouest. Les actions complémentaires ont été définies suite à la condamnation de la France pour manquement à la directive 75-440. Une indemnité forfaitaire par hectare de SAU est attribuée aux agriculteurs situés dans ces zones (ICCS) après accord de la Commission européenne.

Tous les agriculteurs situés en zone vulnérable sont concernés par cette réglementation, indépendamment de la taille de leur exploitation. Les élevages sont de plus concernés par la réglementation installations classées en fonction de leur taille quelle que soit leur localisation géographique.

b) La réglementation relative aux installations classées

Elle fixe des prescriptions aux élevages en fonction de la taille de l'élevage selon le régime de déclaration ou d'autorisation. Ces prescriptions concernent tous les aspects environnementaux, une part importante porte sur la protection de l'eau contre les pollutions directes et les pollutions diffuses (capacité de stockage, modalités d'épandage).

Si cette réglementation existe depuis 1976 pour les élevages porcins, elle a été renforcée et étendue aux élevages bovins en 1992 et avicoles en 1994. Le renforcement des prescriptions techniques relatives aux élevages a conduit à accorder des délais aux élevages existants avant cette date.

Parallèlement, un dispositif d'aide à la mise en conformité (PMPOA) a été mis en oeuvre entre 1994 et 2000 pour permettre aux éleveurs de respecter ces délais. Cette réglementation repose sur une logique par taille et non territoriale. Elle concerne de nombreux élevages (au niveau national : 21.000 élevages soumis à autorisation et 102 000 soumis à déclaration).

Les prescriptions relatives à la directive nitrates, comme la mise en oeuvre des actions renforcées en ZES, doivent être reprises pour les élevages soumis à la réglementation relative aux installations classées qui sont situés en zone vulnérable.

2. Les dispositifs économiques

Ce sont essentiellement des aides financières. Il existe toutefois une redevance élevage en application du principe pollueur payeur de portée très limitée : par exemple, l'Agence de l'eau Seine Normandie a accordé 90 millions d'euros d'aides aux élevage et a émis 2,1 M d'euros de redevance. Un projet de redevance excédent d'azote était inclus dans le projet de loi sur l'eau.

a) Le programme de maîtrise des pollutions liées aux effluents d'élevage ou PMPOA

Ce programme repose sur l'attribution d'aides publiques pour réaliser des investissements et les changements de pratiques en matière d'épandage, en vue de la protection de l'eau. Ces aides permettent notamment aux éleveurs de respecter les réglementations.

Ce programme qui a démarré en 1994 été réformé en 2001 en vue d'une meilleure efficacité environnementale et d'une plus grande équité. Cette réforme, approuvée par la Commission européenne fin 2000 impose les conditions suivantes :

- fin du programme en 2006 dans les zones vulnérables,

- respect d'exigences minimales au titre de la directive nitrates pour être éligible (tenir un cahier d'enregistrement des épandages, faire un plan de fumure prévisionnel et respecter le plafond de 170kg/ha/an),

- répartition de 80% des crédits nationaux en zone vulnérable.

En contrepartie les éleveurs sont entrés dans le dispositif des redevances des agences de l'eau.

Un contentieux européen est en cours pour absence de notification du programme 1994-2000.

b) L'Indemnité Compensatoire de Couverture des Sols (ICCS) dans les ZAC

Ce dispositif est lié à l'obligation de couverture des sols dans les ZAC. Il consiste en une aide par hectare implanté en culture piège à nitrates : cette aide est limitée à 30% de la SAU et elle est dégressive jusqu'à la campagne 2005-2006. Elle est co-financée par le MEDD et le MAPAAR.

c) Les aides au traitement des effluents d'élevage dans les ZES

Ce dispositif est lié à la mesure obligation de traitement dans les ZES. Le financement est accordé par l'Agence de l'eau et dans certains cas par les collectivités territoriales.

Ces aides n'ont pas encore été notifiées à la Commission : le risque de contentieux est fort si la notification n'intervient pas rapidement car les associations de protection de l'environnement ont alerté la commission sur ces aides.

De plus, la plupart des procédés de traitement actuellement mis en oeuvre, efficaces pour diminuer les quantités d'azote, génèrent des coproduits dont la teneur en phosphore et en éléments traces métalliques posent des problèmes lors de l'épandage.

d) La redevance élevage

L'intégration de l'élevage dans le champ d'intervention des agences de l'eau concerne depuis 1994 les élevages d'une certaine taille (tous les élevages soumis à autorisation au titre de la législation Installations Classées et une grande partie des élevages bovins soumis à déclaration).

Afin de faciliter cette intégration, un report de paiement de la redevance pollution a été accordé. Ce report a pris fin pour les éleveurs intégrables au PMPOA de 1994 à 1998 qui ont reçu en 2001 une déclaration d'activité polluante à remplir et qui peuvent avoir une redevance à payer si leurs stockages d'effluents d'élevage et leurs pratiques d'épandages ne sont pas satisfaisants.

3. Les actions volontaires  de conseils aux agriculteurs

La plus structurée, Ferti-Mieux, concerne 30000 agriculteurs et 1,9M d'ha réparti en 54 actions petits bassins versants sur tout le territoire (toutes situées en zones vulnérables). L'application du conseil ne doit pas avoir de coût pour l'agriculteur (sinon indemnisation MAE réduction d'intrants, contrats territoriaux d'exploitation (CTE) subvention aux CIPAN, aide au compostage, ....). Il en résulte une sensibilisation des agriculteurs, mais l'impact environnemental de ces actions reste limité.

Conclusion

Malgré l'existence de nombreux dispositifs complémentaires, on constate néanmoins :

- une nette insuffisance de résultats sur la qualité de l'eau (teneur en nitrates dépassant la norme pour l'eau potable ; flux d'azote entraînant des proliférations d'algues vertes). Il en résulte :

- des condamnations (condamnation par la Cour de Justice des Communautés européennes pour non respect des 50 mg/l en Bretagne, condamnation dans l'affaire de Guingamp)

- une acceptation difficile de la part des populations (manifestations de Lamballe)

une menace pour la pérennité d'autres secteurs économiques (tourisme, conchyliculteurs, ......).

- une difficulté de mise en oeuvre de ces dispositifs à cause de :

- l'absence de levier économique fort incitant aux changements de pratiques agricoles,

- la complexité des dispositifs

- l'absence de contrôles des dispositifs réglementaires.

Annexe 41 - LES RÈGLES D'ÉPANDAGE DES ENGRAIS Arrêté du Préfet des Côtes d'Armor du 20 juillet 2001

L'arrêté du Préfet des Côtes d'Armor du 20 juillet 2001 définit les actions nécessaires à « une maîtrise de la fertilisation azotée (nitrates) (...) afin de limiter les fuites de composés azotés à un niveau compatible avec l'objectif de restauration et de préservation de la qualité des eaux superficielles et des eaux souterraines (...) dans les zones vulnérables ».

L'arrêté fixe donc des règles d'épandage des engrais minéraux ou d'origine animale, ainsi que des règles de « bonnes pratiques agricoles », par parcelles, en fonction de la vulnérabilité de certains points : proximité des cours d'eau ou des points de captage, distances par rapport aux plages ou aux installations.

Tous les opérateurs ont évoqué la complexité des règles environnementales, en particulier celles applicables à la protection des eaux. Tous les opérateurs ont aussi évoqué la nécessité de clarifier et simplifier. L'arrêté préfectoral évoqué dans le cas présent, qui distingue huit distances différentes à respecter selon les sites et la nature de l'épandage, et qui résulte probablement de longues tractations corporatistes et locales, est une bonne illustration de ces deux idées.

On pourra légitimement se demander si une telle réglementation est réellement applicable, et douter de l'opportunité d'édicter ainsi des règles aussi manifestement incontrôlables.


Distances réglementaires à respecter pour quelques pratiques agricoles

Distance minimale à respecter par rapport au point sensible


Point sensible

Opération
envisagée

2 m

Cours d'eau
Captage AEP
Plage
Pisciculture

Epandage des engrais minéraux

10 m

Cours d'eau

Enherbement obligatoire
Retournement des prairies interdit

15 m

Cours d'eau

Enherbement obligatoire en
cas d'utilisation de l'atrazine au-delà des 15 m
Destruction chimique du couvert végétal interdite

35 m

Cours d'eau

Epandage de fumier et fientes de volaille

50 m

Cours d'eau
Captage AEP

Plage

Epandage de lisier
Epandage de fientes, fumier et lisier
Epandage de fumier avec enfouissement

100 m

Cours d'eau

Plage
Pisciculture

Epandage de lisier sur un terrain avec une pente > 7 %
Epandage de fumier
Epandage de fumier avec enfouissement

200 m

Plage

Epandage de fientes et de lisier

500 m

Pisciculture

Epandage de fumier, de fientes et de lisier

AEP : alimentation en eau potable

Annexe 42 - LES CONTENTIEUX DANS LE DOMAINE DE L'EAU

Jusqu'à ces dernières années la responsabilité de l'Etat n'était engagée que pour faute lourde. Les contentieux liés à la qualité de l'eau se sont beaucoup développés au cours des années récentes et marquent des évolutions profondes.


1. Le contentieux communautaire

Les contentieux communautaire dans le domaine de l'eau sont fondés sur le manquement des Etats à l'application des directives européennes. Ils prennent une place de plus en plus importante pour l'ensemble des Etats membres. En particulier pour la France.

- Qualité des eaux superficielles destinées à la production alimentaire. Sur requête de la Commission européenne, la Cour européenne de justice, dans un arrêt du 8 mars 2001, a déclaré que la France avait manqué à ses obligations résultant de la directive 75/44O/CEE du Conseil du 16 juin 1975 relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire. La Cour a considéré que la France utilisait trop souvent des eaux de qualité insuffisante pour la production d'eau de consommation en Bretagne, que les mesures prises par la France avaient été tardives, restreintes et ne constituaient pas un véritable plan d'action.

- Directive nitrates d'origine agricole. Sur requête de la Commission européenne, la Cour de Justice européenne, dans un arrêt du 27 juin 2002, a déclaré que la France avait manqué à ses obligations résultant de la directive 91/676/CEE du Conseil, du 12 décembre 1996, concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole. Elle a considéré que la désignation des « zones vulnérables » par la France, n'était pas suffisante (défaut d'identification de la baie de Seine parmi les zones vulnérables, alors même que le fleuve serait à l'origine d'un déversement annuel de 100.000 tonnes d'azote, aux deux-tiers d'origine agricole, en Manche).

La Cour de Justice a constaté les mêmes manquements d'Etat aux obligations prévues par cette directive nitrates, pour l'Espagne (arrêt du 13 avril 2000), le Royaume-Uni (arrêt du 7 décembre 2000), le Luxembourg (arrêt du 8 mars 2001), l'Italie (arrêt du 8 novembre 2001), l'Allemagne (arrêt du 14 mars 2002). Une procédure est en cours (2002) à l'encontre des Pays-Bas.

- Directive eaux résiduaires urbaines. La Commission européenne a saisi la Cour de justice en novembre 2001 sur l'application de la directive 91/271/CEE concernant le traitement des eaux résiduaires urbaines. Elle a considéré que la désignation des zones sensibles était insuffisante et que les zones sensibles ne bénéficiaient pas de traitement des eaux assez rigoureux.

2. Le contentieux administratif

a) Les contentieux se sont fortement développés.

Le retentissement des condamnations de la France pour manquement aux directives européennes s'est traduit par des contentieux nationaux et une certaine appréhension des pouvoirs publics. De nombreuses dispositions relatives à la protection des eaux ne sont que très partiellement appliquées ce qui constitue un élément de grande vulnérabilité qui renvoie à la responsabilité des communes mais aussi de l'Etat.

Des contentieux sont redoutés que ce soit dans les projets d'infrastructures (le tracé du contournement autoroutier de Lille a été annulé parce qu'il traversait une zone de vulnérabilité des nappes - Jugement du T.A. de Lille, 19 avril 2000) ou pour inapplication des réglementations.

b) La jurisprudence a beaucoup évolué.

L'abandon du principe de responsabilité de l'Etat pour faute lourde est parfaitement illustré par le contentieux sur la qualité des eaux de Guingamp.

En 1995, le Tribunal d'Instance de Guingamp a condamné la Société Suez Lyonnaise des Eaux à verser une indemnité de 251.000 F à 176 abonnés d'un réseau de distribution d'eau potable, pour avoir distribué pendant 247 jours une eau contenant plus de 50 mg de nitrates par litre. La société s'est retournée contre l'Etat considérant que l'Etat avait fait preuve d'une carence fautive dans l'exercice de ses pouvoirs de police, que des contrôles des exploitations et la protection des eaux contre les nitrates d'origine agricole étaient insuffisants, et que la transposition de la directive nitrates avait été tardive.

Dans un jugement du 2 mai 2001, (soit quelques jours après l'arrêt de la CJCE sur la qualité des eaux) le Tribunal administratif de Rennes a suivi cet argumentaire et a condamné l'Etat à rembourser l'indemnité versée par la société et à lui verser 500.000F pour «préjudice moral et l'atteinte à l'image».

Dans ce dossier la jurisprudence ancienne qui ne reconnaissait la faute de l'Etat qu'en cas de faute lourde a clairement évolué vers une responsabilité pour faute simple, une responsabilité pour manquement, inspirées de la jurisprudence européenne. Il est à craindre que l'entrée en vigueur de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 donnant pour objectif aux Etats membres d'atteindre un bon état des eaux en 2015, n'entraîne de nouveaux contentieux.

Annexe 43 - LES « MARÉES VERTES » EN BRETAGNE, UNE POLLUTION QUI DÉRANGE

Rédaction : Alain MÉNESGUEN - IFREMER/Centre de Brest, Direction de l'Environnement et de l'Aménagement du Littoral, Département d'Ecologie Côtière

1. Description du phénomène de « marée verte »

Les algues macrophytes, composantes naturelles de nos écosystèmes côtiers se sont adaptées à la très grande variété de conditions d'éclairement, de turbulence ou de richesse nutritive que présente la bande côtière. Dans certains sites côtiers cependant, l'équilibre entre espèces est rompu en réponse à une augmentation importante des apports nutritifs d'origine continentale, parfois d'origine urbaine (effluents de stations d'épuration), souvent d'origine agricole (lessivage de terres cultivées trop enrichies en engrais organiques ou minéraux). La manifestation la plus visible de ce dérèglement local des phytocénoses consiste en une prolifération saisonnière massive d'une espèce particulièrement adaptée aux milieux riches, entraînant une eutrophisation du milieu marin côtier, similaire à ceux affectant certains écosystèmes d'eau douce. Etant donné que parmi les macrophytes marines, ce sont surtout des algues vertes (chlorophycées) qui se révèlent les plus aptes à profiter d'eaux enrichies en nutriments, on parlera souvent de "marée verte" à propos de ces accumulations estivales de biomasse macroalgale, sans que l'espèce incriminée soit forcément la même sur tous les sites. La prolifération concerne surtout des algues vertes du genre Ulva appelées communément « laitue de mer », essentiellement des espèces Ulva armoricana et Ulva rotundata

Ce phénomène affecte depuis les années 70 de nombreux sites des côtes de Bretagne, surtout du nord.  Démarrant à la belle saison, au mois d'avril, sous la forme de petits fragments de thalle en suspension dans l'eau du rivage, la prolifération s'accélère en juin, pour aboutir à une biomasse maximale en début juillet, capable de recouvrir par temps calme la quasi-totalité de l'estran lors des marées descendantes. Les algues des dépôts de haut de plage, non-reprises par la mer lors de marées d'amplitude décroissante, meurent en séchant en surface, se décomposent, générant des jus noirâtres et des odeurs d'oeuf pourri peu avenantes pour les populations riveraines. L'effet désastreux pour le tourisme incite les communes touchées à opérer un ramassage mécanique.

Il est probable que, de tout temps, des proliférations limitées de macroalgues se sont produites en été sur certains sites favorables. Depuis les années 50, les survols photographiques mettent en évidence une colonisation croissante des plages et une spectaculaire augmentation depuis la fin des années 70. De "naturel" et très limité, le phénomène de prolifération macroalgale est devenu une nuisance préoccupante en Bretagne. La « marée verte » se présente sous forme d'une biomasse d'ulves de l'ordre de 50.000 tonnes en poids frais pour l'ensemble du littoral breton en juillet. Parmi la cinquantaine de sites régulièrement atteints en Bretagne, une dizaine le sont fortement, distribués sur les côtes finistériennes et costarmoricaines. Cela se traduit aussi par l'augmentation des dépenses engagées par les communes littorales pour le nettoyage des plages (de 0.3 M.F en 1978 à 3 M.F dans les années 90, pour l'ensemble de la Bretagne correspondant à l'enlèvement d'environ 50 à 100 000 m3 d'algues échouées).

Carte des accumulations d'ulves sur le littoral breton en été 1998 (les cercles ont une surface proportionnelle à la biomasse; données IFREMER/CEVA)

2. Explication scientifique du phénomène et déductions pratiques

La constitution d'une "marée verte" nécessite que deux conditions soient remplies:

En premier lieu, il faut que les conditions environnementales soient propices à la croissance des macroalgues, et tout d'abord que la lumière accessible aux thalles des algues soit suffisante pour assurer la photosynthèse de glucides. Ceci explique que la croissance d'ulves soit très faible d'octobre à février, et que la reprise de croissance se produise au printemps, quand l'intensité et la durée d'éclairement redeviennent suffisantes. Les biotopes où l'on rencontrera des "marées vertes" seront donc soit les lagunes très peu profondes soit la zone de déferlement des vagues sur les estrans sableux, là où la turbulence est suffisamment forte pour maintenir en suspension les thalles dans une colonne d'eau bien éclairée. En certains sites, comme la Baie de Douarnenez, les courants de retour dispersent les thalles sur de vastes fonds sous-marins bien éclairés, où ils peuvent maintenir une bonne croissance. Ce stock "offshore" particulier a été estimé à environ 10 000 tonnes en 1998 par l'IFREMER. Par ailleurs, pour la synthèse des protéines et d'autres molécules, il faut des apports suffisants de nutriments. Chaque année, les ulves montrent en fin de printemps une chute rapide de leur teneur en azote, qui devient alors insuffisante pour une croissance correcte. Elles ne retrouvent des teneurs élevées qu'en fin d'automne. Ce phénomène d'appauvrissement des algues est également visible pour le phosphore, mais est moins marqué que pour l'azote, ce qui établit au niveau physiologique que la prolifération estivale des ulves sur les côtes bretonnes est limitée par l'azote. Le rôle limitant de l'azote ne se fait sentir qu'en fin de printemps et en été, lorsque les apports par les cours d'eau et par l'eau du large ne peuvent plus subvenir aux énormes besoins d'une biomasse déjà largement constituée. L'examen des données météorologiques a permis de constater que la prolifération était d'autant plus intense que la pluviométrie printanière était forte, et que le lessivage important des terres agricoles conduisait à une arrivée sur l'estran de forts débits d'eaux riches en nutriments, au moment où la demande des ulves en croissance était maximale. Le fait qu'il apparaisse une bonne corrélation entre le maximum annuel de biomasse algale et les flux d'azote inorganique apportés sur l'estran pendant le mois de juin, alors qu'aucune relation ne se dégage avec les flux de phosphore, prouve que la biomasse maximale atteinte annuellement sur un site est contrôlée par les apports d'azote et non par ceux de phosphore: l'azote est donc l'élément nutritif limitant de la croissance algale en fin de printemps et en été. Les modèles numériques ont permis d'évaluer les effets attendus de divers scénarios d'évolution des apports terrigènes de nitrate, et montrent que, sans une réduction forte des concentrations en nitrate des rivières aboutissant aux sites les plus touchés, il est vain d'espérer voir diminuer sensiblement cette nuisance estivale, sauf momentanément, lorsque sous l'effet de la sécheresse, on note une diminution importante des débits fluviaux et donc des apports de nitrate.

En deuxième lieu, il faut que la géographie du site soit propice au confinement de la biomasse formée, sans quoi il ne peut y avoir d'accumulation visible d'algues. Les lagunes, communiquant peu avec la mer, fournissent de façon statique un tel confinement, mais des sites ouverts sur le large en mer à marée peuvent également être sujets à un « confinement dynamique », par absence locale de dérive résiduelle d'un cycle de marée au suivant : c'est ce dernier mécanisme qui explique le paradoxe des « marées vertes » bretonnes, sur des plages à très fort marnage.

3. La gestion du problème par la société

Les pouvoirs publics ont régulièrement privilégié le traitement curatif de la marée verte par rapport aux actions préventives volontaristes sur les causes de cette atteinte aux écosystèmes côtiers. La gêne créée par les proliférations macroalgales est, sur le littoral breton, essentiellement d'ordre touristique (odeurs de putréfaction des algues échouées, désagréments causés aux baigneurs...), même si, localement, les algues constituent une entrave croissante aux activités de conchyliculture ou de pêche (colmatage des filets et des chaluts de petits navires côtiers). L'essentiel des efforts curatifs a donc porté pour l'instant sur le ramassage estival des algues en échouage, au moyen d'engins usuels de travaux publics (bulldozers, tractopelles, camions). Les algues collectées, mêlées de sédiment et d'eau salée, sont soit déposées à terre dans des carrières désaffectées (mais à partir de 2002, la réglementation européenne a interdit cette solution), soit épandues en tant qu'engrais sur des terres agricoles, soit mélangées à des débris végétaux terrestres pour former un compost. Par ailleurs, les possibilités de méthanisation des ulves, compromises par la forte teneur en eau des tissus, supérieure à 97 % de la biomasse fraîche, semblent non-rentables économiquement.

Il est bien évident que les techniques précédentes ne peuvent venir réellement à bout de l'énorme biomasse engendrée, et qu'elles ne s'attaquent nullement aux causes, dont la principale est l'augmentation récente des apports azotés terrigènes sur les sites sensibles. Il serait donc urgent de recenser pour chaque site à restaurer les sources majeures d'azote inorganique (lessivage des terres agricoles, parfois rejets de stations d'épuration) et de conduire une politique de réduction à la source de ces excédents azotés. Même si le but à atteindre est la diminution des apports au milieu marin pendant la seule période de croissance des algues (fin du printemps, été), il faut souligner le fait que, dans le cas où les rejets diffus d'origine agricole sur un bassin versant perméable sont majoritairement en cause, il faudra éventuellement plusieurs années de fertilisation raisonnée pour diminuer sensiblement la part des apports azotés transitant lentement par la nappe phréatique.

Devant cette certitude fondée sur les résultats scientifiques français, mais aussi internationaux, quelle est l'attitude de différentes fractions de la société ?

* Paradoxalement, parmi les scientifiques eux-mêmes, ne règne pas l'unanimité : arguant du fait qu'en eaux douces, il a été démontré que c'est le phosphore qui contrôle le niveau d'eutrophisation, certains en déduisent des recommandations abusives, de réduction exclusive des apports de phosphore, voire d'encouragement aux rejets de nitrate, ce qui ne tient évidemment aucun compte des effets dévastateurs du nitrate lors de son arrivée en zone marine confinée.

* Etant en première ligne parmi les responsables de l'augmentation des concentrations de nitrate dans les rivières bretonnes (Fig.2), une fraction bien organisée de la profession agricole et de l'industrie agro-alimentaire qui lui est liée n'hésite plus à pratiquer un négationnisme avéré, allant jusqu'à nier la réalité de cette augmentation de la teneur en nitrate. Certaines revues professionnelles entretiennent la désinformation du milieu. La fermeté des propos laisse entrevoir la détermination de la profession à ne pas accepter la moindre remise en question de ses pratiques.

Figure 2. Evolution de la moyenne annuelle des mesures de concentration en nitrate dans l'ensemble des rivières bretonnes (données DIREN Bretagne & Agence de l'Eau).

L'administration régionale et nationale, les politiques et, plus généralement, les pouvoirs publics français, ont montré depuis trente ans une impuissance chronique à imposer les solutions efficaces au monde agricole, qui représente, il est vrai, une force économique très importante en Bretagne. Face à l'incurie française, on assiste à la montée en pression des contentieux communautaires. Un constat lucide de cette impuissance vient d'être fait par le rapport accablant de la Cour des Comptes de février 2002: « Si le constat auquel aboutit la Cour des Comptes au terme de cette analyse est particulièrement critique, c'est parce que la dégradation des eaux bretonnes ne constitue en aucune façon un phénomène récent devant lequel les pouvoirs publics se seraient trouvés désarmés. Bien au contraire, elle est le produit de trente années d'un modèle de développement agricole dont les déséquilibres et les risques sont connus depuis longtemps. Ce ne sont pas seulement les caractéristiques intrinsèques de l'agriculture bretonne, c'est-à-dire de l'élevage intensif hors-sol, qui sont aujourd'hui en cause, c'est aussi la singulière passivité de l'Etat devant l'inapplication d'une réglementation dont l'objectif était précisément de concilier l'exercice des activités économiques avec la préservation des patrimoines naturels. Le présent rapport s'est attaché à mettre en évidence les insuffisances, voire les incohérences qui ont empêché les programmes engagés depuis le début des années 1990 de reconquérir la qualité des eaux. ».

* Devant cette incurie coûteuse et l'aggravation de la situation d'année en année, les populations locales, mais aussi les touristes de passage, expriment de plus en plus leur lassitude ou leur révolte, constituant même des associations dédiées avec site internet.

Finalement, le phénomène de "marée verte", installé depuis une trentaine d'années sur les côtes de Bretagne, et probablement de façon durable, a été révélateur d'une part des conflits d'intérêt profond entre la logique économique de l'agriculture industrielle et la logique du développement durable compatible avec le respect des écosystèmes, d'autre part de l'impuissance du pouvoir politique et administratif. La compréhension scientifique du phénomène est actuellement largement suffisante pour aboutir à des recommandations concrètes sur les actions de reconquête de la qualité de l'eau à mener, essentiellement la diminution des rejets azotés : encore faut-il que les pouvoirs publics prennent réellement les moyens de faire respecter les normes permettant une utilisation respectueuse de l'environnement et aient enfin la volonté de faire passer l'intérêt général avant celui d'un groupe professionnel particulier.

Annexe 44 - LES PESTICIDES PRÉSENTATION GÉNÉRALE

Les pesticides sont des produits dont les propriétés chimiques contribuent à la protection des végétaux. Ils sont destinés à détruire, limiter ou repousser les éléments indésirables à la croissance des plantes, insectes, parasites et autres plantes.

Les « pesticides », étymologiquement « tueurs de fléaux » sont aussi appelés, dans la réglementation nationale et européenne « produits phytosanitaires. Les mots sont aujourd'hui utilisés indifféremment par les services impliqués dans le contrôle de la qualité de l'eau (cf. étude de l'Institut français de l'environnement - IFEN - sur « Les pesticides dans les eaux - bilan 2000 » et « Étude de la contamination des eaux superficielles de Bretagne par les produits phytosanitaires », réalisée par une structure associative (Fédération régionale de groupements de défense contre les ennemis des cultures de Bretagne - FEDEREC). Les producteurs de pesticides utilisent aussi l'appellation « produits phytopharmaceutiques », appellation à consonance plus médicale et plus positive.

Les pesticides sont utilisés dans l'agriculture et dans les métiers du bois pour leurs propriétés toxiques. L'action des pesticides est multiforme. Elle peut être directe - par destruction de l'élément nuisible - ou indirecte, par réduction des capacités de reproduction des insectes par exemple, ou en pénétrant d'abord la plante-hôte, qui élimine ensuite les bactéries nuisibles. Ces pesticides à action indirecte sont dits aussi « systémiques ».

Les pesticides sont classés par grandes familles selon un double classement :

1. Un classement par cible

On distingue quatre grandes familles :

Les insecticides : ils sont destinés à la lutte contre les insectes. Ils interviennent en tuant ou en empêchant la reproduction des insectes. Ce sont souvent les plus toxiques, notamment l'arsenic, très utilisé avant la seconde guerre mondiale. C'est dans cette famille que l'on trouve la plupart des « polluants organiques persistants » -les POP- notamment le fameux DDT, insecticide très puissant très utilisé jusqu'à son interdiction, très persistant, très mobile et très soluble puisque l'on retrouve des traces de DDT dans les glaces et les mammifères de l'Arctique et de l'Antarctique. Un autre insecticide puissant est le LINDANE, également interdit depuis 1999. C'est aussi dans cette famille que l'on retrouve la plupart des « organochlorés » (voir ci-après).

Les fongicides : ils sont destinés à éliminer les moisissures et parasites (champignons...) des plantes. Le fongicide le plus ancien et le plus courant est le soufre et ses dérivés (la bouillie bordelaise) ainsi que le cuivre, le triazole et le benzène.

Les herbicides : ils sont destinés à lutter contre certains végétaux (les « mauvaises herbes »), qui entrent en concurrence avec les plantes à protéger en ralentissant leur croissance. Ils sont de nature assez différente de celle des trois autres familles. D'une part, leur action n'est pas d'intervenir contre un intrus, de nature différente (insecte/parasite), mais de lutter contre un autre végétal. D'autre part, leur mode d'épandage est différent puisqu'ils sont déposés directement au sol, par opposition aux autres produits, plutôt pulvérisés sur la plante en croissance. Les herbicides les plus connus sont l'acide sulfurique, utilisé pour désherber les céréales, et les phytohormones (le 2-4 D). Les herbicides constituent aujourd'hui le groupe le plus important, le plus utilisé. On y trouve d'ailleurs la plupart des produits « sous surveillance », notamment l'ATRAZINE, utilisé pour le maïs, et le DIURON, désherbant total, utilisé surtout en voierie.

Le dernier groupe est celui des pesticides spéciaux, tels que les répulsifs de rongeurs, fumigènes.

2. Un classement par groupe chimique

Il s'agit d'un classement technique à partir de la molécule principale utilisée. On distingue :

Les organochlorés, parmi les plus anciens et les plus persistants, dont le fameux DDT déjà évoqué. Ils sont surtout utilisés comme insecticides en agriculture et dans les métiers du bois. Exemples : aldrine, dieldrine, etc ;

Les organophosphorés, eux aussi utilisés comme insecticides ;

Les carbamates, fongicides et insecticides ;

Les phénox, herbicides - (Exemple 2-4 D)

Les organo-azotés, repérables par le suffixe « zine », principalement utilisés comme herbicides. (Exemple : atrazine, simazine, etc...)

Les urées, repérables par le suffixe « uron », utilisés comme herbicides et fongicides. (Exemple : DIURON, ISOPROTURON, etc.).

Naturellement, ces deux classements se recoupent, ainsi qu'il est indiqué dans le tableau ci-dessous :

Source : UIPP - Brochure sur la recherche dans les produits phytosanitaires)

Annexe 45 - DONNÉES STATISTIQUES SUR LES PESTICIDES

1. Consommation totale

La consommation de pesticides en France représente environ 110 000 tonnes par an, soit 100 000 tonnes utilisées en agriculture, auxquelles il faut ajouter environ 10 000 tonnes pour les autres utilisateurs (voir détail en 3 ci-dessous).

La France est le troisième consommateur mondial, après les Etats-Unis et le Japon et, de loin, le premier utilisateur de pesticides en Europe.

Répartition géographique
du marché des produits phytosanitaires

Monde (2001) Europe (2000)
25,6 milliards de dollars 5 814 millions d'euros

Amérique du Nord 32,2 % France 32 %
Asie 23,2 % Allemagne 18 %
Europe de l'Ouest 20 % Italie 12 %
Amérique latine 11,7 % Espagne/Royaume Uni 10 %

Source : UIPP - Rapport annuel 2001

Ce volume doit toutefois être rapporté à la surface et aux productions agricoles. La France est aussi le premier utilisateur de produits phytosanitaires parce qu'elle est le premier producteur agricole européen (21,7 % de la production totale de l'Union européenne), le premier producteur de maïs, très gros consommateur d'herbicide (42,7% de la production totale européenne), et qu'elle dispose de la plus grande surface agricole utilisée -SAU- : 28,4 millions d'hectares, soit 22 % de la SAU totale). Rapportée à l'hectare, la France est dans une position moyenne.


CONSOMMATION DES SUBSTANCES ACTIVES PHYTOSANITAIRES

DANS LES PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE
(en kg/ha de surface agricole)

Pays-Bas

17,5

Belgique

10,7

Italie

7,6

Grèce

6

Moyenne européenne

4,5

Allemagne

4,4

France

4,4

Royaume-Uni

3,6

Luxembourg

3,1

Espagne

2,6

Danemark

2,2

Irlande

2,2

Portugal

1,9


Source : UIPP-LEL/BLO

2. Evolution

L'idée couramment avancée par les professionnels et les fabricants est que la tendance lourde est à la diminution des volumes utilisés.

Cette idée part du constat qu'avec les exigences posées par la réglementation - voir annexe sur la commercialisation des pesticides - l'élaboration des produits est de plus en plus sophistiquée et les matières actives de plus en plus spécifiques, permettant une réduction notable des doses. Selon l'UIPP (Union des industries de la protection des plantes), il fallait 1 000 grammes de matières actives à l'hectare en 1950, il en faut 100 grammes aujourd'hui, et d'ici 10 ans, 10 grammes suffiront.

Cette évolution, dans les faits, n'est pas aussi nette.

D'une part, les évolutions sont très contrastées en Europe, puisque, selon la Commission européenne, la France serait dans une position moyenne avec une quasi-stabilité de consommations, entre le Danemark (-40 % de consommation en 10 ans entre 1990 et 1999) et l'Espagne (+50 % des produits consommés). Ainsi, la diminution annoncée ne s'est manifestement pas produite partout !

D'autre part, l'évolution dans le temps est en fait très irrégulière. Les chutes de consommation assez brutales constatées certaines années (1991-1992 ou 2000 par exemple), souvent à la suite ou par anticipation de mesures réglementaires restreignant les usages de certaines molécules, sont suivies de périodes d'augmentation lente mais régulière. Ainsi, après quelques années, la chute est totalement absorbée par le mouvement de fond, qui, lui, reste croissant.

Bien que les molécules soient de plus en plus efficaces à faibles doses, les tonnages sont stables, voire continuent d'augmenter. Cette évolution est liée à la progression de l'artificialisation du territoire (les villes sont les endroits où l'on utilise le plus de désherbants par hectare d'espaces traités, les golfs et les équipements touristiques sont aussi de gros consommateurs d'herbicides (une surface enherbée d'un sol consomme cinq fois plus de pesticides que la même surface cultivée). Par ailleurs, on observe une adaptation des espèces aux produits utilisés. On observe 600 espèces d'insectes et 60 espèces de végétaux résistants aux produits phytosanitaires aujourd'hui présents sur le marché (source AAPA -Association pour la prévention de la pollution atmosphérique - comité régional Nord Pas-de-Calais - Bulletin n° 55 - 2000). L'adaptation aux traitements se poursuit aussi par contagion : les arbres voisins de ceux qui ne sont pas traités deviennent à leur tour vulnérables s'ils ne sont pas traités.

En outre, on observe que la tendance à la diminution des produits peut aussi s'arrêter brutalement. Ce fut le cas en 1999, puisque l'annonce de la suppression de quelques produits (LINDANE, ATRAZINE notamment) a déclenché une vague d'achats massifs, par anticipation : cette année-là, les volumes commercialisés se sont accrus de + 11 %.

3. Répartition

L'agriculture est, de loin, le premier utilisateur de pesticides en France, puisqu'elle représente 90 % des utilisations totales. Le reste étant réparti entre les utilisations privatives, pour les jardins, 8  % du total, et les utilisations publiques, pour les espaces verts (entretien des espaces verts des collectivités locales, voiries, réseau SNCF, etc.).

Les produits utilisés diffèrent sensiblement selon les utilisateurs. Les fongicides sont massivement utilisés en agriculture (56 % des produits), tandis que les herbicides sont massivement utilisés pour l'entretien des jardins et des espaces verts (87 % des produits).

Cette répartition est donnée dans le tableau ci-dessous :

UTILISATION DES PESTICIDES

Répartition par utilisateurs - Données 2000 en tonnes

 

Agriculture

Jardins

Espaces verts

Total

Pourcentage

Fongicides

52 800

765

22

53 587

51 %

Insecticides

3 100

223

11

3 334

3 %

Herbicides

30 800

7 078

1 942

39 820

38 %

Autres

7 900

np

np

7 900

8 %


Total


94 600*


8 443


1 975


104 641


 


Pourcentage


90 %


8 %


2 %

 


100 %

Source : UIPP - UPJ, Synthèse OPECST

* en 2001, le tonnage s'établirait à 96.936 tonnes, soit une baisse de 2,5 %, compensant la forte baisse constatée en 2000.

Annexe 46 - LES DIFFICULTES D'ÉTABLIR DES COMPARAISONS SUR LA CONTAMINATION DES EAUX AUX PESTICIDES

Les comparaisons sur les teneurs des eaux en pesticides sont extrêmement délicates. Elles n'ont de sens que si elles portent sur les mêmes eaux, les mêmes sites, avec le même nombre de prélèvements, opérés dans des circonstances équivalentes.

Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, les interprétations sont sujettes à caution.

1. Les comparaisons dans l'espace.

Peut-on comparer les niveaux de contamination d'une région à une autre ? La comparaison entre sites ne peut avoir lieu qu'avec des méthodes de prélèvements communes. Les deux variables déterminantes à connaître avant toute comparaison sont :

le choix de sites. S'agit-il d'un réseau spécifique pour alimentation en eau potable - AEP - (type réseau DDASS, dont l'analyse portera sur les lieux de captage des eaux destinés à la production d'eau potable) ou d'un réseau dédié, spécifique aux pesticides, auquel cas les analyses portent sur les cours d'eau et les eaux souterraines susceptibles d'avoir été contaminées, à proximité de zones d'épandage ? Les concentrations relevées sur les réseaux dédiés sont évidemment plus importantes que les concentrations relevées sur des réseaux d'alimentation en eau potable.

le moment des prélèvements. Certains réseaux choisissent d'effectuer des prélèvements réguliers à date fixe ; d'autres procèdent à des prélèvements après les pluies, lorsque les effets de ruissellement sont au maximum. Dans ce deuxième cas, les concentrations relevées sont évidemment plus élevées que dans le premier, qui masque les pics dans la plupart des cas. Dans une étude sur les produits phytosanitaires, l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, précise d'ailleurs «en dépit du mode d'échantillonnage réalisé, réparti régulièrement sur l'année et ne privilégiant donc pas les périodes à risques, les niveaux de concentration rencontrés sont parfois très élevés (jusqu'à plus de 100 fois le seuil de 0,1ug). Ceci laisse à craindre qu'à des périodes non échantillonnées dans l'étude, des concentrations puissent être encore plus élevées ». On estime en général que les pics sont de l'ordre de dix fois les valeurs médianes.

Les différences régionales, et même départementales peuvent être très importantes, notamment pour les rivières qui retracent des contaminations localisées. Ainsi, même si l'étude du Corpep - cellule d'orientation régionale pour la protection des eaux contre les pesticides- en 2000 sur la contamination des eaux superficielles de Bretagne aux produits phytosanitaires montre indiscutablement une forte contamination des eaux, celle ci n'est pas générale : en 2000, l'Aven, dans le Finistère, était quasiment exempt de contamination aux pesticides alors que la plupart des rivières d'Ille-et-Vilaine étaient très fortement contaminées.

Chaque réseau d'observation obéit à une logique propre (suivre la qualité des eaux utilisées pour l'eau potable, suivre l'évolution de la ressource dans son ensemble, suivre les lieux les plus exposés...) pouvant conduire à des appréciations et des mesures différentes. Le tableau suivant reprend les mesures d'atrazine et de diuron dans les différents réseaux d'observation.

Teneur des eaux en atrazine et diuron (1998-1999) en ug /l

 

Valeur moyenne

Valeur maxi
(90  % des cas)

Valeur maxi

 

Atrazine

Diuron

Atrazine

Diuron

Atrazine

Diuron

Eaux superficielles
Réseau national
(400 points)

0,14

0,13

0,26

0,3

12

20,2

Réseau d'usage
(854 points)

0,11

0,1

0,27

0,2

5,5

2,7

Réseau local
(123 points)

0,36

0,27

0,99

0,6

7

15,8

Eaux souterraines
Réseau national
(1140 points)

0,07

0,03

0,1

0,05

2,5

3

Réseau d'usage
(2731 points)

0,03

0,03

0,05

0,05

0,9

0,8

Réseau local
(307 points)

0,13

0,02

0,23

0,02

13,5

0,2

Source : IFEN - Études et travaux n° 34
Atrazine : désherbant de maïs
Diuron : désherbant à usage mixte agricole/non agricole


2. Les comparaisons dans le temps

Les comparaisons sur un même site montrent la permanence de certaines contaminations (dans les nappes) ou leur irrégularité (en rivière), l'étude Corpep sur les rivières de Bretagne montrait des écarts de 1 à 370 sur une même rivière entre février et mai par exemple (0,03 ug d'atrazine par litre en février, 11,1 ug/litre en mai).

Les comparaisons dans le temps à l'échelle régionale appellent les mêmes réflexes de prudence que ceux évoqués dans le cas des comparaisons dans l'espace. Là encore, deux variables sont déterminantes :

- Le choix des sites. Les analyses portent-elles sur les mêmes sites ? Le travers le plus .déformant concerne les abandons de captage. Les premières analyses du Bassin Seine-Normandie sont un exemple typique de ce type de déformation. Une carte d'exposition à l'atrazine sur les années 1990-1995 montrait 30 captages avec des concentrations d'atrazine comprises entre 1 et 2 ug/l (repérés par des points orange) et 9 captages avec des concentrations supérieures à 2 ug/l (repérés par des points rouges). En 1995, la carte comparable ne montre plus que 5 points orange et 1 point rouge. La situation était améliorée... En effet, les captages à risques avaient été fermés ou n'étaient plus surveillés. (Ces travers ont disparu. Les analyses menées par l'agence Seine Normandie sur la qualité des eaux souterraines sont aujourd'hui tout à fait remarquables)

- La méthodologie de prélèvements : Il faut être extrêmement prudent dans les comparaisons, sur plusieurs années, tant les chiffres les plus simples (proportion de captages à telle concentration part exemple) peuvent induire en erreur. Ces risques peuvent être illustrés par les résultats dans la contamination des rivières de Bretagne au glyphosate (herbicide total à usage mixte, agricole et non agricole).

Evolution du glyphosate dans les rivières de Bretagne

 

Nombre de recherches

% d'analyses
> 0,1 ug/l

% d'analyses
> 1  ug/l

Temps de recherche

Valeur maximale

1998

40

85 %

8 %

5 mois

3,4 ug/l

1999

21

90 %

10 %

7 mois

1,68 ug/l

2000

77

62 %

5 %

11 mois

1,15 ug/l

Source : CORPEP - étude de la contamination des eaux superficielles de Bretagne par les produits phytosanitaires en 2000.

Une lecture rapide conduirait à dire que la situation (au regard de la contamination des rivières en glyphosate) s'est détériorée en 1999, puisque la proportion d'analyses très mauvaises (supérieures à 1 ug/l soit10 fois le seuil de potabilisation) est passée de 8 % en 1998 à 10 % en 1999, avant de s'améliorer en 2000 (5 % en 2000).

Une lecture attentive conduit à nuancer cette appréciation :

- passer de 8 % à 10 % de dépassement n'est pas forcément un signe de détérioration, si, comme c'est le cas, les 10 % ont été calculés sur les seules rivières les plus polluées, alors que les 8 % étaient calculés sur les sept rivières du réseau ;

- passer de 10 % à 5 % de dépassement n'est pas forcément un signe d'amélioration, si, comme c'est le cas, les 10 % ont été calculés à partir d'échantillon sur 7 mois, tandis que les 5 % ont été calculés sur 11 mois ;

Les comparaisons appellent une grande vigilance, ne peuvent êre effectuées que sur des réseaux suivis avec une grande rigueur. On observera à ce propos que dans les 115 pages du rapport que l'IFEN a consacré aux pesticides dans les eaux, à aucun moment le mot de « dégradation » n'est mentionné.

Annexe 47 - L'ATRAZINE

L'atrazine est un herbicide. Il agit en bloquant la photosynthèse des végétaux (production de glucides à partir de gaz carbonique présent dans l'air, en employant la lumière solaire comme source d'énergie).

L'atrazine fait partie de la famille des triazines, produits de synthèse organique parmi lesquels on trouve aussi la simazine et le therbuthylazine, désherbants utilisés en agriculture. L'atrazine est le nom générique d'une molécule. Les produits sont commercialisés sous différentes appellations. On compte plus de 30 produits à base d'atrazine (Buldozer, Iroquois, Belleter...).

L'atrazine est utilisé principalement comme désherbant du maïs et plus modestement, en arboriculture. Le maïs est gros consommateur d'herbicides. Tandis que la plupart des céréales ont besoin d'une protection au départ, au moment de la pousse, le maïs a besoin d'être désherbé au départ mais aussi pendant les 90 jours de la végétation. C'est pourquoi les consommations ont été très importantes. On estimait la consommation annuelle en France à plus de 5.000 tonnes.

L'atrazine présentait pour l'exploitant beaucoup d'avantages : facile à utiliser, efficace (la molécule conserve son efficacité dans le sol de 2 à 6 mois) et d'un faible coût. L'atrazine a donc été très couramment utilisé pendant quarante ans, entre son introduction en 1960 jusqu'à son interdiction, décidée en 2001.

1. La contamination des eaux brutes à l'atrazine

L'interdiction fait suite à l'inquiétude provoquée par la fréquence et l'importance de la contamination des eaux par l'atrazine. Cette contamination touche à la fois les cours d'eau, par ruissellement, et les eaux souterraines, par infiltration. Comme tous les pesticides de synthèse, l'atrazine n'existe pas dans la nature. Sa seule présence est un indicateur de contamination des eaux.

Les premières alertes remontent à la fin des années 80 lorsque les DDASS et DRASS -directions départementales et régionales des affaires sanitaires et sociales- ont constaté des dépassements de seuils d'atrazine dans les prélèvements d'eau potable.

Ces analyses ont été suivies de campagnes de mesures à la fois plus précises, puisque dédiées aux pesticides, voire même à la seule atrazine, et plus larges, puisque les analyses ne portaient plus seulement sur les eaux de captage d'eau potable, mais sur les eaux brutes, rivières et eaux souterraines (campagne de mesures de l'atrazine dans les eaux souterraines du Bassin Seine Normandie, par exemple). Ces différentes analyses ont révélé un certain nombre de faits majeurs :

- la fréquence des détections et des dépassements du seuil de 0,1 ug/l, seuil requis pour l'aptitude d'une eau à la production d'eau potable: La contamination des eaux à l'atrazine est très répandue en France au moins dans le voisinage des lieux des grandes cultures;

- la fréquence des détections et des dépassements du seuil de 0,1 ug/l dans les eaux souterraines : Si le ruissellement des pesticides ou rivières peut être compris, sinon toléré dans la mesure où la contamination est supposée momentanée, les infiltrations des pesticides dans les nappes sont les signes d'une pollution profonde et durable ;

- l'importance des dépassements : Les concentrations maximales observées peuvent être très élevées. Dans les années récentes, on relèvera par exemple une concentration de 29 ug/l dans les rivières de la Flume, en Ille-et-Vilaine, soit 290 fois le seuil de 0,1 ug/l et une concentration de 2 ug/l dans les nappes souterraines de Craie (Yonne), soit 20 fois le seuil ;

- la fréquence de la distribution d'une eau non conforme au regard du paramètre atrazine : La non conformité aux pesticides est souvent le premier élément de non conformité d'une eau aux normes de distribution. Sur les dix départements du Grand Ouest (départements des régions Bretagne - Pays-de-Loire et département des Deux-Sèvres, 2,7 millions de personnes ont été alimentées en 1997 par une eau non conforme) ;

- le faible effet des mesures de restriction d'usage. Les contaminations à l'atrazine subsistent plusieurs années après l'arrêt d'épandage. L'effet retard est important.

2. Métabolite et dégradation de l'atrazine

La molécule reste active assez longtemps (2 à 6 mois) mais se modifie avec le temps. Le processus de dégradation dans le sol commence une à deux semaines après l'application. La molécule se transforme et génère une nouvelle molécule sous l'action des micro-organismes. Cette nouvelle molécule, dite aussi métabolite, est le déséthylatrazine ou « DEA ».

Le rapport D-déséthyl/A-atrazine permet de mesurer la vitesse des transferts. En cas de pollution rapide (ruissellement en rivière ou une infiltration rapide dans une nappe), le rapport D/A est inférieur à 0,4 : l'atrazine n'a pas eu le temps de se transformer. En cas de pollution diffuse dans une nappe souterraine, le rapport D/A est voisin ou supérieur 1 : la molécule de base s'est transformée.

Ainsi, les pollutions dans les eaux de surface sont plutôt mesurées par la concentration d'atrazine (c'est le cas en Bretagne où les cours d'eau sont pollués à l'atrazine) tandis que les pollutions dans les eaux souterraines doivent plutôt être suivies par le métabolite. Dans le bassin Seine-Normandie, un tiers des captages en eaux souterraines a une teneur en DEA double des teneurs en atrazine. Tandis que les teneurs maximales en atrazine diminuent, celles en DEA augmentent. En 2000, plus de captages sont concernés par des valeurs supérieures à 0,1 ug/l en DEA qu'en atrazine (respectivement 32 % et 27 %).


3. La toxicité

La toxicité est avérée sur le milieu aquatique. La molécule a un effet inhibiteur sur les plantes aquatiques, et la toxicité aigue -entraînant la mort- apparaît à faibles doses (invertébrés : 0,2 à 7 mg/litre d'eau pendant deux jours d'exposition ; poissons : 5 à 15 mg/litre d'eau pendant quatorze jours d'exposition).

La dote létale (dose nécessaire pour tuer 50 % d'animaux témoins) est très élevée : entre 750 et 4.000 mg d'atrazine par kilo de poids d'animal ou d'oiseau (lapin : 750 mg, faisan : 2.000 mg, rat ou souris : 1.700 -4.000 mg).

Pour l'homme, l'atrazine est classé comme « produit nocif ». Cette nocivité se manifeste après inhalation ou contact dermique. Les risques d'effets graves apparaissent en cas d'exposition prolongée par ingestion. La dose journalière acceptable est de 40 ug/kilo de poids corporel. Les effets à long terme sur la reproduction sont suspectés. En revanche, l'atrazine a été classé non cancérigène par le Centre international de recherches sur le cancer en 1998.

Les limites de concentrations fixées par l'Union européenne pour l'eau potable (soit 0,1 ug de substance par litre d'eau) sont vingt fois plus sévères que le taux fixé par l'Organisation Mondiale de la Santé (2 ug/l) et deux cents fois plus sévères que le taux fixé en Australie. Aujourd'hui, les inquiétudes viennent moins de la molécule que de son métabolite, le DEA, considéré comme plus toxique que la molécule mère.


4. L'interdiction de l'atrazine

Le produit a été homologué en 1959, mais les restrictions d'usage se sont multipliées au cours des années 90 tant en raison des inquiétudes sur ses effets à long terme sur la santé (voir toxicité) qu'en raison de sa présence généralisée et parfois massive, dans les cours d'eau et les eaux souterraines voisines des lieux d'épandage.

En 1997, le Ministère de l'Agriculture et de la Pêche a restreint les usages, à la fois par une diminution des doses d'emploi (la dose homologuée en 1959 qui était fixée à 2,5 kg/ha/an a été successivement baissée à 1,5 en 1990, puis en 1997 à 1 kg/ha/an -avis JO du 15 février 1997), et par une restriction des usages (interdiction des épandages sur les zones non agricoles telles que jardins, fossés, bordures des voies... avis JO du 4 juillet 1997).

Des interdictions locales ont été décidées en 1998. Ce fut notamment le cas en Bretagne. Les préfets des quatre départements de la région Bretagne ont pris des arrêtés d'interdictions temporaires d'utilisation de l'atrazine à proximité des cours d'eau et des points de captage.

L'interdiction totale a été décidée fin 2001. Après le choix politique, annoncé en octobre 2001, l'interdiction a pris la forme d'un avis aux opérateurs par produit (avis du 27 novembre 2001). La date limite de distribution a été fixée au 30 septembre 2002. La date limite d'utilisation a été fixée au 30 septembre 2003.

On regrettera que cette décision importante ne figure ni sur le site Internet du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation, ni sur celui du Ministère de l'écologie et du développement durable.

Même si la France suivait l'exemple allemand qui avait également banni l'utilisation des triazines quelques mois auparavant, cette mesure d'interdiction a pu être contestée par de nombreux professionnels qui privilégiaient des mesures de restriction d'usage (en limitant les quantités épandues), plutôt que des mesures radicales d'interdiction. La profession relève en effet que l'atrazine reste homologuée dans la plupart des pays de l'Union européenne et en Amérique du Nord.

Il est clair que la décision est avant tout politique. Le fondement scientifique est ténu, dans la mesure où l'atrazine n'a que très peu d'impact avéré sur la santé et que les normes internationales n'imposaient nullement l'interdiction. Le produit reste d'ailleurs utilisé dans de nombreux pays. La décision se justifie néanmoins pleinement, tant à titre rétrospectif que prospectif.

D'une part, les précédentes mesures de restrictions d'usage n'ont pratiquement eu aucun effet sur les concentrations observées dans les eaux. L'atrazine est présent pratiquement partout. Les limitations étant sans effet, il a donc été décidé un arrêt total.

D'autre part, cette décision est clairement un signal politique fort d'appel aux changements de pratiques agricoles. L'interdiction de l'atrazine a rendu possible les mesures de restriction d'usage des autres principales molécules (la diuron et l'isoproturon).

Annexe 48 - LA CONTAMINATION DES RIVIÈRES DE BRETAGNE AUX PESTICIDES

Source : Etudes CORPEP - sur la contamination des eaux superficielles de Bretagne par les produits phytosanitaires - 1999 - 2000 - 2001

1. Méthodologie

Depuis cinq ans, le CORPEP (Cellule d'orientation régionale pour la protection des eaux contre les pesticides) suit la contamination des principales rivières de Bretagne aux pesticides. Les prélèvements d'eau sont opérés en période pluvieuse. Ce choix a des effets contradictoires. D'une part, le ruissellement est le principal vecteur de transfert des polluants. Les analyses suivent donc les pollutions en « temps réel » et permettent de connaître avec précision les différents pics de pollution dans les différentes rivières (les résultats sont nécessairement plus élevés que ceux d'autres agences qui procèdent par prélèvements à dates fixes, qui peuvent, par conséquent « passer à côté » des pics de pollution).

D'autre part, en cas d'orage, les polluants sont dilués et les concentrations mesurées sont faussées par la dilution dans les eaux. En toute rigueur, il conviendrait de compléter les mesures de concentration par des mesures de flux annuels.

Les comparaisons dans le temps et dans l'espace doivent prendre en compte les différences dans les méthodes et la fréquence d'analyses selon les années. Ainsi, en 1999, 289 matières actives ont été recherchées dans 8 rivières. En 2000, 65 matières actives ont été recherchées dans 7 rivières (l'Aven, l'Arguenon, le Gouessant, la Rance, la Seiche, la Flume et le Meu). En revanche, le suivi du Fremur a été abandonné en 2000). Un recentrage s'est donc opéré en 2000. La recherche de l'exhaustivité est en l'espèce coûteuse et inutile, et l'étude s'est concentrée sur les pics et sur les risques.

2. Résultats

Les principaux résultats sont les suivants :

§ Le nombre de molécules décelées dans les eaux de surface est de plus en plus élevé. Les analyses sont aussi de plus en plus performantes et abaissent les seuils de détection. Les substances de substitution des molécules faisant l'objet de restrictions d'usage ont aussi été décelées.

Sur les 65 matières actives recherchées, 23 ont été détectées à des concentrations supérieures à 0,1 ug/litre (Il n'existe pas de seuil réglementaire de qualité des eaux brutes superficielles. Pour les pesticides, le seuil retenu comme étant un seuil à risque est celui utilisé pour l'aptitude des eaux à la production d'eau destinée à la consommation humaine, soit 0,1 ug de substance par litre). Les substances les plus fréquemment décelées à des concentrations élevées sont les suivantes:

- l'atrazine herbicide agricole, désherbant du maïs (usage limité en Bretagne depuis 1998)

- la DEA molécule dérivée de l'atrazine

- l'isoproturon herbicide agricole, désherbant du blé

- le diuron herbicide à usage mixte (usage limité en Bretagne depuis 1998)

- le glyphosate herbicide à usage non agricole

- l'AMPA produit de dégradation du glyphosate

- l'aminotriazole herbicide non agricole

§ A l'inverse, l'importance des dépassements élevés (1 ug soit 10 fois le seuil) et les concentrations maximales ont, dans l'ensemble, baissé.

L'étude CORPEP permet ainsi d'évaluer les effets des mesures de restriction d'usage. L'impact est assez net sur les concentrations maximales. Les pics de pollution atteignent des niveaux beaucoup plus bas après l'interdiction. En revanche, l'impact est faible sur la fréquence de détection, même à des niveaux élevés. C'est en particulier le cas de l'atrazine. La molécule reste très fréquemment détectée deux ans après son interdiction d'usage. L'effet de l'interdiction est donc très progressif et décalé.

§ Ainsi, les différentes études de CORPEP soulignent l'existence d'une contamination chronique ou quasi chronique liée aux désherbants agricoles, ainsi qu'un problème de contamination lié au désherbage des zones non agricoles.

Les évolutions sont variables selon les molécules. Des baisses constatées sur certaines molécules (diuron, et dans une moindre mesure, atrazine) sont compensées par des hausses sur d'autres molécules (glyphosate, isoproturon), voire par l'apparition de nouvelles molécules non détectées les années précédentes (notamment les produits de substitution de l'atrazine).

3. Principaux résultats

(Voir tableau ci-après)


Principaux résultats de contamination des rivières de Bretagne aux pesticides

 

Atrazine
(désherbant maïs)

Diuron
(désherbant sélectif mixte)

 

1997

1998

1999

2000

2001

1997

1998

1999

2000

2001

Nombre de recherches

% d'analyses > 0,1 ug/l

% d'analyses > 1 ug/l

Pics observés (ug/l)

Lieu du pic

51

96 %

51 %

29 ug

Flume

62

81 %

24 %

4,1 ug

Arguenon

70

66 %

7 %

6,3 ug

Flume

77

64 %

9 %

11,1 ug

Flume



 

17

88 %

29 %

6,3 ug

Seiche

60

65 %

18 %

15,8 ug

Seiche

40

48 %

3 %

4,1 ug

Gouessant

77

22 %

1 %

1,6 ug

Gouessant



 
 

Isoproturon
(désherbant blé)

Glyphosate
(désherbant non agricole)

Nombre de recherches

% d'analyses > 0,1 ug/l

% d'analyses > 1 ug/l

Pics observés (ug/l)

Lieu du pic

19

71 %

-

0,5 ug

Flume

60

35 %

7 %

5 ug

Rance

61

38 %

15 %

7,7 ug

Gouessant

78

27 %

-

0,8 ug

Rance

 

-

-

-

-

-

40

85 %

8 %

3,4 ug

Seiche

21

86 %

10 %

4,7 ug

Seiche

77

56 %

5 %

1,1 ug

Arguenon

 

Annexe 49 - LES PESTICIDES DANS LES EAUX DE RUISSELLEMENT

Source : Audition de M. Jean-Marie MOUCHEL, Chercheur au Centre d'enseignement et de recherche « Eau, ville, environnement » - CEREVE - Ecole des Ponts - 13 mars 2002

§ Le ruissellement des pesticides

Une partie des pesticides est utilisée en milieu urbain, pour l'entretien des voiries, des espaces verts publics, des jardins des particuliers. Le niveau de formation et d'information sur les risques associés aux pesticides est souvent insuffisant et il est vraisemblable que la plupart des utilisateurs urbains surdosent les épandages de pesticides. La plus forte présence de surfaces imperméables en milieu urbain, ainsi que l'importance du drainage direct sans infiltration dans le sol accroît le risque de ruissellement des pesticides. L'importance du ruissellement des pesticides va dépendre de nombreux facteurs, que l'on peut classer par ordre d'importance décroissante comme suit :

- Les quantités épandues et la période d'épandage. Les concentrations maximales observées dans les eaux de ruissellement sont observées en avril, mai et juin;

- Le coefficient de ruissellement des sols, très variable selon les surfaces : le coefficient peut varier entre quelques pourcents (une terre humide permet au contraire l'infiltration) et 95 % (bitume non fissuré). Cette variabilité, marquée entre les surfaces est toutefois atténuée quand on raisonne au niveau d'un bassin versant aménagé, puisque surfaces perméables et imperméables s'équilibrent (même en ville, avec les fossés, les jardins...).

- Les propriétés des molécules. Une étude détaillée menée sur un petit bassin versant (une commune de banlieue) a montré que les pesticides utilisés par les particuliers avaient des coefficients de ruissellement plus faibles que ceux utilisés par les services techniques sur des surfaces de voirie en grande partie imperméables (1,6 % à 2,6 % pour l'aminotriazole, 5,1 à 5,4 % pour le bromacil, 2,5 % à 6,1 % pour le diuron, principaux pesticides professionnels utilisés dans les parcs et jardins dans ce secteur). Les faibles coefficients de ruissellement sont toutefois compensés par un effet volume important lié aux masses épandues.

§ Résultats

Un bilan a été réalisé dans le Bassin de la Marne (12.000 km2).

- Masses. La Marne véhiculerait chaque année de l'ordre de 15 tonnes de pesticides, issues des différents épandages, urbain et agricole. Un coefficient moyen de ruissellement de 0,3 % a été estimé pour les pesticides agricoles et 7 % pour les pesticides urbains qui sont en très grande majorité des herbicides.

Le parcours se présente comme suit :

Parcours des pesticides (Bassin de la Marne)


Epandage

 


Ruissellement

 


Marne

Agricole

5.200 T*

13,5 T


18 T

Rétention
et dégradation :
3 tonnes

Urbain

63 T

4,5 T

 

Apport final :
15 tonnes

* hors vigne (nappe)

- Concentration. Les concentrations, très variables selon les périodes de l'année peuvent être très importantes. Dans le ru qui draine la commune de banlieue étudiée, les concentrations moyennes hebdomadaires atteignent régulièrement 4 ug/litre pour une molécule (le diuron) et 7ug/litre pour toutes les molécules dosées (une dizaine de molécules ont été analysées parmi les plus utilisées en milieu urbain). Des pointes, probablement d'origine accidentelle, de plusieurs dizaines de ug/litre peuvent parfois être mesurées.

On rappellera que, en période d'épandage, les pesticides se retrouvent également dans les eaux de pluie météorite : 0,4 ug/l pour les molécules de la famille des triazines, essentiellement utilisées dans le monde agricole. Bien que ces molécules soient très utilisées, on estime que la concentration totale en pesticides (somme de toutes les molécules) est significativement plus élevée sans qu'il soit possible de donner d'ordre de grandeur précis.

Annexe 50 - LA COMMERCIALISATION DES PHYTOSANITAIRES

Il existe plusieurs milliers de pesticides, dont plusieurs centaines de pesticides utilisés en France. En Europe, la vente suit une procédure rigoureuse, en deux phases :

1. L'homologation au niveau communautaire

La première phase d'homologation, au niveau communautaire est prévue par la directive 91/414/CEE

Les pesticides sont analysés par un comité phytosanitaire permanent, qui détermine la liste des matières actives autorisées.

L'examen porte sur :

La toxicité, qui permet d'évaluer les risques pour le manipulateur et le consommateur par inhalation ou ingestion. La toxicité peut être aigue ou chronique par injection répétée de faibles doses,

L'écotoxité, qui permet de décrire le devenir du produit dans l'environnement (eau-sol-air).

L'examen par le comité permanent est préparé par un avis donné au niveau national, puis transmis aux autres États membres.

Lorsque la matière active reçoit un avis favorable, elle est autorisée pour une durée de 10 ans renouvelable, et figure parmi « la liste des matières autorisées » dite « liste de l'annexe I » (annexe de la directive).

La procédure s'applique évidemment aux nouvelles matières proposées depuis 1991. Les matières actives utilisées avant l'entrée en vigueur de la directive sont soumises à un réexamen, échelonné dans le temps.

L'échéance initiale, prévue pour 2003, soit 10 ans après la mise en vigueur de la directive, cependant plusieurs fois été reportée. Elle est aujourd'hui fixée à 2006.

A la suite de l'instruction des matières anciennes, soit la matière est inscrite sur la liste communautaire de l'annexe I pour une durée de 10 ans, soit son inscription est refusée et les autorisations antérieures de mise sur le marché sont retirées.

2. La mise sur le marché au niveau national

La deuxième phase, nationale, porte sur l'autorisation de vente.

L'homologation communautaire est la première étape nécessaire, mais pas suffisante. L'autorisation de vente dite aussi autorisation de mise sur le marché reste à l'appréciation des États membres. Ainsi, une spécialité peut être autorisée en France, mais pas dans un autre État, et inversement.

Cette autorisation est précédée d'un dossier biologique, qui prend en compte l'efficacité et l'intérêt du produit, compte tenu des conditions agronomiques et phytosanitaires du territoire. La dégradation de la qualité des eaux est un élément du choix.

Ce dernier paramètre est devenu déterminant, et à l'origine de la mesure française de l'interdiction de l'atrazine en 1999. L'atrazine est en effet le polluant dont on retrouve le plus de traces dans l'eau. Les dépassements du seuil de 0,1 ug/l - seuil officiel applicable à l'eau potable - sont nombreux et très importants, puisqu'ils peuvent dépasser 100 fois ce seuil. Le produit reste cependant utilisé ou utilisable dans la majeure partie des autres États de l'Union européenne.

Ce régime variable selon les Etats n'est pas propre à l'Union européenne. Ainsi, le DDT, interdit en Europe depuis les années 1970, reste encore massivement utilisé dans les pays en voie de développement, faute de produit de substitution qui permette d'éliminer les moustiques de manière aussi efficace. Le DDT est toujours considéré comme l'une des meilleures armes contre le paludisme : 30.000 tonnes de DDT seraient encore fabriquées chaque année.

Ces autorisations sont provisoires. L'Etat peut aussi décider de limiter les usages pendant certaines périodes ou sur certains lieux, voire de retirer l'autorisation de vente, ce qui fait cesser la commercialisation, et d'interdire l'usage de certains produits phytosanitaires (c'est le cas de l'atrazine, voir annexe spécifique).

ANNEXE 51 - LES UTILISATIONS NON AGRICOLES DES PESTICIDES 

(LES PESTICIDES DANS LES JARDINS

ET LES ESPACES VERTS)

Source : audition de M. Patrice CHÉROUX, Union des parcs et jardins (UPJ)

10 % des pesticides sont utilisés à des fins non agricoles, soit pour les jardins des particuliers, soit pour les espaces verts.

1. Les pesticides dans les jardins

Les Français font une utilisation massive de pesticides. Ils ont acheté, en 2000, 8.443 tonnes de pesticides (comparés à 110.000 tonnes/an de pesticides agricoles) pour leurs 13 millions de jardins.

Le « jardin à la française » se présente comme suit :

- surface moyenne : 960 m2

- surface médiane : 507 m2

- répartition : gazon 60 %

zones non cultivées 23,5 %

potagers 8,8 %

autres (haies, fleurs...) 7,7 %

Plus de 60 % des pesticides sont des désherbants banalisés (chlorate de soude, désherbant traditionnel des pelouses).

Existe-il un surdosage ? Globalement, non. L'épandage moyen est important, soit 6,8 kg/ha/an, tous produits confondus, ou 2,5 kg/ha/an hors chlorate de soude, qui représente à lui seul 5.325 tonnes, mais qui se dégrade très vite. La moitié seulement des jardins sont traités. Sur les seules surfaces traitées, l'épandage moyen serait donc de 13,4 kg/ha/an, tous produits confondus, et 5 kg/ha/an hors chlorate de soude, soit légèrement plus que l'épandage moyen agricole. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y ait pas de risque ponctuel ou localisé. Les risques seraient moins liés au surdosage, lié en particulier à l'utilisation de l'arrosoir, qu'aux comportements à risques qui consistent à verser les contenus des bidons dans les égouts ou les caniveaux, qui seront évacués avec le réseau des eaux pluviales. De très petites doses suffisent à contaminer les eaux des rivières.

Les particuliers sont très peu avertis des précautions à suivre. La formation des distributeurs dans les 1.200 points de vente spécialisés est très insuffisante. Contrairement aux règles prescrites aux applicateurs des collectivités, les distributeurs pour les particuliers n'ont aucune obligation de formation. La concurrence des grandes surfaces non spécialisées où les produits sont en vente libre n'incite pas les points de vente spécialisés à développer les actions de formation.

Par ailleurs, c'est pour les pesticides utilisés par les particuliers que les solutions de rechange écologique sont les plus faciles à mettre en oeuvre, et les plus efficaces notamment en ce qui concerne les insecticides. Les exemples suivants sont issus d'un rapport de la chambre des communes du Canada sur les pesticides (« Pesticides, un choix judicieux s'impose, mai 2000 »). Citons par exemple « le compagnonnage, qui consiste à planter autour des plantes à protéger d'autres des plantes qui éloignent les insectes (capucines, géraniums, coriandre éloignent les pucerons des rosiers...) », ou encore « l'utilisation de « tisanes naturelles » telles que des mixtures de rhubarbe, d'oignons, d'ail et de savons, radicales pour chasser les insectes... ».

2. Les espaces verts

Les « espaces verts » sont ceux des collectivités locales (parcs et jardins, trottoirs, terrains de sport, cimetières...), des terrains de golf et des terrains des infrastructures de transport (bords d'autoroutes, SNCF...). Cette utilisation est importante

En 2001, la quasi totalité des 1.975 tonnes utilisées est constituée d'herbicides. Les collectivités locales consomment 70 % du total. Les golfs consomment peu d'herbicides, leurs utilisations concernent surtout les fongicides. La SNCF, souvent dénoncée, est un utilisateur important parce que repérable, mais qui est aujourd'hui secondaire depuis qu'elle s'est engagée dans la baisse des utilisations (voir annexe « la SNCF et les pesticides »).

Les applications professionnelles (terrains de sports, autoroutes, SNCF, golfs...) sont soumises à des conditions d'agrément : pour dix applicateurs, un au moins doit être agréé. Cette condition de formation et d'agrément ne s'applique pas aux collectivités locales. La formation est seulement recommandée. Beaucoup de professionnels estiment que les applicateurs des collectivités locales surdosent les épandages de pesticides, ce qui est particulièrement regrettable car les pesticides sur des surfaces imperméables ruissellent très rapidement.

Annexe 52 - LA S.N.C.F. ET LES PESTICIDES

Source : SNCF - Service environnement

Jusqu'au milieu des années quatre-vingt, la préoccupation environnementale n'était évidemment pas une priorité de la SNCF, dont la première mission, depuis les débuts du chemin de fer en 1845, a toujours été d'assurer le transport des voyageurs en toute sécurité. Cet objectif passait par un désherbage massif et radical, sur et le long des voies, pour assurer une parfaite visibilité et un transport sécurisé. La qualité de la voie repose en effet sur la qualité du ballast, ce qui suppose qu'il n'y ait ni terre ni végétation. La végétation a deux effets négatifs à proscrire : d'une part elle fait remonter la terre et le sable et nuit, par conséquent, à la qualité du ballast ; d'autre part elle entrave la sécurité en réduisant la visibilité le long des voies et le freinage des locomotrices.

Le tournant a été pris au milieu des années quatre-vingt. C'est de cette époque que datent la première pression politique sur les transporteurs ferroviaires et les premières accusations montrant « le chemin de fer comme étant le premier responsable de la consommation d'herbicides ».

La suspicion vis-à-vis de la SNCF était justifiée par des considérations objectives : la SNCF -ou son émanation, le Réseau ferré de France - est le deuxième propriétaire foncier de France (après l'armée) et hérite d'un réseau historique qui présente d'incontestables vulnérabilités du point de vue environnemental. Le réseau a, d'emblée, été construit dans les vallées (par commodité, et pour éviter les pentes !), c'est-à-dire près des cours d'eau et des nappes.

A partir de 1984, la SNCF décide de suivre l'utilisation des pesticides. En intervenant :

- dans le domaine technique (par l'utilisation de « trains désherbeurs » munis de caméras de reconnaissance de végétation, qui permettent de doser l'épandage) ;

- dans la gestion des épandages en sélectionnant des sites à risque et en s'assurant que les différents opérateurs ne passent pas aux mêmes lieux (outre les sept trains désherbeurs nationaux, chaque région ferroviaire a un train régional,, les applicateurs locaux et les sous-traitants interviennent aussi localement) ;

- dans la sélection des produits, en supprimant notamment l'usage de l'atrazine, à la demande des ministères de la santé et de l'environnement ;

- et surtout en réduisant les usages. Entre 1904 et 2001, la consommation des produits phytosanitaires par la SNCF a été réduite de 40 %, passant de 397 à 236 tonnes. Les principaux désherbants sont présentés dans le tableau ci-dessous :

PRODUITS PHYTOSANITAIRES

UTILISÉS PAR LA SNCF (TONNES)

Produit/Année

1984

2001

diuron

120

68

triazine

68

0

Autres désherbants

168

118

Débroussaillants

41

50

Total

397

236

Source : SNCF, délégation environnement

Pour la SNCF, cette diminution ne pourra se poursuivre au même rythme dans les années à venir.

D'une part, même si tous les réseaux ferroviaires européens travaillent sur ces questions, les solutions de rechange, notamment par chauffage, sont encore imparfaites, dans la mesure où les voies sont chargées de capteurs électriques sensibles à la chaleur.

D'autre part, les efforts de la SNCF ne sont pas toujours compris du grand public. La réapparition de la végétation dans les petites gares donnent une impression de négligence, de mauvais entretien. L'effort d'utilisation des pesticides devra être ciblé sur des zones sensibles.

Y a-t-il un risque « pesticide » propre à la SNCF ? La SNCF reste un utilisateur important de pesticides, de façon très concentrée sur une petite portion de territoire. L'emprise du sol de la SNCF et du réseau ferré en France est de 115 000 hectares. Les voies représentent 70 000 hectares (voies + abords). La surface traitée est de 55 000 hectares. Rapportée à la surface traitée, la consommation de pesticides par la SNCF a beaucoup baissé. Elle est passée de 7,2 kg à l'hectare en 1984, à 4,29 kg à l'hectare aujourd'hui, soit une consommation comparable à celle utilisée en agriculture.

Annexe 53 - LE RÉGIME JURIDIQUE DES PÉRIMÈTRES DE PROTECTION


Source : Service des collectivités territoriales du Sénat, OPECST

1. L'obligation de protection des captages d'eau

Les collectivités locales sont responsables de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, « patrimoine commun de la nation », aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'environnement.

Aux termes de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, l'institution de périmètres de protection immédiate et rapprochée est obligatoire pour tous les points de captages déclarés d'utilité publique. La seule exception vise les captages naturellement protégés, qui doivent cependant être reconnus d'utilité publique. La première loi sur l'eau du 6 décembre 1964 avait rendu l'établissement des périmètres de protection obligatoire, depuis, pour tout nouveau captage créé après la date de publication de la loi (le 12 décembre 1964, disposition reprise dans l'article L 20 du code de la santé publique) ; la seconde loi sur l'eau du 3 janvier 1992 s'appliquait cette fois à tous les captages. L'article 13-1 de la loi donnait un délai de cinq ans, soit jusqu'au 5 janvier 1997, pour la mise en place des périmètres.

L'absence de périmètres de protection peut engager la responsabilité du service de distribution d'eau potable, du maire de la commune d'implantation du captage, ou de l'Etat.

Les périmètres de protection sont au nombre de trois, selon l'article L. 1321-2 du code de la santé publique.

a) Le périmètre de protection immédiat.

Il s'étend généralement dans un rayon de quelques dizaines de mètres autour du point de captage. Les terrains concernés doivent nécessairement être acquis en pleine propriété par la commune. Toutefois, si certains des terrains visés dépendent du domaine de l'Etat, ils ne peuvent donner lieu qu'à une convention de gestion.

La commune peut choisir de recourir à l'expropriation ou à la cession amiable ou encore à l'échange de parcelles (à partir d'une réserve foncière, qui peut être celle de la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural - SAFER -).

Sur ce périmètre, les seules opérations autorisées sont liées à l'entretien des installations de prélèvement d'eau, de la clôture obligatoire et au maintien de la couverture herbacée sans pâturage, avec fauche et évacuation de l'herbe.

b) Le périmètre de protection rapprochée

Il couvre généralement une dizaine d'hectares autour et en amont hydraulique de l'ouvrage. L'objectif est de protéger le captage de la migration souterraine des substances polluantes.

Les activités, installations ou dépôts peuvent être réglementés ou interdits s'ils risquent de nuire à la qualité des eaux (épandage, labour, fertilisation).

Afin de faciliter la mise en oeuvre des prescriptions, les collectivités pourront utilement acquérir par expropriation pour cause d'utilité publique, ou par voie amiable, les terrains fonciers concernés, éventuellement à l'occasion d'une opération de remembrement.

Les exploitations agricoles dont le siège est situé dans un périmètre de protection déclaré d'utilité publique sont éligibles pour les travaux au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, cofinancé par l'Etat et l'Agence de l'eau.

c) Le périmètre de protection éloignée

L'instauration de ce périmètre est facultative. Elle doit permettre de renforcer la protection contre les pollutions permanentes ou diffuses. Le périmètre de protection éloignée correspond à la zone d'alimentation du point d'eau, et parfois même à l'ensemble du bassin versant.

2. La procédure et le financement de mise en place des périmètres de protection

a) La procédure

La procédure de mise en place des périmètres de protection comprend une phase technique et une phase administrative. Les périmètres sont définis, après une étude hydrogéologique effectuée par un hydrogéologue agréé, et prescrits par une déclaration d'utilité publique. La procédure est décrite par une circulaire du 24 juillet 1990 (JO du 13 septembre 1990).

Comment mettre en place les périmètres de protection ?

- Délibération de la collectivité (commune ou établissement de coopération intercommunale) sollicitant la détermination d'un périmètre de protection.

- Etude préliminaire d'environnement comprenant l'inventaire de la pollution des sols et des points de pollutions potentielles sur le bassin d'alimentation du captage.

- Etude hydrogéologique comprenant trois volets : Caractéristiques hydrogéologiques du secteur, vulnérabilité de la nappe, inventaire des risques. Ces études sont réalisées par ou soumis à l'avis d'un hydrogéologue agréé désigné par hydrogéologue coordonnateur départemental.

- Proposition de périmètre. L'hydrogéologue donne un avis sur les limites du périmètre (périmètre de protection immédiat -PPI- périmètre de protection rapprochée- PPR-). Le PPI est autour du lieu de captage, mais l'hydrogéologue peut aussi déterminer des « satellites » de protection immédiate, disjoints du captage en cas de points d'infiltration clairement identifiés ( gouffre).

- Proposition de servitude comportant des interdictions (interdiction de forage, de création de plan d'eau, d'épandage dangereux...) et des servitudes (conditions de stockage de produits dangereux, condition d'épandage d'effluents agricoles, mise en conformité des installations d'assainissement...)

- Enquête publique ouverte par arrêté préfectoral. Elle comprend la désignation d'un commissaire enquêteur, l'envoi de notifications individuelles aux propriétaires concernés, l'enquête elle même, après affichage en mairie, et le rapport du commissaire enquêteur. Elle est complétée par des enquêtes parcellaires en cas de projet d'expropriation.

- Avis du conseil départemental d'hygiène (ou du conseil supérieur d'hygiène publique de France pour les captages les plus importants) sur les mesures de protection.

- Arrêté de déclaration d'utilité publique - DUP- instituant la protection et définissant les conditions d'autorisation d'utiliser l'eau.

- Inscription de la DUP aux hypothèques (aux frais de la commune). Cette inscription est obligatoire (article 36 du décret du 4 janvier 1955).

- Information individuelle de chaque propriétaire concerné, par la commune.

- Inscription des servitudes de la DUP en annexe du plan d'occupation des sols par arrêté du maire.

- Acquisition des terrains du PPI et mise en place de clôture.

- Application des servitudes du PPR. L'acquisition foncière n'est pas obligatoire, les servitudes sont sous le contrôle du juge, elles ne doivent pas être excessives (l'interdiction de construction est excessive)

- Éventuellement indemnisation des servitudes

- Suivi des servitudes sous le contrôle du juge (un permis de construire ne précisant pas les conditions d'assainissement dans une construction située dans le PPR constitue une erreur manifeste d'appréciation) et des services déconcentrés de l'Etat. Certaines communes ont également des services consacrés au respect de la DUP.

b) Le financement

Il convient de distinguer les travaux et les compensations financières éventuelles.

- Concernant les travaux de protection, la création des périmètres de protection est aidée par les agences de l'eau. Aux subventions des agences (qui peuvent atteindre 60 % des travaux concernés), peuvent s'ajouter pour les communes rurales, les subventions du Fonds national pour le développement des adductions d'eau (FNDAE). Le département et la région peuvent également subventionner ces travaux.

- En revanche, les communes ne perçoivent aucune compensation financière. Dans la mesure où la préservation de l'eau et des points de captage est un devoir, une mission obligatoire, aucun mécanisme d'aide ne semble avoir été prévu, y compris pour les communes qui comptent plusieurs points de captage d'eau sur leur territoire et connaissent des conditions d'aménagement du territoire et de développement économique particulières.

Des difficultés surviennent notamment lorsque les unités de production se situent dans une commune différente de celle des points de captage. Il y a alors un décalage complet entre les contraintes imposées à une commune et les ressources financières qu'elle retire du prélèvement des eaux. Cette situation pourrait être améliorée lors de l'examen d'un prochain projet de loi sur l'eau.

Annexe 54 - SITUATION DES PÉRIMÈTRES DE PROTECTION EN 2001

Source : ministère de l'écologie et du développement durable, compte rendu d'activité de la police de l'eau et des milieux aquatiques 2001.

Régions

Points de prélèvements AEP

Points bénéficiant d'un PP

Pourcentage

Alsace

1 448

1 046

72,2 %

Aquitaine

1 193

641

53,7 %

Auvergne

2 844

764

26,9 %

Bourgogne

1 393

781

56,1 %

Bretagne

799

377

47,2 %

Centre

1 352

327

24,2 %

Champagne- Ardennes

1 714

684

39,9 %

Corse

1 116

115

10,3 %

Franche-Comté

1 203

257

21,4 %

Ile de France

763

290

38,0 %

Languedoc-Roussillon

3 356

915

27,3 %

Limousin

1 812

736

40,6 %

Lorraine

2 320

925

39,9 %

Midi-Pyrénées

2 437

229

9,4 %

NPDC

805

397

49,3 %

Basse Normandie

849

242

28,5 %

Haute Normandie

502

261

52,0 %

PACA

2 086

503

24,1 %

Pays de Loire

327

98

30,0 %

Picardie

990

532

53,7 %

Poitou-Charentes

518

218

42,1 %

Rhône-Alpes

5 987

2 401

40,1 %

DOM (4 régions)

357

47

13,0 %

Total

36 171

12 786

35,3 %

AEP : alimentation en eau potable ; PP : périmètre de protection

Annexe 55 - LES LIMITES JURIDIQUES DE L'ARTICULATION ENTRE LE REGLEMENT ET LE CONTRAT

L'EXEMPLE DU PROGRAMME DE MAITRISE
DES POLLUTIONS D'ORIGINE AGRICOLE (PMPOA)

Source : Mme Isabelle DOUSSAN - Chercheur INRA

1. Présentation du dispositif juridique du PMPOA

Ce programme présente la particularité d'associer un volet réglementaire (A) à un volet contractuel (B).

a) Le volet réglementaire

Bien que les activités agricoles, et plus particulièrement les élevages, entrent depuis longtemps dans le champ d'application du droit de l'environnement, la transposition de la directive du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles a obligé l'Etat français à renforcer sensiblement les règles de police administrative visant à prévenir ces pollutions. Ainsi, plusieurs arrêtés ministériels pris en application de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement renforcent les mesures relatives aux conditions de stockage du lisier, au traitement des effluents, ainsi qu'aux opérations d'épandage, en fixant, notamment, une quantité maximale d'azote par hectare et par an (5(*)).

Toutefois, si l'ensemble de la réglementation applicable aux élevages, ainsi qu'aux opérations de fertilisation des sols par des engrais d'origine animale est complété et rendu plus contraignant, il ne s'agit là que de la première étape du processus de « maîtrise » des pollutions par les nitrates agricoles.

a) Le volet contractuel

La seconde étape a consisté à épauler ce dispositif réglementaire de mesures d'ordre financier, consistant essentiellement à octroyer des aides publiques par le biais de contrats et, dans une moindre mesure, à soumettre les exploitations d'élevages à la « redevance pollution » perçue par les agences de l'eau (6(*)). C'est l'accord du 8 octobre 1993 (7(*)) qui prévoit l'octroi d'aides publiques aux exploitants agricoles destinées à réaliser les travaux nécessaires «pour se mettre en conformité et prévenir la pollution des ressources en eau par les déjections animales». L'affectation des aides est d'ailleurs très clairement indiquée par le «comité national de suivi» chargé de la mise en place du programme, qui précise que «les aides de l'Etat ont pour objectif la mise en conformité de l'élevage vis à vis de la réglementation des installations classées».

En conséquence, les obligations contractuelles de l'éleveur sont déterminées en fonction de cet objectif et sont définies conformément aux dispositions relatives au risque de pollution des eaux par les nitrates, édictées au titre de cette législation. Il est d'ailleurs intéressant de préciser que toutes ces prescriptions techniques figurent dans le contrat, même lorsqu'elles ne donnent pas lieu à une contrepartie financière (par exemple, l'obligation pour l'éleveur de respecter un taux d'azote par hectare et par an). On peut ainsi observer une identité parfaite entre les obligations contractuelles de l'éleveur et les prescriptions techniques édictées en matière de police des installations classées.

2. Les limites de la combinaison juridique du PMPOA

Même si elle n'est pas interdite par notre système juridique, l'articulation de deux techniques juridiques - réglementation et contrat - conduit à une confusion préjudiciable au système juridique dans son ensemble (8(*)). On assiste en effet à un déplacement du curseur : l'incitation économique (aide financière, exonération de la redevance pollution durant le temps du contrat) bénéficie à l'exploitant qui respecte la réglementation. Or, dans l'ordre juridique traditionnel, la réglementation est conçue comme établissant des « normes plancher » assurant une protection minimale, strictement nécessaire à la prévention des atteintes les plus graves à l'environnement. En revanche, les instruments économiques sont destinés à inciter les entreprises à aller au-delà et de ce fait à accepter des contraintes plus lourdes. Dans l'ordre juridique classique, deux schémas coexistent donc : l'un répressif qui vient sanctionner les comportements déviants de la norme, l'autre gratifiant, qui récompense, selon les règles d'une économie de marché, l'effort supplémentaire consenti par les particuliers au bénéfice de l'intérêt général. Or, actuellement, la construction juridique construite autour des activités agricoles mélange ces deux schémas pour n'en faire qu'un. L'espace neutre, correspondant au simple respect de la règle, et à ce titre n'appelant ni sanction, ni gratification, disparaît. Ne demeurent alors, en théorie, que deux catégories d'exploitants, les « sanctionnables » et les « méritants ».

Sur un plan pratique, les aides directes ont un coût financier et l'on peut douter que leur pérennité, dans le cas de leur extension à l'ensemble des agriculteurs, soit tout simplement envisageable. L'expérience du PMPOA en atteste. Dans ce programme, l'enveloppe financière nécessaire avait été gravement sous-évaluée conduisant ainsi à une dérive des coûts (8(*)). Par ailleurs, limité dans un premier temps aux exploitations les plus importantes, le programme a récemment été étendu à l'ensemble des élevages. En contrepartie, les aides sont désormais réservées à certaines zones géographiques considérées comme prioritaires en termes d'atteinte aux ressources en eau. Si cette nouvelle orientation du PMPOA permet de pallier les iniquités les plus flagrantes, puisque l'ancien système favorisait très nettement les exploitations les plus importantes, elle montre aussi que le coût financier d'une telle politique est un obstacle à sa généralisation.

Outre ces considérations d'ordre économique, il faut également rappeler l'opacité qui caractérise ces pratiques. Actuellement, les contrats du PMPOA, assimilables sur le plan de leur objet à une règle de police administrative, échappent, par leur nature contractuelle, à tout contrôle démocratique, alors que le public devrait disposer des mêmes moyens d'information et de contrôle juridictionnel et que des fonds publics sont engagés.

Par ailleurs, la mise entre parenthèses, dans les pratiques administratives, du recours à toute sanction dans le délai imparti à « la mise en conformité » des exploitations agricoles risque d'entraîner une marginalisation plus grande encore du recours à des procédures répressives (9(*)). En effet, la réticence des services administratifs à recourir à des procédures pénales concerne les exploitations bénéficiant des aides, mais aussi, en toute logique et « équité » pourrait-on dire, les exploitations n'en bénéficiant pas (10(*)).

Enfin, ce type de mesures incitatives conduit à rendre d'autant plus aiguë la question de l'effectivité de la réglementation. En effet, s'il faut « acheter » l'adhésion, le consentement des agriculteurs à la réglementation, la société est alors en droit d'attendre le respect des termes de ce contrat passé entre le monde agricole et l'Etat.

La construction juridique du PMPOA, pour déroutante et coûteuse qu'elle soit, pouvait au moins se révéler efficace. Par le jeu du contrat, l'administration semblait se donner enfin les moyens d'assurer le contrôle des exploitations et partant l'effectivité des règles juridiques. Or, il n'en est rien : la pratique a montré que, notamment en matière d'épandage, non seulement le respect des engagements contractuels de l'éleveur n'est pas contrôlé, mais qu'une minorité seulement d'agriculteurs a modifié ses pratiques (11(*)). Autrement dit, que les prescriptions permettant d'assurer une protection minimale des ressources en eau figurent dans un texte de police ou dans un contrat, elles ne sont pas respectées. En conséquence, la plus grande faiblesse du PMPOA serait moins juridique que politique et économique, dans le sens où ce programme exprime une nouvelle fois l'extraordinaire difficulté des pouvoirs publics à obtenir une modification sensible des pratiques agricoles.

Annexe 56 - LES LIMITES DU RECOURS À DES INSTRUMENTS JURIDIQUES VOLONTAIRES

Source : Mme Isabelle DOUSSAN - Chercheur INRA

Le recours à des instruments juridiques volontaires (entendus comme ceux nécessitant le consentement à la contrainte des personnes assujetties) dans le domaine de la protection de l'environnement est communément conçu comme un accompagnement des dispositifs réglementaires. Le recours à ce type d'instruments traduit la volonté des pouvoirs publics d'élargir la gamme des techniques juridiques dans un souci de plus grande efficacité du droit dans le domaine de la protection de l'environnement. La logique qui anime ces instruments est d'octroyer un avantage économique à la personne qui y consent. En d'autres termes, l'intérêt général est servi par la poursuite des intérêts des particuliers.

Deux exemples en droit français illustrent cette démarche dans le domaine agricole: les contrats agrienvironnementaux et la qualification au titre de l'agriculture raisonnée.

1. Les contrats agri-environnementaux

Si l'on excepte une timide tentative en 1985, c'est le règlement communautaire du 30 juin 1992, concernant les méthodes de production agricole compatibles avec les exigences de protection de l'environnement ainsi que l'entretien de l'espace naturel, qui marque le début d'une politique environnementale contractuelle dans le domaine agricole. Ce règlement prévoyait un système de contractualisation d'aides publiques destinées à encourager des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement (12(*)). L'agriculteur contractant acceptait des contraintes plus lourdes que le seul respect des réglementations existantes en contrepartie d'aides financières calculées en fonction des pertes de revenus et du surcoût entraînés par ses obligations contractuelles.

Toutefois, au regard de la politique tant agricole qu'environnementale mise en oeuvre par ces mesures, le résultat fut assez décevant : nombre très faible d'exploitations engagées, absence d'impact significatif en termes de changement des modes d'exploitation, améliorations mineures quant à la protection des espaces naturels (13(*)). En réalité, le système a contribué essentiellement au maintien de petites exploitations pratiquant déjà des méthodes de production respectueuses de l'environnement.

Moins d'une dizaine d'années plus tard, le système agrienvironne-mental a été sensiblement réformé par le règlement communautaire du 17 mai 1999 relatif au développement rural et, au plan national, par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, laquelle a crée les contrats territoriaux d'exploitation -CTE-.

Les CTE répondent, en partie, aux critiques formulées à propos des mesures agrienvironnementales. Ainsi, leur objet n'est pas limité à l'environnement, mais concerne également le domaine économique et de l'emploi. Ainsi, par l'association de ces trois volets, les exigences environnementales font partie intégrante de l'ensemble des contraintes s'imposant aux agriculteurs. Cette disposition s'inscrit dans une démarche plus globale visant à associer des méthodes de production respectueuses de l'environnement à une logique de marché, notamment de marchés des produits de qualité.

Toutefois, les contrats territoriaux d'exploitation ont semble-t-il souffert de certaines faiblesses qui ont conduit, entre autres, à leur abandon en 2002.

Il est certain que le dispositif s'est révélé assez complexe et d'une faible lisibilité pour les agriculteurs. On a pu observer sur le terrain la grande difficulté, et souvent l'impossibilité, à mettre en oeuvre de manière cohérente et simultanée les trois volets des contrats territoriaux d'exploitation. Soit l'aspect environnemental a pris le dessus, le contrat est alors, dans la lignée des précédentes mesures agrienvironnementales, le moyen d'aider financièrement des exploitations situées dans des zones difficiles et pratiquant déjà des méthodes de production respectueuses de l'environnement. Soit l'aspect économique l'a emporté, réduisant alors le volet environnemental à la portion congrue, le CTE se transformant alors sur le terrain en un contrat « de filière » selon une stratégie purement commerciale (14(*)).

Cependant, au regard des objectifs ambitieux de ces contrats, on ne peut que déplorer leur mise à l'écart trop rapide et s'interroger sur ce que pourront apporter les nouveaux contrats d'agriculture durable.

2. La qualification au titre de l'agriculture raisonnée

Le dispositif de qualification des exploitations, et de leurs produits, au titre de l'« agriculture raisonnée » (15(*)) est récent. Les textes prévoient la possibilité de « qualifier » les exploitations agricoles, et à terme les produits qui en sont issus, lorsque l'agriculteur met en oeuvre les « moyens techniques et pratiques agricoles conformes aux exigences du référentiel de l'agriculture raisonnée ».

Ce référentiel porte « sur le respect de l'environnement, la maîtrise des risques sanitaires, la santé et la sécurité au travail et le bien-être des animaux ». Or, en ce qui concerne la protection de l'environnement, on s'aperçoit que les engagements de l'agriculteur ne différent pas sensiblement du simple respect de la réglementation (16(*)). Le ministère de l'agriculture le reconnaît d'ailleurs lui-même puisque afin de bien distinguer la nouvelle qualification des contrats territoriaux d'exploitation, il est noté que seuls ces derniers vont « sensiblement au-delà des exigences réglementaires » (17(*)).

Ainsi, non seulement la plupart des articles du référentiel reprennent des contraintes existantes, mais celles qui sont présentées comme nouvelles, n'apportent rien, car elles figurent déjà, sous une formulation différente, dans les textes applicables (18(*)). Il en va ainsi par exemple des « exigences » selon lesquelles les éleveurs doivent « connaître les quantités d'effluents produites sur l'exploitation ». Sachant que la réglementation applicable aux élevages classés ainsi que celle concernant les zones vulnérables, fait obligation aux agriculteurs de tenir un plan d'épandage relevant notamment les quantités d'azote épandu, on peut supposer, a fortiori, que l'exploitant est déjà tenu de connaître les quantités produites. Il en va de même de l'article 20 du référentiel « exigeant » la connaissance des valeurs fertilisantes des différents épandus, sachant que pour les élevages soumis à autorisation et ceux situés dans les zones vulnérables, la réglementation oblige les agriculteurs à produire un bilan de fertilisation azotée. Il est plus loin « exigé » de l'agriculteur qu'il respecte les prescriptions des programmes d'action, obligatoires en zones vulnérables, étant d'ailleurs précisé que « l'azote ne doit pas être apporté en dehors des périodes d'interdiction »...

Autrement dit, la qualification au titre de l'agriculture raisonnée se situe dans le droit fil du PMPOA ; il s'agit d'employer un instrument de type incitatif -ici la qualification « agriculture raisonnée » qui, si elle est portée sur les produits agricoles, jouera le rôle d'un label- comme appui de la réglementation. Dans cette logique, un pallier supplémentaire est même franchi, puisqu'il ne s'agit plus seulement d'aider provisoirement des exploitants à mettre leurs entreprises aux normes, mais d'offrir une reconnaissance officielle et durable aux exploitants qui respectent la réglementation.

Par ailleurs, on peut craindre la confusion entraînée par l'apposition de la qualification au titre de l'agriculture raisonnée sur les produits agricoles. Le consommateur sera dans l'impossibilité de savoir que ce nouveau « label » ne lui « garantit » que le simple respect d'une réglementation minima (19(*)). Alors même que les attentes des consommateurs se font plus précises en termes de traçabilité des produits alimentaires, cette nouvelle qualification marque un recul du droit à l'information.

Plus généralement, cette nouvelle qualification met en lumière les limites du recours à des instruments volontaires dans le domaine de l'environnement. En effet, par principe, les « contraintes consenties » doivent aller au-delà des exigences réglementaires. Mais, d'une part, le dispositif doit être alors suffisamment clair et nettement incitatif pour jouer pleinement son rôle et d'autre part, et surtout, l'effectivité des instruments volontaires est alors subordonnée au respect par l'ensemble des exploitants de règles minimales de protection de l'environnement. L'instauration d'un « degré de protection supérieure » par des instruments volontaires suppose en effet qu'il existe un « degré de protection inférieure » qui soit effectif... A défaut, ce qui est actuellement le cas, ces instruments sont condamnés à servir de mesures incitatives au respect de la réglementation. Sauf à dénaturer le système juridique dans son entier, le recours à ces instruments ne peut être alors que provisoire, c'est-à-dire limité à des dépenses d'investissement et non de fonctionnement ou destiné à être modifié afin de dépasser les exigences réglementaires. En ce sens, on doit d'ailleurs signaler la position du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire à propos de la qualification au titre de l'agriculture raisonnée, qui se prononce pour « une logique de progression du niveau des exigences dans le temps » du référentiel.

Annexe 57 - LA POLICE DE L'EAU

La police de l'eau consiste à s'assurer de l'application de la réglementation relative à l'eau. La police de l'eau incombe pour l'essentiel aux services de l'Etat.


1. Les missions

Les missions incombant à la police de l'eau se sont beaucoup diversifiées. La mission traditionnelle qui remonte à la Révolution Française s'attache au maintien du libre écoulement des eaux, à la lutte contre les inondations et à la préservation de la salubrité publique (lois des 12-20 août 1792 et 8 avril 1898). La loi sur l'eau du 16 décembre 1964 a orienté la police de l'eau sur la qualité des rejets (assainissement et rejets des eaux usées.) La loi de 1976 sur les installations classées pour la protection de l'environnement contenait, elle aussi, des dispositions sur les rejets industriels dans les eaux. Durant près de deux siècles, la police de l'eau était donc tournée vers le contrôle des usages de l'eau.

La loi du 3 janvier 1992 a donné un tournant environnemental aux missions de la police de l'eau dont le but est étendu à la gestion équilibrée des milieux aquatiques et la protection de la qualité de la ressource dans toutes ses composantes (écosystèmes, zones humides...). La police de l'eau s'applique à toutes les eaux, superficielles, souterraines et même aux eaux territoriales.

Ainsi, la police de l'eau intervient sur quatre types de missions principales :

- les travaux sur les cours d'eau

- les prélèvements d'eau,

- l'assainissement

- l'eau potable

La police de l'eau, assurée par l'Etat, dispose d'une panoplie de moyens : des procédures assorties de sanctions.

Le principe d'autorisation et/ou de déclaration s'applique à tous les projets entraînant des prélèvements, des modifications de régime des eaux ou de déversements dans le milieu naturel. Les opérations et seuils de déclenchement sont prévus par les décrets 93-762 et 93-743 du 29 mars 1993.

Ce système est complété par un ensemble de sanctions administratives et pénales qui visent à en assurer l'efficacité. Concernant les sanctions administratives, le préfet peut, après une mise en demeure infructueuse, ordonner soit l'exécution d'office des mesures visant à faire cesser les troubles occasionnés par un ouvrage, soit la consignation auprès d'un comptable public de la somme nécessaire à la mise en oeuvre de ces mêmes mesures, soit encore l'arrêt temporaire de l'installation incriminée.

Concernant les sanctions pénales, le délit de pollution des eaux sanctionne le non respect des prescriptions liées à une autorisation accordée au titre de la police des eaux. Le juge répressif a la faculté d'ordonner, sous astreinte, des mesures visant à suspendre le fonctionnement d'une installation, restaurer le milieu aquatique ou à faire cesser une infraction. Pour toutes les infractions aux dispositions de la loi sur l'eau, les associations peuvent se porter partie civile.

2. L'organisation de la police de l'eau

Le rôle de la police de l'eau et des milieux aquatiques est confié à l'Etat. Elle est exercée localement par le préfet du département qui fait appel aux services extérieurs de l'Etat de plusieurs ministères placés sous son autorité.

Si le principe est clair, l'organisation pratique s'avère beaucoup plus complexe. Une très grande confusion caractérise la police de l'eau. Dans son bilan annuel de la police de l'eau et des milieux aquatiques, le Ministère de l'écologie et du développement durable mentionne cinq services différents chargés de la police de l'eau (DDAF, DDE, services maritimes, services de navigation, DDASS ...), mais la liste n'est pas exhaustive. Les précisions qui suivent sur la compétence de différents services sont données à titre indicatif.

- La police de l'eau des cours d'eau domaniaux navigables est confiée aux services de navigation (SN), une direction du Ministère de l'équipement, du logement et des transports

- La police de l'eau des cours d'eau domaniaux non navigables est confiée aux directions départementales de l'équipement (DDE),

- La police de l'eau des cours d'eau non domaniaux est confiée ou aux directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF),

- Les eaux littorales sont sous la surveillance des cellules qualité des eaux littorales -CQEL- dépendant des services maritimes du même Ministère.

- Les équipements et stations d'épuration sont de la compétence des DDE mais le suivi épandage de boues incombe à la DDAF

- Les directions départementales des affaires sanitaires et sociales -DDASS- contrôlent la qualité des eaux brutes destinées à l'eau potable ainsi que la qualité des eaux distribuées.

Signalons aussi, pour compléter la liste principale, la direction des services vétérinaires -DSV- dépendante elle aussi du Ministère de l'Agriculture, compétente pour surveiller les effluents d'élevage ; la Direction Régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement -DRIRE- compétente pour la surveillance des rejets des installations classées pour la protection de l'environnement, ainsi que les brigades départementales du Conseil supérieur de la pêche, surveillant la pêche sur les cours d'eau.

Des services sont normalement chargés d'assurer la coordination. La coordination de l'action des services au niveau départemental est assurée par les Missions interministérielles des services de l'eau -MISE-. Certains départements ont également créé les délégations interservices de l'eau -DISE, qui contrairement aux MISE ne sont pas de simples coordonnateurs mais ont une véritable ( ?) autorité sur les services départementaux.

Au niveau régional, les directions régionales de l'environnement, (DIREN) assurent moins une coordination des actions de police qu'une coordination des travaux et de la planification des actions de gestion de l'eau (accent sur les inondations ou sur l'assainissement...).

Certains départements « pour simplifier » ont aussi choisi de partager les compétences sur un critère géographique (le nord du département à la DDE, le sud à la DDAF...).

En dehors de ces services dédiés à la police de l'eau, les services chargés de la police générale, police et gendarmerie, peuvent également intervenir pour faire cesser des infractions manifestes et engager des poursuites.

La seule police de l'eau représente environ en France plus de 500 services différents. La plupart sont à la fois contrôleurs, tuteurs et « conseillers » des activités qu'ils sont censés contrôler, ce qui crée une confusion particulièrement regrettable.

En 2001, 27.600 dossiers ont été instruits dont les près des trois quarts concernaient des demandes de prélèvements d'eau.

Annexe 58 - LA PROTECTION DE LA RESSOURCE PAR LES SOCIÉTÉS D'EAUX MINÉRALES

Source : auditions de M. Claude THEVENOT, Direction environnement Nestlé Waters, et de M. Jean-Christophe BLIGNY, responsable de la gestion des ressources en eau Danone.

La montée des nitrates, au milieu des années 80, a entraîné des réactions radicales des sociétés distributrices d'eaux minérales. Les mesures de prévention des pollutions sont évidemment adaptées au contexte hydrogéologique de chaque source, mais s'inspirent d'une batterie de mesures articulées autour de trois points :

1. Un cahier des charges type pour les exploitations agricoles

Ce cahier de charges, appuyé sur les connaissances et les préconisations de l'Institut national de recherches agronomiques -INRA- comprend les dispositions suivantes :

. suppression de la culture du maïs qui modifie rapidement les teneurs des eaux en nitrates et pesticides,

. réduction de l'utilisation des engrais chimiques,

. interdiction de l'utilisation des pesticides,

. extensification de l'élevage, par réduction du nombre de têtes (unité de gros bétail - UGB) à l'hectare,

. mesures de gestion des terres (régulation des retournements...)

L'idée générale est de conserver l'activité agricole, préférable à l'urbanisation, mais de réduire les risques de pollution. Ce cahier-type peut être adapté, exploitation par exploitation, voire parcelle par parcelle.

2. Les « incitations financières »

Les financements concernent trois types d'actions :

- les aides financières liées au cahier des charges. Ces aides, pour Vittel et Contrex, ont été de 1.200 F/hectare pendant cinq ans (183 euros). 2.000 hectares ont été concernées soit un coût de 12 millions de francs (1.830 millions d'euros)... Cette dépense est répartie entre les communes, financées par la surtaxe sur les ventes d'eau en bouteilles, et les sociétés d'eaux minérales.

- les aides complémentaires. Ces aides sont financées par les sociétés d'eaux minérales. Il s'agit d'aides aux investissements (mise aux normes de bâtiments d'élevage, construction de plateformes de compostage...) et d'aides aux exploitations (agronomes et formateurs mis à disposition des chambres d'agriculture, sociétés de services fournissant à titre exclusif et gracieux les engrais, récupérations de déchets...). Les réussites agricoles locales sont également très aidées par une politique axée sur la qualité des produits (Reblochon, dans le cas d'Evian...),

- les acquisitions foncières. Vittel est propriétaire de plus de 60 % des terres agricoles du périmètre de protection. Malgré cet exemple, les sociétés considèrent que l'acquisition foncière ne s'impose pas dans la plupart des cas. L'option « cahier des charges » suffit. Quand elles ont lieu, les politiques d'acquisition se font surtout par échanges avec des terrains situés hors du périmètre (échange de 50 ha dans le PP contre 100 ha hors PP). L'idée n'est pas de supprimer l'activité agricole mais de la déplacer pour éviter les concentrations dans des zones vulnérables.

3. Actions sur l'environnement non agricole

En complément de cette action directe sur les agriculteurs, plusieurs actions diffuses intéressent les autres secteurs :

- collecte des eaux usées et des déchets. Les sociétés financent l'assainissement des communes du bassin et de nouvelles stations d'épuration. Il s'agit souvent de la principale dépense hors cahier des charges. Elles favorisent également la collecte des déchets à risques (récupération des huiles, solvants, auprès des garages...),

- équipements individuels. Afin d'éviter les citernes à fuel (qui se dégradent et fuient à terme), la Société Danone (Evian) octroie une aide de 1.000 euros pour aider au remplacement des chaudières à fuel par des chaudières à gaz et assure gratuitement l'enlèvement des cuves anciennes,

- contrôle des travaux. Un hydrogéologue veille à limiter les opérations à risques : stockage des carburants et entretien des matériels en dehors des PP, soutien au désherbage thermique des voies de la SNCF, sensibilisation des personnels des collectivités locales à l'utilisation des sels de déneigement, sensibilisation des élus locaux aux constructions en centres villes de préférence au mitage des pavillons individuels...

Sans être spectaculaires, les résultats sont satisfaisants. La dégradation a été stoppée. L'inflexion de tendance est amorcée. Le coût ne peut être nié. (Evian évalue le coût annuel total de ses actions à 0,5 millions d'euros). Mais pour les intéressés, « la reconquête des sites est moins caractérisée par des achats de terrains à prix d'or ou l'octroi de subventions généreuses que par une mobilisation constante des partenaires fondée sur la responsabilité de chacun dans la préservation de l'environnement ».

Annexe 59 - LES PRINCIPAUX PARAMÈTRES DE QUALITÉ DES EAUX

(Décret 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine à l'exception des eaux minérales naturelles)

Le décret distingue :

- les limites de qualité et références de qualité applicables à l'eau de consommation ;

- les limites de qualité, sous forme de valeur guide et de limites impératives applicables à l'eau brute, destinée à la production d'eau de consommation. Ces limites s'appliquent aux eaux de surface.

La présentation des paramètres varie selon qu'il s'agit de l'eau de consommation ou de l'eau brute. La présentation qui suit, qui rassemble dans un même tableau les différentes valeurs limites, reprend la structure retenue pour les paramètres de qualité des eaux brutes.

 

Unités

Eau destinée à la consommation

Ressource (limites de qualité)

Paramètres

 

Limites de qualité

Références de qualité

Eaux de surface

Eaux souterraines

Valeur guide

Valeur limite

A - Paramètres Organoleptiques

           

Couleur (échelle Platine/Cobalt)

mg/l

 

Acceptable

50

200

 

Turbidité (unité Jackson)

U.J.

1-2

0,5-2

-

-

 

Odeur

Tx Dilut.

 

Acceptable

20

-

 

Saveur

Tx Dilut.

 

Acceptable

-

-

-

B - Paramètres Physico-chimiques

           

Température

°C

-

25

22

25

 

pH

 

-

-

5,5 - 9

   

Chlorure Cl

mg/l

 

250

200

   

Sulfates SO4

mg/l

 

250

150

   

Sodium Na

mg/l

 

200

     

Aluminium total Al

mg/l

 

0,2

     

C - Substances indésirables

           

Nitrates NO3

mg/l

50

       

Nitrites NO2

mg/l

0,1

       

Ammonium NH4

mg/l

 

0,1

 

2

4

Hydrocarbures dissous

mg/l

   

0,5

1

1

Phénols

mg/l

   

0,01

0,1

0,1

Fer Fe

ug/l

 

200

     

Manganèse Mn

ug/l

 

50

     

Cuivre Cn

mg/l

2

1

     

Zinc Zn

mg/l

   

1

5

5

Phosphore P2O5

mg/l

         

Fluorures

mg/l

1,5

 

1,7

   

D - Substances toxiques

Arsenic As

ug/l

10

 

50

100

100

Cadmium Cd

ug/l

5

 

1

5

5

Cyanure CN

ug/l

50

   

50

50

Chrome total Cr

ug/l

50

   

50

50

Mercure Hg

ug/l

1

 

0,5

1

1

Nickel Ni

ug/l

20

       

Plomb Pb

ug/l

10

     

50

Antimoine Sb

ug/l

5

       

Sélénium Se

ug/l

10

   

10

10

H.A.P. (6 substances)

ug/l

0,1

   

1

1

E - Paramètres microbiologiques

           

Coliformes totaux

N/100 ml

   

50 000

   

Escherichia coli

N/100 ml

0

 

20 000

 

20 000

Entérocoques

N/100 ml

0

 

10 000

 

10 000

F - Pesticides

           

Par substance*

ug/l

0,1

 

2

2

 

Total

ug/l

0,5

 

5

5

 

Annexe 60 - LA FIXATION DES NORMES DE LA QUALITÉ DE L'EAU

Dans le domaine alimentaire, la plupart des seuils, limites et références de qualité adoptés en France et en Europe sont issus de « valeurs guides » déterminées au niveau international.

1. Les valeurs guides

Les « valeurs guides » sont recommandées par l'OMS - organisation mondiale de la santé- ou le JEFCA - Joint Expert Committee on Food Additives-, comité conjoint entre l'OMS et la FAO - Food and Agriculture Organisation. Le processus d'élaboration est le suivant.

L'estimation part d'une connaissance du danger et du risque.

Le danger est une propriété de la molécule. Il peut s'agir d'une perturbation physiologique, d'une lésion organique, d'une maladie, d'une altération des capacités et des performances (fertilité par exemple). Le risque est la probabilité d'être exposé au danger.

Il faut alors distinguer les éléments à effet déterminant et les éléments à effet probabiliste.

· Une molécule à effet déterminant est une molécule pour laquelle une relation dose-effet a été mise en évidence. Une trop forte concentration de plomb ou de fluor dans le sang, par exemple, a des effets connus sur la santé. Cette relation permet de déterminer un seuil d'exposition, déclenchant des effets critiques. Ce seuil est défini à partir d'études épidémiologiques chez l'homme (à partir d'épidémies, d'exposition professionnelle) ou d'études expérimentales chez l'animal.

On applique ensuite un coefficient d'incertitude, une marge de sécurité, pour tenir compte des différences de sensibilité entre espèces (le passage de l'animal à l'homme est affecté d'un facteur 10 à 100), et de différences de sensibilité entre individus (avec un nouveau facteur 10). Le facteur d'incertitude peut donc aller de 100 à 1.000.

· Les produits à effet probabiliste sont des éléments pour lesquels il n'y a pas de relation dose-effet. L'exposition à la molécule augmente la fréquence d'apparition de la maladie, mais la maladie peut aussi survenir chez les personnes qui ne sont pas exposées. Les molécules cancérigènes sont des molécules à effet probabiliste. La molécule aggrave le risque, mais le risque subsiste sans molécule. L'arsenic ou certains pesticides rentrent dans cette catégorie. L'objectif n'est donc pas le risque zéro puisque, par définition, il n'y a pas de risque zéro, mais est plutôt de fixer un risque, ou un « sur risque » acceptable, par exemple 1 cas pour 10.000 ou 100.000 personnes.

· Ces deux méthodes conduisent à déterminer une dose journalière tolérable (DJT), ou dose journalière admissible (DJA) (quand il s'agit d'un additif alimentaire par exemple) qui constitue la base des normes d'exposition. Ces doses sont souvent calculées en proportion du poids corporel.

Cette dose pouvant provenir de plusieurs sources, il est calculé ensuite la part qui revient à l'eau. Cette part varie entre 10 % et 80 %, selon la part de l'eau dans la source d'exposition. Ainsi, pour les métaux lourds par exemple, on estime que 90 % de l'exposition sont issus de l'alimentation. En revanche, certaines toxines peuvent être essentiellement d'origine hydrique, comme c'est le cas des microcystines, toxines issues des cyanobactéries présentes dans les eaux stagnantes.

La part qui revient à l'eau est calculée sur la base d'une consommation d'eau de deux litres par jour, pour une personne de 60 kg. Cette hypothèse paraît surestimée. Même si la consommation réelle d'eau est en fait assez méconnue (on connaît le volume tiré du robinet, mais pas la répartition faite selon les usages), elle serait plutôt voisine de 1,4 litre d'eau.

L'ensemble conduit donc à une valeur guide, établie par consensus scientifique.

2. La valeur limite

Cette valeur guide sert de référence à ce que deviendra ensuite une réglementation sous forme de concentration maximale autorisée (CMA) ou de valeur limite.

Il n'y a pas stricte concordance entre les valeurs guides internationales et les valeurs limites nationales. La réglementation nationale résulte aussi d'un arbitrage entre deux principes : le principe de précaution, qui vise à limiter les risques potentiels, et le principe dit ALARA « As Low As Reasonnably Achievable », c'est-à-dire aussi bas que possible. Cette demande tient compte du contexte naturel et du contexte local.

D'une part, il y a deux logiques différentes pour déterminer un seuil. Soit on accepte de développer un risque mineur pour tout le monde, même si l'on sait que le danger est réel pour une partie de la population. C'est le cas des « tourista » d'origine hydrique et bactérienne. La population est autochtone et de fait immunisée, mais un touriste extérieur est très vulnérable et développe des pathologies (diarrhées). Soit on est solidaire de la population la plus fragile (nourrissons, femmes enceintes, personnes âgées ou immuno-déficientes) et le seuil est alors fixé pour cette catégorie.

D'autre part, il ne paraît ni possible de faire totalement abstraction des conditions économiques et sociales des pays, ni souhaitable d'interdire tel ou tel produit consommé depuis des générations pour la seule raison qu'il contient quelques milliardièmes de gramme de trop de tel ou tel composant. Un Etat doit aussi faire avec son sol, son sous-sol et son passé.

C'est pourquoi les valeurs limites peuvent être différentes entre l'OMS et l'Union européenne (sur le cadmium et le bore par exemple), entre l'Union européenne et d'autres Etats (sur les pesticides par exemple), voire même entre les réglementations nationales et les valeurs de la directive européenne (la réglementation nationale pouvant seulement n'être que plus restrictive).


Exemple : Comment calculer le seuil des teneurs en eau
en microcystines ?

La microcystine est une toxine de cyanobactéries, appelée aussi algues bleues, qui sont des bactéries d'eau douce qui prolifèrent dans les eaux stagnantes. Dans plusieurs pays, les cyanobactéries ont provoqué des intoxications chez des personnes qui avaient bu de l'eau insuffisamment traitée ou mal traitée (adjonction de sulfate de cuivre pour détruire les algues). La microcystine LR a été identifiée comme étant la principale toxine des cyanobactéries.

Le calcul de la limite de qualité a suivi les étapes suivantes. Une étude chez les souris a permis d'évaluer la dose sans effet identifié observable (DSEIO) : 40 ug/kg de poids corporel. Cette dose a été appliquée à l'homme après prise en compte d'un facteur d'incertitude de 100 pour tenir compte du passage de la souris à l'homme, et d'un nouveau coefficient d'incertitude de 10, en raison du manque de données sur la toxicité chronique. La dose journalière tolérable a donc été fixée pour l'homme à 0,04 ug/kg de poids corporel.

Un facteur de 0,8 a été appliqué pour établir la contribution relative de l'eau de boisson. Le coefficient est souvent beaucoup plus faible pour les autres contaminants qui peuvent prendre la voie d'une contamination par des aliments, mais pour les cyanobactéries, la cause principale d'exposition est l'eau de boisson.

On arrive ainsi à une valeur guide, dite « provisoire » pour tenir compte de l'évolution des connaissances, reprise dans la réglementation française sous forme de référence de qualité à 1 ug/litre d'eau.

Le classement de substances cancérogènes

Le Centre National de Recherche du Cancer qui dépend de l'Organisation Mondiale de la Santé classe les substances selon quatre niveaux de cancérogénicité :

. Catégorie I : cancérogènes prouvées chez l'homme (arsenic, amiante..). Des résultats épidémiologiques concluent à une relation causale entre la substance et le cancer.

. Catégorie II a : cancérogènes probables (cadmium, PCB ...) Cette classe regroupe les substances pour lesquelles les connaissance épidémiologiques sont limitées mais avec des données animales concluantes constatant une fréquence accrue des tumeurs cancéreuses dans au moins deux espèces différentes.

. Catégorie II b : cancérogènes possibles (DDT ...). Dans ce cas, les connaissances épidémiologiques et les données chez l'animal sont limitées.

. Catégorie IV : absence d'effets cancérogènes.

En matière de cancérogénèse, il est admis que la dose admissible est celle qui entraîne dans la population générale un supplément de risque d'avoir le cancer pour une exposition durant la vie entière d'un millionième par rapport au risque de base. Cette dose est déterminée le plus souvent à partir d'une approche toxicologique qui suppose qu'il existe un seuil en dessous duquel il n'y a pas d'effet toxique. On admet qu'une dose n'ayant entraîné aucun effet chez l'animal n'aura pas non plus d'effet chez l'homme en appliquant un coefficient d'incertitude pour tenir compte de l'extrapolation à l'homme (coefficient de 100 à 1000).

Annexe 61 - MICROBIOLOGIE ET MALADIES HYDRIQUES

Sources : Henri Leclerc « Microbiologic agents associated with waterbones diseases - Critical review in microbiology - 2002 - ; audition de M. P. Baudeau, Institut de veille sanitaire.

1. Panorama

a) Les bactéries qui survivent dans l'eau

Le choléra : c'est la bactérie la plus connue, responsable de nombreuses épidémies mortelles en Europe au XIXe siècle. Le choléra se développe surtout dans les eaux stagnantes et dans les estuaires. La maladie n'a pas été éradiquée et demeure une cause fréquente de mortalité dans les pays pauvres. Il existe quelques cas sporadiques dans les pays développés (notamment aux Etats-Unis, à la suite de la consommation de crabes et de crevettes pas assez cuits). Le choléra est très sensible à la désinfection.

La salmonelle, responsable de la typhoïde, première cause de mortalité d'origine hydrique jusqu'à la seconde guerre mondiale. La bactérie est très sensible à la désinfection.

L'Escherichra coli, ou E-coli, bactérie de l'intestin, surtout dans le bétail, indicateur de contamination fécale. L'E-coli n'est pas directement toxique, elle a même a son utilité dans l'intestin, en supprimant des bactéries nuisibles, mais elle crée une toxine, la vérotoxine, qui entraîne des diarrhées et de hémorragies., tout comme la campylobacterie, surtout présente dans les intestins et par conséquent les fientes des oiseaux.

b) Les bactéries pathogènes qui se développent dans l'eau

Les pseudomonas, très fréquentes dans les eaux usées et les eaux pluviales. La bactérie est très résistante aux antibiotiques. Elle entraîne des diarrhées.

Les aéromonas, naturellement présentes dans l'eau claire, se développent dans les eaux usées et chaudes.

Les légionelles : on compte 42 espèces de légionelles dont une, la légionelle pneumophila, responsable de la maladie du légionnaire. Elle est peu sensible à la chaleur. La maladie est liée à l'inhalation de microgouttelettes.

b) Les parasites ou protozoaires

Ce sont des parasites dits « opportunistes », car ils se développent sur un hôte. Les plus connus sont les gardia et le cryptosporidium, découvert en 1955, à l'origine de l'épidémie du Milwaukee, en 1993. Ces parasites sont rejetés par les animaux et les hommes. Le cryptosporidium est résistant aux désinfectants. La dose infectieuse n'est pas connue avec précision mais pourrait démarrer avec un seul microorganisme.

c) Les virus

Parmi les virus présents dans l'eau, on compte le virus de l'hépatite A, le virus de l'hépatite E, plutôt confiné dans les milieux tropicaux, le virus commun des gastroentérites, qui comprennent plusieurs familles (virus de Norwich, de Sapporo, etc.).On compterait plus de 140 virus identifiés, dont la plupart se retrouveraient dans les selles. Le seuil de déclenchement des maladies est encore ignoré mais paraît très bas. Leur résistance aux traitements de désinfection est variable.

2. L'importance des contaminations

Attention, il n'y a pas de stricte concordance entre les contaminations bactériennes et l'apparition de maladies ou de troubles pathogènes.

D'une part, il existe des porteurs sains. L'exemple le plus connu est celui d'une cuisinière du XIXe siècle connue sous le nom de « Marie-Typhoïde ». Partout où elle travaillait, des gens mouraient. Elle était « porteuse saine » de typhoïde qui, faute d'une hygiène suffisante, se transmettait aux familles.

D'autre part, la gravité des troubles varie beaucoup selon les populations exposées. La forme habituelle est la diarrhée ou gastro-entérites aiguës- GEA La plupart évoluent vers une guérison spontanée, mais il existe des populations vulnérables aux contaminations hydriques, repérées aux Etats-Unis sous l'appellation YOPI, Young, Old, Pregnant, Immunodeficient - jeunes, personnes âgées, femmes enceintes et, surtout, immunodéprimés, quelle qu'en soit l'origine (transplantation, rougeole, SIDA, etc.). La quasi-totalité des 70 décès de l'épidémie de Milwaukee concernait des personnes atteintes du Sida. La société, par l'effet du vieillissement et des soins, a créé des personnes sensibles aux risques hydriques.

Enfin, l'importance des maladies d'origine hydrique est très sous-estimée. Un médecin voit, en moyenne, une gastroentérite par jour ; s'il en voit 4 ou 5, il est alerté, s'il en voit seulement deux au lieu d'une, cela passera inaperçu. Seules les épidémies sont repérées. On compte en moyenne deux épidémies par an, souvent à la suite de contacts entre des eaux contaminées et l'eau distribuée.

Selon une étude américaine, 10 à 50 % des gastroentérites sont liées à l'eau, avec la répartition suivante :

- 70 % des cas d'origine virale,

- 25 % des cas d'origine bactérienne,

- 5 % des cas d'origine parisitaire.

Annexe 62 - LES CARACTÉRISTIQUES DE L'EAU PRÉLEVÉE

Source : l'eau et les collectivités locales, ouvrage collectif, éditions le Moniteur, 1991

1. Caractéristiques communes aux eaux souterraines et superficielles

On trouvera toujours dans l'eau :

· Des gaz dissous provenant de l'atmosphère, les plus importants étant l'oxygène et le gaz carbonique qui jouent un rôle fondamental pour la vie aquatique mais aussi pour le traitement.

· Des matières dissoutes provenant des roches traversées ou lessivées. Ces matières dissoutes se présentent sous forme de quelques milligrammes d'ions, soit des cations (ions positifs) tels que calcium, magnésium, sodium, potassium ; soit des anions (ions négatifs): tels que bicarbonates, sulfates, chlorures, nitrates....

· De fines particules d'argile en suspension, c'est-à-dire des particules maintenues en équilibre dans l'eau sous l'effet de charges électriques. Elles donnent à l'eau sa turbidité, et constituent une « éponge » absorbante qui attire les bactéries et les molécules organiques ou inorganiques.

· Des bactéries de l'eau, c'est-à-dire des bactéries qui prolifèrent dans le milieu aquatique en utilisant pour leur métabolisme, soit l'oxygène dissous (bactéries aérobies), soit l'oxygène d'un anion - sulfate ou nitrate - (bactéries anaérobies). Leur présence en grand nombre dans l'eau joue, lors du traitement, un rôle fondamental. Il ne faut pas les confondre avec les bactéries pathogènes qui sont étrangères à l'eau et n'y prolifèrent pas.

· Des matières organiques, qui sont des éléments provenant du cycle de décomposition des végétaux. Parmi ces matières organiques, les acides humiques, constituant l'essentiel de l'humus, jouent un rôle important. Ce sont de très grosses molécules qui se trouvent dans l'eau sous forme colloïdale. Elles participent peu à la turbidité de l'eau, mais lui confèrent en partie sa couleur.

2. Caractéristiques particulières aux eaux souterraines

Elles sont surtout liées à l'absence de lumière et au non renouvellement de l'oxygène, et sont également influencées par la filtration dans les terrains poreux que l'eau traverse très lentement.

S'il s'agit de terrains calcaires, on trouvera donc souvent une charge importante en éléments minéraux (calcium en particulier), peu de particules colloïdales, peu d'oxygène, donc peu de bactéries aérobies. Par contre, les bactéries anaérobies pourront être présentes et on trouvera de l'ammoniaque et des sulfures provenant de la réduction par les bactéries des nitrates et des sulfates.

On trouvera également souvent des quantités importantes, jusqu'à quelques milligrammes par litre, d'ions ferreux et manganeux résultant de la réduction des sels ferriques et manganiques contenus dans les roches. Ainsi, sans qu'elle ait été polluée, il est possible qu'une eau prélevée dans un puits soit privée d'air dissous, sente le gaz sulfhydrique, c'est-à-dire l'oeuf pourri, devienne rouge ou noir dès qu'elle en contact avec l'air - les ions ferreux et manganeux redevenant ferriques et manganiques et précipitant.

Les eaux souterraines sont à température constante toute l'année, 12 à 15 °C généralement, sauf pour le cas de nappes très profondes pour lesquelles les températures sont supérieures.

3. Caractéristiques particulières aux eaux superficielles

Les éléments minéraux sont identiques à ceux rencontrés dans les nappes. D'ailleurs, les rivières sont en partie alimentées par les nappes. Toutefois, du fait de la dilution avec les eaux de ruissellement, leur teneur est moins élevée.

Les eaux de ruissellement apportent, par contre, beaucoup plus d'argile et d'acides humiques, rendant ainsi les eaux de rivières plus turbides et plus colorées. Mais c'est la lumière et l'oxygène qui jouent le rôle fondamental. Les algues, qui sont souvent très fines, participent à la turbidité de l'eau et posent des problèmes délicats au cours du traitement. La conséquence de cette vie est que les teneurs en matières organiques sont beaucoup plus élevées.

Les eaux superficielles sont aussi plus sensibles que les eaux souterraines aux pollutions d'origine anthropique. L'activité humaine modifie en effet les caractéristiques de l'eau brute naturelle en entraînant plusieurs pollutions :

- les germes pathogènes, liés aux déchets animaux et humains. L'assainissement des eaux usées protège les nappes souterraines et concentre les rejets dans les rivières, qui peuvent ainsi être polluées par des parasites et des virus. C'est la principale source de pollution de l'eau.

- les autres pollutions d'origine domestique (qui proviennent de l'ammoniaque, l'azote, le phosphore et les matières organiques), des eaux pluviales, issues des agglomérations ou de l'activité agricole, ou des pollutions industrielles.

Annexe 63 - L'ARSENIC DANS LES EAUX DE BOISSON

1. L'arsenic dans l'eau

Les sources de l'arsenic dans l'eau

En France, la quasi totalité de contamination de l'eau à l'arsenic est d'origine naturelle. L'arsenic est en effet naturellement présent dans le sol. Il est associé à 245 minerais notamment le cuivre, l'or, le zinc. L'arsenic se trouve donc dans les gisements de minerais, c'est à dire dans les roches anciennes, dite « roches du socle » ou les roches volcaniques (massif central, Vosges...). L'arsenic dans le sol se trouve par conséquent dans les aquifères correspondantes. Il existe une corrélation entre l'arsenic dans le sol et l'arsenic dans l'eau.

Certaines activité industrielles ont également beaucoup utilisé l'arsenic pour ses pouvoirs de blanchiment (industrie du verre, du cuir, du papier peint), de conservation (industrie du bois) et même son pouvoir toxique (industrie pharmaceutique et chimique, notamment pour la fabrication de fongicides utilisés dans les vignes et les vergers). L'exemple le plus connu de pollution historique est la pollution de Salsigne dans l'Aude. Certains sites miniers fermés depuis 75 ans génèrent toujours des contaminations dans les rivières qui peuvent atteindre près de 200 ug/l. Cette résurgence historique n'est pas propre à la France et les contaminations spectaculaires sont aussi connues en Espagne (après l'exploitation d'une mine de cuivre, il y a ... 4000 ans).

Les normes d'arsenic dans l'eau

L'arsenic est connu pour sa forte toxicité générant des troubles digestifs graves pouvant entraîner la mort (l'arsenic a été d'ailleurs longtemps utilisé comme poison mortel. La dose létale est comprise entre 70 et 180 mg). D'autres toxicités ont été découvertes, notamment le risque vasculaire et le risque sur l'athérosclérose carotidienne découverte en 2002. L'arsenic est surtout un cancérogène entraînant des cancers de la peau et des cancers internes.

Ces différentes toxicités ont conduit l'organisation mondiale de la santé (OMS) à abaisser en 1993 la valeur guide de l'arsenic dans l'eau de boisson de 50 à 10 ug par litre d'eau. Le risque additionnel de cancer associé à une concentration de 50 ug/l, calculé sur une consommation quotidienne de deux litres d'eau par jour, était estimé à 26 cas de cancers internes pour 1000. Avec le nouveau seuil de 10ug/l, le risque a été ramené à 6 cancers cutanés supplémentaires sur 10.000 personnes. Même si l'hypothèse d'une consommation quotidienne de 2 litres d'eau par jour paraît maximale, le risque retenu a parfois été considéré comme laxiste. Pour le professeur Pascal Grossier, auteur d'un rapport sur la contamination des eaux à l'arsenic dans le cadre des travaux du réseau national de santé publique (mai 1998), « ce seuil ne garantit pas le niveau de protection jugé habituellement acceptable pour les substances cancérogènes ».

Cette valeur guide de l'OMS a été reprise en droit européen (directive 98/83/CE du conseil du 3 novembre 1998) et en droit français (décret 2001-1220 du 20 décembre 2001) sous forme d'une «concentration maximale admissible » et d'une « limite de qualité », fixée à 10 ug/l au lieu des 50 ug/l fixés en 1989. En revanche, les limites de qualité des eaux brutes utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation est restée inchangée, à 100 ug/l dans la mesure où le traitement pour éliminer l'arsenic est bien connu et bien maîtrisé et permet de garantir 10 ug/l.

Deux traitements permettent l'élimination ou au moins la diminution de l'arsenic dans l'eau : soit la précipitation, par coagulation et décantation par des sels de fer ou d'aluminium, après oxygénation de l'eau (pour s'assurer que l'arsenic est sous forme oxydée), soit l'adsorption sur des colonnes d'alumine, d'oxyde de fer ou dioxyde de manganèse). L'efficacité des traitements est cependant variable selon l'acidité de l'eau et l'origine de l'eau. L'arsenic est plus facilement éliminé dans les eaux de surface que dans les eaux souterraines.

2. L'arsenic dans l'eau en France

Le suivi de l'arsenic dans les eaux est variable selon l'importance des stations de production de l'eau potable. La fréquence est fixée par le décret précité. Elle varie entre une fois tous les cinq ans pour les communes de moins de 500 habitants à 12 fois par an au minimum pour les communes supérieures à 625.000 habitants.

En 1998, le réseau national de santé publique a établi un bilan de contamination de l'eau à l'arsenic, à partir des donnés transmises par les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). On s'étonnera d'ailleurs que sur une question aussi importante, moins de la moitié des DDASS ait renseigné l'enquête.

Les données partielles et fragmentaires ont cependant donné des résultats importants :

- 54 unités de distribution réparties sur treize départements avaient de teneurs d'arsenic supérieur à 10 ug/l. La population concernée était de 200.000 personnes. L'excès de risque de décès par cancer interne était estimé à 30 décès par an.

- 13 unités de distribution réparties sur quatre départements (Vosges, Puy de Dôme, Hautes Pyrénées, Moselle) avaient des teneurs d'arsenic supérieur à 50 ug/l. Au delà de 50ug /l, on considère qu'il s'agit d'une situation d'urgence et il est déconseillé de consommer l'eau du robinet. La population concernée était de 17 000 personnes. Le record est une station du Puy-de-Dôme où la teneur d'arsenic a été relevée à 190 ug/l. Selon l'institut de veille sanitaire, une concentration d'arsenic de 170ug/l et une consommation d'eau de 4 litres par jour conduisent à un excès de risque de cancer cutané de 2%.

On notera que dans la majorité de ces cas les dépassements concernaient de petites unités desservant moins de 3.500 habitants.

Selon une estimation de l'institut de veille sanitaire (bilan d'activités 2001), l'excès de risque de cancer cutané lié aux teneurs excessives d'arsenic dans l'eau de boisson (teneurs supérieures à 10 voire 50 ug/l) dans le Puy de Dôme et dans l'Allier est respectivement de 93 et 33 cancers. La réduction des teneurs d'arsenic à 10ug/l pour cette population permettrait d'éviter respectivement 44 et 15 cancers dans la population actuellement exposée.

On rappellera que la réglementation sur l'eau potable ne s'applique pas aux eaux minérales et que certaines d'entre elles sont elles aussi extrêmement chargées en arsenic. Ainsi sur 74 eaux minérales analysées en 1995 par le réseau national de santé publique, 24 présentaient des teneurs en arsenic supérieures à 10 ug/l, 4 dépassaient 50 ug/l, et 2 dépassaient 100 ug/l.

Annexe 64 - LA REGLEMENTATION DES TENEURS EN PESTICIDES DANS L'EAU

1. La réglementation des eaux de consommation

La fixation des teneurs de l'eau destinée à la consommation en pesticides est déterminée par le décret 2001-1220 du 20 décembre 2001. Ce décret reprend pour l'essentiel les normes fixées antérieurement par le décret du 3 janvier 1989 transposant la directive européenne 80-777 du 15 juillet 1980. Cette directive a été modifiée par la directive 98/83 du 3 novembre 1998. Cette directive conserve les mêmes contraintes que celles fixées en 1980 mais en étendant les seuils antérieurement applicables aux seules molécules mères, à leurs métabolites, ainsi qu'aux produits de dégradation.

Ces références de qualité sont les suivantes : 0,1 ug/l par substance individualisée (sauf quatre d'entre elles -l'aldrine, la dieldrine, l'heptachlore et l'époxyde d'heptachlore, pour lesquelles la limite applicable est de 0.03 ug/l, ce qui correspond à la valeur guide de l'OMS) et 0,5 ug/l pour le total des pesticides quantifiés.

2. La réglementation des pesticides dans les eaux souterraines

Le paramètre « pesticides » dans les eaux brutes est, dans la réglementation actuelle, un paramètre accessoire. La norme a été fixée par la directive européenne 75/440 du 16 juillet 1975, relative à la qualité des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire. Les limites de qualité concernaient trois pesticides seulement (le parathlon, l'HCH et la dieldrine) et sont fixées à 1, 2 et 5 ug/l. Il n'y a pas de limite réglementaire aux pesticides dans les eaux souterraines. Cette réglementation pour les eaux superficielles est en vigueur jusqu'en 2007. Il est très probable que des changements interviendront sur ce point puisque la directive cadre fixe pour objectif un bon état chimique et écologique des masses d'eau.

3. Les restrictions d'usage en cas de dépassement

Le conseil supérieur de l'hygiène publique de France -CSHPF dans son avis du 7 juillet 1998 a proposé des conditions d'intervention en cas de dépassement de la limite de 0.1 ug/l.

- Des mesures correctives doivent être mises en oeuvre si le dépassement des limites de qualité ne constitue pas un danger potentiel pour la santé des personnes et s'il n'existe pas d'autres moyens raisonnables de maintenir la distribution des eaux dans le secteur concerné.

- Des mesures de restriction d'utilisation devront être prises si la qualité de l'eau constitue un danger.

Un programme renforcé de suivi mensuel est appliqué dès que la limite de 0.1 ug/l est dépassée.

Une interdiction provisoire de la consommation d'eau pour la boisson et les préparations alimentaires doit être prise dès qu'une analyse révèle la présence d'un pesticide à une concentration supérieure à sa valeur guide fixée par l'OMS ou dès que la concentration en pesticide dans l'eau distribuée est supérieure à 20 % de cette valeur guide pendant plus de 30 jours.

L'information de la population de la présence des pesticides doit être effectuée si la concentration en pesticides a été supérieure à 0.1 ug/l pendant plus de 30 jours au cours des 12 derniers mois.

Annexe 65 - LES PESTICIDES DANS L'EAU ET DANS LES FRUITS

On considère que l'eau de boisson ne représente que 10 % des apports de pesticides dans l'alimentation, 90 % proviennent de fruits et légumes ingérés.

L'utilisation des pesticides dans les produits d'alimentation est étroitement réglementée. Les résidus de pesticides dans l'eau, les fruits et légumes et les autres produits d'origine végétale ne doivent pas excéder certaines teneurs fixées par des textes réglementaires.

En ce qui concerne l'eau, les limites (exprimées en microgrammes par litre -g/litre) sont fixées par le décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001 relatif aux eaux destinées à la consommation humaine, à l'exception des eaux minérales (JO du 22 décembre 2001). La limite, unique pour tous les pesticides (sauf quatre molécules) est de 0,1 g/litre. Le total, c'est-à-dire la somme de tous les pesticides détectés, ne peut excéder 0,5 g/litre.

En ce qui concerne les fruits et légumes, les « teneurs maximales de résidus » sont fixées par l'arrêté du 5 août 1992 (JO du 22 septembre 1992) modifié par l'arrêté du 18 septembre 2002 (JO du 21 septembre 2002). Contrairement au régime unique précédent, les limites (exprimées en milligrammes par kilo) sont fixées par produit et par catégorie, voire par type de fruit (avec notamment des limites spécifiques pour les pommes et le raisin de table...). Les limites ainsi fixées sont considérablement plus élevées que les limites correspondantes pour l'eau. Le facteur d'écart varie, selon les produits, entre 100 et 500 000 fois. En d'autres termes, la teneur en résidus de pesticides tolérée dans les fruits est de 100 à 500 000 fois plus élevée qu'elle n'est dans l'eau potable...

COMPARAISON DES TENEURS EN PESTICIDES DANS L'EAU ET LES FRUITS

Dénomination (sélection)

Limite maxi dans l'eau

(en µg/litre)

Limite maxi dans les fruits

(en mg/kg)(20(*))

Écart

(eau/fruits)

Daminozidine

0,1

0,01
(pommes)

100

Aldrine/Dieldrine/Heptachlore

0,03

0,01

330

Aminotriazole/Exadiazon

0,1

0,05

500

Atrazine/simazine

0,1

0,1

1000

Flubenzinine/Gamma HCH

0,1

1

10.000

Benzoximate

0,1

1 ou 2
(raisin)

10 000-20 000

Chlozolinate

0,1

5
(raisin)

50 000

Chlorothalonil/Methoxychlore

0,1

10
(fruits rouges)

100 000

Annexe 66 - L'ORGANISATION DU SERVICE DE L'EAU

La responsabilité des communes

L'alimentation en eau potable et l'assainissement des eaux usées sont de la responsabilité des communes. Cette compétence, issue de la Révolution Française, est justifiée pour des raisons techniques (la qualité et la disponibilité de la ressource varie selon les lieux) et politiques : l'exploitation et la gestion doivent être aussi proches que possible du lieu de production. Pour Mme Dominique Voynet, ancien ministre de l'environnement, « la politique de l'eau doit se faire au plus près du terrain, en s'insérant dans les pratiques culturelles et sociales des populations concernées ». Cette conception reste celle des pouvoirs publics. Cette responsabilité se traduit par quatre caractéristiques :

- Des coopérations étendues avec les autres communes. L'eau a été le premier facteur d'incitation à l'intercommunalité: syndicats, communautés de communes... Ces syndicats ont été à vocations et périmètres variables selon les buts recherchés : syndicat de pompage, de distribution d'eau, d'assainissement, de barrage, de nappe, de rivière... Le regroupement est particulièrement fréquent s'agissant de la distribution de l'eau

- Des modes de gestion variables. Les communes peuvent choisir la gestion directe, en régie (auquel cas la commune ou son groupement assure directement le service de distribution de l'eau) ou parmi les différentes formes de gestion déléguée à des personnes privées qui se présentent comme suit :

Gestion déléguée

équipement

exploitation

financement

concession

propriété de la commune mais financé par le concessionnaire

par la société concessionnaire

redevance prélevée sur l'usager

affermage

propriété de la commune et financé par la commune

par la société affermée

redevance prélevée sur l'usager par la société, une partie étant reversée à la commune

gérance

propriété de la commune et financé par la commune

par la société gérante

redevance prélevée sur l'usager par la commune et rémunération du gérant au forfait

régie intéressée

propriété de la commune et financé par la commune

par la société gérante

redevance payée à la commune et rémunération du gérant avec une formule d'intéressement à l'exploitation

- Des prix très variables : En pratique, les habitants de deux communes (ou groupements de communes) ne payent pas le même prix de l'eau. Accessibilité et qualité de l'eau brute, modes de traitements différents, longueur des réseaux de distribution, mise en oeuvre de l'assainissement collectif, et gestion prévisionnelle plus ou moins avancée, expliquent des différences de tarifs. Cette situation n'est pas une spécificité française et se retrouve dans de nombreux pays. En revanche, revendiquer une eau gratuite et en faire un « programme politique », comme on l'a entendu au cours de cette mission, est le signe d'une totale irresponsabilité. L'eau a un prix. La gratuité est annonciatrice de pénurie et de gâchis. Tous les équipements (canalisations, traitements de l'eau) ont un coût et une durée de vie ; ils doivent un jour ou l'autre être changés. La gratuité est un leurre et une supercherie.

- La responsabilité pénale : La responsabilité du maire peut être engagée en cas de distribution d'une eau impropre à la consommation (par défaut de surveillance, voire par défaut de périmètre de protection), ou en cas de pollution des cours d'eau par un dysfonctionnement de la station d'épuration (non respect des valeurs limites de rejets...)


L'origine des eaux utilisées pour la production d'eaux
destinées à la consommation humaine

Les 26 680 unités publiques de distribution d'eau sont alimentées par 36 581 captages. Le nombre de captages exploités varie largement suivant les départements. Il n'existe que 8 captages dans le département du Val-de-Marne alors que la Savoie en compte plus de 1 400.

34 852 captages (soit 95 %) exploitent des eaux souterraines (puits, forages ou sources) et 1 529 (soit 5 %) prélèvent des eaux superficielles. Toutefois, en termes de quantités d'eaux produites, la répartition diffère puisque les 1 529 captages en eau superficielle produisent 37 % du volume distribué annuellement.

Une répartition des captages est donnée dans le rapport d'évaluation du Commissariat général du Plan.

Les réseaux publics d'eau destinée à la consommation humaine (UDI)

Source : extrait du rapport du Conseil national de l'évaluation - Commissariat général du Plan : « La politique de prévention de la ressource en eau destinée à la consommation humaine », La Documentation française, septembre 2001.

On dénombre 26 680 unités de distribution publique (UDI) qui alimentent au total plus de 58 millions d'habitants. Une unité de distribution correspond à un réseau géré et exploité par une même structure et délivrant une eau de même qualité. Une unité de distribution peut correspondre au réseau d'une commune qui est alimenté par un seul captage ; mais une seule commune peut aussi avoir plusieurs unités de distribution d'eau si elle possède plusieurs réseaux desservis par des captages différents. A l'inverse, une unité de distribution peut couvrir plusieurs communes regroupées au sein d'un syndicat. Le nombre d'unités de distribution d'eau d'alimentation varie donc de façon importante selon le contexte hydrogéologique local et selon les choix faits dans la politique de la distribution de l'eau. La moyenne est d'environ 270 unités de distribution par département.

· 16 580 UDI, soit environ 60 % des UDI, alimentent chacune moins de 500 habitants,

· les 2 024 UDI de plus de 5 000 habitants représentent moins de 10 % des unités de distribution françaises mais desservent au total environ 75 % de la population,

· les 50 plus grandes UDI françaises desservent ensemble près de 12,5 millions d'habitants,

· Les 5 UDI les plus importantes sont situées en Ile-de-France et desservent ensemble près de 3,5 millions d'habitants.

La gestion des UDI relève de divers modes d'exploitation ; 64 % sont exploitées sous le régime de l'affermage ou de la concession et 34 % le sont en régie directe ou assistée. Il apparaît que les petites unités de distribution sont plutôt gérées en régie.

L'organisation régionale

Cette liberté et cette responsabilité des communes se situent dans un cadre de gestion globale défini dans un cadre géographique régional selon l'articulation suivante :

- L'articulation Agences de l'eau/bassin versant/SDAGE- Schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux.

La loi du 16 décembre 1964 a défini le cadre géographique pour la protection des ressources en eaux : les bassins versants (les bassins versants ont pour délimitation les lignes de partage des eaux, c'est à dire les territoires où toutes les eaux reçues suivent une pente commune vers la mer, ultime point d'écoulement) et institué les agences de l'eau. Il existe six « agences de l'eau » couvrant chacune un bassin : Adour Garonne, Artois Picardie, Loire Bretagne, Rhône Méditerranée Corse- RMC, Rhin-Meuse et Seine Normandie. Le conseil d'administration de chaque agence, émanation du comité de bassin, est composé des représentants des différents acteurs de l'eau (élus, industriels, agriculteurs, usagers, associations et services de l'Etat). C'est lui qui décide des actions à engager et de l'emploi des fonds.

La loi sur l'eau du 3 janvier 1992 a institué notamment une planification régionale de la ressource en eau par la création des SDAGE. Les SDAGE sont élaborés par chacun des six comités de bassin. Chaque agence de l'eau dispose donc de son SDAGE. Le Sdage fixe des programmes d'action pour l'alimentation en eau, et pour la préservation ou la reconquête de la qualité des eaux et des écosystèmes aquatiques. Tous les bassins et agences de l'eau disposent d'un SDAGE à l'exception des Départements d'outre mer où les procédures sont inégalement avancées.

Cette planification au niveau du bassin versant est complétée localement par des SAGE, schéma d'aménagement des eaux. Ils sont définis pour des périmètres couvrant un sous bassin, correspondant à une unité hydrographique ou un système aquifère. Les périmètres sont définis par le comité de bassin. Les SAGE sont élaborés par des Commissions locales de l'eau qui réunit tous les usagers de l'eau afin de gérer la ressource (élus industriels, agriculteurs, services de l'Etat, associations, gestionnaires d'ouvrages). Les SAGE établissent un bilan de la ressource en eau et des usages. Ils visent à prévenir les conflits, améliorer la qualité des milieux aquatiques en fixant des priorités de gestion et de protection de la ressource. Bien que prévus dans la loi de 1992, tous les bassins ne disposent pas de SAGE. Beaucoup sont en cours d'élaboration, en phase d'instruction, ou « en cours d'émergence ». Ce retard témoigne de la vraie place attribuée à la protection des eaux. La liste des SAGE est régulièrement tenue à jour par le RNDE.

On observera que ces deux instruments de planification sont indépendants des structures administratives et politiques traditionnelles. Le découpage entre bassins et sous bassins est notamment indépendant du découpage entre régions et départements. Régions et départements ont cependant la possibilité de se doter de politiques et d'instruments spécifiques de gestion de l'environnement et des eaux et d'assister les communes par des incitations financières. La région, dans le cadre des contrats de plan Etat région peut programmer de gros investissements (barrages...). Les départements sont également des partenaires financiers des opérations d'équipement des communes (stations d'épuration, séchage des boues de stations, réhabilitation de sites...), en partenariat avec les agences de l'eau.

Annexe 67 - LE PRIX DE L'EAU

1. Les composantes du prix de l'eau

Conformément aux dispositions de l'arrêté du 10 juillet 1996, la facture d'eau est présentée en quatre postes :

§ Le prélèvement et la distribution d'eau : ce poste recouvre lui même deux parties : la rémunération du service correspondant au pompage, au traitement de l'eau, à la distribution de l'eau, à la gestion de clientèle...

La redevance de l'agence de l'eau pour la préservation de la ressource en eau. Cette redevance fixée par chaque agence est destinée à inciter les entreprises et les collectivités à modérer leurs prélèvements. Le tarif est fixé par le comité de bassin de chaque agence en fonction de la sensibilité des milieux aquatiques. On distingue quatre zones et trois redevances distinctes : la redevance de base à laquelle s'ajoutent la redevance de régulation et/ou la redevance pour action renforcée. Ce qui fait donc quatre tarifs différents...

§ La collecte et le traitement des eaux usées, qui correspond au coût du service.

§ La part des organismes publics qui comporte trois éléments :

- la redevance perçue par l'Etat au profit du fonds national d'adduction d'eau, qui est un fonds qui permet de financer le développement des réseaux publics de distribution

- la redevance de lutte contre la pollution, qui est perçue par les agences de l'eau. Cette redevance est perçue dans toutes les communes de plus de 400 habitants. Elle est calculée au moyen d'une formule tenant compte des caractéristiques de la collectivité. Les paramètres de pollution sont les suivants : Ils sont fixés par l'arrêté ministériel du 6 novembre 1996 qui définit la quantité journalière de pollution émise par un habitant à savoir : les matières en suspension, les matières oxydables, les matières azotées... si l'assiette est fixée, les taux diffèrent selon les zones. On distingue les zones sensibles, les zones intermédiaires, les zones littorales et les zones aval des fleuves.

Le cas échéant, ces deux redevances sont complétées par une redevance des voies navigables de France perçue sur les communes qui prélèvent l'eau dans les cours d'eau navigables.

- Enfin, la taxe sur la valeur ajoutée.

Le tarif moyen en France se présente comme suit :

Répartition des postes de la facture « distribution de l'eau »

 

Montant en francs
d'une facture annuelle d'eau de 120m3 (1998)

Montant en euros

%

Consommation

686

104,5

54 %

Abonnement « eau »

165

25,1

13 %

Redevance préservation des ressources


34


5,2


3 %

Redevance pollution

304

46,3

24 %

FNDAE + VNF + TVA

84

12,8

6 %

Total eau TTC

1 273

154

100 %

Le prix de l'eau présente de grandes différences selon les communes (et leurs groupements). Les principales différences sont liées aux éléments suivants :

- l'assainissement collectif. L'assainissement collectif représente un prix de 0,95 euros/m3 en moyenne par an.

- la taille de la commune. Le prix augmente avec la taille des communes jusque 3.000 habitants.

- la gestion. Le prix augmente si le service est géré en groupement de communes (du fait de l'interconnexion des réseaux) et/ou géré par un délégataire.

- les caractéristiques de l'eau brute relevées. L'eau souterraine est de meilleure qualité que les eaux de surface et appelle donc moins de traitements pour être rendue potable. L'eau est moins chère là où elle est le moins traitée c'est à dire en amont des activités humaines : Les disparités sont très importantes entre 0,30 et 5 euros soit entre 2 et 33 francs le m3.

Annexe 68 - LES PROCÉDÉS DE TRAITEMENT DE L'EAU DESTINÉE À LA CONSOMMATION HUMAINE

Source : l'eau et les collectivités locales, ouvrage collectif, éditions le Moniteur, 1991

1. La désinfection

La désinfection consiste à éliminer les germes pathogènes qui peuvent être présents dans l'eau brute.

La désinfection est une étape commune à tous les traitements et sans doute la plus importante de toutes. Certes, les eaux souterraines sont souvent naturellement dépourvues de germes pathogènes, mais, par infiltration, une contamination accidentelle est toujours possible dans les nappes des sous-sols calcaires.

Trois principaux agents désinfectants, oxydants puissants,  sont utilisés: le chlore, le bioxyde de chlore et l'ozone.

· Désinfection par le chlore

C'est le procédé le plus utilisé, car il est peu onéreux et sa technique est très simple : sur un forage de faible débit en zone rurale, une bouteille de chlore gazeux et un organe de dosage peu sophistiqué suffisent.

Dans l'eau, le chlore ou plus exactement l'une des formes du chlore -HCLO- est stérilisante et peut pénétrer la membrane cellulaire pour inhiber les fonctions enzymatiques de la bactérie.

Pour une eau à température de 15 °C et à pH 7,5, une dose de chlore de 0,3 mg/l, maintenue pendant dix à vingt minutes, suffit à assurer la destruction des bactéries. L'efficacité du chlore dépend toutefois de la température de l'eau et du pH. Dans les eaux chaudes et pour les pH élevés, d'une part, la proportion de HClO baisse très vite, d'autre part, les matières oxydables par le chlore, matières organiques et surtout ammoniaque, consomment du chlore et rendent donc une partie de la dose introduite inutilisable pour la désinfection, et il faut alors mettre beaucoup plus de chlore.

Le chlore est efficace également contre les bactéries, mais l'efficacité de son action contre les virus est moins connue. La sécurité impose en général de mettre plus de chlore.

Le moyen le plus sûr de réduire la formation de sous-produits de chloration consiste à ne traiter l'eau qu'après avoir éliminé la matière organique.

· Le bioxyde de chlore (ClO2)

peut être utilisé. Il est instable et doit être fabriqué sur place au dernier moment. Mais il n'oxyde pas l'ammoniaque ; et peut être préféré au chlore, pour éviter de donner à l'eau un goût désagréable.

· Désinfection par l'ozone

L'ozone peut être obtenu industriellement par décharge électrique dans l'air très sec. C'est un oxydant très puissant. Il se présente comme un gaz instable, qui doit donc être produit sur place dans des ozoneurs industriels.

La principale différence entre l'ozonation et la désinfection par le chlore est une efficacité plus sûre contre les virus. Des études ont montré que l'élimination des virus était garantie par la présence dans l'eau d'au moins 0,4 mg/l d'ozone pendant 4 minutes. Une étape de désinfection à l'ozone dans une filière de traitement d'eau s'avère dont être une des meilleures barrières contre les risques de contamination. L'ozonation entraîne la formation de sous-produits de réaction, les bromates. L'utilisation de l'ozone est, par contre, plus complexe et plus onéreuse que celle du chlore ou du bioxyde de chlore.

2. La clarification

· La décantation

Elle consiste à débarrasser l'eau des matières en suspension, algues et particules, qui se présentent pour l'essentiel sous forme colloïdale. (substance dispersée de même signe électrique) Cette phase est très importante car elle élimine les microparticules qui constituent un support pour les bactéries.

La stabilité des suspensions de particules argileuses est due à la couche externe électronégative qu'elles portent. Les forces électrostatiques de répulsion empêchent les particules de s'agglomérer.

Les réactifs coagulants utilisés sont généralement des sels de métaux : fer ferrique ou aluminium. Les argiles et les autres particules colloïdales, acides humiques, minéraux, sont ainsi coagulés.

Les sels métalliques utilisés produisent également des hydrates qui se constituent en flocons, formant ainsi de véritables petites éponges qui ramassent au passage les particules en suspension. Il se constitue donc un « floc » qui tombe très lentement. De nombreuses molécules organiques sont éliminées par la même occasion par adsorption sur le floc. L'ensemble de ces premières étapes de la clarification est généralement appelé « coagulation-floculation ».

· La flottation

Certaines qualités d'eau contiennent peu de matières en suspension, mais plutôt des matières organiques dissoutes que l'ajout d'un sel métallique va transformer en particules insolubles.

Il est alors plus avantageux de procéder à la séparation entre ce floc et l'eau par une opération de flottation plutôt que par décantation.

Cette opération consiste à mettre tout ou partie de l'eau floculée en contact avec de l'air dans une enceinte maintenue à une pression de 5 à 8 bars, puis à ramener brutalement le mélange à la pression atmosphérique. Tout l'air préalablement dissous sous pression se dégage alors sous forme de micro-bulles.

Ces bulles s'attachent au floc qu'elles ramènent ainsi à la surface du bassin d'où il est évacué sous forme d'une écume gorgée d'air. L'eau clarifiée est, elle, soutirée au fond du flottateur.

3. La filtration

La filtration est un procédé essentiellement mécanique qui consiste à faire passer l'eau à travers un filtre physique qui va retenir toutes les particules plus grandes que les tailles des pores du filtre.

Le premier filtre est la filtration sur lit de sable. La filtration de l'eau potable, les volumes considérables concernés ont imposé la technique simple et peu coûteuse de la filtration sur sable. Les grains de sable, dont les dimensions sont de l'ordre du millimètre, forment un empilage qui est traversé par l'eau et va arrêter, par simple effet de tamisage mécanique, les particules plus grosses que les intervalles situés entre les grains.

Ainsi, les grosses particules seront arrêtées dès la surface du filtre. Des particules plus petites seront également retenues par effet de paroi sur la surface des grains.

Le pouvoir d'arrêt du filtre sera d'autant plus grand que le diamètre des grains sera plus faible et que le temps de séjour de la particule dans le filtre sera plus long, les chances de rencontre avec la surface d'un grain étant ainsi accrues. Pour avoir un long temps de séjour, il faut que la vitesse soit faible ou que la hauteur du filtre soit grande.

La granulométrie du sable est un facteur déterminant pour l'efficacité du filtre. Cette dernière est caractérisée par deux chiffres : la dimension moyenne des grains et la dispersion des dimensions autour de cette moyenne. Au cours du lavage, de bas en haut qui fluidise le lit de sable, s'effectue un classement des grains par taille, les plus fins étant en haut et les plus gros en bas. C'est exactement le contraire de la position idéale : les grains fins rencontrent l'eau sale et les gros grains l'eau propre. On ne peut éviter ce phénomène et on en minimise les effets en utilisant des grains de taille uniforme, après un calibrage très soigné du sable.

L'efficacité de la filtration est attestée par la valeur de la turbidité de l'eau filtrée. Une eau correctement filtrée doit accuser moins de 0,5 unité néphélométrique ou NFU.

Effectuer un lavage complet du filtre colmaté pour lui faire retrouver son pouvoir filtrant initial est un impératif absolu. Il faut donc en extraire tout le floc qu'il a arrêté.

· La microfiltration sur membranes

La filtration sur membrane est de plus en plus fréquemment utilisée pour le traitement de l'eau en remplacement des filtres traditionnels à sable.

Le principe de la filtration sur membranes consiste à utiliser une fine surface filtrante garnie de pores réguliers de très petite dimension. Les membranes sont constituées de polymères organiques ou de fines poudres minérales agglomérées (alumine, zirconium, carbone).

Contrairement aux filtres à sables qui fonctionnent par tamisage vertical, les filtres à membranes sont des cylindres dans lesquels l'eau est sous pression et part à travers des pores de très petite dimension. Les membranes sont classées par taille d'orifices : on distingue la microfiltration, l'ultra filtration, la nanofiltration dont la taille des pores est de l'ordre de quelques dizaines d'Angströms (soit quelques millionièmes de millimètres).

Annexe 69 - LES MEMBRANES ET L'EAU POTABLE

Source : SAUR

Annexe 70 - INTÉRÊT ET LIMITES DE LA CHLORATION POUR MAÎTRISER LA QUALITÉ MICROBIOLOGIQUE DE L'EAU DISTRIBUÉE

Rédaction : Jean-Claude Block, Professeur des Universités, CNRS Université Henri Poincaré Nancy

1. Efficacité de la chloration des eaux de distribution en réseau

Les produits à base de chlore (eau de javel, chloramines, dioxyde de chlore) représentent les oxydants les plus largement utilisés pour la désinfection de l'eau de boisson. Le chlore est utilisé durant la phase de traitement. Les plus grosses usines préfèrent souvent l'ozone. Le chlore n'étant utilisé qu'en dernière étape (une post-chloration en quelque sorte) au moment de l'envoi de l'eau traitée dans les réservoirs amont du (des) réseaux. On ne traite plus en préchloration pour ne pas générer trop de produits organo-chlorés type trihalométhanes (THM). Par contre, cette chloration qui se fait en fin de traitement donc, en tête de réseau de distribution est généralement réglée en fonction du résiduel que l'on veut maintenir dans le réseau ou/et au robinet du consommateur. Depuis le 11 septembre 2001, les consignes sont de maintenir un résiduel plus élevé que d'habitude, voisin de 0,2 mg/l.

En réseau de distribution, les produits chlorés ne sont pas utilisés stricto sensu pour traiter l'eau distribuée (tout danger doit avoir été préalablement éliminé par le traitement amont au mieux des techniques disponibles du moment et du lieu) mais pour limiter la multiplication de microorganismes hétérotrophes (c'est-à-dire capables de se multiplier en dégradant la matière organique) saprophytes (c'est-à-dire considérés comme non dangereux, par opposition à pathogènes).

Appliqué en réseau de distribution, le chlore a une efficacité réelle mesurable. Il entraîne une réduction drastique du nombre de bactéries cultivables calculées à partir de 1 ou 100 ml d'eau, comme le prévoient les normes actuelles - ce qui ne veut pas dire que l'échantillon ne contienne pas de mircoorganismes viables. De fait, lorsque l'on complète les analyses classiques normalisées par des méthodes plus sophistiquées, il est facile de montrer qu'il y a toujours croissance des bactéries dans le réseau au niveau du biofilm fixé sur les parois.

L'action de ces désinfectants résulte de l'oxydation des structures des microorganismes. En fonction de la dose appliquée le traitement entraîne soit des lésions réversibles, soit des lésions irréversibles causant de fait la mort cellulaire. L'action bactéricide traduit la réaction du chlore avec les polymères des enveloppes bactériennes. Cette oxydation entraîne un changement de perméabilité et inhibe le transport des nutriments. Les bactéries perdent leur capacité à se développer. Elles restent vivantes mais sont non cultivables en particulier du fait des dommages affligés à la membrane cytoplasmique. Les bactéries blessées par l'oxydant sont incapables de se multiplier donnant ainsi un résultat négatif lors de l'analyse et une fausse sécurité (surestimation de l'effet du désinfectant).

L'oxydant agit relativement bien sur des mircoorganismes en suspension. La désinfection de l'eau par le chlore est donc utile même si imparfaite (beaucoup de ces microorganismes sont réellement abîmés ou tués par le traitement). Par contre, ce chlore n'atteint pas sa cible lorsqu'elle est protégée au sein du biofilm et il est impossible aujourd'hui de désinfecter un réseau public d'eau potable avec des oxydants.

Le chlore est efficace contre des bactéries (exemple, les mycobactéries comme celles que l'on a vues dans une clinique du sport à Paris il y a quelques années sont très résistantes). Certains virus sont aussi sensibles que les bactéries, certains un peu plus résistants. Généralement, les parasites sont un peu plus résistants, mais l'efficacité est toujours liée à la dose et il est possible de désinfecter correctement avec le chlore un échantillon d'eau qui contient virus, parasites et bactéries. La chloration est efficace contre la plupart des bactéries, et dans une moindre mesure contre les virus et contre les parasites.

En bref les désinfectants appliqués jouent le rôle attendu qui est de limiter la croissance des microorganismes mais sans jamais l'interdire.

Dans la situation actuelle même si l'efficacité des produits chlorés est loin d'être absolue aux doses auxquelles il est possible de les utiliser en réseau d'eau potable, ils représentent un groupe de produits sans vraiment de concurrent majeur. A condition d'être utilisé sur des eaux de bonne qualité (avec une faible quantité de matière organique biodégradable), il permet une bonne désinfection des eaux.

2. Limites de la chloration

Réussir une désinfection avec des produits oxydants n'est pas chose aisée en particulier en réseau où l'interface eau-matériau représente un lieu d'accumulation de dépôts organiques et minéraux présentant un fort pouvoir réducteur.

Il y a une réelle difficulté pour un oxydant relativement puissant comme l'eau de javel à éliminer le biofilm : malgré un traitement choc élevé sur une canalisation déjà nettoyée avec un acide, le nombre de cellules fixées (mortes et vivantes) reste constant, et dès la réalimentation en eau, l'activité et la cultivabilité sont identiques à celles préexistantes à la chloration.

La mauvaise diffusion de l'oxydant au sein du biofilm et plus encore à l'intérieur des cellules formant ce biofilm a pour conséquence que beaucoup de microorganismes échappent au traitement (ils ne sont pas exposés au chlore ou simplement blessés).

L'exposition des bactéries au chlore se traduit par l'activation d'un système de défense. La conséquence de cette réponse cellulaire est une très grande résistance des bactéries à une exposition ultérieure au chlore et la quasi-impossibilité de tuer la cellule par des taux de traitement classiquement utilisés par l'industriel.

La très grande difficulté à inactiver les bactéries fixées sur les parois des réseaux de distribution d'eau par un oxydant résulte à la fois de la non-diffusion de l'oxydant dans des biofilms épais de quelques dizaines de micromètres et de l'induction de leurs mécanismes de résistance à ce stress.

L'utilisation d'oxydants pour désinfecter le biofilm accumulé sur les parois internes des canalisations d'un réseau de distribution d'eau est donc inefficace. Dans les conditions actuelles d'utilisation l'eau de javel (ou les produits chlorés) - en maintenant un résiduel de chlore voisin de 0,2 mg Cl2/L au robinet du consommateur - il est impossible d'éliminer ou même d'inactiver la biomasse fixée. Pire, il est légitime de considérer que le maintien continu d'un oxydant en faible concentration induit plusieurs systèmes de résistance des bactéries et interdit tout espoir de prévention du biofilm dans les réseaux de distribution.

En d'autres termes le chlore appliqué en continu en réseau joue un rôle utile sur la biomasse en suspension dans l'eau, mais masque l'activité bactérienne à l'interface. Dans ces conditions l'arrêt du traitement se concrétise immédiatement par la mesure d'un nombre élevé de microorganimes viables et cultivables dans l'eau.

3. Conclusion

L'introduction, dans les réseaux de distribution d'eau potable, de microorganismes potentiellement pathogènes (contaminations accidentelles révélées par le non-respect des normes, ou contaminations chroniques non détectables du fait des faibles concentrations) est sans doute quasi systématique. De fait, de nombreux agents pathogènes sont régulièrement identifiés comme vecteurs de maladies via l'eau de consommation publique.

La croissance des microorganismes hétérotrophes peut être limitée par des actions adéquates mais jamais interdite. À titre d'exemple, des réseaux d'eaux « ultrapures » restent systématiquement contaminés par une biomasse vivante. Il convient donc de combiner plusieurs actions complémentaires : limiter la quantité de matière organique biodégradable capable de soutenir la croissance de bactéries hétérotrophes, corriger les paramètres induisant une corrosion des matériaux ferreux, fixer la dose efficace du désinfectant sans modifier exagéremment le goût ou l'odeur de l'eau.

L'utilisation de désinfectants en réseau de distribution, appelés ici sous le vocable général produits chlorés ou chlore, exige une eau de bonne qualité (faiblement chargée en matière organique, faiblement turbide, pH correct voisin de la neutralité) pour permettre au pouvoir désinfectant de s'exprimer vis-à-vis des bactéries en suspension dans l'eau.

Par contre la bataille est quasi perdue en ce qui concerne la désinfection de la biomasse fixée sur les parois des canalisations de distribution et qui représente la majeure partie de la biomasse du système. Cette limitation résulte à la fois de la forte consommation de l'oxydant par les dépôts organiques et minéraux très réducteurs accumulés sur la surface, de sa mauvaise pénétration à l'intérieur des biofilms. Même dans des réseaux constamment chlorés, le biofilm peut représenter jusqu'à 107 bactéries/cm2 dont 1 % sont viables et capables de se multiplier, prouvant l'inefficacité réelle du traitement sur ces biomasses fixées.

De ce fait, le principe de précaution actuel peut dans certains cas se révéler préjudiciable pour des actions d'urgence ultérieures. En effet il est aujourd'hui démontré que les microorganismes de l'environnement mettent en jeu un ensemble complexe de mécanismes de résistance au stress oxydant en général et aux produits chlorés utilisés en traitement d'eau potable en particulier. L'application de faibles doses inefficaces sur le biofilm ne fait que mettre en route ces mécanismes de défense interdisant de facto une action désinfectante ultérieure réussie.

La situation n'est pas dramatique, mais elle interpelle acteurs privés et pouvoirs publics pour souhaiter, au-delà des exigences des directives européennes, maîtriser complètement la qualité microbiologique des eaux potables et délivrer en toute sécurité une eau sans risque. Cette démarche passe à la fois par une évaluation objective des risques microbiologiques, par l'emploi de nouveaux produits, mais aussi par une utilisation différente des anciens produits traditionnels (la désinfection en mode discontinu par exemple pouvant dans certains cas éviter l'induction de phénomènes de résistance aux désinfectants).

Annexe 71 - LES CANALISATIONS DU RÉSEAU D'EAU POTABLE

Sources : IFEN - Les données de l'environnement - décembre 2001 - Étude de l'Association des départements de France (ADF) - mars 2002

Les canalisations d'eau potable -hors branchement- représentent 800 à 850 000 km (évaluations IFEN et ADF). 10 % ont plus de 50 ans, 44 % ont plus de 30 ans. Les canalisations installées avant 1970 sont majoritairement en fonte. Les canalisations installées après 1970 sont majoritairement en plastique (PVC-PEHD). La longueur des canalisations est en moyenne de 40 mètres par abonné. Les communes rurales ont des réseaux plus longs, mais aussi moins performants. Le rendement primaire, défini par le pourcentage entre le volume comptabilisé et facturé et le volume mis en distribution atteint 72 % en moyenne, mais seulement 55 % pour les communes de moins de 1 000 habitants. La différence entre volume distribué et volume consommé est liée aux fuites et aux quantités consommées non facturées, telles que les eaux de lavage du domaine public ou les eaux utilisées pour la lutte contre l'incendie. Dans le cas des petites communes, l'écart vient majoritairement de fuites.

Les caractéristiques de réseau selon les communes s'établissent comme suit :

Taille des communes (en nombre d'habitants)

Longueur par abonné

Rendement du réseau

< 400 hab

75 m

50 %

400-1 000 hab

65 m

62 %

1 000-2 500 hab

48 m

70 %

3 500-10 000 hab

28 m

71 %

> 10 000 hab

20 m

75 %

Moyenne

40 m

72 %

Données financières

Actuellement, le taux de remplacement (longueur de conduites rénovées ou changées divisée par la longueur de réseau sanitaire) est de 0,6 %. Ce rythme est très insuffisant compte tenu de l'ancienneté du réseau et conduit à un renouvellement en 100 ans.

L'étude de l'ADF envisage un renouvellement en 50 ans en trois temps, avec, en priorité, la résorption des matériaux à risque (amiante, acier.), soit 100 000 km en deux ans, puis les matériaux les plus anciens, puis un changement de rythme de croisière.

Les projections conduisent aux évaluations suivantes :

Années

Longueur de canalisation à changer (en km)

Coût total (en milliards d'euros)

Coût annuel (en milliards d'euros)

Coût au m3 (en euros)

Coût par habitant et par an (en euros)

2004-2005

100 000

9,3

4,65

2

80

2005-2010

230 000

23

4,65

2

80

2010-2015

205 000

21

4,2

2

80

Après 2015

9 000

32

1

0,4

15,5

Ainsi, le renouvellement des canalisations à risque ou les plus anciennes représenterait, sur 12 ans (2004-2015), un coût de 53 milliards d'euros, entraînant une majoration du prix de l'eau de 2 €/m3.

Annexe 72 - LES NORMES DE PLOMB DANS L'EAU POTABLE

1. La norme actuelle

La teneur limite autorisée du plomb dans l'eau destinée à la consommation humaine a été fixée par la directive 98/83/CE du 3 novembre 1998 (article 2 et annexe 1 partie B), reprise en droit français par le décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001 (articles 4 et 53, et annexe 1 partie B).

La teneur aujourd'hui (2003) autorisée est de 50 microgrammes par litre (ìg/l). Elle est abaissée en deux temps : une valeur transitoire de 25 ìg/l à respecter à partir du 24 décembre 2003, et une valeur limite de 10 ìg/l devant être atteinte d'ici le 24 décembre 2013.

Ce seuil reprend une valeur guide recommandée par l'Organisation Mondiale de la Santé en 1993. Cette recommandation a été déterminée à partir de la dose journalière tolérable (DJT) de 3,5 ìg/kg/j, préconisée en 1993 par le comité mixte sur les additifs alimentaires (JECFA). La valeur guide (VG), qui ne prend en compte que les apports par l'eau d'alimentation, est calculée suivant la formule :

VG = DJT x P x F

C

Où DJT = 3,5 ìg/kg/j, P = Poids corporel, F = part de DJT attribuée à l'eau, C = quantité d'eau consommée par jour.

La valeur guide a été calculée sur le groupe de la population jugé le plus sensible, en l'occurrence les nourrissons, choisis pour trois raisons : l'incidence de la plomberie est plus grave et se manifeste à de faibles teneurs en plomb dans le sang, l'absorption digestive du plomb est de 30 à 50 %, alors que chez l'adulte, seulement 10 % du plomb ingéré passe la barrière digestive, et la part de l'eau dans l'exposition au plomb est la plus importante : 50 % contre 24-27 % pour les autres âges.

La répartition des apports de plomb s'établit comme suit :

 

Nourrisson
(13 mois)

Enfant (2 ans)

Adulte

Air

4,2 %

15 %

7 %

Eau

50,5 %

24,1 %

27,4 %

Aliment

35,1 %

46,8 %

61,4 %

Poussière

10,2 %

24,1 %

4,2 %

Total

100 %

100 %

100 %

Sachant que le poids d'un jeune enfant est estimé à 5 kg et la part de la DJT attribuée à l'eau de boisson est de 50 %, pour une quantité d'eau consommée de 0,75 l, l'application de la formule aboutit à une valeur guide de 11,6ug/l arrondie à 10 ug/l d'eau de boisson.

On observera que ce seuil de 10 ug/l recouvre deux choses différentes. Il s'agit pour l'OMS d'une recommandation, sous forme de « valeur guide » reprise dans la directive européenne et en droit français sous forme de « teneur limite » ou de « concentration maximale admissible ». Les autorités américaines ont d'ailleurs proposé une CMA différente de 15 ug/l.

2. Les controverses

Cette concentration a été et reste contestée par de nombreux scientifiques, notamment le professeur Hartemann de la faculté de médecine de Nancy :

« Il me semble ni raisonnable ni légitime d'imposer une CMA pour l'eau qui ne serait pas respectée pour les autres boissons des enfants, notamment pour les boissons venant en concurrence avec l'eau et c'est le cas du lait (15 ug/l) et des jus de fruits (30 ug/l).(...) Il semblerait plus rationnel de considérer l'apport global plutôt que l'apport spécifique de l'eau des boissons (...). La baisse importante de la part du plomb dans l'air, du fait de l'élimination du plomb dans l'essence doit être prise en compte (...). C'est l'apport total qui ne doit pas dépasser la quantité tolérable. La fixation d'un taux maximum à échéance de 15 ans paraît, dans ces conditions, prématurée. »

Ainsi, pour le professeur, si l'objectif intermédiaire de 25 ug/l paraît pleinement justifié, la réduction à 10 ug/l à échéance de 15 ans est plus discutable. Compte tenu de l'évolution des autres sources d'exposition, une réduction à 15 ug/l paraît tout aussi pertinente. Cette valeur serait beaucoup plus facile à respecter que la valeur européenne de 10 ug/l.

Les teneurs en plomb sont comptées au robinet du consommateur. On observera toutefois que chaque Etat est libre de déterminer les conditions de mesure de l'échantillonnage. Les prélèvements doivent être représentatifs de l'eau réellement consommée, mais des différences dans les conditions d'échantillonnage peuvent influer sur le résultat.

Une des formules proposées consiste à effectuer soixante séries de prélèvements comprenant un prélèvement aléatoire, un prélèvement après 30 minutes de stagnation, un prélèvement après écoulement. La mesure au robinet de l'usager est à l'évidence une difficulté supplémentaire, source de contentieux.

Votre rapporteur rappellera à cette occasion la position qu'il avait prise lors de son précédent rapport sur « les effets des métaux lourds sur l'environnement et la santé » (Sénat n° 261 - 2000-2001) :

« Le coût d'élimination de canalisations en plomb étant estimé à 120 milliards de francs en France au moment où la décision fut prise, l'estimation, corrigée à la baisse, est aujourd'hui de 70 milliards de francs.

Trois questions se posent alors :

- le coût doit-il intervenir dans une décision sanitaire ? Tout dépend bien évidemment des risques et de l'arbitrage entre le principe de précaution et le principe « ALARA », -reasonably acceptable ». D'ailleurs, on peut aussi renverser la question : le coût peut-il être exclu d'une décision sanitaire ?

- le but peut-il être atteint à un coût moindre ?

- enfin, la dépense pouvait-elle être mieux utilisée ? La France va dépenser 70 milliards pour limiter un risque faible. Tandis que dans le même temps il existe des contaminations et des expositions beaucoup plus importantes et plus graves (l'exposition liée aux vieilles peintures, l'arsenic dans l'eau..) qui peuvent être éradiquées pour un coût bien inférieur.

La France, l'Europe a-t-elle établi des priorités, une véritable stratégie sanitaire ? Il est permis d'en douter.

Les traitements uniformes sont coûteux et inopérants. Une politique ciblée, modulée serait, de loin, beaucoup plus efficace. Il ne faut pas chercher à réduire les risques partout en dépensant des moyens importants sur des zones où ils n'existent pas.

La fixation d'une concentration maximale admissible à 10 ug par litre appelle donc quelques réserves. L'Office regrette que la France n'ait pas su faire valoir une autre logique, fondée sur l'appréciation des risques et l'action sur des groupes ou lieux à risques. On rappellera que, contrairement à la France, un certain nombre d'Etats de l'Union européenne, pour des raisons historiques ou géographiques, ne sont pas affectées par cette décision, qui n'entraîne pour eux aucune dépense. »

Annexe 73 - SONDAGE : LES FRANÇAIS ET L'EAU

(sélection d'informations)

Source principale: Centre d'information sur l'eau, sondage SOFRES, « Les Français et l'eau » - novembre 2001

1. Les usages

Un Français consomme en moyenne 150 litres d'eau par jour tous usages confondus. 1 % est utilisé pour la boisson. La consommation purement ménagère (hors arrosages, lavages de voiture,...) est de l'ordre de 50 m3 par personne.

Cuisine et tâches ménagères 10-120 litres

Vaisselle à la main 10-12 litres

Lave-vaisselle 25-40 litres

Lave-linge 70-120 litres

Hygiène-salle de bains 5-20 litres

Toilette de lavabo 5 litres

Douche 60-100 litres

Bain  150-250 litres

Fuite de robinet  2 litres à l'heure

W.C. (à chaque utilisation)  3-12 litres

Fuite de chasse d'eau : 3 litres à l'heure

Jardin 15-20 litres par m²

Tuyau d'arrosage : jusqu'à 1000 litres à l'heure

Piscine 50 à 80 000 litres

Lavage de voiture  180/200 litres

(Source principale : www.lyonnaise-des-eaux.fr)

2. Attitude vis-à-vis de l'eau du robinet

Opinion générale sur la qualité de l'eau (2001)

 

Oui ( %)

Non ( %)

Avez-vous confiance dans l'eau du robinet ?

79

20

Etes-vous satisfait de la qualité de l'eau du robinet ?

72

27

Pensez-vous que l'eau est sûre ?

71

25

Trouvez-vous que l'eau est chère ?

57

30

Etes-vous prêt à payer plus cher pour que sa qualité soit préservée ?

59

40

Raisons de la non satisfaction ( %)

 

Pour la boire

Pour la cuisine

Pour la toilette

Pour le linge

Trop calcaire

26

33

51

62

Goût de chlore

33

20

9

6

Pas confiance (peur des pollutions...)

12

9

1

-

Note de satisfaction

5,3

7,4

7,5

7,6

3. La consommation d'eau

Les Français sont de plus en plus nombreux à être des « buveurs mixtes », c'est-à-dire des consommateurs de l'eau du robinet et de l'eau plate en bouteille. La consommation d'eau en bouteille est à la fois plus fréquente (72 % des Français consomment de l'eau en bouteille au moins une fois par semaine, 65 % en consomment tous les jours, soit plus de 11 % en quatre ans), et plus massive..:

Fréquence de consommation

Eau du robinet

Eau en bouteille

 

France

Bretagne

France

Tous les jours ou presque

53

12

65

2-3 fois/semaine / souvent

4

6

5

De 1 à 4 fois par mois/de temps en temps

5

13

6

Moins d'une fois par mois /exceptionnellement

7

15

6

Jamais

30

53

17

(Sources : France : CI Eau ; Bretagne : sondage préfecture/Conseil régional 1999, libellé des questions en italique)

Pourquoi ne buvez-vous pas de l'eau du robinet (%)

France

Bretagne

À cause de sa mauvaise qualité

À cause du goût

Par peur des pollutions, des maladies...

À cause de l'odeur

-

40

15

6

65

58

38

36


Les consommations d'eau eau du robinet/eau en bouteille (%)

 

1998

1999

2000

2001

Consommation d'eau du robinet

Tous les jours

Occasionnellement

Jamais

58

15

27

57

14

28

56

17

27

53

16

30

Consommation d'eau en bouteille

Tous les jours

Occasionnellement

Jamais

54

24

24

54

23

23

57

24

20

65

17

17

Répartition eau du robinet/eau en bouteille

55/45

55/45

53/47

51/49

4. Les inquiétudes des français

60 % des Français estiment que les ressources en eau se sont dégradées depuis dix ans. 48 % s'attendent à une poursuite de cette dégradation dans les années à venir. 79 % pensent qu'elle va entraîner une augmentation du prix de l'eau, et 71 % craignent qu'elle aboutisse à une moins bonne qualité de l'eau. (Source : CI eau - bulletin janvier 2002).

La pollution de l'eau figure parmi les préoccupations croissantes des Français, mais encore assez loin derrière la pollution de l'air. Tandis qu'en 1997/1998, 12 % des Français considéraient que la lutte contre la pollution de l'eau était une tâche prioritaire de l'Etat, la proportion est passée à près de 18 % en 1999. En Bretagne, 81 % des personnes interrogées considèrent que l'eau potable est une question dont il faut « s'occuper d'urgence ». Cette lutte incombe avant tout à l'Etat. Seuls 7,5 % des Français pensent être en mesure d'avoir une action individuelle.

Quelles sont les actions que l'État doit mener dans le domaine de l'environnement (1999) ?

 

Choix 1

Choix 2

Total

La réduction de la pollution de l'air

33,3

20

53,3

La lutte contre la pollution de l'eau

17,9

25,1

43

La lutte contre les risques de l'industrie nucléaire

8,9

11,9

20,8

L'élimination et le tri des déchets

8,1

12,6

20,7

Le développement de technologies respectueuses de l'environnement

10

10,1

20,1

Source : IFEN - L'opinion des Français sur l'environnement - Juin 2000 - Tableau 9

5. L'information sur l'eau

Les Français s'estiment mal informés sur tous les domaines qui concernent l'eau. Certains sondages montrent qu'effectivement ils le sont : ainsi, 53 % des Français pensent (à tort) que les eaux usées sont retraitées pour être transformées en eau potable. Non seulement cette idée est erronée, mais les proportions s'aggravent d'année en année : ils n'étaient que 46 % à avoir cette idée fausse il y a six ans. Paradoxe, s'ils n'ont guère confiance dans les pouvoirs publics pour assurer cette information, ils considèrent que c'est quand même aux pouvoirs publics qu'incombe le devoir de les informer.

Vous estimez-vous bien informés sur l'eau (2001)?

 %

Non, pas suffisamment

Oui, suffisamment

67

30

Quelles informations attendez-vous ?

 

Les contrôles de l'eau potable

Les normes de qualité de l'eau potable

La provenance de l'eau de votre commune

Les conseils sur l'eau et la santé

Les éléments constitutifs du prix de l'eau

Le traitement des eaux usées

Les conseils pratiques d'utilisation

59

57

41

37

33

33

16

Source : CI eau, bulletin janvier 2002

 

En qui avez-vous confiance pour vous informer sur la sécurité alimentaire des produits ? ( %)

En qui avez-vous confiance pour vous informer sur l'eau potable de la commune ? ( %)

Qui doit vous informer sur la qualité de l'eau ? ( %)

 

Confiance

Pas confiance

Confiance

Pas confiance

1er choix

TOTAL

Association de consommateurs

89

9

86

11

3

27

Milieu médical

84

14

81

15

3

27

Maires

   

75

22

26

67

Organismes professionnels

56

38

70

25

7

43

Pouvoirs publics

59

38

66

31

44

65

Entreprises (producteurs, régies)

40

38

64

32

11

46

Medias

56

41

56

40

3

21

Source : CI Eau - bulletin janvier 2002

Annexe 74 - LE CALCAIRE DANS L'EAU DISTRIBUÉE

1. Présentation

La présence de calcaire dans l'eau distribuée est liée à sa composition naturelle, qui dépend de la nature des terrains traversés. Une eau prélevée dans une nappe souterraine alimentée par une eau ayant traversé un sol calcaire ou crayeux est une eau calcaire. Une eau ayant traversé un sol cristallin comme le sable ou le granite et une eau de surface seront plutôt non calcaires.

Calcaire et calcium

Le calcaire est une roche caractérisée par une forte minéralisation en calcium. En d'autres termes, calcium et calcaire sont (pratiquement) une seule et même chose. En termes chimiques, le calcaire est un carbonate de calcium, c'est-à-dire un mélange de l'ion calcium (CA++) et de l'ion carbonate ou oxyde de carbone (CO3--). La molécule finale est donc composée d'ions calcium (chargés en positif) et d'ions carbonates (chargés en négatif).

La dureté de l'eau

La dureté de l'eau est définie par le titre hydrotimétrique, qui correspond à la présence de sels de calcium et de magnésium. Plus une eau est riche en calcium et en magnésium, plus elle est dite « dure ». Inversement, une eau pauvre en calcaire est dite « douce ». Ainsi, l'importance du calcium (calcaire) dans l'eau est le principal critère déterminant la dureté de l'eau. La dureté de l'eau, associée à son acidité, définissent son agressivité : une eau douce associée à un pH acide donne une eau agressive.

La dureté de l'eau s'exprime par un indice, ou titre hydrotimétrique, TH, exprimé en degrés, chaque degré résultant du calcul suivant : 1 degré (°F) = 4 mg/l de calcium ou 2,43 mg/l de magnésium ou 10 mg de calcaire.

Les eaux sont classées en fonction de leur TH :

0 à 6 degrés = eau très douce

6 à 15 degrés = eau douce

15 à 30 degrés = eau moyennement dure

> 30 degrés = eau dure.

Il est aisé de reconnaître, sans test, la nature de son eau : Avec une eau douce, le savon mousse et on a du mal à se débarrasser du savon. Au contraire, une eau dure (calcaire) élimine très vite le savon et même donne des mains un peu rêches après lavage.

2. Les effets du calcaire dans l'eau

La présence de calcium (de calcaire) dans une eau a des effets contradictoires :

- elle est bénéfique pour la santé : une eau dure (riche en calcium et en magnésium) couvre un tiers des besoins en calcium et magnésium de l'homme, et assurerait une protection contre les maladies cardiovasculaires. Elle est aussi plus agréable à boire. En outre, une eau carbonatée génère un dépôt sur les parois des canalisations qui la transportent. Ce dépôt peut être utile à faible dose, en assurant notamment une protection contre les risques de corrosion.

- en revanche, elle présente certains inconvénients domestiques, en formant des dépôts blancs, un dépôt de carbonate sur la vaisselle, les verres, en provoquant des phénomènes d'entartrage des tuyaux et des équipements électroménagers qui utilisent l'eau. C'est pourquoi le calcaire est, après le goût, le deuxième motif de non-satisfaction des usagers de l'eau du robinet. Ces inconvénients se manifestent surtout avec l'eau chauffée. En effet, les dépôts de carbonate sont proportionnels à la température. Plus une eau est chauffée, plus les dépôts sont importants (c'est pourquoi les bouilloires s'entartrent si vite). Quelques remèdes simples permettent donc d'éviter l'entartrage des appareils : ne pas laver le linge à plus de 60°, abaisser la température du chauffe-eau électrique (souvent surchauffée par l'installateur.... pour le changer plus vite).

Ces inconvénients sont bien connus de tous ceux qui effectuent des tâches ménagères. Ils sont parfois limités par l'installation d'« adoucisseurs d'eau », qui diminuent le calcaire (voir annexe sur les dispositifs de traitement d'eau à domicile).

A l'inverse, une eau trop douce (sans calcaire) présente aussi des inconvénients : l'absence de calcaire empêche l'instauration d'une couche carbonatée qui assure aussi la protection des canalisations contre les risques de corrosion. L'eau devient donc agressive. Les phénomènes de corrosion, liés aussi au pH, entraînent donc la solubilisation des métaux, notamment le fer, le cuivre et le plomb.

Ainsi, les eaux brutes naturellement douces, comme la plupart des eaux de rivières, sont reminéralisées à l'usine de traitement afin de parvenir à une eau distribuée comprise entre 8 et 15° F.

Annexe 75 - LES PROCÉDÉS DE TRAITEMENT DE L'EAU À DOMICILE

1. Les produits

a) Les adoucisseurs d'eau

Ils consistent à éliminer le calcaire de l'eau dont les effets sont bien connus de tous ceux qui effectuent des tâches ménagères : dépôts blanchâtres sur la vaisselle ou le linge, dysfonctionnements des appareils chauffant l'eau (lave-linge, cafetières, etc.). L'élimination du calcaire a lieu par substitution d'ions sodium aux ions calcaires. L'eau prend un léger goût salé.

Le marché des adoucisseurs concerne surtout le marché pavillonnaire (l'appareil, assez volumineux, peut être placé dans un garage ou une cave), souvent par démarchage à domicile. Le coût d'un adoucisseur, de l'ordre de 1 000 à 2 000 euros, et le contrat d'entretien annuel qui est proposé expliquent cette pression commerciale.

b) Les filtres à eau

L'objet des filtres à eau est d'améliorer le goût de l'eau et/ou d'éliminer les métaux, notamment le plomb. Contrairement à l'adoucisseur d'eau, qui est un équipement ménager, les filtres à eau sont des produits de consommation courante (de 60 à 150 euros). Ils sont disposés avant les points de distribution finale, sous forme de cartouche fixée sous l'évier ou au robinet.

Plusieurs techniques sont proposées :

- le filtre à charbon, le plus courant, qui élimine le goût et les odeurs, en captant toutes les molécules chlorées (et accessoirement toutes les molécules dites « longues », ce qui permet d'arrêter les pesticides) ;

- la zéolithe, qui est une sorte de résine capteur de métaux, dont le plomb (les études sur les filtres à eau ont d'ailleurs été poussées par le ministère chargé de la santé, afin de mettre sur le marché un produit qui permettrait de tenir la norme de 10 ug de plomb par litre, au robinet, sans attendre le changement des canalisations) ;

- la microfiltration inverse, à partir d'une membrane, c'est-à-dire d'un filtre physique, qui retient toutes les particules supérieures à 0,5 micron.

2. Appréciations

Ces dispositifs appellent quelques réserves :

a) Sur un plan général

On rappellera que les adoucisseurs d'eau sont souvent vendus par démarchage à domicile, dans les campagnes, auprès de personnes seules qui peuvent être facilement abusées. L'adoucisseur n'a une utilité qu'en cas d'eau calcaire. Mais qui connaît la dureté de son eau ? De même, il arrive que des réparateurs peu scrupuleux prétendent que le calcaire est à l'origine des pannes et en profitent pour vendre un adoucisseur d'eau.

Le marché des adoucisseurs est propice à ce genre de déviances. Selon « la charte des affineurs d'eau », « les publicités ne doivent jamais dénigrer l'eau de la distribution publique ». La pratique est évidemment tout autre, et la mauvaise qualité de l'eau en général et de l'eau distribuée en particulier sont évidemment le premier argument commercial évoqué.

Cette pratique devient suspecte lorsque la région démarchée n'est pas caractérisée par une eau particulièrement calcaire, puisque l'adoucisseur perd alors sa raison d'être. Cette pratique devient même inconvenante lorsque le démarcheur appartient à une filiale qui relève du même groupe que la société distributrice. Il y a là un conflit d'intérêt et un manque de cohérence qui méritent d'être soulevés.

b) L'efficacité technique

- Ces installations améliorent-elles la qualité de l'eau ? Elles interviennent sur deux paramètres, le calcaire et le goût, qui ne sont pas des critères de qualité au sens réglementaire de santé publique. Il s'agit, dans les deux cas, d'installations de confort. Quelques filtres ont cependant une action de filtration sur quelques paramètres réglementés tels que la turbidité, les métaux et les pesticides. Mais ils n'arrêtent ni les nitrates, ni la plupart des contaminations bactériennes (même s'il existe un filtre à charbon actif avec des métaux qui préviennent le développement des bactéries), ni les virus (qui ont une taille inférieure aux filtre de microfiltration).

- Ces équipements peuvent même s'avérer potentiellement dangereux, s'ils sont mal utilisés. Ainsi, l'adoucisseur d'eau élimine le calcaire et rend l'eau douce. Mais une eau douce est aussi une eau agressive pour les métaux et en particulier le plomb. Ainsi, un adoucisseur qui serait installé avant des canalisations au plomb accélèrerait la dissolution du plomb et augmenterait les teneurs de l'eau en plomb, créant un problème là où il n'y en avait peut-être pas. Dans cette hypothèse, rare il est vrai, l'adoucisseur d'eau, loin d'améliorer la qualité de l'eau, devient alors source de pollution !

Les filtres n'ont pas cet inconvénient, mais ils doivent être changés régulièrement (tous les 600/1 200 litres, soit 3/6 mois). Faute d'entretien, le filtre perd de son efficacité mais surtout devient lui-même vecteur de pollution. Le filtre, par définition, arrête les molécules, y compris la matière organique, favorisant ainsi le développement bactérien. Ces bactéries ne sont pas forcément pathogènes, ne présentent pas forcément des risques pour la santé, mais elles peuvent l'être, notamment lorsque leur prolifération est favorisée par la chaleur (eau chaude). Ainsi, dans ce cas, le filtre, loin d'améliorer la qualité de l'eau, devient alors source de contamination !

Annexe 76 - LE GOÛT DE L'EAU

Le goût de l'eau et le calcaire sont les premiers motifs de non-satisfaction des usagers de la qualité de l'eau du robinet. Les critiques dépendent évidemment des usages : 40 % des Français déplorent le mauvais goût de l'eau pour la boire (33 % incriminent le goût de chlore en particulier).

Raisons de non-satisfaction de la qualité de l'eau du robinet (en  %) - 2001 -

 

Pour la boire

Pour la cuisine

Pour se laver

Mauvais goût

40

24

22

Goût de chlore

33

20

9

Trop calcaire

26

33

51

(Trop dure)

1

4

10

Source : CIEau - Les Français et l'eau - rapport de synthèse novembre 2001

Les quatre goûts fondamentaux - sucré, salé, acide, amer - sont perçus sur les papilles gustatives de la langue, mais d'autres goûts sont plutôt perçus par l'intermédiaire des odeurs, du fait de la communication entre l'arrière-bouche et la cavité nasale (odeur et goût de chlore, de terre, de vase ou de moisi).

Le goût de l'eau résulte de trois paramètres :

- l'état naturel de la ressource en eau, en particulier l'importance de la présence de sels minéraux ; certaines eaux minérales sont très chargées en sodium notamment, qui donne un goût salé, et qui peut atteindre jusqu'à 1 700 mg/l ;

- les traitements de potabilisation, notamment le chlore qui, quand il se mélange aux molécules, leur donne un goût très prononcé ;

- le transport de l'eau et sa stagnation dans les canalisations, qui peuvent être endommagées.

Le goût n'est pas un critère de qualité, du point de vue de la santé publique ; c'est un paramètre de confort. Dans le décret n° 2001-1220 du 20 décembre 2001 donnant des références de qualité des eaux destinées à la consommation humaine, il n'y a pas de disposition spécifique relative au goût. Le goût est seulement mentionné dans un cas : concernant le chlore, la réglementation impose « l'absence d'odeur ou de saveur désagréable ». Une eau peut parfaitement être de bonne qualité sanitaire, respecter les critères de qualité définis par la réglementation et être de qualité médiocre au goût des usagers. C'est en particulier le cas depuis septembre 2001 et la décision d'augmenter la chloration des eaux.

Certains remèdes simples permettent d'enlever le goût du chlore, notamment en refroidissant l'eau.


Pourquoi l'eau perd-elle son goût de chlore au réfrigérateur ?

La solubilité varie selon la température. Un sucre se dissout très facilement dans l'eau chaude et se cristallise au froid. Il en va de même pour le chlore, qui est moins soluble dans l'eau froide que dans l'eau chaude.

Quand l'eau chlorée est mise au réfrigérateur, sa température baisse, le chlore dissous se transforme en gaz qui est évacué dans l'atmosphère (l'air du réfrigérateur).

Ainsi, le chlore passe de l'eau dans l'air.

Certes, le chlore circule sous forme gazeuse dans l'air du réfrigérateur, mais les doses sont tellement faibles que l'effet sur le goût des aliments est nul.

Mettre l'eau au réfrigérateur quelques heures avant sa consommation enlève le goût de chlore.

Annexe 77 - RÈGLES ET ÉCHÉANCES EN MATIÈRE D'ASSAINISSEMENT

Les règles et les échéances en matière d'assainissement sont fixées par la directive européenne 91/271/CEE du 21 mai 1991 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines, et le décret 94-469 du 3 juin 1994. La lecture des deux textes est difficile dans la mesure où la directive fixe un échéancier en fonction de la taille des agglomérations, tandis que le décret fixe une échéance en fonction de la charge de pollution organique par jour, évaluée en kilogrammes par jour. Même s'il y a une correspondance entre les deux, ce double référentiel n'est pas le plus heureux (par semaine, on compte 60 kg de charge brute de pollution organique par jour, par tranche de 1.000 habitants. Une agglomération de 2.000 équivalents habitants génère 120 kg de pollution organique par jour et ainsi de suite).

1. Les notions de base

L'équivalent habitants (dit « EH »). La notion d'équivalent habitant est une notion ancienne utilisée en assainissement pour évaluer la capacité des stations d'épuration. Cette notion a été introduite pour convertir les rejets d'eaux usées industrielles en « équivalents habitants ».

En 1981, une estimation de la pollution induite par « l'équivalent habitant » était de :

. 90 g/habitant/jour pour les matières en suspension,

. 57 g/habitant/jour pour les matières oxydables,

. 15 g/habitant/jour pour l'azote total,

. 4 g/habitant/jour pour le phosphore total.

La directive européenne donne une nouvelle définition de l'équivalent habitant, correspondant à une charge organique biodégradable ayant une demande biochimique en oxygène de cinq jours -dite DBO5 de 60 grammes d'oxygène par jour.

Le DBO est la quantité d'oxygène qu'il faut fournir à un échantillon d'eau pour minéraliser les matières organiques biodégradables contenues dans l'eau, par voie biochimique, c'est-à-dire par oxydation par des bactéries aérobies

Les microorganismes consomment l'oxygène pour dégrader les matières organiques. La réaction de minéralisation étant lente, on prend la quantité d'oxygène disparue au bout de cinq jours ; c'est le DBO5.

Le DBO mesure aussi la présence de matières organiques présentes dans les effluents dans l'eau et caractérise leur biodégradabilité.

L'agglomération. Les obligations d'assainissement sont évaluées par rapport à l'agglomération. La notion d'agglomération est plus pertinente que la notion juridique ou que la taille des communes, ou que l'ancienne répartition obsolète entre zone urbaine et zone rurale. Il existe des petites communes de 400 habitants en agglomération et des communes de 10.000 habitants en zone rurale. Les agglomérations sont issues de la classification INSEE et définies par le préfet.

Les zones sensibles. Les échéances et les contraintes diffèrent lorsque les agglomérations se situent en zone sensible, qui présente des risques d'eutrophisation. Dans ces zones, l'assainissement doit aussi porter sur le phosphore et l'azote. La définition des zones sensibles est donnée par l'article 6 du décret 94-469 du 3 juin 1994 (alinéa 1). Les zones sensibles comprennent les masses d'eau significatives à l'échelle du bassin qui sont particulièrement sensibles aux pollutions, notamment celles qui sont sujettes à l'eutrophisation et dans lesquelles les rejets du phosphore, d'azote, ou de ces deux substances doivent, s'ils sont cause de ce déséquilibre, être réduits. Un arrêté du ministre chargé de l'environnement, pris après avis de la mission interministérielle de l'eau et du Comité national de l'eau, peut, en tant que de besoin, préciser les critères d'identification de ces zones.

Les cartes des zones sensibles sont actualisées au moins tous les quatre ans, dans les conditions prévues pour leur élaboration (article 7).

2. Le calendrier

La Directive opère une distinction entre la collecte et le traitement.

La collecte des eaux usées doit être réalisée avant le 31 décembre 1998 pour les agglomérations en zone sensible de plus de 10.000 équivalents habitants ; avant le 31 décembre 2000 pour les agglomérations de plus de 15.000 équivalents habitants ; avant le 31 décembre 2005 pour les agglomérations comprises entre 2.000 et 15.000 équivalents habitants.

Un traitement secondaire (destiné à attaquer la pollution dissoute de colloïdale, le plus souvent réalisé par voie biologique) est requis d'ici le 31 décembre 2000 dans les agglomérations de plus de 15.000 équivalents habitants et d'ici le 31 décembre 2005 pour les agglomérations comprises entre 2.000 et 15.000 équivalents habitants.

Dans les zones sensibles, il est prévu un traitement spécifique de l'azote et du phosphore.

3. Performances épuratoires

Les exigences épuratoires ont été fixées par le décret 94-469 du 3 juin 1994 et l'arrêté du 12 décembre 1994 (prescription technique). Elles s'établissent comme suit :

Performances épuratoires

Taille de la commune ou de l'agglomération

Charge correspondante (en DBO5/jour)

Concentrations maximales
(mg/l)

Rendement minimal en %

   

DCO

DBO5

MES

DCO

DBO5

MES

< 2.000 EH
(arrêté du 21 juin 1996)

< 120 kg

 

35

 

60 %

60 %

 

2.000 - 10.000 EH
(arrêté du 22 décembre 1994)

120-600 kg

125

25

35

75 %

70 %

90 %

> 10.000
(arrêté du 22 décembre 1994)

> 600 kg

125

25

35

75 %

80 %

90 %

Lorsque les rejets ont lieu dans des zones sensibles à l'eutrophisation, les valeurs indiquées ci-dessus sont complétées par des exigences épuratoires sur l'azote et le phosphore.

Zone sensible

Charge correspondante (en DBO5/jour)

Concentration maximale
(mg/l)

Rendement minimal en %

Azote

> 600
> 6.000

15
10

70 %

Phosphore

> 600
> 6.000

2
1

80 %

Il existe une certaine tolérance dans l'appréciation de ces paramètres. D'une part, le nombre d'échantillons non conformes ne doit pas dépasser un certain nombre, variable selon l'importance de la station (voir détails dans l'arrêté du 22 décembre 1994) ; d'autre part, les paramètres ne doivent pas dépasser un seuil déclassant fixé à 50 mg/l de DBO5, 250 mg/l de DCO, 85 mg/l de MES.

Annexe 78 - ÉTAPES ET PROCÉDÉS DE TRAITEMENT DES EAUX USÉES

1. Les prétraitements

Les prétraitements ont pour objectif d'éliminer les éléments les plus grossiers. Il s'agit des déchets volumineux (dégrillage), des sables et graviers (dessablage) et des graisses (dégraissage-déshuilage).

Au cours du dégrillage, les eaux usées passent au travers d'une grille dont les barreaux retiennent les matières les plus volumineuses. Le tamisage peut compléter cette phase de prétraitement.

Le dessablage débarrasse les eaux usées des sables et des graviers par sédimentation. Ces particules sont ensuite aspirées par une pompe. Les sables récupérés sont essorés, puis lavés avant d'être soit envoyés en décharge, soit réutilisés, selon la qualité du lavage.

Le dégraissage vise à éliminer la présence de graisses dans les eaux usées, graisses qui peuvent gêner l'efficacité des traitements biologiques qui interviennent ensuite. Le dégraissage s'effectue par flottation. L'injection d'air au fond de l'ouvrage permet la remontée en surface des corps gras. Les graisses sont raclées à la surface, puis éliminées (mise en décharge ou incinération).

2. Le traitement primaire

Le traitement « primaire » fait appel à des procédés physiques, avec décantation plus ou moins aboutie, éventuellement assortie de procédés physico-chimiques, tels que la coagulation-floculation.

- La décantation primaire classique consiste en une séparation des éléments liquides et des éléments solides sous l'effet de la pesanteur. Les matières solides se déposent au fond d'un ouvrage appelé « décanteur » pour former les « boues primaires ». Ce traitement élimine 50 à 55 % des matières en suspension et réduit d'environ 30 % la DBO et la DCO.

- L'utilisation d'un décanteur lamellaire permet d'accroître le rendement de la décantation. Ce type d'ouvrage comporte des lamelles parallèles inclinées, ce qui multiplie la surface de décantation et accélère le processus de dépôt des particules. Une décantation lamellaire permet d'éliminer plus de 70 % des matières en suspension et diminue de plus de 40 % la DCO et la DBO.

- La décantation est encore plus performante lorsqu'elle s'accompagne d'une floculation préalable. La coagulation-floculation permet d'éliminer jusqu'à 90 % des matières en suspension et 75 % de la DBO. Cette technique comporte une première phase d'adjonction d'un réactif, qui provoque l'agglomération des particules en suspension. Les amas de solides ainsi obtenus sont appelés « flocs ».

3. Les traitements « secondaires », l'élimination biologique des matières polluantes


a) Les traitements biologiques

Dans la grande majorité des cas, l'élimination des pollutions carbonée et azotée s'appuie sur des procédés de nature biologique. Les traitements biologiques reproduisent les phénomènes d'autoépuration existant dans la nature. L'autoépuration regroupe l'ensemble des processus par lesquels un milieu aquatique parvient à retrouver sa qualité d'origine après une pollution.

Les techniques d'épuration biologique utilisent l'activité des bactéries présentes dans l'eau, qui dégradent les matières organiques. En France, c'est aujourd'hui le procédé des « boues activées » (cf. infra) qui est le plus répandu dans les stations d'épuration assurant un traitement secondaire.

Parmi les traitements biologiques, on distingue les procédés biologiques extensifs et intensifs.

b) Les procédés biologiques extensifs

Le lagunage utilise la capacité épuratrice de plans d'eau peu profonds. Les eaux usées sont envoyées dans une série de bassins. L'oxygène est apporté par les échanges avec l'atmosphère. La pollution organique se dégrade sous l'action des bactéries présentes dans le plan d'eau. Ce mode d'épuration permet d'éliminer 80 à 90 % de la DBO, 20 à 30 % de l'azote et contribue à une réduction très importante des germes. Il a cependant l'inconvénient d'utiliser des surfaces importantes.

c) Les procédés biologiques intensifs

Ils regroupent toute une série de techniques ayant en commun le recours à des cultures bactériennes qui « consomment » les matières polluantes. Il existe deux grandes catégories de procédés biologiques artificiels.

Les installations à « boues activées » : il s'agit d'un système d'épuration aérobie, c'est-à-dire nécessitant un apport d'oxygène. La culture bactérienne est maintenue dans un bassin aéré et brassé. Les matières organiques contenues dans l'eau se transforment en carbone (sous la forme de dioxyde de carbone - CO2) sous l'action des bactéries. Les résidus ainsi formés, contenant ce stock de bactéries, sont appelés « boues ». Après un temps de séjour dans un bassin d'aération, l'effluent est renvoyé dans un clarificateur, appelé aussi décanteur secondaire. Ensuite, les boues sont soit envoyées dans une unité de traitement spécifique, en vue de leur épandage agricole ou de leur élimination, soit réinjectées pour partie dans le bassin d'aération. On qualifie cette opération de « recirculation des boues ».

Les traitements par boues activées éliminent de 85 à 95 % de la DBO5, selon les installations. C'est le traitement biologique le plus simple et le plus fréquemment utilisé actuellement en France.

Les installations à « cultures fixes ». La technique des lits bactériens consiste à faire ruisseler les eaux à traiter sur un support solide où se développe une culture de micro-organismes épurateurs, le « film biologique » ou « biofilm ». Le rendement maximum de cette technique est de 80 % d'élimination de la DBO. Ces procédés équipent moins de 10 % du parc français des stations d'épuration. Ils sont en général réservés aux installations d'une taille inférieure à 2 000 équivalents-habitants.

La biofiltration utilise une culture bactérienne fixée sur un support granulaire. Le milieu granulaire sert à la fois de filtre et de support aux cultures bactériennes. Cette installation offre donc la possibilité de réaliser conjointement la dégradation des matières polluantes et la clarification des eaux usées. Quel qu'il soit, le matériau retenu doit se caractériser par son action filtrante et permettre une fixation maximale des cultures biologiques. Un système d'aération apporte l'oxygène nécessaire à l'intérieur du filtre. Cette technique élimine environ 90 % de la DBO et peut également éliminer l'azote.

d) Les procédés membranaires

Les procédés membranaires combinent des procédés biologiques et physiques. Ces membranes très fines constituent une barrière physique qui retient les micro-organismes et les particules.

4. Clarification et rejet des effluents

A l'issue des traitements, une ultime décantation permet de séparer l'eau épurée et les boues ou résidus secondaires issus de la dégradation des matières organiques. Cette décantation est opérée dans des bassins spéciaux, les clarificateurs. L'eau épurée peut alors être rejetée dans le milieu naturel.

5. La désinfection

Les traitements primaires et secondaires ne détruisent pas complètement les germes présents dans les rejets domestiques. Des procédés d'élimination supplémentaires sont donc employés lorsque les eaux traitées sont rejetées en zone de baignade ou de pisciculture.

Le chlore est le désinfectant le plus courant. Mais la désinfection peut également s'effectuer avec l'ozone ou le brome, voire le dioxyde de chlore.

5. Les traitements complémentaires

L'élimination de l'azote

Les stations d'épuration prévues pour éliminer les matières carbonées n'éliminent qu'environ 20 % de l'azote présent dans les eaux usées. Pour satisfaire aux normes de rejet en zones sensibles, des traitements complémentaires doivent être mis en place.

L'azote organique se transforme dans les eaux usées en azote ammoniacal (NH4+). L'élimination de l'azote ammoniacal est, le plus souvent, obtenue grâce à des traitements biologiques, de « nitrification-dénitrification ». La nitrification consiste en une transformation, par des cultures bactériennes, de l'azote ammoniacal en nitrates (NO3), une forme oxydée de l'azote. Une seconde phase, la dénitrification, complète le processus. Les nitrates, sous l'action de bactéries « dénitrifiantes », sont transformés en azote gazeux. Ce gaz s'échappe alors dans l'atmosphère.

L'élimination du phosphore

L'élimination du phosphore, ou « déphosphatation », peut être réalisée par des voies physico-chimiques ou biologiques.

En ce qui concerne les traitements physico-chimiques, l'adjonction de réactifs, comme des sels de fer ou d'aluminium, permet d'obtenir une précipitation de phosphates insolubles et leur élimination par décantation. Ces techniques, les plus utilisées actuellement, éliminent entre 80 et 90 % du phosphore, mais engendrent une importante production de boues.

La déphosphatation biologique consiste à provoquer l'accumulation du phosphore dans les cultures bactériennes des boues. Le rendement moyen est d'environ 60 %.

Annexe 79 - L'ÉLIMINATION DE L'AZOTE ET DU PHOSPHORE

Rédaction : M. Jean-Luc VASEL, membre du Comité de pilotage.

L'azote et le phosphore sont de nature à entraîner des phénomènes d'eutrophisation des eaux, sous la forme de prolifération algale de mortalités piscicoles... Ce phénomène concerne avant tout les zones sensibles à l'eutrophisation dans lesquelles les stations d'épuration doivent être équipées de procédés permettant l'élimination de l'azote et/ou du phosphore

L'épuration et les transformations qu'ils subiront au sein des stations d'épuration seront cependant très différentes selon que l'on s'adresse à l'azote ou au phosphore.

- L'azote sera l'objet, sous l'action des bactéries, d'une série d'oxydations, puis de réductions successives l'amenant du stade (ammonium étage d'oxydation -3), au stade (nitrite étage d'oxydation +3) puis (nitrate étage +5) pour ensuite être réduit au stade N2 (azote : étage zéro).

Arrivé à ce stade il est sous forme gazeuse et pourra alors passer dans l'atmosphère où il rejoindra sans inconvénient l'azote atmosphérique. L'azote est donc éliminé, sous la forme gazeuse.

Les conditions nécessaires pour l'apparition des bactéries responsables des étapes d'oxydation ne sont pas très difficiles à obtenir dans une station. Par contre ces micro-organismes consomment beaucoup d'oxygène (réactions d'oxydation) qui doit être apporté par des moyens mécaniques (turbines, sur presseurs), ce qui se traduit par une consommation d'énergie et donc un coût de fonctionnement.

Les étapes de réduction (dénitrification) ne nécessitent pas d'oxygène, mais permettent, au contraire, de récupérer une partie de celui qui a été utilisé au départ. Cependant ces opérations nécessitent des mises en oeuvre particulières qui ne peuvent être assurées dans les stations anciennes ou surchargées.

Notons que des recherches récentes ont permis de mettre en évidence l'existence de bactéries issues du milieu naturel (anammox) capables de réaliser l'ensemble du processus de façon plus intéressante consistant à combiner l'ammonium () au nitrite () pour aboutir directement au stade N2. Les premières applications industrielles viennent de voir le jour.

Le phosphore, quant à lui, pourra être extrait de la phase liquide et évacué non pas sous forme gazeuse mais sous forme solide. En effet, il n'existe pas dans les transformations du phosphore mises en oeuvre dans une station d'épuration de formes gazeuses de cet élément Il devra donc être extrait sous forme de solides : soit sous forme de sels obtenus par précipitation chimique à partir de réactifs appropriés, soit comme partie intégrante des boues biologiques produites dans la station d'épuration.

Dans le premier cas le coût de l'opération sera lié à la fois au coût des réactifs mis en oeuvre et aux investissements pour les équipements de récupération des précipités formés.

L'élimination biologique du phosphore correspond au second cas. Elle vise à obtenir une boue biologique dont la teneur en phosphore est particulièrement élevée. Cet enrichissement inhabituel n'est obtenu qu'en alternant les conditions d'environnement des bactéries responsables de ce phénomène (création d'un état de stress pour les bactéries).

Si l'opération d'élimination biologique du phosphore est en soi peu coûteuse en énergie, elle requiert des investissements plus coûteux au départ et implique une gestion de la station beaucoup plus précise qu'auparavant.

Notons que dans les deux cas (traitement physico-chimique ou biologique), le phosphore se retrouvera dans les boues produites par la station. Il sera alors associé au devenir des boues et pourra donc, suivant le cas, aller vers l'incinération ou la valorisation agricole directe.

Notons cependant que le phosphore est un élément utile et précieux dont les ressources ne sont pas inépuisables. On songe de plus en plus à l'extraire des boues pour le récupérer.

Une des pistes explorées par les chercheurs dans ce domaine est de provoquer la précipitation d'un composé particulier : la struvite, qui est un sel d'azote et de phosphore, qui pourrait alors constituer un engrais contenant à la fois l'azote et le phosphore nécessaires aux cultures. Cela permettrait alors une récupération et une valorisation de ces deux éléments indispensables à l'agriculture.

Annexe 80 - L'ÉLIMINATION DES MICROPOLLUANTS DANS LES STATIONS D'EPURATION

Rédaction : M. Jean-Luc VASEL, membre du Comité de pilotage

Jusqu'à présent, la pollution organique (carbonée) et son élimination sont suivies au moyen de mesures globales telles que la DCO (Demande Chimique en Oxygène) et la DBO (Demande Biochimique en Oxygène). Ces deux paramètres globaux sont des Demandes en Oxygène, c'est-à-dire que l'on mesure la quantité d'oxygène qui est nécessaire pour dégrader la pollution, soit par la voie chimique (DCO) soit par voie biologique (DBO). Ce sont cependant des paramètres importants dans la mesure où, dans les stations d'épuration, il faut apporter artificiellement l'oxygène nécessaire au traitement et que le coût de l'opération sera proportionnel aux valeurs mesurées des demandes en oxygène (DBO, DCO).

Par contre, une eau usée domestique ou industrielle contient de très nombreux polluants différents et les mesures de la DBO (ou de la DCO) ne donnent aucune indication sur la teneur de ces composés individuels. Or, tous ces produits ne sont pas dégradés avec la même efficacité lors de leur passage dans les stations d'épuration.

Ainsi, en sortie de station d'épuration, on trouvera, en concentration faible certes, des produits non dégradés, des produits partiellement dégradés et des résidus de transformation. En effet, il est une idée bien ancrée dans l'esprit de nos concitoyens et pourtant fausse quant aux possibilités de dégradation des bactéries vis-à-vis des substances organiques. On imagine que, si on leur en donne le temps, les micro-organismes finiront toujours par dégrader totalement les substances avec lesquelles ils sont en contact.

Or ceci n'est certainement pas vrai, du moins à l'échelle de temps de quelques mois ou de quelques années.

Il suffit de songer aux substances naturelles telles que les acides humiques présents dans les sols forestiers. Ces substances, pourtant naturelles, sont très peu dégradées par les micro-organismes, sinon elles seraient oxydées en CO2 et ne s'accumuleraient pas dans les sols.

Il est vrai que de très nombreuses substances d'origine naturelle sont biodégradables, c'est-à-dire peuvent être décomposées par les micro-organismes.

Cette propriété n'est pas aussi fréquente pour les produits organiques de synthèse. Ainsi d'assez nombreuses molécules organiques fabriquées par synthèse chimique sont en fait peu ou pas biodégradables. Elles peuvent alors passer à travers les stations d'épuration sans subir de transformations importantes, pour aboutir finalement dans les milieux récepteurs. Au fur et à mesure que la qualité des cours d'eau se restaure suite à la politique d'assainissement menée depuis plusieurs décennies et aux progrès faits dans les techniques de mesures, on peut à présent détecter ces polluants présents à l'état de traces.

Auparavant ces pollutions étaient masquées par les pollutions primaires, secondaires ou tertiaires ; ces dernières ayant fait l'objet des efforts d'épuration, on s'intéresse dorénavant de façon plus attentive aux micropolluants, que certains auteurs classifient aussi sous le vocable de « pollution quaternaire ».

Ainsi on s'intéresse à leur présence dans les milieux récepteurs, à leur taux de réduction dans les stations d'épuration conventionnelles, voire aux types de traitements « quaternaires » qu'il faudra mettre en place pour poursuivre plus avant leur dégradation.

Parmi ces substances, on mentionnera les substances reprises dans la liste des substances toxiques bien entendu, les pesticides, les médicaments ou leurs métabolites, les oestrogènes ainsi que les micropolluants à effets modulateurs endocriniens, les stéroïdes, les métabolites de détergents, mais aussi des produits tels que les parfums, etc...

Bien qu'elles soient, pour la plupart d'entre elles, utilisées depuis quelques dizaines d'années à présent, on considère qu'elles sont potentiellement perturbatrices des écosystèmes, non pas seulement par des effets de toxicité directe qui auraient le plus souvent conduit à bannir leur usage, mais aussi parce qu'elles seraient susceptibles de réduire la fertilité de certaines espèces (poissons, crustacés, mollusques ...). On se pose à présent la question du risque .potentiel pour la santé humaine.

Cette nouvelle question environnementale fait l'objet d'études approfondies pour mesurer les taux de contamination des milieux aquatiques, quantifier les abattements obtenus dans les différentes filières d'épuration, mieux identifier les flux de ces matières dans les stations : ces polluants se retrouvent-ils majoritairement dans l'eau traitée, dans les boues, dans les produits gras (graisses), et, finalement, mieux cerner les risques associés à leur présence, éventuellement de façon simultanée, dans ces écosystèmes.

Annexe 81 - LES RÉSEAUX UNITAIRES

Rédaction : M. Jean-Claude DEUTSCH, Professeur à l'Ecole des Ponts, membre du Comité de pilotage.

Vaut-il mieux promouvoir un réseau unitaire ou un réseau séparatif ? Les enjeux sont techniques, économiques, environnementaux.

La création des réseaux d'assainissement modernes à partir du XIXème siècle répond à deux objectifs : évacuer les eaux le plus loin et le plus rapidement possible des centres villes pour des raisons sanitaires et diminuer la fréquence des inondations. Le « tout à l'égout », c'est-à-dire la canalisation souterraine qui doit servir à évacuer aussi bien les eaux usées que pluviales apparaît alors comme la solution la plus satisfaisante. D'un point de vue technique, elle est extrêmement simple, car l'écoulement des eaux est conçu de manière gravitaire. Elle répond aux objectifs, dans une certaine mesure, de lutte contre les inondations et fait disparaître le problème des déchets liquides dans une ville dont l'embellissement est une priorité affirmée. La France, après l'Angleterre, adopte cette solution à la fin du XIXème siècle. Le réseau d'assainissement unitaire est né.

Deux problèmes vont conduire à le mettre en question. D'une part, on constate qu'au niveau des rejets de ces réseaux dans le milieu naturel, l'eau des rivières et des fleuves devient anoxique et impropre à la vie. D'autre part, le coût des réseaux, qui sont dimensionnés pour évacuer les débits produits par l'événement pluvieux de fréquence décennale, devient vite insupportable pour le budget des collectivités territoriales.

La mise en oeuvre au début du XXème siècle du principe de l'épuration biologique des eaux usées va donner la solution à ces problèmes. En effet, ce système de traitement n'accepte que de faibles variations de débit en entrée : généralement de un à trois. Il n'est donc pas question d'accueillir dans les stations d'épuration des eaux pluviales en trop grande quantité. Le réseau unitaire, pour répondre à cette contrainte, met en place des déversoirs d'orage, c'est-à-dire des trop-pleins, qui conduisent les débits excédentaires directement vers le milieu naturel. Ce qui est rejeté ainsi lors d'événements pluviaux moyens est un mélange d'eaux usées et d'eaux pluviales. Il est clair que ce n'est pas satisfaisant.

Tout cela aboutit à faire une distinction nette entre l'évacuation des eaux usées et des eaux pluviales. Les premières auront leur propre réseau, avec un diamètre beaucoup moins important que celui du réseau unitaire, donc moins cher, aboutissant à une station d'épuration. Les secondes devront le plus possible ruisseler en surface, et elles se rejetteront directement dans le milieu naturel. Voici les principales caractéristiques du réseau séparatif à l'origine.

Le réseau séparatif d'aujourd'hui est assez différent du réseau théorique imaginé alors. La reconstruction après la deuxième guerre mondiale et la construction de villes nouvelles vers les années soixante s'est traduite par la mise en place d'un double réseau, dédié l'un aux eaux usées et l'autre aux eaux pluviales. Mais faute de contrôle des branchements, lors de la réalisation des travaux, les défaillances sont nombreuses. Rappelons que l'on a pu atteindre dans les villes nouvelles de la région parisienne jusqu'à 40% de mauvais branchements dans un sens ou dans l'autre.

En outre, la reconnaissance de la pollution des eaux de ruissellement est une contrainte supplémentaire dans le choix d'un réseau d'assainissement, car il faut aussi chercher à minimiser l'impact des rejets d'eaux pluviales sur le milieu naturel.

Par ailleurs, depuis 1977 s'est développé un nouveau paradigme en assainissement : on peut stocker les eaux pluviales au plus près de l'endroit où elle tombe, ce qui permet d'éviter de construire des émissaires de grand diamètre pour les évacuer, alors qu'auparavant, il s'agissait d'évacuer toutes les eaux le plus rapidement le plus loin possible des centres-villes. Un certain nombre de techniques ont été alors mises en place (bassins de retenue, chaussées à structure-réservoir, fossés absorbants, toitures terrasses..). Celles-ci supposent que les eaux stockées sont propres, dans la mesure où elles ont relativement peu ruisselé sur le sol.

L'ensemble des paramètres qui sont en jeu (économiques, institutionnels, techniques, contrôle des branchements, mise en oeuvre de méthodes alternatives de stockage) ne facilite pas le choix de l'un ou l'autre réseau. Ce qui semble à peu près acquis aujourd'hui, c'est que dans les centres-villes où le réseau unitaire existe depuis longtemps, il ne semble pas raisonnable d'envisager la transformation en réseau séparatif pour des raisons d'analyse coûts-avantages. Par contre, il faut bien maîtriser le fonctionnement des déversoirs d'orage de manière à minimiser l'impact des rejets directs. Dans les nouvelles urbanisations en amont, il faut plutôt se diriger vers un séparatif avec le moins de double réseau possible, en portant une attention particulière au contrôle des branchements au moment de la construction et dans la durée. Entre ces deux situations, la solution dépend essentiellement des conditions locales.

Annexe 82 - LE CADRE RÉGLEMENTAIRE : ZONAGE ET SCHÉMA D'ASSAINISSEMENT

La loi sur l'eau, et ses textes d'application, conduit les communes à réaliser des schémas d'assainissement. Le zonage est l'étape préalable au schéma d'assainissement. Il est défini par le décret 94-469 du 3 juin 1994.

1. Les différentes zones

Le zonage d'assainissement consiste à déterminer :

. Les zones d'assainissement collectif où les communes sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées domestiques et le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation des eaux collectées.

. Les zones relevant de l'assainissement non collectif où elles sont seulement tenues d'assurer le contrôle des dispositifs d'assainissement, et si elles le décident, leur entretien.

Un zonage complémentaire peut être ajouté lorsque les enjeux locaux le justifient.

Il s'agit d'une part des zones où des mesures peuvent être prises pour limiter l'imperméabilisation des sols,

Il s'agit d'autre part des zones pour assurer la collecte et en tant que de besoin, le traitement des eaux pluviales et de ruissellement. Ce zonage concerne surtout les régions dans lesquelles l'affaissement des nappes constitue un défi vital notamment face aux risques d'intrusion marine. L'idée est alors de réalimenter les nappes par les eaux de pluie. La délimitation des zones d'assainissement des eaux pluviales n'est pas déterminée au niveau communal mais au niveau du bassin versant.

2. Les obligations juridiques qui découlent du zonage sont les suivantes :

Les obligations qui découlent du zonage d'assainissement collectif diffèrent selon la taille des communes. Pour les communes de plus de 2.000 EH les travaux de collecte doivent être réalisés avant le 31 décembre 2005. Les constructions nouvelles dans une zone déterminée en assainissement collectif non encore desservie par le réseau doivent s'équiper d'un assainissement individuel. Pour les communes de moins de 2.000 EH, la commune n'a pas obligation de s'engager sur un échéancier de réalisation. Le zonage signifie seulement que à terme, tous les terrains inclus dans la zone déterminée seront desservis par un réseau public d'assainissement collectif.

Le zonage en assainissement non collectif impose à la commune de contrôler les systèmes d'assainissement (fosses septiques...) et de mettre en place un service public d'assistance à l'assainissement non collectif (SPANC). Dans cette zone, les nouveaux équipements doivent respecter les obligations de conformité prévues par la réglementation ; en revanche, les anciens équipements non conformes à l'article L.2224-10 du code général des collectivités territoriales ne fixe pas formellement de date limite à la réalisation de ce zonage mais elle est vivement recommandée dans la mesure où la mise en place du service d'assainissement non collectif, elle, est soumise à l'échéance du 31 décembre 2005.

Le schéma d'assainissement correspond à une approche plus complète des questions d'assainissement comprenant le diagnostic des réseaux existants, la localisation des débordements, la caractérisation des boues et les filières de traitement, la programmation des travaux ...

Annexe 83 - L'ASSAINISSEMENT COLLECTIF EN MILIEU RURAL

Source : Les études de l'Agence de l'eau Adour Garonne

1. Présentation générale

En application du décret 94-469 du 3 juin 1994, les communes de moins de 2.000 EH ne sont pas tenues d'avoir un système collectif de collecte des eaux usées. Mais, évidemment il n'y pas d'interdiction. Une commune peut parfaitement décider de se doter d'un système d'assainissement collectif. Le zonage en assainissement collectif signifie que, à terme, tous les terrains de la zone seront desservis par un réseau public collectif, lorsqu'elle fait ce choix. Il n'y a pas d'échéancier pour les communes de moins de 2.000 EH et les formalités sont allégées : les structures d'assainissement collectif sont soumises à déclaration pour les stations de capacité comprises entre 200 et 2.000 EH ; les stations de capacité inférieure à 200 EH ne sont pas soumises à déclaration.

Tous les traitements sont basés sur le principe de l'épuration biologique. Elle consiste à reproduire les processus existants dans la nature : lorsque, dans une eau, il y a de la matière organique, les bactéries aérobies (qui nécessitent de l'oxygène pour leur activité), se chargent de dégrader partiellement la matière organique en épuisant l'oxygène présent dans ces matières. Ainsi, les matières organiques des eaux usées vont être dégradées par les microorganismes, essentiellement des bactéries qui trouvent dans les boues les matières nécessaires à leur développement. Ce développement bactérien peut être naturel, facilité par des filtres ou accéléré par des apports de bactéries et/ou d'oxygène.

2. Les différents traitements possibles

Le choix d'une filière de traitement doit prendre en compte plusieurs facteurs techniques, financiers et environnementaux. Il faut identifier les milieux récepteurs potentiels, connaître les sources de pollution amont afin de déterminer le poids de la collectivité dans l'ensemble des pollutions, fixer une marge de pollution acceptable, un flux maximal admissible de pollution et adapter le niveau de traitement en conséquence.

Les traitements mis en oeuvre doivent être appropriés et permettre de respecter les objectifs de qualité du milieu récepteur. L'arrêté du 21 juin 1996 et la circulaire du 17 février 1997 déterminent des niveaux de rejet-type pour les ouvrages soumis à déclaration. Il existe quatre niveaux de traitement (D1, D2, D3, D4) selon les niveaux de rendement épuratoire attendus ou les limites de concentration après épuration. Les modes de traitement sont les suivants :

Les modes de traitement classiques, inspirés de l'assainissement non collectif

- filtres à sable verticaux souterrains. L'eau est infiltrée dans un milieu granulaire sous terre inaccessible de l'extérieur.

- filtres d'infiltration percolation. L'eau est infiltrée dans un milieu granulaire accessible.

- décantation-digestion. Les matières en suspension tombent par décantation. Les microorganismes se développent naturellement.

- lagunage naturel : les bactéries aérobies se développent naturellement en utilisant la matière organique comme source de nutriment. L'oxygène est fourni par l'air et par l'activité photosynthétique des algues de surface.

Les procédés épuratoires intensifs

- le lit bactérien. Les eaux usées décantent sur un lit bactérien poreux qui sert de support au développement des matières organiques. L'aération est donnée par l'oxygène de l'air. Le biofilm qui se forme se détache et tombe au fur et à mesure du matériau poreux.

- les disques biologiques. C'est le même principe que le lit bactérien mais le développement a lieu sur des disques qui servent de support aux bactéries. Le biofilm ne se détache pas mais reste accroché aux disques

- les boues activées. C'est le même principe avec apport de microorganismes et apport d'oxygène pour favoriser le développement bactérien. Une partie de la matière organique se dépose, crée donc un milieu anoxique, sans oxygène où les bactéries (anaérobies cette fois, c'est-à-dire qui ne nécessitent pas d'oxygène), engendrent une fermentation qui dégage de l'ammoniac.

3. Les performances des traitements

Selon l'étude de l'agence de l'eau, les performances épuratoires des différents traitements adaptés à la taille des communes se présentent comme suit :

Performances épuratoires des modes d'assainissement
des petites collectivités

 

Rendement épuratoire (%)

Résidus (en mg/l)

Procédés (population adaptée)

DBO 5

DCO

MES

DBO 5

DCO

MES

Filtre à sable (-300 hab)

90/95

90/95

95

20

60

20

Bassin d'infiltration percolation
(-500 hab)

75/90

90/95

95

30

100

30

Filtre roseaux (- 500 hab)

90

90

90

20

60

20

Décanteur digesteur (- 500 hab)

30

 

50

250

500

200

Lagunage naturel (-500)

80/90

80/90

70

90

200

100

Lit bactérien (+ 200 hab)

80

65/85

75

20

60

20

Disque biologique (+200 hab)

90

90

90

20

60

20

Boues activées (+ 1000 hab)

           

Annexe 84 - LA RÉGLEMENTATION DE L'ASSAINISSEMENT NON COLLECTIF

L'assainissement non collectif (ANC), dit aussi assainissement individuel, concerne les immeubles et les maisons individuelles non raccordées à un réseau public de collecte des eaux usées.

Le cadre juridique est fixé par la directive européenne 91/271/CEE du 21 mai 1991 et la loi sur l'eau du 3 janvier 1992.

Les communes ont l'obligation de déterminer sur leur territoire les zones d'assainissement collectif et les zones d'assainissement non collectif. Leurs obligations diffèrent dans les deux cas. Dans les zones d'assainissement collectif, les communes sont tenues d'assurer la collecte des eaux usées, le stockage, l'épuration et le rejet ou la réutilisation des eaux collectées Il y a donc une obligation de résultats. Dans les zones d'assainissement non collectif, les communes sont tenues seulement d'assurer le contrôle des installations. Ce contrôle est réalisé par un service public de contrôle des dispositifs d'assainissement non collectif (dit SPANC), qui doit être mis en place au plus tard le 31 décembre 2005. Ce service de contrôle peut être complété, si les communes le décident, par une prestation d'entretien. Le SPANC est un service public industriel commercial financé par les redevances des intéressés. Il ne sera pas financé par le budget de la commune mais fera l'objet d'une redevance dont seuls les usagers bénéficiant du service seront redevables.

Les modalités techniques fixant les obligations de contrôle et les caractéristiques des installations sont fixées par l'arrêté du 6 mai 1996.

L'arrêté opère une distinction entre les contrôles des installations neuves ou réhabilitées et le contrôle des installations existantes.

Concernant les installations neuves ou réhabilitées, le contrôle est un contrôle de conception, de l'implantation et de la bonne exécution des ouvrages. Les installations ne doivent pas représenter de risques de contamination ou de pollution des eaux ; l'assainissement doit être installé par une entreprise spécialisée; l'installation doit être adaptée aux caractéristiques de l'immeuble et à l'hydrologie du site ; il ne doit pas être installé à moins de 35 m d'un point de prélèvement d'eau destiné à la consommation humaine ; la fosse septique doit être vidangée au moins tous les quatre ans ; enfin, l'installation doit faire l'objet d'un contrôle périodique de bon fonctionnement et d'entretien. La circulaire du 22 mai 1997 prévoit une fréquence de contrôle tous les quatre ans au minimum.

Dans le cas des installations existantes, le contrôle est un contrôle diagnostic. Il constitue un état des lieux permettant de repérer les défauts de conception et d'usure des dispositifs existants. Ce contrôle impose une visite sur le site (contrôle de distance par rapport à tout captage d'eau utilisée pour la consommation humaine, dimensionnement adaptée, ventilation suffisante, etc...).

Dans le cas où un dysfonctionnement apparaît, la commune rappelle aux propriétaires qu'ils demeurent responsables en cas de pollution. Si un dysfonctionnement persiste après contrôle, la commune n'est pas responsable car c'est au propriétaire de réaliser une étude d'adéquation de filière (adéquation de l'installation, au dimensionnement, etc...). En revanche, si les obligations de contrôle ne sont pas mises en oeuvre, la commune ainsi que le maire sont responsables de tout dysfonctionnement. La responsabilité personnelle du maire peut être engagée en cas de pollution et d'atteinte grave à la salubrité publique.

L'arrêté du 6 mai 1994 fixe les prescriptions techniques applicables au système d'ANC afin d'assurer leur compatibilité avec les exigences de santé publique et de l'environnement.

Les principaux dispositifs d'ANC sont les suivantes :

- la fosse toutes eaux, qui permet de séparer les graisses les plus légères et permet une sédimentation des particules lourdes qui s'accumulent en fond de fosse pour former des boues.

- les installations d'épuration biologique à boues activées, qui assurent la dégradation de la pollution par des micro-organismes en culture libre ou préalablement fixées sur un support.

- la fosse septique. Les fosses septiques fonctionnent sur le principe des fosses toutes eaux avec dégraissage et sédimentation. Il s'agit de la première génération d'équipements d'assainissement individuel mis en oeuvre par un arrêté de 1974. On distinguait alors les « eaux vannes » (les eaux des toilettes qui devaient être dirigées vers les fosses septiques) et les autres eaux dites « eaux ménagères » qui étaient dirigées vers des bacs à graisse. Ce système a été bouleversé par une nouvelle réglementation de 1982 avec la création des fosses toutes eaux qui opèrent un mélange entre les eaux. Normalement, les fosses septiques ne sont plus autorisées dans les nouvelles constructions depuis 20 ans.

- les techniques de lit filtrant. Il s'agit d'un système de filtres constitué à partir d'un lit de sable ou de matériau filtrant.

Annexe 85 - RÉGLEMENTATION DE LA RÉUTILISATION DES EAUX USÉES ÉPURÉES

Rédaction : M. François BRISSAUD, Professeur à l'Université Montpellier II.

L'article 24 du décret n° 94-469 du 3 juin 1994 fonde le statut réglementaire de la réutilisation des eaux usées urbaines (REU) : Les eaux usées peuvent, après épuration, être utilisées à des fins d'arrosage ou d'irrigation, sous réserve que leurs caractéristiques et leur modalité d'emploi soient compatibles avec les exigences de protection de la santé publique et de l'environnement (...). Les conditions d'épuration et les modalités d'irrigation ou d'arrosage requises, ainsi que les programmes de surveillance à mettre en oeuvre, sont définis, après avis du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France( CSHPF) et de la Mission Interministérielle de l'Eau par un arrêté du ministre de la Santé, du ministre chargé de l'Environnement et du ministre chargé de l'Agriculture.

On remarque que seules les réutilisations pour l'irrigation et l'arrosage sont prises en compte. Dans l'attente de cet arrêté, il convient de se référer aux recommandations du CSHPF concernant l'utilisation, après épuration, des eaux résiduaires pour l'irrigation des cultures et des espaces verts (Circulaire n° 51 du 22 juillet 1991 et du 3 août 1992 du ministère chargé de la Santé). Ce document, destiné à guider les autorités locales et les équipes chargées d'élaborer des projets de réutilisation, s'appuie sur les recommandations relatives à la réutilisation des eaux usées de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

Les recommandations du CSHPF visent à protéger la santé du personnel placé au contact des eaux usées, du consommateur des produits cultivés et de la population vivant au voisinage des zones d'irrigation. Elles définissent trois catégories de qualité d'eau, C, B et A, de qualité sanitaire croissante, correspondants à des usages en fonction de la qualité des eaux:

Qualité C : même si une épuration préalable est nécessaire, aucune limite microbiologique n'est imposée dans la mesure où les techniques d'irrigation et les types de cultures irriguées assurent une rupture de la chaîne de transmission des risques de contamination. Les cultures autorisées sont : céréales, cultures industrielles et fourrages, vergers et zones forestières ainsi que les espaces verts non ouverts au public.

Qualité B : elle est définie par un critère parasitologique, soit une teneur en oeufs d'helminthes intestinaux (tenia, ascaris) inférieure à une unité par litre. Cette qualité est requise pour l'irrigation par submersion et à la raie des vergers, cultures céréalières et fourragères, pépinières et de végétaux consommables après cuisson (pommes de terre, betterave, choux, carottes...) Les terrains de sport utilisés plusieurs semaines après l'arrosage peuvent aussi être irrigués avec des eaux usées respectant le niveau de qualité B.

L'irrigation par aspersion de ces cultures, des prairies de pâtures ou de fauche ainsi que l'arrosage d'espaces verts inaccessibles au public sont tolérés avec ce niveau de qualité sous réserve que la protection des personnels d'exploitation contre les risques d'inhalation des aérosols soit assurée, que l'aspersion soit réalisée à une distance suffisante des habitations, des zones de sport et de loisir (100 mètres minimum), que des obstacles ou des écrans (arbres) limitant la propagation des aérosols soient mis en place et que l'arrosage direct des voies publiques de communication soit évité.

Qualité A : elle est définie par le même critère parasitologique que la qualité B et par un critère bactériologique, soit une teneur en coliformes thermotolérants inférieure à 10.000 par litre. Cette qualité vise à assurer la protection des consommateurs de produits pouvant être consommés crus. Cette exigence de qualité doit être complétée par la mise en oeuvre de techniques d'irrigation limitant le mouillage des fruits et légumes : irrigation à la raie...

Cette qualité sera également requise pour tolérer l'arrosage des terrains de sport (golf) et d'espaces verts ouverts au public, sous réserve du respect de quelques contraintes supplémentaires (l'irrigation réalisée en dehors des heures d'ouverture au public...).

Parallèlement aux contraintes concernant l'aspect microbiologique des eaux usées épurées susceptibles d'être réutilisées pour l'irrigation, les eaux réutilisées dans cette catégorie doivent aussi respecter des critères de qualité chimique (présence de micropolluants chimiques).

Le dossier de demande d'autorisation de rejet doit comporter une analyse des boues produites par la station d'épuration. Lorsque les valeurs des concentrations mesurées sur les boues dépassent les seuils fixés pour les métaux lourds, un examen complémentaire de la qualité de l'eau épurée devra être effectué si cette eau est destinée à l'irrigation des cultures maraîchères, céréalières, industrielles et fourragères ainsi qu'aux pâturages.

Les règles relatives aux REU font l'objet de controverses à l'échelle mondiale. L'OMS est sur le point de réviser ses propres recommandations, en concertation notamment avec l'Union Européenne. Le dernier projet de révision des recommandations du CSHPF (novembre 2000) tend également à les durcir sensiblement.

Annexe 86 - LA RÉUTILISATION DES EAUX USÉES URBAINES

Rédaction : M. François BRISSAUD, Professeur à l'Université Montpellier II.

Réutiliser les eaux usées d'une collectivité consiste à récupérer les eaux d'égout, les traiter dans une station d'épuration, les stocker et, enfin, les utiliser pour des usages variés : en milieu urbain (arrosage des parcs publics, espaces verts, terrains de sport, alimentation des pièces d'eau et fontaines, arrosage des jardins privés, chasses des toilettes, lavage des véhicules, lavage des rues, circuit incendie, ...), industriel (eau de refroidissement, eau de procédé ...), agricole (irrigation de cultures diverses, maraîchages, arbres fruitiers, céréales, fourrages, pâturages, cultures industrielles, forêts) et souterrain (recharge de nappe souterraine). Ces usages n'exigent pas de l'eau potable. Cependant la recharge de nappe souterraine revient, le plus souvent, à réutiliser indirectement des eaux usées pour produire de l'eau potable. On connaît un unique exemple de production directe d'eau potable à partir d'eaux usées ; il s'agit de Windhoek, capitale de la Namibie.

La réutilisation des eaux usées (REU) est une pratique très répandue dans les régions du monde affectées par des pénuries de ressources en eau. Elle est, par exemple, très développée aux Etats-Unis, mais aussi en Asie et dans les pays du Golfe Persique. Le bassin méditerranéen est l'une des régions du Monde où la réutilisation agricole des eaux usées urbaines est la plus pratiquée. Elle est largement systématisée en Israël. La Tunisie et Chypre ont également une politique nationale de réutilisation. Il en est de même à. L'Espagne et l'Italie sont les deux pays européens dans lesquels la réutilisation se développe le plus rapidement, soit sous la forme de réalisations nouvelles soit par la mise en conformité de pratiques anciennes fort répandues qui consistaient tout simplement à irriguer avec des eaux usées non traitées..

La réutilisation des eaux usées urbaines est encore très peu développée sur le territoire français. Cela tient essentiellement à l'abondance de nos ressources en eau. Sur les parties du territoire les moins arrosées, la pluviométrie moyenne annuelle ne descend guère en dessous de 600 mm. Dans le Midi méditerranéen, les zones les moins bien pourvues sont adossées à des reliefs beaucoup plus arrosés. Par ailleurs, ces régions sont desservies par de grands équipements hydrauliques (Canal de Provence, Canal du Bas Rhône Languedoc), capables de satisfaire leurs besoins en eau. C'est dans les îles et le long du littoral de l'Atlantique et de la Manche que sont situées la plupart des installations de réutilisation. Il faut y ajouter un certain nombre de réalisations à l'intérieur du territoire. En France, la réutilisation d'eau usée traitée est quasi-exclusivement destinée à l'irrigation.

Même si la France ne connaît pas de pénurie durable de ses ressources en eau, certaines localités sont obligées de payer de plus en plus cher pour faire face à la croissance de leurs besoins. On peut citer le cas où, faute de ressources en eaux locales suffisantes - îles, petits bassins versants, nappes de capacité limitée- il faut recourir à des ressources de plus en plus lointaines pour satisfaire les besoins croissants d'une population plus nombreuse ou plus consommatrice. Ce type de situation a donné lieu à un nombre significatif d'opérations de réutilisation, dans les îles de , Noirmoutier, Oléron, Porquerolles, mais aussi, plus récemment, à Pornic en Loire Atlantique, Chanceaux sur Choisille en Indre et Loire, Le Revest du Bion dans les Alpes de Haute Provence, Noisilly dans l'Indre et Loire. La réutilisation des eaux usées a permis de maintenir ou de développer une activité agricole ou, comme à Pornic, de diminuer très sensiblement le coût de l'arrosage d'un terrain de golf.

La REU permet aussi d'éviter de changer les réseaux d'adduction existants pour en accroître la capacité. Enfin, le développement des cultures irriguées, le maïs notamment, exacerbe la compétition pour l'accès aux ressources en eau au risque d'épuiser certaines nappes et cours d'eau. Dans tous ces cas, il peut arriver que la réutilisation agricole d'eaux usées, en soulageant les prélèvements effectués par les irriguants, puisse contribuer à des solutions plus satisfaisantes. La réutilisation des eaux usées de Clermont-Ferrand pour irriguer près de 700 hectares en Limagne noire constitue un des exemples récents, d'une ampleur significative, de cette possibilité.

La REU permet également de supprimer ou de différer les rejets des stations d'épuration dans les milieux vulnérables. Elle détourne les rejets des milieux qu' ils dégradaient antérieurement pour les transférer dans des milieux à irriguer où ils sont, au contraire, d'un apport bénéfique. Ainsi, la suppression des rejets dans les eaux côtières contribue à réduire les risques sanitaires relatifs à la baignade, à la conchyliculture et à la pêche à pieds. C'est ce qui a motivé la réalisation de projets de réutilisation à Saint Armel dans le Morbihan, à Beauvoir - Mont St Michel dans la Manche ou dans les environs de Royan (Charente Maritime). Cet impact de la réutilisation a aussi contribué à la décision de réutiliser les eaux usées dans les îles; par exemple, l'objectif rejet zéro dans les eaux littorales est à l'origine de l'opération de Noirmoutier.

Il pourrait en aller de même pour les rejets dans les cours d'eau utilisés pour la baignade et les activités sportives qui impliquent des contacts avec l'eau. La réutilisation peut contribuer à la réhabilitation des cours d'eau menacés d'eutrophisation - même si les fertilisants sont souvent plus responsables de ce dernier processus que les rejets d'eaux usées. On peut citer les exemples de Melle dans les Deux Sèvres ou du Mesnil en Vallée et du Fuilet dans le Maine et Loire. On sait que la nécessité de protéger les eaux de baignade en rivière et, souvent aussi, les difficultés liées à l'eutrophisation sont liées à la période estivale. C'est aussi le moment où les besoins d'eau d'irrigation sont les plus grands. Cette simultanéité devrait être favorable à l'émergence de nouveaux projets de réutilisation agricole.

Annexe 87 - LES PROCÉDÉS DE TRAITEMENT DES BOUES

Source : OTV traiter et valoriser les boues collection OTV N° 2

1. La réduction des volumes

Quelle que soit la destination finale des boues, il est impératif de réduire leur volume, c'est-à-dire leur teneur en eau. Cette diminution diminue les coûts de stockage et de transport en cas de valorisation et donne de l'homogénéité : la diminution facilite les manutentions et augmente le pouvoir calorifique en cas d'incinération.

Les procédés de réduction des volumes sont les suivants :

L'épaississement. C'est la première étape du traitement. L'épaississement est opéré par décantation  (séchage par pesanteur), par flottation (la flottation consiste à dissoudre de l'air dans la boue entrante à l'intérieur d'un réservoir. Au cours de leur ascension, les bulles entraînent les matières en suspension à la surface, par égouttage (filtration gravitaire avec un apport de polymères).

La déshydratation. La déshydratation permet de réduire le volume des boues par un effet de concentration. Elle est opérée par centrifugation (l'eau est séparée de la boue sous l'effet d'une accélération) ou par filtres.

Le séchage. Le séchage consiste à évaporer l'eau contenue dans une boue déjà déshydratée. Le séchage est plus ou moins poussé (séchage partiel à 30 ou 45 % de siccité ou séchage poussé de 60 à 90 % de siccité) selon les usages ultérieurs. Le séchage poussé permet une meilleure valorisation agricole et, en cas d'incinération, garantit un pouvoir calorifique comparable à celui des ordures ménagères.

2. La stabilisation et l'hygiénisation

Une boue reste très chargée en matières volatiles, en matières organiques qui ont tendance à fermenter spontanément surtout en l'absence d'air et à générer des nuisances olfactives. Elle peut aussi comporter des agents pathogènes indésirables.

La stabilisation vise à éviter la fermentation des boues après traitement. L'effet indirect est aussi de diminuer les odeurs. La stabilisation peut s'opérer par voie biologique ou par voie physique notamment par le chauffage. Une boue de siccité élevée contient très peu d'eau ce qui empêche tout développement microbien.

L'hygiénisation consiste à éliminer les agents pathogènes. L'hygiénisation requiert des conditions de températures pendant un temps donné et /ou un pH soit très élevé (l'augmentation de pH est assurée par chaulage, c'est-à-dire par apport de chaux, qui permet de monter le pH jusqu'à 12) soit très bas (apport de nitrites qui permet de réduire le pH jusqu'à 2).

La stabilisation et l'hygiénisation peuvent être opérées par voie biologique (compostage), par voie chimique (chaulage), par voie thermique (séchage). Les différences entre les deux traitements proviennent des durées de traitement et des températures.

3. Le compostage

Le compostage consiste à réaliser un mélange de boues fraîches et de coproduits qui vont constituer des supports carbonés qui vont permettre d'absorber l'eau des boues (bois, déchets verts...) puis de laisser évoluer l'ensemble pendant plusieurs semaines au cours de laquelle a lieu la fermentation. L'ensemble produit un compost. L'aération est au coeur du procédé. Elle peut être effectuée par simple retournement ou elle peut être accélérée lorsque la fermentation a lieu en silo fermé. Le compostage permet de sécher une boue jusqu'à 60% de siccité.

La valeur agronomique du compost réside dans sa teneur en fertilisants (azote essentiellement) et en matières humiques. Le maintien du taux d'humus favorise la rétention d'eau réduisant l'érosion et le ravinage. L'épandage de compost permet d'assurer une bonne revégétalisation dans les sols appauvris par les engrais minéraux.

La technique du compostage connaît un grand développement. Les produits servant de support sont très variés :

. compostage avec résidus de bois (Saint Cyprien -66)

. compostage avec déchets verts et de palettes (Graincourt -62)

. compostage avec déchets de bois et apport de huiles de restauration

(Rambouillet - 78)

. compostage avec ordures ménagères (Bourges- 18)

Source : OTV traiter et valoriser les boues collection OTV N° 2

Annexe 88 - L'ÉPANDAGE DES BOUES EST-IL POTENTIELLEMENT DANGEREUX ?

Source : Agence de l'eau Rhin-Meuse

Les boues, comme les déjections animales, contiennent des micro-organismes vivants (dont une infime partie est pathogène) et des contaminants :

 Les risques liés aux micro-organismes pathogènes sont des risques à court terme liés à leur durée de vie très courte dans le sol (de quelques jours à quelques mois). L'origine de ces micro-organismes est liée directement aux processus septiques liés à la dégradation de la matière organique dans les réseaux de collecte puis dans la station d'épuration. Il est possible d'effectuer un traitement d'hygiénisation pour les réduire ou les éliminer (digestion ou stabilisation thermophile, compostage ou chaulage).

Mais les boues d'épuration ne constituent pas un milieu favorable à la survie de ces micro-organismes pathogènes. L'épandage accélère en outre leur destruction en les soumettant aux aléas climatiques (température, rayonnement solaire) et aux effets du sol (compétition avec d'autres micro-organismes et la microflore du sol, absence de matière organique, pH bas, sols sableux). Aussi le risque sanitaire pour l'homme est infime si les précautions réglementaires d'emploi sont respectées (renforcées si épandage sur prairies).

 Parmi les risques environnementaux liés aux agents contaminants présents dans les boues, on distingue ceux relevant des composés traces organiques (CTO) (provenant de détergents, solvants, pesticides domestiques, etc...) et les éléments traces (ET) (métaux lourds), dont les risques sont liés aux mécanismes d'accumulation dans les sols.

La notion de danger est à relativiser. Les sols contiennent naturellement de fortes teneurs en éléments traces (métaux lourds), représentent une surface cumulée très nettement supérieure à celle vouée aux épandages des boues et  ne sont pas un milieu amplificateur de métaux comme les chaînes marines.

Pour s'affranchir de ces risques minimes, la réglementation française fixe des teneurs maximales et des flux annuels maximums d'éléments traces à ne pas dépasser. Le respect de ces normes est suffisant pour se prémunir des risques dus à la présence des éléments indésirables précités.

En outre les risques sanitaires et environnementaux induits par les boues sont potentiellement moindres voire du même ordre de grandeur que des apports banalisés.

Apport comparé d'éléments traces métalliques

Sources identifiées

Éléments

Cadmium

Plomb

Zinc

Cuivre

Retombées atmosphériques (industries - voitures)

3 %

97 %

2 %

-

Engrais (phosphatés)

89 %

     

Boues

4 %

1 %

14 %

1 %

Composts urbains

4 %

2 %

15 %

1 %

Lisiers de porc

   

64 %

6 %

Produits phytosanitaires

     

92 %

Source : INRA Journées Techniques ADEME - 5/6 juin 1997 Contribution relative des différentes sources d'éléments traces métalliques contaminant le sol français

Apport comparé d'éléments traces organiques

 

Sols cultivés en zone agricole

Sols cultivés situés en zone urbaine

Composés

Pluies

Boues

Fumures

Engrais

Pluies

Boues

Fumures

Engrais

PCB

44 %

38 %

17 %

1 %

44 %

38 %

17 %

1 %

HPA

44 %

38 %

17 %

1 %

80 %

14 %

6 %

0 %

Ainsi, l'apport, via des boues, des éléments jugés comme indésirables et néfastes dans les sols est minoritaire par rapport à d'autres sources soit externes, soit sciemment utilisées dans la production alimentaire.

Ces éléments objectifs tendent à accréditer les thèses scientifiques fondées sur la pertinence d'un recyclage agronomique de la matière organique dès lors que ses teneurs en éléments indésirables sont réduites.

Annexe 89 - LA RÉGLEMENTATION DES BOUES D'ÉPURATION

Le régime juridique des boues est déterminé par le décret 97-1133 du 8 décembre 1997 relatif à l'épandage des boues issues du traitement des eaux usées.

Selon l'article 2 du décret, les boues ont le caractère de déchet au sens de la loi du 15 juillet 1975, laquelle précisait « est considéré comme un déchet tout résidu d'un processus de production, de transformation ou d'utilisation (...) que son détenteur destine à l'abandon ou qu'il est tenu d'abandonner ».

Les conditions d'épandage définies par le décret recouvrent cinq opérations :

- Le stockage.

- Les études préalables à l'épandage

- Le programme prévisionnel d'épandage qui consiste à planifier les périodes d'épandage.

- Un registre d'épandage qui doit être tenu par l'agriculteur.

- Un bilan annuel.

Des restrictions d'usage résultent de la directive du Conseil du 12 décembre 1991 relative à la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d'origine agricole. Cette directive a été transposée par les décrets du 27 août 1993 et du 4 mars 1996. La directive et les décrets de transposition définissent des « zones vulnérables » associées à des restrictions d'épandage.

- Une restriction des périodes d'épandage en fonction du rapport carbone/azote des boues et du type de culture réceptrice. Concrètement pour les boues liquides et déshydratées qui présentent un rapport carbone/azote inférieur à 8, la période d'épandage se limite au printemps, ce qui entraîne des besoins de stockage conséquent.

- Une restriction des surfaces d'épandage en interdisant l'épandage sur certaines productions et sur certains types de sol.

- Un accroissement des contraintes par le biais de programmes d'actions départementaux.

Le décret 97-1133 ne s'applique cependant pas « aux produits composés en tout ou partie de boues qui, au titre de la loi du 13 juillet 1979, bénéficient d'une homologation ou à défaut, d'une autorisation provisoire de vente ou sont conformes à une norme rendue d'application obligatoire » Ainsi, il est explicitement prévu que les boues sont aussi des matières fertilisantes qui relèvent de la loi du 13 juillet 1979. Les matières fertilisantes réalisées en tout ou partie à partir de boues doivent être conformes à des normes (normes NFU 44-041 et 44-051) et faire l'objet d'une homologation ou d'une autorisation provisoire de vente.

La ville de Saint-Brieuc s'est engagée dans une procédure de ce type afin de qualifier les boues séchées issues de leur station de traitement des eaux usées.

L'ambiguïté demeure sur la qualification de compost. Certains souhaiteraient qualifier de compost une boue simplement séchée qui aurait certaines qualités fertilisantes. D'autres souhaitent réserver la qualification de compost aux boues mélangées à des supports carbonés (bois ou déchets verts).

Annexe 90 - LES NOUVEAUX PROCÉDÉS DE TRAITEMENT THERMIQUE DES BOUES : L'OXYDATION PAR VOIE HUMIDE

Source : Vivendi Waters Systems

L'oxydation par voie humide (OVH) consiste à chauffer un liquide (en l'espèce les boues) à haute température et sous pression avec un gaz oxydant (l'air ou l'oxygène) dans le but de transformer par oxydation une partie de ses composés organiques.

Les boues contiennent trois types de composants : de l'eau, dans des proportions variables selon le degré de siccité des boues, et des matières sèches constituées de matières minérales et de matières organiques. Lors du traitement thermique classique, sur boues séchées, la matière organique contenue dans les boues est oxydée et les boues sont détruites à très haute température (900°). Le traitement par voie humide permet d'éliminer les boues simplement pâteuses grâce à un chauffage à haute température (250° à 300°) mais surtout sous haute pression pour permettre de détruire la matière organique. La montée en pression résulte du fait que l'eau se transforme en vapeur sous la température et qu'il faut monter la pression pour maintenir l'eau sous l'état liquide. Le traitement donne de l'eau, du gaz, et un résidu minéral.

Ce système est utilisé aux Etats-Unis, pour traiter notamment les boues de New-York et Chicago.

Une nouvelle génération de ce système commercialisé par la société Vivendi sous le nom de procédé ATHOS, permet de réduire la température (235°) et la pression avec un apport d'oxygène pur. La matière organique n'est plus détruite. Une partie est transformée en gaz (CO2), une partie est transformée sous forme soluble dans l'eau (acide acétique, transformation de l'azote, du soufre et du chlore en ammoniac, en sulfates et en chlorures solubles dans l'eau). La déshydratation ne porte que sur les seules matières minérales.

Après traitement, les boues sont transformées en trois compartiments : de l'eau avec tous les composés qui ont été dissous et qui peuvent être éliminés par des traitements biologiques de l'eau, du gaz (CO2 et azote) et une « galette » inerte constituée des éléments minéraux, aluminium, phosphates, carbonates, métaux lourds. Ces éléments ont été cristallisés et se présentent donc sous une forme inerte. Ils peuvent aller en décharge de classe 3 ou être utilisés comme sous couches pour les travaux routiers. Ces produits sont brevetés par la société sous l'appellation « technosable ».

L'intérêt de ce type de traitement est triple. D'une part cette technique part des boues épaissies et non des boues séchées ou déshydratées, ce qui évite un prétraitement. D'autre part, le produit final est extrêmement réduit : une tonne de boues à 4 % de siccité soit 40 kg de matières sèches donne 10 kg de « technosable ». Enfin, la société annonce un prix compétitif, comparable, voire légèrement moins cher que celui de l'incinération. L'adaptation par rapport au système d'OTV est une moindre montée en température et en pression, ce qui permet des économies sur le fonctionnement.

Cette technologie a été choisie pour traiter les boues de Bruxelles (1,2 million d'équivalents habitants, soit 17 tonnes de matières sèches par jour). Le coût de l'investissement (seulement donné à titre indicatif car le procédé s'insère dans toute une filière de traitement des eaux usées) est estimé à 15 millions d'euros.

CARTES

- Les nitrates dans les cours d'eau

- Les pesticides dans les cours d'eau

- Les matières phosphorées dans les cours d'eau

- Qualité des eaux souterraines utilisées pour l'eau potable

LES NITRATES DANS LES COURS D'EAU

(classes de qualité)

LES PESTICIDES

DANS LES COURS

D'EAU

LES MATIÈRES PHOSPHORÉES

DANS LES COURS D'EAU

(classes de qualité)

QUALITÉ

DES EAUX SOUTERRAINES UTILISÉES

POUR L'EAU POTABLE

RAPPORTS DE L'OPECST CONSACRÉS À L'ENVIRONNEMENT

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) a été créé par la loi n° 83-609 du 8 juillet 1983. Sa mission est « d'informer le Parlement des conséquences des choix de caractère scientifique et technologique afin (...) d'éclairer ses décisions ». L'Office est composé de trente-six parlementaires - dix-huit députés et dix-huit sénateurs ». Il est saisi par le bureau ou une commission de l'une ou l'autre assemblée.

Les saisines reflètent parfaitement les préoccupations du moment, des citoyens et de ses relais parlementaires. Cette nouvelle saisine sur la qualité de l'eau et de l'assainissement en France, émanant de la commission des finances, de l'économie générale et du plan de l'Assemblée nationale, témoigne de la montée des inquiétudes de l'opinion sur l'environnement et la santé, deux thèmes sur lesquels l'Office s'est spécialisé. Ainsi, sur les 71 rapports publiés par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques depuis sa création, 18 rapports, soit le quart, concernent des questions de santé et d'environnement :

1985 Les formes de pollution atmosphérique a longue distance dites « pluies acides » (Georges LE BAILL, député), doc. AN 3142 (7e législature) ; Sénat 211 (1985-1986)

1990 Les effets des chlorofluorocarbones -CFC- sur l'environnement et les moyens de supprimer ou de limiter leurs émissions (Robert GALLEY, député - Louis PERREIN, sénateur), doc. AN 1573 (9e législature) ; Sénat 462 (1989-1990)

1991 Le traitement des déchets industriels (Michel DESTOT, député), doc. AN 2146 (9e législature) ; Sénat 415 (1990-1991)

1991 La préservation de la qualité de l'eau (Jean FAURE, sénateur - Richard POUILLE, sénateur), doc. AN 2218 (9e législature) ; Sénat 479 (1990-1991)

1992 Les problèmes posés par l'extraction des ressources minérales de l'Antarctique (Jean-Yves LE DÉAUT, député), doc. AN 3027 (9e législature) ; Sénat 42 (1992-1993)

1992 Le traitement des déchets ménagers (Michel PELCHAT, député), doc. AN 3246 (9e législature) ; Sénat 200 (1992-1993)

1993 L'impact écologique de la liaison Rhin-Rhône (Raymond FORNI, député - Pierre VALLON, sénateur), doc. AN 3250 (9e législature) ; Sénat 203 (1992-1993)

1993 Le traitement des déchets hospitaliers (Michel DESTOT, député), doc. AN 3253 (9e législature) ; Sénat 221 (1992-1993)

1993 L'intérêt du véhicule électrique au regard de la protection de l'environnement (Pierre LAFFITTE, sénateur), doc. AN 680 (10e législature) ; Sénat 70 (1993-1994)

1995 La prévention des risques naturels : séismes et mouvements de terrain (Christian KERT, député), doc. AN 2017 (10e législature) ; Sénat 261 (1994-1995)

1996 Le lien entre environnement et santé chez l'enfant (Jean-François MATTEI, député), doc. AN 2588 (10e législature) ; Sénat 245 (1995-1996)

1997 L'amiante dans l'environnement de l'homme : ses conséquences et son avenir (Jean-Yves LE DÉAUT, député), doc. AN 329 (11e législature) ; Sénat 41 (1997-1998)

1999 La prévention des risques naturels en France (Christian KERT, député), doc. AN 1540 (11e législature) ; Sénat 312 (1998-1999)

1999 Les nouvelles techniques de recyclage et de valorisation des déchets ménagers et des déchets industriels banals (Gérard MIQUEL, sénateur, Serge POIGNANT, député), doc. AN 1693 (11e législature) ; Sénat 415 (1998-1999)

2001 Les effets des métaux lourds sur l'environnement et la santé (Gérard MIQUEL, sénateur), doc. AN 2979 (11e législature) ; Sénat 261 (2000-2001)

2001 Les énergies renouvelables en France (Jean-Yves LE DÉAUT, Claude BIRRAUX, députés), doc. AN 3415 (11e législature) ; Sénat 94 (2001-2002)

2002 L'évaluation de l'ampleur des changements climatiques, de leurs causes et de leur impact prévisible sur la géographie de la France à l'horizon 2025, 2050 et 2100 (Marcel DENEUX, sénateur), doc. AN 3603 (11e législature) ; Sénat 224 (2001-2002)

2002 L'incidence éventuelle de la téléphonie mobile sur la santé (Jean-Louis LORRAIN et Daniel RAOUL, sénateurs), doc. AN 346 (12e législature) ; Sénat 52 (2002-2003).

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

(par ordre chronologique)

M. Bernard BAUDOT

Directeur de l'eau au ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement (MATE)

La qualité de l'eau en France

M. Bernard CHOCAT

Institut national des sciences appliquées (INSA, Lyon)

Pollution des eaux de surface

M. Jacques OUDIN

Sénateur de Vendée, Président du Cercle français de l'eau

Les élus locaux et la qualité de l'eau

M. Georges RAIMBAULT

M. Michel LEGRET

Directeurs de recherche au Laboratoire central des Ponts & Chaussée, Nantes

L'eau de ruissellement sur des surfaces aménagées

Mme Sylvie DETOC

Responsable des eaux continentales à l'Institut français de l'environnement (IFEN)

La qualité des eaux superficielles

M. Philippe CROUZET

Responsable du département eau à l'IFEN

L'échantillonnage des mesures de qualité

M. Alexis DELAUNAY

MATE

Les contentieux administratifs et internationaux sur la qualité de l'eau en France

M. Michel VAUCLIN

Directeur de recherche en hydrologie, CNRS

Le transfert de l'eau et des éléments chimiques vers les aquifères

M. Denis BALLAY

Mme Caroline de VILLENEUVE

Rapporteurs de l'étude du Conseil national d'évaluation sur « la politique de préservation de la ressource en eau destinée à la consommation humaine »

Bilan du rapport du CNE -

Les mesures destinées aux élus locaux

M. Jean-Gabriel WASSON

CEMAGREF

Panorama de l'état des rivières - Problèmes scientifiques liés à la mise en oeuvre de la directive-cadre

M. René SEUX

Professeur à l'École nationale de santé publique

La qualité des eaux de pluie : évolution et perspectives

M. Louis-Charles OUDIN

Responsable du département « Milieux » à l'Agence de l'eau Loire-Bretagne

Présentation du SEQ-eau dans le contexte de la directive européenne « eau »

M. Guy BARROIN

Chargé de recherche à l'INRA

L'alimentation en eau potable à partir des eaux stagnantes

M. Daniel HERVÉ

Responsable de la subdivision qualité et police de l'eau au service de la navigation de la Seine

Les causes de la détérioration de la qualité des eaux de la Seine en amont des prises d'eau

M. Thierry POINTET

Chef du département Eau au Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

La connaissance de l'état des nappes ; les relations entre qualité de l'eau et nature des sols

M. Daniel THÉVENOT

Professeur des universités (Paris XII) et Directeur scientifique du CEREVE

Les eaux pluviales urbaines

M. Patrice CODDEVILLE

Enseignant-chercheur à l'École des mines de Douai

La qualité de l'eau de pluie en France

M. Gilbert FOURNOL

Responsable de l'unité sud de la SAGEP

Les difficultés d'application des périmètres de protection

M. Philippe HARTEMANN

Professeur de santé publique à la faculté de médecine de Nancy

La qualité de la ressource : dangerosité des molécules et micro-organismes dans la ressource en eau

M. Emmanuel ADLER

Thésard à l'EHESS

État des lieux critique sur l'eau potable en France
Les boues issues de la potabilisation des eaux de consommation

M. SCHOCKAERT

Président de la commission environnement à l'UFC

Le consommateur face à la qualité de l'eau du robinet

M. Dominique TRICARD

Responsable de l'unité d'évaluation des risques liés à l'eau à l'AFSSA

Situation et évolution des eaux souterraines

     

M. Jean-François DARTIGUES

Professeur de santé publique à l'université Bordeaux II

La potabilisation de l'eau, l'aluminium et la maladie d'Alzheimer

M. Jean-Paul GAUDET

Ingénieur de recherche au LTHE

Les périmètres de protection : les transferts des polluants dans les nappes

M. Gilbert ALCAYDÉ

Président de la section des eaux du CSHPF

Les périmètres de protection

Mme Monique CHOTARD

Directrice du CIEau

La perception de la qualité de l'eau par les consommateurs et par les médecins

M. Philippe VESSERON

Direction de la prévention, de la pollution et des risques au MATE

La qualité de l'eau et l'industrie (secteurs polluants, décharges)

M. Jean-Claude LEFEUVRE

Professeur au MNHM, membre du conseil scientifique de WWF France

La qualité de l'eau en France : analyse critique du WWF France

MM. Guy VASSEUR

Président de la commission environnement

L'agriculture et la qualité de l'eau

M. Jean-Marie MOUCHEL

Chargé de recherche au CEREVE

La qualité de l'eau et les phytosanitaires

M. Gilles ZASK

M. Edouard BAUER

Pôle industrie, EdF

Pôle industrie, EdF

L'incidence des eaux de rejet et de refroidissement des centrales EdF sur la qualité de l'eau

M. Maurice TUBIANA

M. André RICO

Professeurs à l'académie de médecine

Les effets des nitrates et des pesticides sur la santé

M. François GUEROLS

Mme Cécile OSTRIA

Conseillers scientifiques à la fondation Nicolas Hulot

Les inquiétudes de la fondation sur la qualité de l'eau en France

Mme Isabelle DOUSSAN

Maître de conférences à la faculté de droit de Rennes

Les mesures juridiques et économiques de lutte contre la pollution de l'eau d'origine agricole

M. Denis NGUYEN

Ingénieur au BRGM Montpellier

Évaluation de l'impact des décharges sur la qualité de l'eau

Mme Chantal GASCUEL

M. Luc AQUILINA

Directeurs de recherche à l'INRA, à Rennes

Les délais de réponse des eaux aux changements de pratiques agricoles

M. Pascal BONNE

M. Dominique OLIVIER

M. Jean-Claude JORET

Directeur des technologies

Directeur adjoint

Chef du département qualité

Vivendi Water

Les recherches sur la qualité des traitements des eaux-Vivendi

M. Alain BERNARD

Président du SIEP

Analyse du syndicat des constructeurs de stations de potabilisation

M. Marian APFELBAUM

Professeur honoraire de nutrition

L'effet des nitrates sur la santé humaine

M. Thierry MICHELON

Directeur au ministère de la santé

Position du ministère sur la qualité de l'eau potable

M. Jacques COUDERC

Président du syndicat national des entrepreneurs de puits et forages d'eau

Les forages d'eau - situation et perspectives

M. Patrick BERNASCONI

Président des canalisations de France

Situation et perspectives des canalisations d'eau potable et d'eaux usées

M. Jean-Claude BLOCK

Professeur à l'université Henri Poincaré (Nancy)

Portée et limites de la désinfection des eaux par le chlore

     

Professeur LECLERC

Académie de médecine

Les maladies liées à l'eau et au transport de l'eau et les moyens de les combattre

M. Claude THEVENOT

Direction environnement, Nestlé-Waters

La protection de la ressource

M. Pascal BEAUDEAU

Mme Martine LEDRANS

Division Eau de l'Institut de veille sanitaire

Évaluation des dispositifs de surveillance de la qualité de l'eau

M. Jean-Christophe BLIGNY

M. Vincent DUCASSE

Chargés de la gestion de la ressource en eau, DANONE

La protection de la ressource en eau. Le cas de Danone

M. Bernard GUIRKINGER

M. Jean-Luc TRANCART

M. Daniel VILLESSOT

M. Patrick BARTHÉLEMY

M. Gérard MICHEL

Président Directeur Général de Lyonnaise des Eaux France

Directeur délégué chargé de la communication de Suez Environnement

Directeur Technique de Lyonnaise des Eaux France

Président Directeur Général SAUR

Directeur du Développement Scientifique et Technique

Echange de vues sur la gestion de l'eau et état de la recherche Suez - Lyonnaise des Eaux

La sécurisation de l'eau potable

M. Yves LÉVI

Professeur à la faculté de pharmacie (Paris-Sud)

La multi-exposition de risque sanitaire lié à l'eau

M. François BARTHÉLEMY

Ingénieur général des Mines
Président de la section technique du Conseil Général des Mines

Echange de vues sur la police de l'eau

VISITES

Visite des usines de potabilisation d'Orly et d'Ivry

Visite de l'agence de l'eau Loire-Bretagne (Orléans)

Visite de l'agence de l'eau Artois-Picardie

Visite de l'agence de l'eau Adour-Garonne

Visite de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse

Visite de l'agence de l'eau Rhin Meuse

Visite de l'agence de l'eau Seine-Normandie

Rencontre avec les élus du Conseil Général des Côtes d'Armor (dégradation de la qualité de l'eau en Bretagne), de St-Brieuc (homologation des boues) et de Binic (les algues vertes)

Rencontre avec les élus de Marseille et visite de la décharge de St-Martin de Crau

Visite des installations de Suez-Lyonnaise des eaux dans l'Oise : Le séchage des boues par sécheur mobile et le compostage des boues à Bury

Mission en Martinique et en Guadeloupe (rencontre avec les élus et les services des Conseils Généraux)

Visite du pilote de traitement des boues par voie humide OTV - Toulouse

Les Français ont-ils raison de s'inquiéter de la dégradation de la qualité de l'eau ? Que peuvent faire les pouvoirs publics pour y remédier ?

Tout indique que la prétendue priorité accordée à la protection de l'eau, patrimoine de la nation, n'en est pas une. Elle doit le devenir.

Le rapport de l'Office, en partant d'un constat critique de la situation actuelle, vise trois objectifs :

- élaborer un document pédagogique destiné aux élus et à leurs équipes,

- établir un bilan des politiques publiques de préservation de la qualité de la ressource,

- ouvrir quelques pistes de réflexion sur les stratégies de reconquête à suivre.

* (1) Voir sur ce point « Les effets des métaux lourds sur l'environnement et la santé », Rapport OPECST de M. Gérard MIQUEL n° 2979 (Assemblée nationale) et 261 (Sénat).

* (2) Annexe - L'eau de pluie sur les autoroutes et les aéroports.

* (3) Décision n° 2455/2001/CE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2001, établissant la liste des substances prioritaires dans le domaine de l'eau (JO CE L.331 du 15.12.2001).

* (4) Directive n° 76/464/CEE du Conseil du 4 mars 1976 modifiée, relative aux substances dangereuses, et cinq directives filles relatives aux :

- rejets de mercure (82/176/CEE)

- rejets de cadmium (83/513/CEE)

- mercure (84/156/CEE),

- rejets d'HCL (84/491/CEE),

- rejets de substances dangereuses (86/280/CEE).

* (5) Arrêtés modifiés du 29 février 1992 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de veaux de boucherie, de bovins à l'engraissement, de vaches laitières et de porcs, soumis à autorisation au titre de la protection de l'environnement, ainsi qu'un arrêté modifié du 13 juin 1994 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de volailles. Il convient également de mentionner la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau qui fournit un cadre à une réglementation des élevages non classés, ainsi qu'à la protection des zones dites vulnérables à la pollution par les nitrates.

* (6) Les exploitants contractants bénéficiant d'une exonération de leur redevance.

* (7) Accord conclu entre les représentants de la profession agricole et les ministres de l'environnement et de l'agriculture relatif au Programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, non publié.

* (3) Pour une analyse détaillée voir I Doussan, activité agricole et droit de l'environnement, l'impossible conciliation ? L'Harmattan, collection logiques juridiques, 2002, p 241 et s.

* (8) Le rapport de juillet 1999 sur l'évaluation de ce programme montre l'importance des économies d'échelle : plus le nombre d'animaux par exploitation est élevé, plus le coût des travaux par tête de bétail décroît. Autrement dit, le coût du programme, qui a réservé dans un premier temps les aides aux plus grosses exploitations, croît avec le temps.

* (9) La première mouture du PMPOA prévoyait explicitement la « régularisation » des exploitations aidées. Il va de soi pourtant que cette tolérance ne met pas l'agriculteur à l'abri d'une procédure pénale. La Cour de cassation a eu l'occasion de le rappeler en rejetant l'argument d'un agriculteur selon lequel son engagement contractuel valait régularisation de sa situation et excluait, en outre, l'intention coupable dans la commission de l'infraction, Cass. Crim., 20 février 2001,

* (10) Ainsi la circulaire conjointe du 1er décembre 2000 des ministres chargés de l'agriculture et de l'environnement relative au PMPOA (non publiée), si elle prévoit un renforcement des actions de police pour les exploitants aidés, dispose aussitôt que des « assouplissements » seront accordés aux élevages situés hors de ces zones.

* (11) Voir le rapport d'évaluation sur la gestion et le bilan du PMPOA, ainsi que le rapport de la Cour des comptes de février 2002, « Préservation de la ressource en eau face aux pollutions d'origine agricole : le cas de la Bretagne ».

* (12) Par exemple, la conversion à l'agriculture biologique, « l'extensification » des productions animales, l'élevage de races en voie de disparition ou encore la mise en jachère de certaines parcelles.

* (13) Voir notamment le rapport très critique de la Cour des comptes n° 14/2000 sur la PAC et l'environnement, JOCE C353 du 8 décembre 2000.

* (14) Voir par exemple le cas non isolé de la Meuse. H.Cochet et S.Devienne, La mise en place des CTE dans la Meuse, Courrier de l'environnement de l'Inra, n° 47, 2002.

* (15) Décret du 25 avril 2002 relatif à la qualification des exploitations agricoles au titre de l'agriculture raisonnée et quatre arrêtés du 30 avril en portant application, dont l'un relatif au référentiel. Arrêté du 17 janvier 2003 portant nomination à la Commission nationale de l'agriculture raisonnée.

* (16) C'est-à-dire la loi du 19 juillet 1976, les textes applicables dans les zones vulnérables, le décret du 12 juin 1996 concernant les élevages non classés ainsi que le règlement sanitaire départemental.

* (17) Présentation de l'agriculture raisonnée sur le site internet du ministère de l'agriculture.

* (18) Les services du ministère de l'agriculture ont signalé par un astérisque les exigences renvoyant à des exigences réglementaires lors de la rédaction de l'arrêté du 30 avril 2002 relatif au référentiel.

* (19) Le décret relatif à l'agriculture raisonnée prévoit d'ailleurs que « le référentiel peut comporter des exigences assorties de délais ». Autrement dit, la garantie offerte au consommateur peut se réduire au fait que le produit qu'il achète sera, à terme, produit conformément à la réglementation...

* (20) 1 g = 1000 mg